Alors que la symbolique 50e édition des compos collectives d’Audiofanzine vient de s’achever, AF revient sur ces héros du partage qui, depuis 15 ans, croisent le fer créateur par amour pour la musique et la rencontre.
Putain quinze ans !
Quinze ans que se trament des compotes dans le ventre des forums d’Audiofanzine… Les compotes ? C’est le petit nom qu’ont donné les plus musiciens d’entre nos membres aux Compos Collectives, un exercice qui consiste à faire un morceau en tandem pour le pur plaisir de mettre des notes sur une rencontre. Le principe est simple : chaque mois à peu près, il s’agit de s’inscrire dans le forum dédié pour participer à la prochaine édition. Un tirage au sort désigne ensuite des duettistes qui auront un mois pour produire une compo, quels que soient sa forme, sa durée, son style, son thème. Chanson, instrumental, symphonique, électronique, métal, funk ou java : tout est donc accepté, l’important étant de s’entendre suffisamment avec l’inconnu qui vous sert de collaborateur pour produire une compo.
L’origine de tout cela n’est pas certaine, mais le concept serait parti de discussions entre lonewolf, pcstudio, Olvib, Piaz, Quetzal et Takis en 2003, sous le nom « On s’la joue collectives ». Après une seconde édition décevante, l’idée est toutefois reprise par diabolo qui la renomme en « Compos collectives ». Quinze ans et cinquante éditions plus tard, les 210 participants ont accouchés de 472 compos, et sur des motivations semblables naissent les Compos inspirées, où il s’agit cette fois de faire la meilleure compos d’après une photo. Au-delà des chiffres, c’est toutefois dans les mots des participants eux-mêmes qu’il y a le plus à apprendre, et surtout sur leurs motivations.
Des mots et des notes
Il s’agit bien évidemment d’abord de faire de la musique avec d’autres, ce qui n’est pas forcément évident pour tout le monde. daRinze se souvient : « Quand j’étais petit et que j’ai commencé à jouer de la musique, Internet n’existait pas, les téléphones portables n’existaient pas, les ordis tournaient sous Windows 3.1 pour les meilleurs, et pour jouer fallait trouver des potes et un garage. Sans voisins. Pouvoir jouer au pied levé avec n’importe quel musicien sur la planète était un pur fantasme. Alors certes, en 2019 on n’y est pas encore, mais presque… ». deozza confesse quant à lui : « J’ai jamais pu jouer dans un groupe et je ne sais pas si je pourrais un jour. Les compotes c’est la bonne occasion pour parler avec des notes à d’autres passionnés ». Et Fanou83 de souligner que les Compos Collectives lui ont « également permis, sur une phase de [sa] vie ou [il n’avait] plus de groupe IRL, de pouvoir faire de la musique avec… un humain. »
À entendre les compoteurs, il n’est jamais bien évident de savoir ce qui est le plus important dans ces joutes créatives entre le rapport humain et la musique qui en découle, chaque aspect se nourrissant de l’autre. Une chose est sûre en tout cas : en écoutant la qualité des morceaux obtenus comme les propos des uns et des autres, l’exercice semble être un excellent vecteur de progrès, la présence d’un collaborateur poussant chacun à se montrer plus exigeant avec soi-même, à s’obliger à finir les choses. Diabolo parle d’un « coup de pied au fesses nécessaire pour faire autre chose que des brouillons d’un soir » tandis que Fanou83 avoue : « ça m’oblige parfois à me sortir les doigts du cul. Je suis, musicalement, un procrastinateur. Et j’ai un processus de création très long. Le fait d’avoir un binôme qui attend et me relance m’oblige à me secouer et à travailler. »
Tous désignent un autre enjeu majeur de l’exercice : « sortir de sa zone de confort, aller explorer des styles sur lesquels [on ne va] pas d’habitude, aller au bout des choses, là où on a tendance, seul, à survoler ou bâcler certaines parties… ». Il s’agit, comme le souligne encore philrud, « de « sortir le nez de son nombril » et d’avoir une vision plus large des choses, des personnes et de la musique. » tandis que Jaeckel surenchérit : « Ça ne sort pas de la zone de confort, non, ça m’en a éjecté avec pertes et fracas ! ». Ce dernier explique même que se prêter au jeu l’a forcé à monter et optimiser [son] Home studio. » et que « la découverte d’autres façons de faire, d’autres états d’esprit[, ] ça change l’angle d’approche de la musique qu’on peut faire. » On trouve visiblement chez beaucoup un vrai bonheur de se perdre dans les territoires musicaux de l’autre et de s’y laisser porter, comme le décrit Amice : « je suis toujours agréablement surpris lorsque je reçois les pistes de mon binôme, car il y a souvent des choses qui renverse le morceau dans sa couleur ou ambiance, des choses auxquelles je ne me serais pas attendu et surtout que je n’aurais jamais pondues seul. »
Bien sûr, tout cela ne se fait pas sans difficulté parfois et si certaines compos naissent dans la simplicité en une petite semaine, d’autres ont une gestation plus difficile et douloureuse. Outre les problèmes de démissionnaires (8.5 parle des « abandons, des binômes qui disparaissent dans la nature, ou ne font absolument rien malgré les multiples relances. »), il faut encore faire avec les multiples doutes propres à la création avec un inconnu : « Se sentir perdu quand on reçoit une idée de son binôme dont on ne sait pas quoi faire, les crises de nerfs avant le rendu, le binôme qui critique une idée à soi à laquelle on veut s’accrocher… ». Mais comme poursuit Cortoni, « une fois la compo partagée au milieu de toutes les autres, tout ça est oublié. Au début ça [le] faisait paniquer, alors qu’en fait ce sont des bons souvenirs, des émotions fortes. », d’autant que les plus zélés des participants n’hésitent pas à voler au secours des binômes en perdition pour donner un coup de main inespéré : c’est le cas de l’impressionnant Delucq qui s’est impliqué dans 53 morceaux en 41 éditions. En outre, ce sentiment de risque n’est d’ailleurs pas étranger au plaisir qu’y prennent tous les compoteurs, ainsi que le résume parfaitement daRinze : « les Compos Collectives c’est tout le plaisir d’une grosse pression, d’un mec avec qui on va tomber, mais on sait pas qui, d’un style qu’il va falloir appréhender, mais on sait pas quoi, et d’un morceau qu’il va falloir sortir, mais on sait pas comment. ».
Potes de compotes
Qu’en reste-t-il à la fin ? Des compos autant que de l’humain, ce que BB Mitch résume ainsi : « Les compotes, ça m’a révélée. Ça m’a fait rencontrer des musiciens fabuleux, de notes ou de coeur, passer des heures avancées dans la nuit à vibrer de partout » avant de souligner « quand on a créé un truc ensemble, même le plus petit truc de rien du tout, ça crée souvent des liens, une complicité, une espèce d’amitié qui se développe. »
C’est dire la qualité qu’on trouve dans ce collectif qui a fait son petit nid, chanceux que nous sommes, sur Audiofanzine, une forme de maison bleue adossée à la colline virtuelle du site et dont la porte est toujours ouverte. N’hésitez pas à la pousser, sachant que si ces quelques mots ne vous ont pas convaincus, les compos qui en résultent devraient en séduire plus d’un. Bien sûr tout n’est pas de qualité égale, mais c’est le petit prix à payer d’une ouverture à tous les profils, musiciens accomplis comme débutants, sachant qu’on a tous à apprendre de quelqu’un, quel qu’il soit.
Gloire soit en tout cas rendue à tous ceux qui se sont prêtés au jeu au fil de ces quinze années :
_d j a n g o, -marmotte-, [IN.machina), **naPOLEoN**, 8.5 / Mr Pâté de Campagne, a.k.a, Akadok, Allie, ALM-Studio, Amplimi, Arnice, Atomheart, Axobass, Ay, azemazer, Azugreg, Babaorum, bande-son, Bass Vador, bassmanklm, basstien, benjy B, BB Mitch, Black_Wizards, Blackbollocks, bruno.bower.1, C.Lawde, Captain Niglo, Cbien, Ceddie1974, chaos_is_me, Chiver, Chrisdu77, cleansed, Cortmgm, Cortoni, craven A, Cyclyk, Cystite Heaven, daRinze, Darkouz, Davidsouslinux, DbassMasta, dda, DDBT, Decrep_fanfan, delchambre, Delucq, DensDensDens, deozza, diabolo, DiGiorgio DG, Dino_10, Disciple, Distoman360, Djardin, Doran McKinlay, Dorian Song, El Tom-John, Eloipo, Emma.12, fabsqueak, Fanou83, Ferdy, Fink Ployd, FL0, Fockwulf, Fracasseland, Franckten, Fraunhofer, G13N Noisemaker, gaaab, GaëtanMM, Gégène94, gloumoutrct13, Gojats, Goum le chat, Gratt’oche, GuguDouglas, Guirito, Guitarboy, HemSi, Indivizik, J-Luc, j-master, Jaeckel, jah_mar, janov pelorat, Jay F., Jeangusyoung, Jeezeus, Jeg Folay, Jeneora, jensouniev, Jetlag, Jeux, Jeygiro, jmabate, Jo², johnfaustus, JohnMichel, JohnnyG, JxB, Kapam, Kevin luche, Kraftmusik, Krafty cat, kristoc’h, la.boulanderie, LaGuibole, LaSyl, le-node, lenny, Léo et les bas, loloboombass, Lotche, LouFerrinio, Lucarne, Ludo38, Ludwigh, Lying Dalai, Lysbleu, mal cyst, manu147, Martinaa, Master_Chang, Max Onhoff, Mellotron, Melski44, Midiaudio, Mikro93, miles1981, Mimache, Miss Yakaba, Miz Du, Moa, Modraw, Mreumreum, MrKermit, mrnormal, multiform, Mwall, Nambule, Niconu, nobazz, nomenklatura, Northfake, Nurge, Obe, Oboreal, Odehel, OliVBee, Patatac, Perigo, Philrud, Piergynt, PLCV83, poykeh, Poritur, prolifere19, Props, Prunigus, Psyx, Purplebash, Push-Pull, R-Oméga, Reset, Riatto_Music, Rocofolie, Rouxx, Salzani, Saponace, sergioreis, Sir kouni, Spike-db, Sqoqo, sstan, Stef59, steppenmoufles, synfix, Tasek, Teurastaja, The Digital Worker, Thomas ln77, Theroms, Transblack, TomA SL, Toons76, Traumax, Tripy, ttcc, unebonnepomme, ur-quell, Ur3000, Urban Koala, vertigopier, Vickibaum, Voynish, vyni, W-Addict, Will Zégal, Will_Bru, x_X_x_av, Xavier Belmoufles, Yann de Pins, YDMachine, Yoshed, ZardoZ, zekragash, zeuhl50_
Notez pour finir qu’une bonne partie des archives des Compos Collectives vous attendent dans l’Espace Média ou sur la page Compos dédiée, tandis que vous êtes vivement convié à vous joindre aux compoteurs dans le forum qui leur est dédié.