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Pédago
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Polyphonie et monodie

La synthèse sonore - 9e partie

Nous avons vu dans les précédents articles tout ce qui constituait la chaîne sonore de base d’un synthétiseur : les oscillateurs, suivis d’un filtre et d’un amplificateur accompagnés eux-mêmes des enveloppes pour les piloter.

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Nous avons égale­ment vu qu’un oscil­la­teur peut produire une onde sonore, plus ou moins char­gée en harmo­niques, mais toujours basée, pour les ondes pério­diques, sur un seul son fonda­men­tal – dont la fréquence peut, dans bien des cas, corres­pondre à celle d’une de nos notes du système occi­den­tal. Mais alors, qu’en est-il lorsque nous souhai­tons produire plusieurs notes à la fois, un accord par exemple ? Et plusieurs sons de natures diffé­rentes ?

C’est à ces deux ques­tions que nous allons tenter de répondre dans le présent et le prochain articles.

À une ou plusieurs voix

Tout d’abord, il s’agit de bien diffé­ren­cier les notions de poly et mono­pho­nie… oups pardon « mono­die ». 

Monodie et polyphonie en synthèse sonore

Eh oui, c’est le terme consa­cré, même si presque tout le monde fait l’er­reur aujour­d’hui d’em­ployer « mono­pho­nie » dans ce contexte. La « mono­pho­nie » s’op­pose à la « stéréo­pho­nie » et concerne le nombre de canaux des systèmes de diffu­sion audio. Elle n’a donc rien à voir avec ce qui nous inté­resse aujour­d’hui, à savoir le nombre de notes exécu­tables simul­ta­né­ment sur un instru­ment. La confu­sion est toute­fois d’au­tant plus excu­sable que l’op­posé de la mono­die n’est pas la « poly­die », mot inventé, mais bien la polyphonie. Bref, la langue française et sa logique…

Pour en reve­nir à notre sujet, on pour­rait être tenté de simpli­fier en affir­mant la chose suivante : la mono­die, c’est quand il n’y a qu’un seul oscil­la­teur, la poly­pho­nie c’est quand il y en a plusieurs… Et l’on serait complè­te­ment à côté de la plaque ! Car la diffé­rence entre mono­die et poly­pho­nie ne se situe pas au niveau du nombre d’os­cil­la­teurs, mais bien à celui du nombre de voix.

Avant d’al­ler plus loin, il est donc impor­tant de défi­nir ce qu’est une « voix » (ou voie) en jargon « synthé­siste ». Une voix peut tout d’abord être consi­dé­rée comme la chaîne sonore de base citée en intro­duc­tion de l’ar­ticle : oscil­la­teurs, filtre et ampli­fi­ca­teur avec leurs enve­loppes respec­tives. Mais c’est bien plus que cela ! 

Quand vous action­nez une touche de synthé, vous action­nez en plus trois autres éléments simul­ta­né­ment : un « pitch trig­ger » (signal de hauteur, égale­ment appelé « pitch CV » pour Pitch Control Voltage) qui renseigne l’ap­pa­reil sur la touche que vous enfon­cez, un « enve­lope trig­ger » qui va acti­ver les diffé­rentes enve­loppes concer­nées, et un « gate » (portail en anglais) qui restera « ouvert » tant que la touche restera enfon­cée, et qui servira donc à indiquer au système à quel moment la touche est relâ­chée.

Comme vous pouvez le consta­ter, une « voix » est donc consti­tuée de bien plus d’élé­ments que simple­ment d’un oscil­la­teur. D’ailleurs, reve­nons une seconde à la défi­ni­tion donnée plus haut : « Oscil­la­teurs, filtre… »… Atten­dez une minute, « oscil­la­teurs » au pluriel ? Pour une seule voix ?

Oui, car la plupart des synthé­ti­seurs proposent plusieurs oscil­la­teurs par voix, ceci afin de produire des sons plus riches. Ainsi le récent Little Phatty de Moog, mono­dique, propose-t-il 2 oscil­la­teurs, capables de produire simul­ta­né­ment chacun une forme d’onde diffé­rente et même d’être désac­cor­dés entre eux, sans toute­fois que cela en fasse un synthé­ti­seur poly­pho­nique, les deux oscil­la­teurs étant déclen­chés par une seule et même touche, et leur signal étant traité par une seule et même chaîne d’élé­ments (filtre, ampli­fi­ca­teur, enve­loppes, etc.). Le fait que ce synthé soit capable par contre de produire simul­ta­né­ment deux sons de nature diffé­rente en fait un synthé­ti­seur dit « multi-timbral ». 

Mono­die et prio­rité

Monodie et polyphonie en synthèse sonore

Bien, main­te­nant que nous avons défini ce qu’est une voix, penchons-nous à présent sur ce qu’est la mono­pho… pardon, la mono­die (déci­dé­ment, la tenta­tion est grande !). La mono­die est le fait de ne jouer qu’une seule note ou voix à la fois (même si cela peut englo­ber, comme nous venons de le voir, des sono­ri­tés diffé­rentes !).

Mais alors, que se passe-t-il si le musi­cien plaque à deux mains un magni­fique accord de 8 notes, ou plus simple­ment laisse « traî­ner » une note sur une autre pendant l’exé­cu­tion d’une ligne mélo­dique ? Comment un appa­reil mono­dique défi­nit-il, parmi toutes les notes enfon­cées simul­ta­né­ment, laquelle doit être jouée ?

Lorsqu’une telle situa­tion se présente, un système de prio­rité entre en jeu pour déter­mi­ner quelle est la note qui doit être conser­vée parmi toutes celles enfon­cées.  Les prin­ci­paux choix qui s’offrent, diffé­rents selon les synthés, sont alors les suivants : prio­rité à la note la plus basse (option la plus courante), prio­rité à la note la plus haute, prio­rité à la dernière note et — beau­coup plus rare­ment – prio­rité à la première note.

Dans les années 70, les synthés améri­cains et les synthés japo­nais se diffé­ren­ciaient entre autres par le fait que les améri­cains préfé­raient donner la prio­rité à la note la plus grave, alors que les japo­nais favo­ri­saient la plus aiguë, entraî­nant des diffé­rences de tech­niques de jeu dans la gestion des tran­si­tions mélo­diques entre les notes. La prise en compte de ces spéci­fi­ci­tés et la maîtrise des tech­niques de jeu asso­ciées peuvent s’avé­rer extrê­me­ment inté­res­santes lors de l’exé­cu­tion de riffs mélo­diques.

Dans le prochain article, nous trai­te­rons de la poly­pho­nie comme annoncé plus haut, mais égale­ment d’un prin­cipe moins connu, la para­pho­nie…

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