Onfray Vs Freud
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Anonyme
Je ne suis pas vraiment fan d'Onfray (que je trouve de plus en plus arrogant) mais je ne le suis pas non plus de la psychanalyse.
Dans un court article paru dans un hors-série du Point consacré à Freud, Onfray disait des choses que j'avais longtemps pensé "de loin" à propos de la psychanalyse.
La semaine prochaine paraîtra le livre d'Onfray "Le Crépuscule d'une idole. L'affabulation freudienne."
il y démonte le système Freud et la mythologie autour de ce dernier.
Après l'annonce de la parution de l'ouvrage, quelques articles et invitation à la télé, le philosophe d'Argentan et créateur des Universités Populaires de Caen se met de fait tous les psychanalystes à dos dont certains, lui collent déjà une étiquette d'extrêmiste de droite ("Onfray réhabilite un discours d’extrême droite" dixit Elisabeth Roudinesco, grande historienne de la psychanalyse).
Si la question vous intéresse voilà un thread dédié, question de ne pas pourrir d'autre sujets.
Pour se faire une idée, voici Onfray invité dans l'émission de Franz Olivier-Giesbert, suvi d'un
article de Roudinesco.
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Un article de Elisabeth Roudinesco démontant le système Onfray.
Onfray et le fantasme antifreudien,
par Elisabeth Roudinesco
LE MONDE DES LIVRES | 15.04.10 | 11h43 •
Mis à jour le 15.04.10 | 11h43
Créateur d'une Université populaire à Caen, Michel Onfray s'est fait connaître pour avoir inventé une "contre-histoire de la philosophie" dont la méthodologie s'appuie sur le principe de la préfiguration : tout est déjà dans tout avant même la survenue d'un événement. Cela lui a permis d'affirmer des choses extravagantes : qu'Emmanuel Kant était le précurseur d'Adolf Eichmann - parce que celui-ci se disait kantien (Le Songe d'Eichmann, Galilée, 2008) -, que les trois monothéismes (judaïsme, christianisme et islam) étaient des entreprises génocidaires, que l'évangéliste Jean préfigurait Hitler et Jésus Hiroshima, et enfin que les musulmans étaient des fascistes (Traité d'athéologie, Grasset, 2005). Fondateurs d'un monothéisme axé sur la pulsion de mort, les juifs seraient donc les premiers responsables de tous les malheurs de l'Occident. A cette entreprise mortifère, M. Onfray oppose une religion hédoniste, solaire et païenne, habitée par la pulsion de vie.
C'est dans la même perspective, dit-il, qu'il a lu en cinq mois l'oeuvre complète de Freud puis rédigé ce Crépuscule d'une idole. Truffé d'erreurs, traversé de rumeurs, sans sources bibliographiques, l'ouvrage n'est que la projection des fantasmes de l'auteur sur le personnage de Freud. M. Onfray parle à la première personne pour avancer l'idée que Freud aurait perverti l'Occident en inventant, en 1897, un complot oedipien, c'est-à-dire un récit autobiographique qui ne serait que la traduction de sa propre pathologie. Il fait du théoricien viennois un "faussaire", motivé "par l'argent, la cruauté, l'envie, la haine".
LA FIGURE DU PÈRE
Face à cette figure qui lui sert de repoussoir, et dont il annonce le crépuscule, l'auteur revalorise la destinée des pères, et d'abord du sien propre. Et puisque Freud fut adoré de sa mère, M. Onfray considère que le fondateur de la psychanalyse était un pervers haïssant son père et ayant abusé psychiquement de ses trois filles (Mathilde, Sophie et Anna). L'appartement de Vienne était, selon lui, un lupanar et Freud un Œdipe ne pensant qu'à coucher réellement avec sa mère puis à occire vraiment son père, afin de fabriquer des enfants incestueux pour mieux les violenter. Pendant dix ans, il aurait torturé sa fille Anna tout au long d'une analyse qui aurait duré de 1918 à 1929, et au cours de laquelle, chaque jour, il l'aurait incitée à devenir homosexuelle. La vérité est toute différente : Freud a bien analysé sa fille, mais la cure a duré quatre ans, et quand Anna a commencé à se rendre compte de son attirance pour les femmes, c'est elle qui a choisi son destin et Freud ne l'a pas tyrannisée : il a même fait preuve de tolérance.
Cédant à une rumeur inventée par Carl Gustav Jung, selon laquelle Freud aurait eu une liaison avec Minna Bernays, la soeur de sa femme Martha, M. Onfray en vient à imaginer, à la suite d'historiens américains du courant dit "révisionniste", que celui-ci l'aurait engrossée puis obligée à avorter. Aussi peu soucieux des lois de la chronologie que de celles de la procréation, M. Onfray situe cet événement en 1923. Or, à cette date, Minna était âgée de 58 ans et Freud de 67.
Et Michel Onfray d'ajouter que Freud aurait cédé à la tentation de subir une opération des canaux spermatiques destinée à augmenter sa puissance sexuelle afin de mieux jouir du corps de Minna. La réalité est toute différente : en 1923, Freud, qui vient d'apprendre qu'il est atteint d'un cancer, subit cette opération de ligature (dite de "Steinbach"), classique à l'époque, et dont on pensait qu'elle pouvait prévenir la récidive des cancers.
Si Freud est un pervers, sa doctrine devient alors le prolongement d'une perversion plus grave encore : elle serait, pour M. Onfray, le "produit d'une culture décadente fin de siècle qui a proliféré comme une plante vénéneuse". L'auteur reprend ainsi une thématique connue depuis Léon Daudet et selon laquelle la psychanalyse serait une science parasitaire, conçue par un cerveau dégénéré et née dans une ville dépravée.
Dans la même veine, il retourne l'accusation de "science juive" prononcée par les nazis contre la psychanalyse pour faire de celle-ci une science raciste : puisque les nazis ont mené à son terme l'accomplissement de la pulsion de mort théorisée par Freud, affirme-t-il, cela signifie que celui-ci serait un admirateur de tous les dictateurs fascistes et racistes. Mais Freud aurait fait pire encore : en publiant, en 1939, L'Homme Moïse et la religion monothéiste, c'est-à-dire en faisant de Moïse un Egyptien et du meurtre du père un moment originel des sociétés humaines, il aurait assassiné le grand prophète de la Loi et serait donc, par anticipation, le complice de l'extermination de son peuple. Quand on sait que Freud soulignait que la naissance de la démocratie était liée à l'avènement d'une loi sanctionnant le meurtre originel et donc la pulsion de mort, on voit bien que l'argument d'un Freud assassin de Moïse et des juifs ne tient pas un instant.
LE BOURREAU ET LA VICTIME
Refusant le principe fondateur de l'histoire des sciences, selon lequel les phénomènes pathologiques sont toujours des variations quantitatives des phénomènes normaux, M. Onfray essentialise l'opposition entre la norme et la pathologie pour soutenir que Freud n'est pas capable de distinguer le malade de l'homme sain, le pédophile du bon père et surtout le bourreau de la victime. Et du coup, à propos de l'extermination des quatre soeurs de Freud, il en conclut qu'à l'aune de la théorie psychanalytique, il est impossible "de saisir intellectuellement ce qui psychiquement distingue Adolfine, morte de faim à Theresienstadt, de ses trois autres soeurs disparues dans les fours crématoires en 1942 à Auschwitz et Rudolf Höss (le commandant du camp d'extermination), puisque rien ne les distingue psychiquement sinon quelques degrés à peine visibles". Au passage, M. Onfray se trompe de camp : Rosa fut exterminée à Treblinka, Mitzi et Paula à Maly Trostinec. Et si la "solution finale" a bien saisi la famille Freud, ce n'est pas dans un tel face-à-face inventé de toutes pièces.
Bien qu'il se réclame de la tradition freudo-marxiste, Michel Onfray se livre en réalité à une réhabilitation des thèses paganistes de l'extrême droite française. Telle est la surprise de ce livre. Ainsi fait-il l'éloge de La Scolastique freudienne (Fayard, 1972), ouvrage de Pierre Debray-Ritzen, pédiatre et membre de la Nouvelle Droite, qui n'a jamais cessé de fustiger le divorce, l'avortement et le judéo-christianisme. Mais il vante aussi les mérites d'un autre ouvrage, issu de la même tradition (Jacques Bénesteau, Mensonges freudiens. Histoire d'une désinformation séculaire, Mardaga, 2002), préfacé par un proche du Front national, soutenu par le Club de l'Horloge : "Bénesteau, écrit-il, critique l'usage que Freud fait de l'antisémitisme pour expliquer sa mise à l'écart par ses pairs, son absence de reconnaissance par l'université, la lenteur de son succès. En fait de démonstration, il explique qu'à Vienne à cette époque nombre de juifs occupent des postes importants dans la justice et la politique." Au terme de son réquisitoire, M. Onfray en vient à souscrire à la thèse selon laquelle il n'existait pas de persécutions antisémites à Vienne puisque les juifs étaient nombreux à des postes importants.
On est loin ici d'un simple débat opposant les partisans et les adeptes de la psychanalyse, et l'on est en droit de se demander si les motivations marchandes ne sont pas désormais d'un tel poids éditorial qu'elles finissent par abolir tout jugement critique. La question mérite d'être posée.
Anonyme
J'ai posté les liens mais n'ai pas encore lu les articles.
faren
Car à l'heure ou les neurosciences progressent, les découvertes sur le fonctionnement du cerveau tendent à donner en partie raison aux intuitions de freud !
D'ailleurs dans sa correspondance, et même dans ses bouquins, freud dit toujrours qu'il avance des théories, que la science infirmera ou confirmera plus tard. Il était médecin, neurologue.
Je regarde tout ça et on cause après !
Dr Pouet
Visiblement le livre d'Onfray est basé essentiellement sur des citations de Freud ou sur des faits établis, avec à chaque fois la précision de ses sources ; ça lui donnerait un certain poids.
Anonyme
le 22 avril comme le laisse entendre Franz-Olivier Giesbert dans la troisième vidéo postée plus haut.
aris
DiZ69
Dr Pouet
(Par contre le début de l'article de Roudinesco est très agressif et pas factuel ; elle aurait mieux fait de s'en passer)
Anonyme
Voilà, c'est fait, Mme Roudinesco qui piaffait d'impatience dans la perspective de la parution de mon livre sur Freud a enfin pu vider sa bile dans "Le Monde des livres" et, personne ne s'en étonnera, les arguments sont connus : je suis un fasciste, un compagnon de route de Vichy et de Pétain, un suppôt du Front national, un défenseur d'auteurs ayant trempé dans la collaboration... De fait, chacun jugera : mon trajet depuis mon premier livre paru en 1989 illustre bien les dires de cette dame, je n'ai cessé en effet d'être un Léon Daudet moderne, un Maurras contemporain, un genre de Le Pen de la philosophie ou bien encore un "freudo-marxiste " qui réhabilite "les thèses paganistes de l'extrême droite française". J'ai honte pour elle...
Pour écrire un pareil tissu de sottises, il lui aura suffi de reprendre les textes qu'elle publia jadis pour criminaliser les auteurs du Livre noir de la psychanalyse et de changer les noms pour y mettre le mien : son épistémologie est bien connue du milieu... Je dispose même de plusieurs témoignages de psychanalystes illustres affligés que cette dame puisse s'autoproclamer gardienne médiatique du temple freudien et considérer que, si on émet une critique sur Freud, le freudisme ou la psychanalyse, c'est à elle qu'on fait une offense personnelle. Une semaine avant la parution du livre, elle se répandait déjà dans un communiqué insultant à mon endroit auprès de l'Agence France-Presse... Pour éviter cette paranoïa, on peut toujours se faire psychanalyser, mais il est vrai que la chose semble déjà faite et témoigne contre l'efficacité du divan !
Mme Roudinesco coupe l'humanité en deux : les juifs et les antisémites. Comme je n'ai pas l'honneur d'être juif, il faut bien que je sois antisémite. Dialectique imparable apprise pendant les longues années de son militantisme au Parti communiste français dans sa période stalinienne et resservie ad nauseam depuis qu'elle tient boutique à Paris du petit commerce freudien.
Lisons. Voici ce que je penserais : Kant est un précurseur d'Adolf Eichmann, saint Jean un préfigurateur d'Hitler et Jésus l'inventeur d'Hiroshima. Faut-il en rire ? J'ai peine pour elle... Elle parle de ses fantasmes, pas de mes textes, il lui faudrait pour ce faire des vertus qui lui manquent : l'humilité et la capacité à lire ce qui est écrit et non ce qu'elle projette. Elle n'est pas par hasard l'auteur d'un livre intitulé La Part obscure de nous-mêmes, sous-titré Une histoire des pervers... Elle sait de quoi et de qui elle parle et illustre ce faisant, à son corps défendant, la thèse qui anime mon livre sur Freud, thèse nietzschéenne au demeurant : toute philosophie constitue l'autobiographie de son auteur, sa confession...
J'aurais mis cinq mois à lire l'oeuvre complète de Freud : la préface signale (page 16) que j'ai commencé ma lecture en 1973... Mme Roudinesco affirme que mon livre est "truffé d'erreurs" sans dire lesquelles. Qu'il est "traversé des rumeurs", toujours sans préciser. Qu'il est "sans sources bibliographiques" ! Or, si Mme Roudinesco avait eu le livre entre les mains et ne s'était pas contentée de ses fantasmes, elle aurait constaté qu'il existe une bibliographie commentée de vingt pages en interligne "un", soit, j'ai vérifié sur mon fichier, 56 521 signes... Pour une bibliographie inexistante, on a fait mieux !
Et puis, signature d'un texte qui pourrait être anonyme, on la reconnaîtrait tout de même, la présence du mot "révisionniste", sésame à l'aide duquel on criminalise toute pensée critique qui préfère l'histoire à la légende que Mme Roudinesco entretient avec le soin d'un éleveur de mygales. Voici donc le gros mot lâché, il sert à jeter l'opprobre sur toute pensée critique à l'endroit du freudisme, les auteurs du Livre noir de la psychanalyse s'en souviennent, meurtris d'avoir été traités d'antisémites et de révisionnistes par la presque totalité de la presse emboîtant alors le pas comme un seul homme à la dame spécialiste de la perversion. Comme j'avais prévu l'attaque, j'avais écrit que les thuriféraires de la secte affirmeraient ceci : "Toute critique de la psychanalyse repose sur une critique de Freud qui était juif, elle est donc toujours suspecte d'antisémitisme" (page 461), un argument inventé par Freud lui-même en son temps. Je ne m'étonne donc pas de le retrouver comme fond de sauce à son vieux ragoût...
J'aurais aimé, au lieu de ce long cri de haine, un article qui m'explique : pourquoi Freud rédige une dédicace élogieuse à Mussolini en 1933 ; pourquoi il s'est rangé du côté du chancelier Dollfuss auquel on doit l'austro-fascisme responsable des répressions sanglantes à Vienne en 1934 - 1 500 à 2 000 morts sous ses fenêtres ; pourquoi, avec le psychanalyste Max Eitingon, Freud travaille dès 1933 avec les nazis pour que, sous couvert de l'Institut Göring, la psychanalyse puisse continuer à exister sous le IIIe Reich ; pourquoi Freud envisage de promouvoir le psychanalyste non juif Felix Boehm à la tête de l'institution pour "favoriser une politique de collaboration avec le nouveau régime", écrit Elisabeth Roudinesco dans Retour sur la question juive (page 136) quand il lui arrive par hasard d'être honnête ; pourquoi il existe nombre de textes contre le bolchevisme chez Freud et aucun contre le fascisme ou le national-socialisme ; pourquoi, octogénaire, l'Homme aux loups lui-même explique en 1974 que, plus d'un demi-siècle après avoir été prétendument guéri par Freud en 1918, il est toujours souffrant et en analyse ; pourquoi Freud refusait de prendre les pauvres sur son divan ; pourquoi l'"attention flottante" est un concept mis en place par ses soins qui justifie que l'analyste puisse dormir pendant les séances sans que l'analyse s'en trouve affectée ; pourquoi il prenait l'équivalent de 450 euros la séance en liquide et préconisait une séance par jour.
Ces deux dernières remarques m'autorisent à penser qu'Elisabeth Roudinesco a raison de conclure son texte ainsi : "On est loin ici d'un simple débat opposant les partisans et les adeptes de la psychanalyse, et l'on est en droit de se demander si les motivations marchandes ne sont pas désormais d'un tel poids éditorial qu'elles finissent par abolir tout jugement critique. La question mérite d'être posée."
Avec ce livre, des amis m'avaient prédit la haine au prétexte que je m'attaquais au portefeuille : je mesure aujourd'hui combien ils avaient raison...
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