A la veille de la fête du Travail, on pourrait parler de ces casseurs de manif qui ont remplacé les briseurs de grève d’autrefois, des Panama Papers bientôt accessibles au public ou du salaire discuté du pauvre Carlos Ghosn qui n’a pas le temps d’aller manifester, lui, et qui n’hésite pas, pour boucler ses fins de mois, à cumuler deux emplois, voire plus, sans compter ses heures sup' et sans bénéficier de la moindre assurance chômage ou maladie…
Ou alors on pourrait parler de la musique et de la transformation de l’art en produit sous l’impulsion d’une industrie qui n’a jamais au d’autres buts que celui-là. C’est ainsi qu’une étude menée par l’institut britannique ICM pour le compte de la BBC a révélé qu’un vinyle sur deux vendus en mars 2016 n’avait jamais été écouté, parce qu’il avait été acheté pour des raisons purement décoratives.
Sans même parler du fait que ce sondage devrait calmer la morgue de plus d’un audiophile fêtant le retour du vinyle sur l’air de « je vous l’avais bien dit », on ne pourra s’empêcher de souligner que le disque qui n’était autrefois qu’un support est en passe de devenir plus important que l’oeuvre qu’il véhicule, le contenant primant bientôt sur le contenu. Pour une personne sur deux, il semble en effet plus important de poser un millésime sur son étagère que de le boire, signe que c’est le veau d’or, en définitive, qui est en train de gagner. Il fallait peut-être y penser avant de s’enthousiasmer chaque fois qu’un publicitaire dessinait une banane sur une pochette de disque en prenant des airs de peintre…
De ce point de vue, la tant décriée dématérialisation de la musique aurait presque une gueule d’espoir face au retour des bonnes vieilles pochettes tueuses d’arbres. Une chose est sûre en tout cas : lorsque vous aurez fini votre album grâce aux articles sur le mixage de notre Nantho bien aimé (car c’est la semaine du mixage sur Audiofanzine avec non pas un, deux, trois, quatre ou cinq, mais six nouveaux articles didactiques sur le sujet), ne passez pas trop de temps sur le visuel de votre « pochette » sous peine de voir votre musique réduite à l’état d’image, de bout de carton silencieux destiné à décorer une étagère ou une porte de chiottes.