Avant de réellement rentrer dans le vif du sujet, il me semble tout de même essentiel d’aborder une question connexe, qui d’ailleurs ne se limite pas au domaine de la MAO (Musique Assistée par Ordinateur), à savoir la sauvegarde.
À l’heure du tout numérique, la nécessité de sauvegarder régulièrement ses fichiers les plus sensibles est une évidence afin de se prémunir de tout désagrément. Cependant, la plupart des gens se contente d’une banale copie sur un disque dur externe, et encore, lorsqu’ils y pensent… Cette façon de faire est loin d’être suffisante pour se protéger des aléas de la vie, sans parler de la mise en œuvre plus que bancale. Bien entendu, le « 100 % sûr » n’existe pas. Ceci étant, nous allons voir qu’il est relativement simple de mettre en place une stratégie de sauvegarde qui vous permettra de dormir tranquillement sur vos deux oreilles, même si vous êtes chat noir ascendant corbeau.
Merci qui ?
Laissez-moi vous raconter une petite histoire… Jacky est un musicien amateur, également passionné d’informatique. Swinger dans l’âme, il a monté un Big Band avec quelques personnes de sa région qu’il a tout naturellement rencontrées sur le net via un célèbre site spécialisé. Au sein du groupe, ça tourne plutôt pas mal ! Du coup, Jacky — cet éternel touche-à-tout — décide de se lancer dans l’aventure de la production maison et d’immortaliser l’une de leurs performances dans la backroom de son cloaque où il a installé son home studio. La captation se passe très bien, tout le monde a pris son pied et n’a qu’une seule hâte, partager avec le plus grand nombre le fruit de leur jazz erratique.
Seulement voilà, Jacky calme tout de suite les ardeurs de son gang, l’heure n’est pas encore à la bagatelle puisqu’il reste à mélanger toutes ces prises. Une fois de plus, c’est notre Jacky qui s’y colle, un soir d’orage en solitaire, le regard pénétrant rivé à l’écran de son ordinateur et l’oreille aux aguets. Cela fait déjà une belle paire d’heures qu’il tripote son computer et travaille au corps son mix à grand coup d’EQ lorsque tout à coup, c’est le drame ! Jacky a trop tiré sur son engin ! Est-ce l’excès de plugs analogiques qui pompait trop de ressources, la chaleur excessive qui en découlait, l’humidité ambiante due à l’orage ? Qu’importe la raison, la bête vient de lâcher dans ses mains et son disque dur ne l’est plus tant que ça…
Heureusement, Jacky est quelqu’un de prévoyant, il a même une « assurance vit », c’est vous dire ! Grand amateur d’Apple dont il croque la pomme plus souvent qu’à son tour même si ça tire un poil sur sa bourse, son Mac réalise une sauvegarde automatique Time Machine de façon journalière sur un disque connecté au réseau local. Ainsi, il devrait pouvoir restaurer la dernière sauvegarde en date très rapidement, et même si les dernières heures de travail sont perdues, il compte récupérer sans peine l’ensemble des enregistrements. Sauf que… Si son Home Studio est branché sur un onduleur, ce n’est pas le cas pour l’ensemble de son installation informatique. Et bien sûr, l’orage a engendré plusieurs coupures de courant qui ont été fatales à son disque de sauvegarde.
Décidément, Jacky joue de malchance ! Cependant, il reste d’un calme inébranlable, car il a encore quelques cartouches sous le coude. En effet, il possède un Ghost sur DVD de son disque système qui lui permettra de réinstaller sa bécane en un clin d’œil. Quant aux données, il a eu la grande idée d’investir dans un logiciel spécialisé dans ce que l’on nomme la sauvegarde hors site. Chaque soir, ce dernier envoie via le net une copie de ses fichiers chez un ami, en l’occurrence Michel, un autre membre vigoureux du Big Band. Notez au passage que contrairement à Jacky, Michel est plutôt un adepte des PC, mais que cela ne gêne en rien l’échange de données, Mac et PC cohabitent ici en toute quiétude. C’est donc plein d’espoir que Jacky se rend le lendemain matin chez son partenaire qui habite non loin de chez lui afin de récupérer les précieux enregistrements. Mais le sort semble s’acharner sur nos joyeux drilles. Si l’orage n’a provoqué que quelques coupures d’électricité chez Jacky, à deux pas de là il en a été tout autrement. Le pauvre Michel a vu sa maisonnée entièrement inondée, et bien entendu, ses disques durs sont tout trempés… Bye bye la sauvegarde hors site.
Jacky se sent diablement poisseux et commence à broyer du noir. Mais heureusement, Michel est aussi quelqu’un de prévoyant ! Ses données les plus importantes, il les synchronise sur un compte gratuit d’un célèbre service dans le nuage. Du coup, il n’y a qu’à se connecter au compte via un navigateur web et télécharger le magot. Comme vous devez vous en douter, l’histoire ne s’arrête pas là. Une fois le tout récupéré, Jacky lance la session contenant l’ensemble des enregistrements afin de vérifier que tout roule. Mais quelque chose semble suspect, et les trucs suspects, Jacky n’aime pas ça, ça laisse souvent un mauvais goût dans la bouche… Pourtant, il faut bien se rendre à l’évidence, certaines prises restent étrangement introuvables. Comment cela est-il possible alors que le cloud est censé synchroniser automatiquement et en toute transparence la totalité des dossiers lui étant attribués ? La réponse est simple, une fausse manipulation de l’utilisateur. En effet, Michel a par inadvertance supprimé l’un des dossiers sur son ordinateur, et cette erreur monumentale s’est bien évidemment répercutée dans le nuage. Comme il s’agit d’un compte gratuit, il ne bénéficie pas de l’option d’historique étendu et les enregistrements concernés semblent cette fois perdus à jamais…
Une fois n’est pas coutume, veuillez pardonner ma vulgarité, mais là, Jacky a les boules ! Après toutes ses aventures, il n’a littéralement plus de jus et ne se sent pas de rappeler toute sa bande pour remettre le couvert. Pourtant, cette odyssée pour le moins pittoresque connait un dénouement triomphal. Il se trouve que Michel, aussi maladroit soit-il, est vraiment quelqu’un d’extrêmement prudent. Ainsi, il ne se contente pas uniquement du simple service de synchronisation dans le nuage de monsieur Tout-le-Monde, il a également souscrit à un service de stockage de sauvegarde en ligne illimité. Moins souple que les solutions de cloud « classiques », en cas de force majeure comme ici, le jeu en vaut largement la chandelle ! Nos deux amis ont donc finalement pu recouvrir l’intégralité de leurs enregistrements, et se replonger à corps perdu dans le mix pour une débauche sonore qui fait plaisir à entendre.
Croyez-le ou non, mais comme dirait Barney Stinson : « True story ». Seuls les prénoms des protagonistes ont été changés par souci du respect de l’anonymat. Avouez tout de même que cette anecdote rocambolesque a de quoi rentrer dans les annales ! Mais que faut-il retenir de tout cela ?
L’âme orale…
Eh bien tout d’abord, qu’une bonne stratégie de sauvegarde commence par une automatisation du backup chez soi afin de réduire le risque d’oubli inhérent au facteur humain. Pour cela, Time Machine fait largement l’affaire. Si vous êtes sur PC, ne vous en faites pas, il existe une ribambelle de solutions alternatives et une simple recherche sur le net devrait vous permettre de trouver facilement chaussure à votre pied.
Comme nous l’avons vu, ce seul moyen de sauvegarde est loin d’être suffisant. Il est fortement conseillé d’effectuer régulièrement ou mieux, automatiquement, une sauvegarde hors site, chez un ami par exemple. Pour ce faire, j’utilise à titre personnel la version gratuite du logiciel Crashplan. Attention tout de même à bien choisir la personne chez qui vous sauvegardez. Pour ne pas vous retrouver en carafe dans les cas de catastrophes naturelles, mieux vaut sélectionner quelqu’un de suffisamment éloigné de vous géographiquement parlant.
Concernant les solutions dans le nuage, c’est définitivement un plus. Dropbox, OneDrive, la solution française d’OVH, Hubic, ou autre offrent tous des solutions plus ou moins transparentes de synchronisation dans le nuage. Cependant, il ne s’agit pas vraiment de sauvegarde, mais de synchronisation façon « miroir », donc la moindre erreur de votre part sera répercutée dans le cloud et comme les fonctions d’historique de ces services sont souvent limitées, la prudence est de mise.
Bref, en cas de véritable coup dur, votre salut ne viendra qu’au travers d’un service de sauvegarde en ligne payant tel que BackBlaze ou Crashplan par exemple. Il en existe d’autres bien sûr, mais ces deux-là ont une excellente réputation et sont de surcroît parmi les moins onéreux.
Enfin, pensez à faire un « Ghost » sur DVD de votre système lorsqu’il est au top de sa forme au cas où. Et n’hésitez pas à le joindre à vos sauvegardes en ligne.
En appliquant une telle stratégie, vous devriez pouvoir vous sortir de n’importe quelle situation sans trop de perte, comme l’on fait nos deux compères, Jacky et Michel.
Épilogue
Après toutes ces péripéties, vous vous demandez peut-être ce que sont devenus nos deux héros et leur Big Band. Eh bien, sachez qu’ils ont enfin réussi à finir leur mix ! Depuis, ils ont ouvert un petit site internet au travers duquel ils diffusent leurs œuvres afin d’élargir le cercle de leurs ami(e)s. Je vous invite d’ailleurs à les découvrir ici !
Sur ce, rendez-vous au prochain épisode ! Et ne vous inquiétez pas, cette fois-ci nous attaquerons enfin plus sérieusement et concrètement la question du mixage…