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Pédago
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Les champs d’application de la synthèse par modèle physique

La synthèse sonore - 24e partie

Terminons aujourd’hui le tour d’horizon des différentes variantes de la synthèse par modélisation physique, et voyons ensuite comment elle a été implémentée.

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La synthèse par guide donde

Un guide d’onde est un montage mathé­ma­tique qui tend à modé­li­ser le milieu dans lequel les ondes vont évoluer, souvent une corde ou un tube de métal ou de bois, et qui va donc servir à « guider » l’onde. Un guide d’onde est essen­tiel­le­ment composé d’au moins une ligne dite « à retard ». Il s’agit d’un dispo­si­tif virtuel servant à simu­ler d’une part le temps qu’une onde met pour aller d’un point à un autre, et d’autre part le compor­te­ment de ladite onde quand elle atteint l’ex­tré­mité de la ligne à retard (simu­la­tion de cheva­let dans le cas d’une corde virtuelle) ou bien quand elle rencontre une autre ligne à retard (dans le cas d’un réseau de lignes, simu­lant des envi­ron­ne­ments plus complexes qu’une corde).

La synthèse sonore

L’exemple le plus clas­sique pour illus­trer simple­ment ce que sont un guide d’onde et une ligne à retard est la simu­la­tion du compor­te­ment d’une corde de piano. Celle-ci est frap­pée en son centre par un marteau. Aussi­tôt, deux vibra­tions naissent au point d’im­pact et partent en sens oppo­sés l’une de l’autre le long de la corde, jusqu’à atteindre chacune le cheva­let corres­pon­dant à la fin de son parcours. Là, une part de l’éner­gie de l’onde sera absor­bée par le cheva­let, et l’autre sera renvoyée en retour le long de la corde. Les deux ondes se retrou­ve­ront au point d’im­pact et géné­re­ront éven­tuel­le­ment des inter­fé­rences ou des phéno­mènes de phase.

Dans l’exemple cité, les lignes à retard simulent le compor­te­ment des deux ondes qui partent du point d’im­pact du marteau, et le guide d’onde est l’en­semble du dispo­si­tif simu­lant la corde de piano.

La synthèse Karplus-Strong

C’est en 1983 qu’ap­pa­raît cette forme de synthèse, nommée ainsi d’après ses deux prin­ci­paux décou­vreurs et théo­ri­ciens. Son mode de fonc­tion­ne­ment emprunte beau­coup aux deux formes de synthèse précé­dem­ment citées, la MSW et celle par guide d’onde, et repose sur le prin­cipe suivant. Le signal exci­ta­teur est envoyé dans une ligne à retard fermée sur elle-même. À chaque tour de boucle, un filtrage passe-bas est effec­tué, de sorte que les hautes fréquences sont petit à petit atté­nuées avant de tota­le­ment dispa­raître. Ceci repré­sente le compor­te­ment typique d’une corde en vibra­tion, ce qui fait de l’al­go­rithme Karplus-Strong un modèle parti­cu­liè­re­ment adapté à la repro­duc­tion des cordes, et plus spécia­le­ment encore à celle des cordes pincées. Mais il se révèle égale­ment tout à fait effi­cace en ce qui concerne la repro­duc­tion des tambours. 

Et concrè­te­ment… ?

Comme nous l’avons vu, la synthèse par modé­li­sa­tion physique se distingue surtout par sa capa­cité à recréer les condi­tions de produc­tion et de diffu­sion d’un signal sonore déjà préa­la­ble­ment connu, tels que le son d’un piano ou celui d’une trom­pette. C’est donc prin­ci­pa­le­ment sur les plates-bandes de la lecture d’échan­tillons que cette forme de synthèse est venue marcher. Et elle dispose pour cela de deux atouts majeurs.

Le premier est préci­sé­ment de n’être pas basé sur des échan­tillons, mais sur des algo­rithmes. Il devient alors possible de repro­duire préci­sé­ment chaque inten­tion du musi­cien. Prenons l’exemple d’un para­mètre de jeu tel que la vélo­cité (voir article 12). Dans le meilleur des cas – et large­ment encore du domaine du fantasme – la lecture d’échan­tillons utili­sera un sample par niveau de vélo­cité. La synthèse par modé­li­sa­tion physique ne connaît pas ce genre de limi­ta­tion.

Le second atout – qui découle du premier – est que la synthèse MP permet de dépas­ser les contraintes physiques des instru­ments et envi­ron­ne­ments sonores clas­siques. Nous pouvons alors créer toutes sortes de « chimères », telles qu’un cor de 25 mètres de long, ou un piano dont les cordes seraient déclen­chées par un souffle, par exem­ple… ou encore des choses bien plus éton­nantes. On peut même simu­ler l’ins­tru­men­tiste lui-même, sa dexté­rité, son degré de fatigue, etc.

La synthèse sonore

Comme pour la synthèse FM, nous retrou­vons les labo­ra­toires Bell à l’ori­gine des premières appli­ca­tions concrètes de la synthèse par modèles physiques, notam­ment en faisant inter­pré­ter dès les années 60 une chan­son par un ordi­na­teur modé­li­sant une voix humaine (ce qui n’est pas sans rappe­ler une scène parti­cu­liè­re­ment célèbre du film de Stan­ley Kubrick, 2001, l’Odys­sée de l’Es­pace).

De nos jours, un certain nombre d’ap­pa­reils hard­ware utilisent la modé­li­sa­tion physique. Après avoir promu la synthèse FM dans les années 80 (voir les articles 21 et 22), Yamaha a de nouveau fait preuve d’es­prit pion­nier en produi­sant, dans les années 90, les premiers appa­reils grand public utili­sant la modé­li­sa­tion physique, à savoir les VL-1, VP-1 et VL-7. Les autres prin­ci­pales machines basées au moins partiel­le­ment sur cette tech­no­lo­gie sont les Roland V-Piano, Clavia Nord Modu­lar G2 ou encore les Korg OASYS et Prophecy.

La synthèse sonore

En ce qui concerne les logi­ciels, outre Moda­lys évoqué plus haut, nous avons égale­ment CORDIS-ANIMA, créé à la fin des années 70 par L’ACROE (Asso­cia­tion pour la Créa­tion et la Recherche sur les Outils d’Ex­pres­sion). Celui-ci se présente comme un outil « multi-senso­riel », à retour d’ef­fort (comme les joys­ticks, amis gamers parmi vous…) et propo­sant de mettre les tech­niques de modé­li­sa­tion physique aussi bien au service du son (CORDIS) que de l’image (ANIMA).

Dans un domaine plus récent et plus « grand public », nous trou­vons notam­ment le fameux Piano­teq de Modartt, qui permet d’ac­cé­der à tous les para­mètres de réglage de diffé­rents types de pianos acous­tiques et élec­triques, ainsi que Brass d’Ar­tu­ria pour les instru­ments à vent. On retrouve égale­ment la synthèse par modèles physiques dans une bonne partie des instru­ments virtuels livrés avec Able­ton Live, à savoir Tension, Elec­tric, Collide et Corpus. Et, bien évidem­ment, elle est repré­sen­tée au sein des envi­ron­ne­ments modu­laires tels que Reak­tor, de Native Instru­ments, ou encore de la plate­forme de déve­lop­pe­ment MAX/MSP de Cycling’74.

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