Phonic BKX8800

Voilà, le titre résume plutôt bien la situation !

Description générale :

C'est une mixette compacte 8 voies de Phonic, très proche de ses "cousines", les Boss BX800 et Boss BX8. Phonic est une marque qui présente régulièrement des produits très fortement ressemblants à ceux de la concurrence sans qu'on ne puisse pourtant l'accuser ouvertement de copie, et ici aussi, il n'a pas dérogé à cette règle. Visuellement, on pourrait effectivement la confondre avec les Boss. Elle a les caractéristiques globales de la BX8 avec un design presque identique à la BX800 : panneaux à facettes inclinées, boutons colorés assez gros et bargraph à Leds. Il y a donc vraiment un air de famille assez flagrant entre ces modèles...

Elle n'a pas le format habituel d'un rack, mais possède des "oreilles" en plastique, très facilement démontables par deux vis chacune, qui permettent de l'installer en mode semi-encastré sur le panneau inclinable d'un rack, par exemple (moyennant le rajout d'un petit cadre perso taillé sur mesure), d'autant que l'alimentation secteur et toute la connectique audio & MIDI sont en face arrière, sauf la prise casque accessible sur le panel.
Ce n'est certes plus la tendance actuelle sur les tables de mix mais ça reste très fonctionnel, tout ça !

Dimensions (en cm) :
- Largeur 36cm avec les oreilles latérales, 31cm sans.
- Longueur 29cm (sans aucun jack ni DIN connecté).
- Hauteur max 11.5cm, en comptant la hauteur des boutons de gain.

Chacune des 8 voies comporte les classiques réglages suivants, de haut en bas :
- gain (de "line" à "mic") avec led de clipping
- équalisation 2 voies (Treble / Bass)
- Départ d'effet 1
- Départ d'effet 2
- panoramique
- fader de voie (modèle court : 40mm, mais suffisant)
Sur la partie droite, on a les deux potards de retour d'effets, une prise casque avec son réglage de niveau, et bien sûr les deux faders de volume général Gauche/Droit, ainsi qu'un double vu-mètre vertical de type bargraph à Leds, ce qui la distingue de la BX800 où il est disposé horizontalement.

Tout comme la BX800 et contrairement à la BX8, l'alim est interne, avec un fil non débrochable à l'arrière droit et un switch On/Off situé juste au dessus. Le témoin d'alimentation est assez étrangement pris sur le dernier segment LED rouge en haut du bargraph de gauche. Mais la sérigraphie permet de l'identifier pour ne pas confondre avec un dysfonctionnement du bargraph.

A l'arrière, on trouve toute la connectique des entrées/sorties en jack 1/4" asymétrique, y compris les deux entrées pour les retours d'effets qui pourront éventuellement servir d'entrées ligne supplémentaires, en cas de besoin.
En revanche, pour ceux qui auraient voulu y trouver des XLR en symétrique, un sélecteur de sensibilité d'entrée et une alim phantom pour des micros, c'est raté !
Mais on se rend très vite compte à l'usage qu'elle n'a pas été conçue pour des micros.
Étrangement, trois prises MIDI (DIN 5 broches) sont également présentes en face arrière.
...Mais tout ça, je le détaillerai plus tard.

Utilisation personnelle :

Suite au changements d'ambitions et de style de mon groupe, à une certaine époque (), j'avais remplacé mon ancien "gros" set de quatre claviers par une config MIDI beaucoup plus compacte et légère que la précédente.
Mon nouveau set se composait donc d'un Akai AX73, synthé poly analo MIDI avec un clavier de 6 octaves splittable, de deux expandeurs multitimbraux Roland U-110 et Roland U-220, et d'un Zoom Studio 1202 pour mes effets persos sur les claviers.
Il m'a donc fallu regrouper ces trois sources stéréo et ce rack d'effet à deux canaux sur une petite table de pré-mix suffisamment complète avant de renvoyer ses masters en stéréo sur deux tranches de la sono générale du groupe, déjà bien remplie.
C'est donc cette petite Phonic BKX8800 qui a fièrement assuré la fonction...

Je précise que j'ai également pris l'habitude de toujours laisser l'équalisation à plat sur chaque voie surtout en mode multitimbral où les timbres peuvent être très variés et changeants : selon mon opinion perso, c'est exclusivement aux instruments de produire le son qu'on recherche, et non pas à la table de mix. Sinon c'est qu'on n'a pas choisi les bons synthés ou qu'on a loupé la programmation de leurs patchs...

Ses qualités :

Maintenant que mon cahier des charges et ma config ont été définis, mon opinion favorable se justifie sans aucun problème.
En répète, voire pour un petit live à l'occasion (fête de la musique ou soirée entre copains), j'avais donc une config légère et sans prétention, mais bien adaptée à mon usage et très fonctionnelle selon mes propres critères. Avec un nombre d'entrées largement suffisant, deux auxiliaires pour les effets et une sortie casque pour mon monitoring perso, le contrat était rempli pour ses caractéristiques techniques.
Au niveau du son, mes instruments sonnaient bien comme je le souhaitais, avec une bonne musicalité et une coloration globale plutôt agréable, même si elle n'est absolument pas neutre. Je n'ai donc jamais été déçu sur ce point non plus.
Pour les réglages de gain, avec des signaux d'entrée suffisamment puissants les voyants de clipping par voie se sont montrés vraiment utiles.
Niveau fiabilité, je ne l'ai jamais malmenée, et en retour elle s'est toujours comportée sans aucun défaut de fonctionnement : on branche et ça marche comme prévu. Du coup, on n'hésite pas à l'utiliser pour un live sans craindre une galère...
Même les potards et faders ont plutôt bien résisté aux outrages du temps. Achetée d'occasion et modérément entretenue, je n'ai jamais eu vraiment besoin non plus de l'inonder de KF-contact ou de remplacer un potard défaillant.

Ses défauts :

En fait, bien qu'elle soit sortie dans les années 80/90, une grande partie de sa technologie semble dater des décennies précédentes, puisque les étages préamplis d'entrée/correcteurs de tonalité de chaque voie sont conçus autour d'un montage à transistors franchement "rustique", qui place hélas ses performances audio très très loin de la HiFi. A l'usage, la façon la plus évidente d'en obtenir les meilleurs résultats, c'est donc de les solliciter le moins possible, avec un gain réglé au minimum et une équalisation à plat.
Pourtant, les cousines de chez Boss avec leurs préamplis à AOPs 4558 ne font pas mieux, et c'est un comportement très caractéristique qu'elles ont toutes les trois en commun : le souffle de plus en plus important qui apparaît dès qu'on pousse un peu trop sur le gain et/ou les équalos, ainsi que la saturation qui devient de plus en plus audible lorsque le voyant de clipping commence à clignoter!
Pour une utilisation avec des micros, c'est donc un énorme problème, et la seule solution semble être de passer par un préampli en amont afin d'obtenir un niveau ligne en entrée de tranche. Il m'est arrivé d'utiliser un processeur vocal Korg Ih sur une de ses voies, et ça fonctionnait pas mal avec un assez bon rendu, surtout grâce au tuning MIDI et aux effets du Zoom (...parce que moi comme chanteur, hein ? ).

Le souffle sur les signaux faibles et la distorsion sur les signaux forts, c'est le côté "badass" de la bestiole, et on comprend vite quelles sont les limites à ne pas dépasser pour pouvoir l'utiliser comme une table de mix standard sans que son caractère résolument typé ne vienne gâcher le résultat.
En revanche, la bonne surprise, c'est que la musicalité de cette BKX8800 reste globalement très agréable, justement quand on ne la pousse pas trop loin vers les extrêmes. On pourra même être tenté d'aller approcher en finesse les limites de cette saturation pour donner un supplément de coloration plus "roots" et "salir le son" de certaines émulations (B3 ou Rhodes, par exemple) afin d'améliorer leur réalisme, voire pousser encore la disto et les métamorphoser en monstres rugissants...

Parce que, bizarrement et au gré des modes, certains défauts qui pouvaient sembler autrefois rédhibitoires deviennent parfois plus tard des qualités très recherchées !

Ses particularités :

Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'elle est bien construite et relativement robuste à l'usage, malgré un boîtier majoritairement en plastique. Tout y a été conçu pour une maintenance facile : les techniciens lui disent merci ! Le couvercle de dessous se démonte facilement avec une douzaine de vis parker et laisse généreusement l'accès à un intérieur bien organisé et très proprement câblé, avec des connecteurs sur les bus pour chaque voie, au lieu des habituels bus-bars si pénibles à dessouder. De quoi donner des envies à un électronicien amateur de venir y mettre son nez pour lui bricoler des fonctionnalités supplémentaires : rajouter une prise d'insert ou un switch de MUTE, par exemple...

Bon, parlons un peu de ces surprenantes prises MIDI à l'arrière, maintenant !
Du MIDI dans une mixette 100% analo sans le moindre processeur à l'horizon, c'est très inhabituel, pour ne pas dire incompréhensible... Mais tout dépend de ce qu'on fait avec les signaux MIDI ! Ici, c'est tout simplement un double MIDI Thru...
Ce qui pourrait ne sembler qu'un gadget sur cette mixette est pourtant LA solution ultime sur un set de claviers pour éviter les problèmes de latence MIDI (entre autres) quand on chaîne plusieurs expandeurs derrière un clavier-maître. Et c'est encore plus indispensable quand ce sont des signaux d'horloge MIDI qui doivent transiter (séquenceurs, arpégiateurs, BàRs, groovebox, etc)... En prime, une LED rouge vient efficacement monitorer le trafic MIDI sur le bargraph de la voie de droite, juste en face du témoin d'alimentation.
Ce simple petit module intégré à la table de mix est donc l'arme absolue pour éviter les effets de latence et contrôler ses connexions MIDI d'un coup d'oeil avant un live. Du coup, ça remplace à la fois un un boîtier MIDI Solutions Thru et un testeur de câbles du genre Behringer CT100. Bien vu, surtout à ce prix-là !


Conclusion :

Malgré son prix modeste et son fameux côté "badass" à la façon de ses cousines de chez Boss, cette mixette m'a donc rendu de très bons services en répète comme en live pour mes synthés. Bien plus qu'une autre finalement, grâce à son astucieux doubleur MIDI-Thru avec monitoring de trafic, qui tombait à pic à l'époque pour piloter mes deux expandeurs, et à ses deux départs/retours d'effets qui m'ont permis d'exploiter au mieux les deux moteurs d'effets de mon Zoom Studio 1202. C'était d'ailleurs ce qui avait motivé mon choix du moment...

Pour mixer des instruments au niveau ligne et sans forcer sur les correcteurs de tonalité, elle fait très bien le job. Bien loin d'être totalement polyvalente et encore moins transparente, elle viendra donc apporter à un set de claviers MIDI son caractère sonore très particulier avec une agréable coloration fortement typée "vintage" (merci les transistors des préamps ! ). De quoi réchauffer à la vraie "sauce analo" certains synthés VA dont les DSP manqueraient tristement de personnalité...

D'où ma bonne note générale qui récompense aussi sa fiabilité. ...Avec un peu moins de souffle sur les gains et les équalos, elle aurait même pu décrocher une cinquième étoile !

Au niveau du rapport qualité/prix, ça dépend évidemment du tarif de vente !
La valeur marchande en occase d'une petite mixette analo de cette gamme et de cette époque, que ce soit du Phonic ou du Boss, ça reste plutôt modeste, même avec deux départs/retours d'effets. Rien d'extraordinaire en soi...
Mais si on considère le double MIDI-Thru intégré à cette table, avec monitoring du trafic MIDI sur le panel, c'est un bonus très intéressant pour un set MIDI (synthés/expandeurs/BàRs/groovebox/sampleurs/etc), surtout pour du live. Soit environ 70€ de matériel équivalent (boîtier de Thru et contrôleur de câbles MIDI) économisés...
Quant au caractère sonore particulier et sa coloration très typée "analo vintage", voire son côté "badass" et sa saturation sur le clipping, c'est aujourd'hui l'argument qui pourrait à lui seul justifier un achat-coup-de-coeur, exactement comme on le ferait pour une pédale d'effet...
Voilà, à vous maintenant d'en tirer vos propres conclusions si ça peut répondre ou non à vos critères de recherche... Moi, je vous ai simplement fait partager mes expériences vécues avec cette bestiole, et elles sont plutôt satisfaisantes dans l'ensemble !

Miaousicalement !


PS: La mienne m'est revenue après un "prêt de très longue durée" avec deux voies endommagées au niveau audio. A première vue, il va sans doute falloir changer deux paires de ces fameux transistors sur les préamplis d'entrée des voies défectueuses. Comme quoi, je ne sais pas comment elle a pu être utilisée pour que ces pannes se produisent, mais tout ça pour dire qu'elle n'est pas totalement indestructible non plus quand on l'utilise comme un gros bourrin...