Tous les avis sur JBL PARAGON

Je n'ai jamais possédé de JBL Paragon et même parmi les fervents partisans de JBL nous sommes nombreux dans ce cas, parce que tout simplement elles sont très anciennes et ceux qui en ont acheté neuves ne sont plus là pour en parler.
Cependant je les ai plusieurs fois entendues chez des particuliers et aussi à l'époque du Festival du Son Porte Maillot à Paris quand elles étaient exposées par la marque à titre historique puisque elles ne sont plus commercialisées depuis bien longtemps.
Plutôt que de donner un avis détaillé, ce que je ne saurais faire pour cause, je vais donner quelques indications à leur sujet.
D'abord, il ne s'agissait pas d'enceintes "séparées" à proprement parler.
Elles formaient en appparence un "meuble" unique et symétrique (on ne risquait pas d'inverser les deux côtés!). Bien sûr dans ces conditions, leur installation dans une pièce d'habitation n'était pas facile et il fallait avoir beaucoup de place, à la fois en largeur (elles mesuraient 2,67m sur 0,62m de profondeur et environ 0,86m de hauteur), et en profondeur car le point d'écoute se situait à environ 3 m minimum. En fait les Paragon étaient faites de caissons séparés et solidarisés, car on voit mal comment elles auraient pu être transportées sinon.
Les JBL Paragon n'étaient pas des enceintes professionnelles pour les studios (à l'inverse des 4320), mais plutôt un exercice de style à l'intention des riches amateurs de la hifi qui commencait. Il se dit que Frank Sinatra en possédait, probablement offertes par JBL pour en souligner le prestige.
En ce qui concerne leurs composants, JBL n'a pas cherché bien loin et les avait équipées de ceux des 4320 de studio (grave LE15A, la lettre A signifiant Alnico, médium compression 2 pouces 375, aigu compression 075 et mêmes filtres passifs LX5 et N7000, mais paramétrés différemment) mais en impédance de 16 ohms contre 8 ohms pour les 4320. Cela a son importance pour celui qui voudrait remplacer un des composants, qui devra vérifier la provenance de la pièce d'occasion (Paragon ou 4320) ou bien regarder la plaque de type collée en principe à l'arrière, sachant qu'il est facile de changer l'une par l'autre et qu'une mesure de l'impédance s'impose.
Il va sans dire que leur aspect à la fois désuet et imposant en faisait un objet de prestige qui ne passait pas inaperçu dans un salon, et qui faisait souvent le désespoir des épouses des passionnés quand elles n'étaient pas elles-mêmes intéressées, ce qui arrivait malgré tout: j'ai connu un couple dont la femme était tombée amoureuse de ces enceintes et refusait que son mari s'en sépare.
En ce qui concerne l'écoute, mes souvenirs sont les suivants. D'abord une sensation de réalisme impressionnant comparé à ce que rendaient des enceintes "classiques" de l'époque et même bien plus récentes.
Les médiums vous sautaient aux oreilles avec une présence époustouflante des voix qui donnait l'impression que le chanteur était dans la pièce, renforcée par le côté compact de l'ensemble sans "trou" entre les deux côtés.
Les boomers Alnico de 38cm délivraient un grave, peut-être pas spectaculaire de certaines grosses enceintes qui en rajoutent à l'excès, mais très propre et rapide. Je me souviens que certains étaient presque déçus que le grave ne soit pas plus en avant, mais il était juste comme il devait être, réaliste et sobre.
Les aigus des compressions 075 sont sans doute ce qui m'avait le moins convaincu, m'apparaissant un peu en retrait et très directifs. Les gens chargés de les faire écouter au Festival du Son étaient souvent tentés de forcer un peu sur le correcteur de tonalité des hautes fréquences, ce qui ne se fait pas dans un salon professionnel.
Dans sa globalité l'écoute vous laissait fortement impressionné par son ampleur et sa définition. Cependant, il était clair que le concept même de "meuble" unique touchait sa limite en interdisant de choisir une disposition qui eut pu être meilleure dans certains cas et dans certaines pièces d'écoute et, malgré une disposition des hp très étudiée par JBL, ne procurait pas une largeur de la stéréo vraiment convaincante que possèdent d'autres modèles de JBL, hifi ou pro.
Ce rendu n'était en rien comparable à celui des 4320 en studio, qui était beaucoup plus analytique et précis, avec là un aigu bien plus satisfaisant, mais toujours directif.
Et justement, les 4320 je les connais très bien pour en avoir (en version "S8") depuis des lustres et en aucun cas je ne leur préfèrerais les Paragon, dont les paramètres de fréquences de coupures et de pentes sont bien plus orientés vers une écoute "amateur" qui pour moi les desservent nettement.
Le rendement des Paragon est aussi inférieur à celui des 4320, ce qui oblige les possesseurs à un ampli plus puissant; d'autre part j'ai dès le début fait fonctionner mes 4320 en tri-amplification ce qui est presque obligatoire compte tenu de la qualité que je trouve un peu juste des filtres passifs d'origine, et procure une définition bien meilleure et autorise des variantes de courbes que je juge indispensables.
Comme enceintes hifi elles assuraient bien au-delà de ce qui se faisait à cette époque et même plus tard, mais elles n'avaient vraiment aucune des caractéristiques indispensables à un usage professionnel, elles n'étaient pas faites pour ça. JBL avait par ailleurs décliné ce concept d'"enceinte unique" en un autre modèle beaucoup moins connu, les Metregon plus petites et moins chères. Cependant ce principe n'a pas perduré après les Paragon à ma connaissance, et il faut bien reconnaitre qu'il n'est pas facile à mettre en oeuvre dans une pièce d'habitation et pas souhaitable en studio.

Au cours de leur carrière commerciale en réalité assez courte (bien qu'elles soient restées longtemps au catalogue) les Paragon n’ont pas connu de modifications notables, même si le modèle a existé avec des appellations légèrement différentes. De nos jours elles se vendent d’occasion à des prix assez variables, selon le pays (les plus chères étant bien sûr au Japon où la hifi est bien plus chère qu’ailleurs, il suffit pour le voir de consulter le grand site international bien connu) et c’est naturellement aux USA qu’on en trouve en plus grand nombre. On en trouve aussi fréquemment en Suisse et en Allemagne, avec pour point commun un tarif bien trop élevé en regard de leurs réelles performances. On peut pour ce prix trouver d’autres JBL bien meilleures et d’autres marques aussi. Il y a clairement un effet “objet historique” qui débouche sur des prix disproportionnés, mais pour certains passionnés fortunés cela n’a pas d’importance.
Les JBL Paragon restent un genre d'exercice de style de la part de cette marque prestigieuse, même si de nos jours JBL a perdu beaucoup de terrain dans les studios au profit de marques nouvelles et évolutives. Il n'en reste pas moins que JBL a été et restera comme le pionnier des enceintes de studios avec sa série 43 et 44, et que je ne peux m'empêcher de comparer tout ce qui sort depuis à ces modèles de référence.