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Test du contrôleur Keith McMillen K-Mix
K-méléon

Test du contrôleur Keith McMillen K-Mix
Par Los Teignos le 01/03/2017 Imprimer

Une interface audio USB qui puisse aussi s’utiliser comme mixeur autonome ou comme surface de contrôle : ça ressemblerait presque à une pub Kinder. Sauf que c’est Keith McMillen qui s’y colle avec la K-Mix, un concentré de fonctionnalités à la sauce tactile.

Même s’il n’est pas forcément aussi connu que M-Audio, Roland ou encore PreSonus, Keith McMillen s’est déjà fait un nom dans le milieu des contrôleurs MIDI avec notamment sa QuNeo qui, après avoir connu un beau succès sur Kickstarter, est devenue l’une des surfaces de contrôle les plus pertinentes pour Live sous la barre des 250 euros. Grand spécialiste du pad et des surfaces tactiles, l’ami Keith propose d’ailleurs un très sympathique catalogue où se côtoient mini-claviers portables, petits utilitaires malins et la K-Mix qui nous occupe : un combiné contrôleur/table de mixage/surface de contrôle bardé de contrôleurs lumineux et proposé dans un format petit format : 23,4 x 16,7 x 3,81cm.

Sapin de Noël

Le déballage inspire confiance : l’engin trapu est suffisamment lourd pour bien tenir en place sur un bureau, et assez compact aussi pour être embarqué dans un sac à dos. Et comme aucune touche ou aucun connecteur n’a le moindre jeu, il se dégage une bonne impression de solidité de l’ensemble.

Keith McMillen Instruments K-Mix : kmixside

Les contrôleurs sont tous tactiles et lumineux sans exception et sont remisés sur le dessus de l’appareil. On trouve ainsi 9 bandes pour faire office de faders, 4 disques flanqués de 3 voyants et enfin 31 boutons : un pour la mise en/hors fonction, 9 pour les 9 tranches (8 voies + master), un pavé de 4 commandes de lecture/enregistrement, un bouton pour accéder aux presets, 3 matrices de 2x2 pour accéder aux effets DSP de l’engin ou à diverses fonctions, et enfin 4 touches pour activer/bypasser les effets, définir le comportement du VU-mètre, accéder aux réglages fins ou encore, via la touche Shift, accéder à d’autres commandes que celles par défaut sur l’ensemble de la surface. Compte tenu des nombreuses possibilités offertes (et toutes décrites dans le manuel complet, mais en anglais uniquement) l’organisation de tout cela semble assez logique et bien pensé. Soulignons toutefois que pour garder la K-Mix compacte, les contrôles sont très rapprochés les uns des autres, trop peut-être pour ne pas avoir à regarder sa surface à chaque fois que l’on s’en sert pour être sûr d’utiliser le bon contrôle. Autre problème lié à la taille réduite de l’engin comme de ses contrôles : les sérigraphies sont vraiment dans une police de petite taille, de sorte que lorsqu’un bouton n’est pas activé et qu’il ne jouit pas alors d’une pleine luminosité, on peine à lire son libellé… Je le redis enfin : tout cela est sensitif, et sensitif seulement. Aucun bouton ne s’enfonce donc quand on appuie dessus et seul son rétro-éclairage vous indique s’il est activé ou non. Là encore, il faut regarder la K-Mix pour savoir où on en est.

Keith McMillen Instruments K-Mix : K-Mix outputs

En face arrière, on trouve toute la connectique nécessaire : 8 sorties au format Jack 6,35, et 6 entrées au même format complétées de deux embases combos Jack/XLR pouvant commuter en niveau ligne, micro ou instrument selon le connecteur que vous utilisez. C’est aussi à cet endroit qu’on trouve les deux ports informatiques : un mini-USB et un micro-USB qui permettront d’alimenter la machine et de faire transiter les données informatiques, que ce soit en mode contrôleur ou en mode interface. Last but not least, une prise casque est disponible sur la toute petite épaisseur de la face avant, ce qui est bien pratique et en dit long sur la vocation nomade de la machine.

L’heure est venue de brancher tout cela et de chausser des lunettes de soleil car, sans en faire autant sur ce registre que la QuNeo, la K-Mix ose la couleur et on retrouve ces mélanges de verts, jaunes et rouges qui sont désormais la marque de fabrique de Keith McMillen : ça flashe façon Haribo et si ce n’est pas forcément très joli, ça a au moins le mérite d’être pratique, d’autant qu’un code couleur permet de se repérer plus facilement : réglages en rouges, touches de fonctions en bleu… En termes d’intensité, il ne fait aucun doute que la K-Mix peut être utilisée dans le noir, et peut-être même pour retrouver vos clés de bagnole tombées dans la neige après un set dans un resto d’altitude. Reste à voir si le ramage est aussi flashy que le plumage en s’intéressant à ses capacités audio via un petit benchmark.

Dans mon bench, bench, bench

Nous avons réglé la mémoire tampon au minimum (32 échantillons) afin d’obtenir la meilleure latence : 3,92 ms en entrée et 3,58 ms en sortie (à 96 kHz). Ces résultats sont assez classiques pour une interface USB, même s’ils demeurent légèrement plus élevés que ceux obtenus par les dernières interfaces d’entrée de gamme testées ici même (2,93 ms en entrée et 2,59 ms en sortie pour la M-Audio M-Track 2X2 et la Focusrite Scarlett 2nd Gen).

Afin de tester l’interface, nous avons fait des benchmarks avec notre APx515 d’Audio Precision, et nous allons pouvoir comparer les résultats à ceux obtenus avec les interfaces que nous avons précédemment testées.

Voici les résultats obtenus avec les niveaux ligne :

Keith McMillen Instruments K-Mix : Déviation Line sur le K-Mix

Avec une déviation de ±0,033 dB, la K-Mix s’en tire plutôt bien, même mieux que la Scarlett 18i20 (±0,057 dB), et elle se rapproche des meilleures interfaces testées ici (aux alentours des ±0,02 dB). La courbe de réponse n’a pas vraiment d’accident significatif, c’est très bien !

Keith McMillen Instruments K-Mix : THD Line sur le K-Mix

La distorsion est assez stable sur tout le spectre, ne dépassant que rarement les 0,005 %. C’est du même niveau que la Scarlett 18i20 et un peu moins bien que la M-Track 2X2 qui reste toujours sur les 0,003 %. Les meilleures interfaces tournent autour de 0,001 %.

La K-Mix offre un gain de 60 dB sur les entrées micro, reste à savoir comment réagissent les préamplis avec le gain réglé, comme d’habitude, sur 34 dB.

Keith McMillen Instruments K-Mix : Deviation Mic sur le K-Mix

 

Keith McMillen Instruments K-Mix : THD Mic sur la K-Mix

La déviation en prend un coup lorsque l’on passe par les entrées micro, avec un résultat de ±0,139 dB et surtout une atténuation dans le haut du spectre qui n’existait pas sur les entrées ligne. Le résultat est identique à la M-Track 2X2 (±0,139 dB) et moins bon que la Scarlett 18i20 (±0,075 dB), il n’y a donc pas de quoi crier au loup, mais cela reste décevant vu les résultats obtenus avec le niveau ligne. Côté distorsion, elle augmente aussi un peu, avec une bosse à 0,015 % dans le bas et 0,01 % dans le haut. Rien de dramatique, cela reste du niveau des dernières interfaces d'entrée de gamme testées ici. Le rapport signal/bruit est de 86 dB, ce qui montre que les préamplis, en plus d’être un peu trop colorés, ne sont pas très silencieux.

Sans trop de surprises vu le nombre de fonctions qu’elle concentre et vu son prix relativement serré, la K-Mix se situe sur le terrain de l’audio dans la moyenne des interfaces d’entrée de gamme. C’est notamment sur les préamplis qu’on aura le plus de réserve, mais ces derniers n’intéresseront pas tout le monde : avec ses bonnes entrées ligne, la K-Mix est plus tournée vers le monde de la musique électronique et ne se destine pas spécialement à concurrencer une Babyface sur le terrain de la prise de son.

La belle a en outre d’autres arguments à faire valoir car, non contente de concentrer autant de fonctions, elle se paye de luxe d’embarquer des effets DSP comme nous l’avions mentionné plus haut : compresseur, noise gate et EQ 3 bandes semi-paramétrique pour chaque canal, avec un envoi vers une petite réverbe pour compléter le tout. Et le meilleur de l’affaire, c’est qu’il est possible de définir via l’éditeur logiciel fourni à quel étage est prélevé le signal envoyé à l’ordinateur : en Pré-Fader, et sans effet donc, ou en Post-Fader avec les effets. C’est très bien vu, d’autant que la chose peut se configurer individuellement pour chaque canal et que les effets et traitements, s’ils n’ont rien d’exceptionnel, n’en sont pas moins suffisamment corrects pour être utilisés sans peser sur vos ressources processeur. C’est d’ailleurs au paramétrage de ces derniers que serviront pour l’essentiel les 4 disques tactiles de la surface.

Étude de K

Keith McMillen Instruments K-Mix : Gestion du surround dans l'éditeur K-Mix

De l’interface audio, on passe à la table de mixage qui s’avère bien entendu complètement autonome, mais nécessite une alimentation dans ce mode, comme vous vous en doutez. Il s’agira toujours de passer par la connectique USB de la K-Mix à ceci près que vous brancherez l’autre extrémité du câble dans un transfo type chargeur de téléphone au lieu de votre ordinateur. C’est très malin car de ce fait, rien ne vous empêche d’utiliser une batterie portable munie d’un connecteur USB.

Mine de rien, la petite boîte en a dans le ventre puisqu’outre les effets dont nous parlions précédemment, elle offre 3 sorties auxiliaires stéréo qu’on pourra prélever pré- ou post-fader pour créer des boucles d’effets ou des mixes alternatifs pour d’autres musiciens. Tout cela se configure très simplement depuis l’éditeur dédié avec la possibilité de stocker puis rappeler n’importe quelle configuration. Dans ce logiciel, on découvre d’ailleurs par le biais de l’onglet Surround que Keith McMillen a pensé à un usage multicanal de la K-Mix où les disques sensitifs prennent évidemment tout leur sens lorsqu’il s’agit de positionner une source dans l’espace.

Kontrol

Il nous reste à parler de l’emploi de la K-Mix en tant que surface de contrôle. Entre le nombre de contrôleurs qu’il est possible d’assigner, le fait que les rubans, pads et boutons proposent une bonne réactivité, et le retour visuel relativement convaincant dont on dispose même s’il n’est pas des plus précis, la K-Mix dispose de sérieux atouts à ce niveau. Pour autant, quelques détails s’avèrent gênants à l’usage. Le premier, c’est qu’il n’y a aucun mapping prêt à l’emploi pour aucune STAN en dehors de Live. À moins d’être un Abletonien convaincu, il faudra passer par l’éditeur pour se faire son template à soi, ce dont on se serait volontiers passé. Il n’y a bien sûr rien de rédhibitoire là-dedans car rien ne dit en outre que l’ami Keith ne mettra pas à disposition ce genre de mappings prochainement, mais il y a plus gênant.

Keith McMillen Instruments K-Mix : C'est beau un K-Mix la nuit

L’autre réserve que l’on pourrait en effet émettre tient au concept même du produit qui, en misant sur le tout tactile sans être une tablette, ne dispose à l’usage ni des avantages d’une surface de contrôle traditionnelle ni de ceux d’une tablette. Évidemment, on n’a pas comme sur un iPad un visuel qui s’adapte contextuellement à l’action que l’on est en train d’effectuer et comme on est malgré tout sur un appareil intégralement tactile, il est hors de question de pouvoir l’utiliser sans regarder ce qu’on fait ou sans suivre quoi que ce soit à l’écran. C’est d’autant plus vrai qu’avec tous ces contrôles agglutinés, on a vite fait de presser le mauvais bouton ou de pousser le mauvais fader si on n’y prend pas garde. Or, même en regardant attentivement, les gros doigts ne seront pas à la fête… Enfin, soulignons que même s’il est de bonne qualité, le tactile n’offre pas la précision du tout-mécanique lors des manipulations : sur les faders, on s’en sort, mais sur les disques, il faut vraiment s’appliquer pour réaliser des réglages qui ne seront jamais aussi précis qu’un bon vieil encodeur en dur. Et la machine a beau proposer un mode ‘Fine’ pour améliorer la précision, cela reste un pis-aller ergonomique qui compense comme il peut les lacunes des choix matériels.

Bref, pour ce qui est de piloter un séquenceur à l’heure du mixage, la K-Mix m’a paru moins convaincante qu’un iPad doté d’une bonne appli dédiée pour ceux qui veulent du tout tactile, tandis qu’entre Behringer, PreSonus et Icon, on dispose de pas mal de produits orientés mixage en entrée de gamme qui seront, de mon point de vue, plus pertinents.

Enfin, précisons que la K-Mix a les défauts de ses qualités : même si elle est bien pensée, en cumulant les fonctions et en concentrant autant de contrôles, elle peut vite donner l’impression d’une usine à gaz qui refroidira les adeptes du plug & play sans lire le manuel.

Conclusion

Pour peu que l’on ait bien conscience du potentiel comme des limites de son concept, la K-Mix est un tout-en-un d’autant plus convaincant qu’elle n’a pas de réel équivalent sur le marché. Évidemment, on aurait souhaité que plus de soin soit apporté aux à-côtés du produit (fournir des mappings prêts à l’emploi, bosser un peu plus l’intégration iOS). Évidemment aussi, il existe de meilleures interfaces audio, de meilleures tables de mixage et de meilleures surfaces de contrôle, mais rien qui, mis bout à bout, ne puisse approcher et la taille et le rapport qualité/prestations/prix de cette K-Mix qui, grâce à son petit format et son apparente robustesse, semble taillée pour le voyage et la scène et pourrait même séduire plus d’un home studiste sédentaire. Une chose est sûre en tout cas : Keith McMillen ne fait rien comme les autres et c’est bien pour ça qu’on l’aime…

 


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