Clavier maître USB disposant d'une interface audio et d'une joyeuse bande de contrôleurs, le NeON sera-t'il en mesure d'illuminer les nuits noires de nos égarements créatifs ? C'est ce que nous allons tenter de découvrir ici…
Bien connue pour ses cartes audio innovantes et de qualité (Tout MAOïste vétéran se souvient avec nostalgie de la petite révolution qu’avait provoqué le Wamirack (Voir ce test), en ces temps reculés où faire de la musique sur PC requérait au moins un BTS de compta…), la marque ESI, qui s’est encore distinguée récemment avec l’interface Firewire QuataFire ou l’excellente carte son PCI Julia (voir ce test), propose désormais des monitors et des claviers de contrôle USB.
C’est à cette dernière catégorie qu’appartient NeON, un combo USB autour de 250 euros, qui dispose de 25 touches blanches et noires pour la partie musique, de 8 potars, 8 curseurs rotatifs, 3 molettes de modulation, et d’une vingtaine de boutons pour la partie contrôle, tandis que la partie audio consiste en une carte son stéréo in et out pour la partie audio.
Setup
Le NeON est livré avec un CD contenant les drivers ASIO, MME et WDM. Il est reconnu par Windows 2000 ou XP et par Mac OS X. L’installation du bouzin est limpide et les drivers s’avèrent, même après un certain nombre d’heures d’utilisation, parfaitement stables.Notons que l’alimentation autonome par la connexion USB (le câble est livré) est tout à fait suffisante (aucune coupure pendant les tests) et permet de se dispenser d’une alimentation d’appoint (optionnelle) pour laquelle une prise DCin a été prévue. Un bon point pour les amateurs de prise de son en plein air, ou tout au moins loin des réseaux EDF.
En même temps que le driver, s’installe un petit utilitaire (seulement pour Windows) qui permet de prendre la main sur les paramètres habituels des interfaces audio : choix des entrées, fader (mais pas de Vumètre pour contrôler les niveaux !) et mute pour chaque entrée et sortie, pad de 20db supplémentaires en entrée, et commutateur de « Direct Monitoring » pour s’écouter sans latence.
Celle-ci est assez faible et se situe pour 44 kHz (on peut aussi enregistrer en 48 kHz) entre 17 ms pour un buffer de 512 échantillons et 11 ms pour 256. On peut, en théorie, pousser jusqu’à 2 ms avec 128 échantillons, mais comme on vient de le préciser, c’est en théorie ! Quoi qu’il en soit, on peut bosser tranquille, aussi bien en enregistrement qu’en écoute multipiste.
Audio You Do ?
I do. L’interface audio propose en effet une connectique entièrement dévouée au format jack 6.35, soit deux entrées ligne (droite et gauche), une entrée instrument, une entrée micro, deux sorties lignes et une prise casque. Attention, on ne peut enregistrer que 2 pistes en même temps et il faut choisir dans le logiciel de contrôle entre les entrées micro/instrument ou les entrées ligne.On note ensuite 2 prises MIDI (IN et OUT) qui permettent d’avoir 16 canaux en plus (et aussi de se servir du NeON comme clavier maître pour piloter n’importe quel instrument hardware, en utilisant alors à une alimentation externe), une prise pour une pédale de sustain (dont on peut régler la polarité), et un potar de volume général. Du simple et efficace !
Seule ombre au tableau : on ne dispose pas de ports numériques ! Là franchement, c’est un peu dommage, car les entrées et les sorties S/PDIF sont vraiment pratiques, notamment sur du matériel d’entrée de gamme où elles permettent de faire un bypass sur les convertisseurs, si on a éventuellement sous la main une meilleure machine, comme un préampli, par exemple.
C’est ici une économie qui, au prix actuel des composants, n’est vraiment pas justifiée. Mais ne restons pas sur une mauvaise impression et jetons quelques doigts sur ce beau clavier qui nous tend ses 25 touches pleines d’amour…
Un clavier qui tient la route
Difficile de donner un avis objectif sur le toucher d’un clavier, tant en ce domaine le goût de chacun est différent.Cependant, si vous voulez tout de même l’avis de votre serviteur qui a eu l’infini bonheur de coucher ses grosses empreintes digitales sur… allez, quatre bonnes centaines de claviers différents, celui du Neon est certainement l’un de ses meilleurs atouts.
Equipé d’une mécanique à ressort solide, il offre une réponse très ferme, presque plus même que sur certains claviers lestés, mais très souple en même temps, avec une course verticale des touches assez ample, qui permet vraiment de jouer avec réalisme des types d’instruments très différents, dès que l’on s’est un peu familiarisé avec son apparente rudesse.
De plus, 2 fonctions permettent de personnaliser la réponse à la force de jeu en fonction de chaque cas de figure : le choix d’abord parmi 4 courbes de vélocité (là, franchement, je n’ai pas bien vu de grosse différence !) et d’autre part un offset permettant d’ajouter ou d’enlever des points de vélocité (de – 64 à + 64) aux valeurs détectées lors du jeu.
Ce second paramètre, beaucoup plus efficace que son collègue, assure une bonne adaptation du toucher aux différents types d’instruments à simuler. Regrettons toutefois que ce clavier ne soit pas sensible à l’aftertouch, ce qui l’aurait rendu définitivement parfait.
Enfin, les 2 switchs d’octave plus et moins, indispensables pour un 25 notes, viennent compléter la panoplie de paramètres consacrés à adapter le clavier du NeON à tous vos besoins.
Potars, molettes…
La partie consacrée à la surface de contrôle comprend tout d’abord 8 potars crantés en blanc, de bonne taille, solides, et agréables à manipuler. Juste au dessous, on trouve 8 curseurs rotatifs, qui rappellent étrangement ceux que l’on trouve sur les souris informatiques, mais en un peu plus costaud, cependant.Chargé de faire office de faders, grâce à leur ergonomie verticale, ils autorisent une édition très précise, mais un peu lente pour les paramètres nécessitant de grandes amplitudes de modulation. Ces deux rangées de contrôleurs peuvent être virtuellement doublée grâce à un switch 1–8/9–16, qui permet de prendre la main presque instantanément sur 16 pistes ou 16 contrôles différents.
Viennent ensuite le couple infernal des molettes pitch bend/modulation. Original : elle ne sont pas disposées côte à côte comme sur la plupart des machines, mais au dessus l’une de l’autre. Bon, sans être ravis de prime abord par ce significatif changement dans nos habitudes, il faut reconnaître que l’on s’y fait assez bien et vite.
Enfin, nous découvrons avec bonheur une troisième roue à notre carrosse, horizontale cette fois-ci, qui peut quant à elle être assignée à n’importe quel contrôleur MIDI. Un atout supplémentaire dans ce monde de paramètres.
Et boutons !
Si les potars et les curseurs sont particulièrement ergonomiques, les boutons en revanche ne sont pas très vigoureux, ni même très fiables, et l’on a rapidement constaté en les manipulant quelques faux contacts, voire même quelques blocages en position On ! Rien de très grave, certes, mais il est souvent arrivé qu’il faille s’y reprendre à 2 fois pour exécuter une commande. Si cela ne pénalise pas beaucoup le travail d’édition, cela devient parfois énervant lorsque l’on utilise le mode pad, par ailleurs une excellente fonction du NeON.En effet, parmi les 16 boutons du panneau de contrôle de l’édition, les dix premiers peuvent s’utiliser pour déclencher des notes MIDI, comme des petits pads, très rudimentaires certes (la vélocité est obligatoirement fixée à 127), mais tout de même bien pratiques, par exemple pour piloter des boucles en temps réel. On peut ici paramétrer le numéro de note MIDI ainsi que le canal (bien vu !) pour chaque bouton.
Vous comprenez maintenant pourquoi on regrette vraiment que ces boutons ne soient pas plus robustes… Bon, on s’y fait tout de même et avec un peu de pratique (à savoir une manipulation sensuelle, et une pression bien verticale, dans l’axe du bouton… OK, j’arrête là !), on arrive à ses fins.
Notons tout de même la présence salvatrice d’un commutateur Panic, envoyant un message All Note Off, qui permet de limiter la casse en cas de blocage intempestif d’une note MIDI. Comme si ESI avait pris conscience de la limite de son hardware !
Outre les différents paramètres que nous avons abordés, on peut également envoyer, grâce un switch, des numéros de Program Change, éventuellement précédés d’un numéro de banque (bank MSB), et paramétrer le canal MIDI sur lequel le clavier émettra.
Enfin, tous les réglages de configuration du NeON peuvent être sauvegardés dans 16 banques mémoire (de 1 à 16), le patch zéro, chargé au démarrage de la machine, ne pouvant être altéré.
Bon Bundle
Notons pour terminer, qu’afin d’allécher les chalands, ESI n’a pas oublié l’indispensable petit bonus que tout bonimenteur se doit d’avoir en réserve sous la table, à savoir dans notre cas un bundle plutôt bien conçu.
En plus de quelques sympathiques plug-ins freeware (Kjaerhus Audio Classic Serie, Delay Lama, Mda Piano, Freeverb, RoomMachine, PSP pianoverb, etc.), on dispose ainsi d’une version ESI du célèbre Tassman d’AAS (qui serait, selon certains, le VSTi le plus « analogique » du marché), et surtout la version 1 du séquenceur audionumérique édité par Mackie, l’excellent Traktion.
Un vrai plus qui vous permettra de découvrir l’un des logiciels les plus intuitifs du marché, tout en restant suffisamment complet.
Conclusion
Certes, le Neon n’est pas un foudre de guerre, loin de là, au niveau de l’ergonomie. En effet, si les boutons, comme nous l’avons vu, ne sont pas d’une précision exceptionnelle, pour utiliser ici un doux euphémisme, la gestion de l’affichage laisse elle aussi beaucoup à désirer. Ainsi, lors de l’appel de certains paramètres, comme l’offset de vélocité, le numéro de note MIDI des pads, ou encore l’assignation du numéro de contrôle MIDI des potars, on est très étonné de constater que le LED affiche désespérément toujours un zéro pointé, empêchant tout contrôle de la valeur actuelle du paramètre ! Un peu pénible, surtout lors de certaines manipulations en série.De plus (ou de moins, si vous préférez), l’incrémentation des valeurs de paramètre se fait uniquement au moyen de deux switchs, l’un pour les valeurs positives, l’autre pour les négatives.
On aurait ici largement apprécié de pouvoir dédier la troisième molette de contrôle si bienvenue par ailleurs, à l’entrée des données numériques dans l’interface, d’autant que nos deux switch n’étant pas sensibles à la pression continue (qui permet de faire défiler les valeurs rapidement, simplement en maintenant le switch enfoncé), il faut les bastonner frénétiquement pour parcourir les 128 échelons de la plupart des contrôles MIDI !
Si l’on ajoute à cela des petites négligences du côté audio, comme l’oubli du Vumètre dans le petit utilitaire de contrôle logiciel de la carte son, la connectique micro en jack 6.5, ou l’absence d’entrée/sortie numérique, on peut certes conclure qu’avec le NeON, ESI est loin du parcours sans fautes auquel il nous a pourtant habitué avec nombre de ses produits…
Cependant, il n’en reste pas moins un clavier très confortable (beaucoup plus que dans nombre de produits concurrents), des molettes (3 !), des potars et des curseurs rotatifs suffisamment massifs et précis, une qualité audio permettant de travailler très correctement, des drivers stables et sans prise de tête, une bonne solidité générale du tout, et un look sympa… Ce qui finalement suffit amplement dans 90% des cas, surtout lorsque l’on est sur les routes et que l’on n’a à gérer que des configurations minimales.
C’est ainsi très certainement dans cet esprit que le NeON a été conçu : offrir pour très peu cher une solution nomade complète, même si pas extrêmement sophistiquée. Il sera donc particulièrement destiné à ceux qui, sans se ruiner, cherchent un matos d’appoint, offrant une base solide, simple mais suffisante, leur permettant de travailler rapidement tout en voyageant léger !
[+] Le toucher du clavier.
[+] Les 3 molettes.
[+] Le prix.
[+] Traktion dans le bundle.
[-] Pas d’entrées numériques.
[-] Certains boutons fragiles.
[-] L’ergonomie de l’édition.