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Pédago
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La lecture d’échantillons et les tables d’ondes

La synthèse sonore - 18e partie

Dans l’article précédent, nous nous sommes penchés sur l’échantillonnage, effectué selon le principe de la modulation d’amplitude (Pulse Code Modulation — PCM — en anglais). Nous allons aborder ici les tables d'ondes et les banques d'échantillons.

Accéder à un autre article de la série...

Ce stan­dard est employé en audio­nu­mé­rique, infor­ma­tique musi­cale, produc­tion de CDs et télé­pho­nie numé­rique. Dans un signal PCM, c’est l’am­pli­tude du signal qui est mesu­rée à inter­valles régu­liers, et codée numé­rique­ment avec un taux d’ap­proxi­ma­tion variable en fonc­tion du nombre de bits employés. 

Nous avons égale­ment vu dans le précé­dent article qu’un échan­tillon repré­sen­tait l’élé­ment de base de la numé­ri­sa­tion. Et c’est là que la termi­no­lo­gie infor­ma­tico-musi­cale nous joue des tours, accro­chez-vous bien…

Un joyeux bazar

Car la lecture d’échan­tillons implique souvent deux confu­sions de termes. La première concerne la notion même d’échan­tillon (sample en anglais). En effet, un signal numé­risé « complet », donc composé d’un ensemble d’échan­tillons (rappel : 44 100 échan­tillons par seconde pour la norme CD, par exemple), s’ap­pelle lui aussi… un échan­tillon ! Dans quel cas ? Dans celui où ce fameux signal complet est utilisé comme source sonore pour simu­ler un instru­ment réel, souvent avec d’autres petits cama­rades « signaux complets » au sein de ce que l’on appelle des « banques d’échan­tillons » (voir para­graphe éponyme).

Et c’est là que nous décou­vrons la seconde confu­sion, car les banques en ques­tion ne sont pas à confondre avec les « tables d’ondes » — compo­sées quant à elles d’échan­tillons « première défi­ni­tion ». Et c’est pour­tant cette seconde confu­sion que certains gens du marke­ting des années 90 ont contri­bué à entre­te­nir en nommant abusi­ve­ment « modules à tables d’ondes » (wave­table modules en anglais) des modules à banques d’échan­tillons (la carte-fille Wave Blas­ter pour les cartes son de Crea­tive Labs par exemple).

Si vous êtes un peu perdu à ce stade de l’ar­ticle, rassu­rez-vous, nous sommes là pour clari­fier tout cela !

La synthèse à table d’ondes

La lecture de table d’ondes est une forme de synthèse qui ne fonc­tionne que dans le domaine numé­rique. Elle s’ap­puie sur le fait qu’une forme d’onde pério­dique est par nature répé­ti­tive. Plutôt que de « gaspiller » de la puis­sance de calcul en deman­dant au synthé/ordi de calcu­ler les valeurs d’échan­tillons de l’en­semble d’un signal sonore donné, on ne lui fait calcu­ler que les valeurs d’échan­tillons pour un seul cycle de l’onde que l’on souhaite produire. Chaque valeur d’échan­tillon indi­vi­duelle est ensuite stockée dans une « case ». La lecture consé­cu­tive de chacune de ces cases revient à lire l’en­semble des infor­ma­tions des échan­tillons consti­tuant un cycle. Pour repro­duire ce cycle ad libi­tum, il suffit au système de relire la liste de cases en boucle. C’est l’en­semble de ces cases que l’on appelle une table d’ondes.

La synthèse sonore

Nous avons vu dans l’ar­ticle n° 3 de cette série que la hauteur d’une onde sonore pério­dique dépend direc­te­ment de sa fréquence, donc du nombre de fois que le cycle de base de cette onde se repro­duit en l’es­pace d’une seule seconde. Dans le cas de la lecture par table d’ondes, la méthode la plus effi­cace qui a été rete­nue pour modi­fier la hauteur d’une onde sonore a donc été de ne lire qu’un certain nombre de cases de la table, augmen­tant ainsi la rapi­dité de lecture d’un cycle, donc la rapi­dité de repro­duc­tion de celui-ci, donc la fréquence du signal… donc sa hauteur ! CQFD. C’est selon ce prin­cipe que fonc­tionnent les oscil­la­teurs numé­riques, les DOs (Digi­tal Oscil­la­tors), que nous déjà évoqués dans l’ar­ticle numéro 6 de cette série.

La méthode que je viens de décrire concerne ce que l’on appelle la lecture de table d’onde fixe, c’est-à-dire pour une seule forme d’onde. Toute­fois, plusieurs tables d’onde, conte­nant chacune l’échan­tillon­nage d’une forme d’onde diffé­rente, peuvent coexis­ter au sein d’un même synthé­ti­seur. Celui-ci peut alors passer, grâce à un para­mètre de modu­la­tion, de la lecture d’une table à celle d’une autre – donc d’une forme d’onde à une autre — créant ainsi des effets de tran­si­tion sonore des plus inté­res­sants ! On parle alors de lecture de tables d’ondes dyna­mique. 

Les banques d’échan­tillons

Celles-ci sont compo­sées de sons « complets » pré-enre­gis­trés qui peuvent être char­gés en mémoire – dans un module hard­ware ou bien dans un ordi­na­teur – afin d’ac­cé­der rapi­de­ment à des sono­ri­tés réalistes.

Par le passé, on n’en­re­gis­trait que certaines notes « clés » d’un instru­ment – les fameux échan­tillons dans la seconde accep­ta­tion du terme — et un algo­rithme se char­geait de calcu­ler les hauteurs pour les notes inter­mé­diaires, ce qui nuisait dans certains cas à la qualité de la repro­duc­tion sonore. Aujour­d’hui, les capa­ci­tés de stockage numé­rique se sont telle­ment éten­dues que l’on peut se permettre de numé­ri­ser par exemple des pianos entiers, avec non seule­ment un échan­tillon par note, mais égale­ment presque un échan­tillon par niveau de vélo­cité.

Les lecteurs d’échan­tillons gèrent en arrière-plan tout ce qui se passe pendant que vous jouez, de telle manière que vous n’ayez pas à vous en soucier. Vous jouez, et le logi­ciel dans le module hard­ware ou bien dans l’or­di­na­teur se charge de choi­sir le sample qui répon­dra le mieux à vos inten­tions de jeu en termes d’at­taque ou de vélo­cité par exemple. Sans comp­ter qu’un nombre gran­dis­sant de lecteurs d’échan­tillons vous permettent d’édi­ter vous-mêmes des « scripts » défi­nis­sant des règles de repro­duc­tion sonore – si vous souhai­tez que l’ap­pa­reil produise une tierce majeure à chaque note que vous jouez, par exemple.

Et concrè­te­ment ?

la synthèse sonore

J’ai un peu simpli­fié les choses en écri­vant, dans les articles précé­dents, que la lecture d’échan­tillons prove­nait unique­ment de la recherche d’une méthode plus effi­cace en termes de para­mé­trages que la synthèse addi­tive, et en sous-enten­dant que le premier lecteur d’échan­tillons aurait été le Fair­light CMI. En réalité, des musi­ciens et ingé­nieurs ont cher­ché dès les années 20 à mani­pu­ler des sons pré-enre­gis­trés en temps plus ou moins réel. Parmi les instru­ments qu’ils ont alors pu inven­ter, le plus célèbre a été le Mello­tron, apparu au début des années 60, très large­ment utilisé par les groupes musi­caux de l’époque, et qui utili­sait une petite bande magné­tique par note et par timbre.

Mais c’est bien la société Fair­light qui a été la première à intro­duire le concept d’échan­tillon­nage numé­rique tel que nous le connais­sons aujour­d’hui dans une machine à réelle voca­tion de synthèse, cette dernière illus­trée notam­ment par la possi­bi­lité de modi­fier le contenu harmo­nique du son d’un simple coup de light­pen sur un écran. Elle a ouvert la voie aux Emula­tors de chez E-MU, aux fameux samplers serie S de chez Akai jusqu’aux échan­tillon­neurs logi­ciels d’aujour­d’hui tels que Kontakt ou Omni­sphere.

La synthèse sonore

En ce qui concerne la synthèse à tables d’onde, elle a prin­ci­pa­le­ment été intro­duite et utili­sée par Wolf­gang Palm au sein de la marque PPG dans ses célèbres synthé­ti­seurs « Wave­com­pu­ter » et « Wave 2 » au début des années 80, et au sein de la marque Waldorf pour le « Micro­wave » et le « Wave » de 1993. Mais on la retrouve comme mode de produc­tion sonore secon­daire chez de nombreux fabri­cants, et forcé­ment, par sa nature intrin­sèque­ment numé­rique, dans de nombreux instru­ments de synthèse virtuels, souvent d’ailleurs aux côtés de la lecture d’échan­tillons complets. 

Ainsi, comme on peut le voir dans la capture d’écran ci-contre, le premier des trois géné­ra­teurs de son du célèbre Absynth de Native Instru­ments contient ici un échan­tillon « seconde défi­ni­tion » sous forme de fichier wav.

Tout ceci nous amène donc à en conclure qu’aujour­d’hui, à l’heure de la virtua­li­sa­tion galo­pante, les fron­tières entre la synthèse issue de formes d’onde basiques et la repro­duc­tion d’élé­ments sonores pré-numé­ri­sés n’ont jamais été aussi floues.

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