JBL 4320 S8

J'ai une paire de JBL 4320 S8 (3 voies) dans la configuration d'origine, soit:-grave 38cm LE15A -médium 2 pouces 375 avec la trompe H93 et la lentille L91 -aigu 075 -filtres LX5 et N7000 (impédance 8 ohms; les mêmes composants équipaient aussi les Paragon mais en 16 ohms le plus souvent). Je précise que l'appellation "S8" n'est pas officielle. Je les nomme ainsi sur le modèle des JBL Olympus (qui, elles, n’étaient pas destinées aux studios mais plutôt aux audiophiles). En effet, JBL en rajoutant le tweeter 075 aux Olympus, les a appelées S8 pour les distinguer du modèle d'origine en deux voies qui étaient les S7. Les Olympus avaient en plus un 38 passif (PR15), et une caisse plus grande bien sûr (j'en ai eu une paire, mais je préférais les 4320). Le modèle 4320 est, d’origine, en deux voies et a été le plus diffusé. On ne trouve pas sur les documents émanants de JBL d'informations décrivant les 4320 avec trois voies ni comme étant des S8; c'est plutôt une appellation donnée entre utilisateurs de manière officieuse. La sortie de la version trois voies est restée assez confidentielle et n'a concerné que le monde des studios. Il n'existe aucune brochure des 4320 avec l'aigu 075 et le filtre supplémentaire N7000, à ma connaissance.
Les Apollo C50SM, antérieures aux 4320, étaient très proches. Dans la gamme hifi de JBL, la L300 était un modèle qui s'apparentait aux 4320 par son format et ses composants.
A l'origine, il arrivait que JBL accepte de vendre les 4320 avec des composants un peu différents, on peut donc en trouver parfois (plutôt aux USA) avec des variantes. La 4325 était une variation sur la 4320.
Les miennes sont en configuration "usine". Je les ai achetées il y a longtemps au premier propriétaire, un studio parisien qui n'existe plus.
Je les utilise en tri-amplification avec un filtre actif JBL DSC260 (500w 200w 150w); ce filtre est le même que le BSS FDS336T. Comme sur tous mes monitors JBL que j'ai passés en multi-amplification, j'ai laissé en place mais déconnectés le(s) filtre(s) passif(s) et installé des prises Speakon.
Les suspensions des 38 ont un peu durci avec le temps, mais au moins celles de l'époque ne partaient pas en morceaux comme des modèles plus récents de JBL.
Même ainsi, le niveau de grave est spectaculaire.
L'énorme et très lourde compression 2 pouces délivre un médium d'une présence telle que vous avez la sensation que le chanteur est à côté de vous.
Il est parfois même un peu trop en avant.
L'aigu 075 est d'une grande finesse, mais très directif. C'est pourquoi il a parfois été remplacé plus tard dans certains studios par le 2405, qui équipe les monstrueuses 4350. Il arrivait que les 4320 en version S8 soient fournies avec le tweeter à gauche pour les deux enceintes, et donc qu'il n'y ait pas une enceinte gauche et une droite différenciées. Sur certaines photos prises chez Abbey Road on peut voir que l'aigu avait été placé au milieu et en haut, ce qui est plus logique.
Le rendu sonore global est tout simplement extraordinaire au sens premier du terme et quand on les a entendu une fois avec leur précision sidérante, en particulier sur le médium, il est difficile de les oublier. Je précise qu’elles se démarquent du haut de gamme de JBL destiné aux audiophiles comme les très anciennes Hartsfield ou les Everest et les déclinaisons qui ont suivi, celles-ci répondant à d’autres critères.
Chacun peut avoir une préférence entre ces deux catégories d’écoute, mais il est clair que ces 4320 sont de vraies écoutes de studio et qu’elles ne sont pas des enceintes de compromis et ne s’adressent qu’à des auditeurs avertis qui savent précisément ce qu’ils veulent.
Ces 4320 ont été conçues à l'origine pour les grands studios qui par définition ont une acoustique excellente.
Leur mise en oeuvre dans un local plus ordinaire n'est pas facile, et demande un certain soin.
Ces enceintes, mal installées, mal filtrées, avec une amplification mal choisie, peuvent rendre un très mauvais résultat et méritent largement une multi-amplification (leurs filtres passifs d'origine ne vieillissent pas toujours bien et le mode de branchement du fil dénudé est complètement dépassé-il faudrait au minimum le remplacer).
Il faut d'une part un peu de surface, et d'autre part, une mise en place un minimum étudiée, notamment les surélever de 50 à 60cm et les découpler du sol, au cas où on les poserait par terre. Le mieux étant de les encastrer dans le mur de la cabine du studio, réduisant ainsi le phénomène des ondes stationnaires.
Le traitement complet de la pièce d’écoute est bien sûr l’idéal, mais pas toujours possible en usage à domicile, et pourtant ces 4320, et spécialement cette version 3 voies, s’accommodent plutôt mal d’une acoustique imparfaite d'autant qu'il faut de l'air entre elles et l'utilisateur. Trop près, elles perdent beaucoup de leurs exceptionnelles qualités.
Je dirais même que de tous les gros monitors JBL de cette époque jusqu’à fin des années 80 (les tri ou quadri amplifiés que je possède et que je connais), ce modèle est le plus difficile et le plus critique à faire sonner correctement.
Ces 4320S8 sont, je le répète, typiquement des enceintes de studio et les moins "domestiques" de toutes, tant elles sont analytiques et en rien tolérantes. Les JBL 4320 ne sont pas des enceintes de hifi; à la manière de Dante, je dirais "Vous qui entrez ici abandonnez toute espérance.. de hifi". Ces 4320 peuvent très bien déplaire à beaucoup d'amateurs. A l’écoute de morceaux connus, mais pas toujours parfaitement réalisés (d’un point de vue purement technique, s’entend), il peut arriver que l’on ne se prenne plus qu’à entendre les imperfections, jusqu’à rendre cette écoute un rien pénible parfois.
Je ne conseillerais pas ces 4320 à qui cherche une écoute consensuelle et pour tout dire de pur agrément. Les gros modèles d’aujourd’hui de JBL, comme les 4367, ont quelque peu gommé ce trait, peut-être aussi parce qu’ils sont beaucoup moins directifs par des pavillons très étudiés et qu‘ils se contentent de niveaux d’écoute moins élevés pour être au mieux. Ces monitors viennent d'une époque à laquelle le choix dans cette catégorie n'était pas aussi large qu'il peut être aujourd'hui. Il est tout de même assez remarquable que cette génération d'enceintes de studio, et les JBL des vingt années qui ont suivi les 4320, soit encore digne de figurer dans une liste de matériels contemporains, en les entretenant un peu pour les maintenir à leur meilleur niveau, ce qui n'est pas vraiment difficile parce que les JBL à usage professionnel se distinguent par une caractéristique, confondue souvent à tort avec la notion de fiabilité, qui est une remarquable continuité des performances dans le temps (à part peut-être les filtres passifs, pas toujours à la hauteur du reste).
De tous les monitors JBL, des origines à aujourd'hui avec les 4367 en passant par les 4350, que j'ai possédé ou que j'ai toujours, les 4320 conservent une place à part et sont peut-être ceux que je préfère (les 4435 étant ceux que j'aime le moins, m'ayant laissé un sentiment de tentative mal aboutie). Les JBL 4320 sont anciennes, ne font pas appel aux technologies de pointe qui ont mené aux M2 et aux 4367, mais constituent une référence extrêmement fiable et ce qu'elles révèlent n'est jamais démenti par l'écoute sur les modèles d'aujourd'hui. J'ai constaté que les artistes aiment toujours entendre leur travail sur ces monitors.
Mixer sur ces JBL 4320 était un pur bonheur, qui vous fait toucher du doigt ce que certains producteurs doivent ressentir dans leurs très grands studios sans limite de coût ou presque.
J'avoue que devant la miniaturisation actuelle des monitors, même chers, j'ai du mal à comprendre comment bien équilibrer dans le grave.
Bien sûr maintenant, la tendance est à l'actif et à l'amplification numérique, mais la taille compte toujours, et même avec un sub ce n'est pas la même chose.
En paraphrasant Glenn Coleman, un constructeur américain de matériels de studio, à la fin tout se termine toujours par de l'analogique.

Je suis loin de connaitre tous les modèles de JBL, mais j'en ai écouté beaucoup, et j'ai toujours beaucoup aimé la "signature sonore" de cette marque prestigieuse et quoi que certains disent, sa neutralité. D'ailleurs, à défaut de l'être totalement (neutres), elles ont l'avantage de permettre de réaliser un travail dont on sait que s'il sonne bien dessus, il sonnera bien partout, et tous les monitors ne peuvent pas en dire autant.
Conçues à peu près à la même époque, les 4310, et leurs descendantes très connues, les 4311B, dont j'ai toujours une paire, rivalisent largement et même souvent à leur avantage avec beaucoup de modèles d'aujourd'hui.

Il est difficile de trouver ces enceintes d'occasion et elles sont d'une extrême rareté en excellent état.
Celles proposées de temps en temps à la vente sont souvent passées entre de nombreuses mains, certains composants ayant été changés pour du non-JBL, quand elles n'ont pas carrément fini chez des sonorisateurs non professionnels occasionnels (il y a sur Audiofanzine une rubrique "4320 version 3 voies" qui montre des fausses 4320 dont des éléments ne sont pas d'origine).
On peut trouver d'autres JBL pro plus récentes au même prix que les 4320, mais qui n'ont pas forcément cette "personnalité" reconnue, qui a fait le succès mondial de ces monitors.
Nous avons tous collectivement dans nos discothèques des centaines de disques qui ont été mixés sur les JBL 4320, jusqu'à la fin des années 90; Pink Floyd, Beatles sont parmi les plus emblématiques (voir photo Alan Parsons mixant "Dark side of the moon" chez Abbey Road sur la console EMI TG12345 avec les 4320).

Je profite de cet avis pour remplir la fiche technique (pour le modèle de base, aucune fiche n'ayant été publiée à ma connaissance pour les S8); les données constructeur étaient très timides, et les puissances admissibles sont bien au-delà de ce qui était indiqué (à l'époque du passif les amplis de studio n'étaient pas énormes).

Edit 2021: j'ai apporté quelques modifications à l'avis donné en 2019, pour donner des précisions sur la mise en oeuvre et l'écoute à proprement parler.