Déjà 25 ans que cela dure. Hé oui, on ne dirait pas comme ça, mais le modèle RG de nos Nippons d’Ibanez est apparu il y a déjà un quart de siècle, et a su entre-temps tailler une place de choix au panthéon des guitares vénérées par les shredders et Metalleux de tout crin. Alors, vous vous doutez bien, quand à la rédaction d’Audiofanzine, nous avons reçu un joli carton avec marqué ‘Ibanez RG’ dessus, la première réaction de Los Teignos a été, en regardant de manière insistante mes cheveux longs et ma veste à patches, de me dire : ‘toi le métalleux, tu veux me tester ça et vite fait!’
Et me voici reparti à la maison avec la RG dans son carton. En fait, il y avait un détail important que Los Teignos avait omis de me dire…
on s’fait une toile ?
C’est une fois le couvercle de la boîte enlevé que la vérité toute nue a éclaté. En effet, si la forme d’une stratoïde affinée du corps, le manche et l’accastillage sont dans les canons établis par Ibanez pour les RG, la finition est elle tout sauf habituelle. En fait, gravée à même le corps, une toile d’araignée dont le centre est le bouton de volume s’étend sur tout le corps de la guitare, lequel est aussi recouvert d’une finition noire et granuleuse. Après Steve Vai, Joe Striani, Paul Gilbert et Patrick Rondat, Ibanez aurait donc endorsé Spiderman ? La réponse est négative, mais je crois que s’il avait joué de la guitare, son modèle signature ressemblerait à cette RG.
Passé les premiers instants d’étonnement, j’eus la curiosité de prendre en main l’engin. Malgré la toile d’araignée gravée à même le corps, le poids est tout à fait similaire à celle des RG ‘classiques’. Sous la main, la finition noire granuleuse et un peu rugueuse laisse une curieuse impression de matière plastique. Ceci n’est cependant qu’une impression, car à l’instar de ses cousines, le corps de la RG 420 est fabriqué dans du tilleul.
Le manche renvoie par contre à un terrain très connu, puisqu’il a le fameux profil Wizard II, fin et plat, depuis longtemps standard chez la firme nippone, véritable autoroute à mains se prêtant sans difficulté aux acrobaties et traits de virtuosités. Sur la RG420, celui-ci est fabriqué en 3 pièces d’érable, surmonté d’une touche palissandre de bonne qualité sur laquelle les repères sont en ‘dent de requin’. Enfin, raffinement autrefois réservé aux seuls modèles haut de gamme, un binding blanc fait le tour de la touche.
Côté accastillage, on trouve un vibrato modèle Edge III, évolution à la sauce Ibanez du Floyd Rose Original, et semble plutôt de bonne facture (sans atteindre non plus la qualité des modèles ‘pro’ réservés au haut de gamme). Chose curieuse, alors que l’intégralité de l’accastillage est noire, les pivots du vibrato sont en acier couleur naturelle. D’habitude, l’ensemble est raccord, mais peut être il y a-t-il une bonne raison à cela ? Quant à la tige, il s’agit d’un modèle qu’on enfonce simplement dans le puits prévu à cet effet, sans qu’il n’y ait rien à visser nulle part. Bon point du côté de sa hauteur : là où les tiges de Floyds sont en général trop hautes, elle tombe bien sous les doigts lors du jeu. Par contre, on peut douter que le système ne finisse pas par donner du jeu, ni ne prévienne les arrachements intempestifs de la tige lors d’acrobaties poussées.
Niveau micro, on retrouve de vieux amis, les V7 et V8 de chez Ibanez, directement montés à même le corps, et sous caches, à la manière des EMGs par exemple. Ceux-ci sont pilotés par un bouton de volume, un bouton de tonalité, et un sélecteur à 5 positions du type ‘megaswitch’. Celui-ci permet d’obtenir 5 combinaisons de micros : en position 1 il s’agit du humbucker chevalet seul, en position 2 des bobines intérieures des 2 humbuckers splittés, en position 3 des 2 humbuckers en parallèle, en position 4 du humbucker manche dont les bobines sont en parallèle, et en position 5 du humbucker manche dont les bobines sont en série. Cela devrait donner des résultats intéressants une fois la guitare branchée. Justement, branchons.
Ou on s’tisse un riff ?
On s’en doute, la prise en main de la guitare déroute un peu. Le matériau recouvrant le corps, granuleux, offre une sensation assez étrange, il faut bien l’avouer. Heureusement que le bois est bien présent en dessous, sinon on aurait presque l’impression d’avoir un jouet entre les mains… Cependant, cette impression s’estompe au premier accord joué à vide : la résonance est agréable, le sustain bien présent, la RG vibre sous les doigts. Le manche est, comme toujours chez Ibanez, un régal de prise en main pour qui aime les manches fins. Comme toujours sur les RG, les découpes marquées des cornes permettent un accès irréprochable aux aigus, d’autant que la jonction corps/manche se fait par un talon au profil bien pensé, n’utilisant pas de plaque métallique à l’arrière du corps. Bref, toute personne ayant touché une RG sera, une fois les premiers instants de déroutes dus à la finition passés, en terrain archiconnu.
Pour les besoins du test, ne pouvant au sein de mon appartement pousser mon cher Laboga, j’ai décidé pour une fois d’utiliser un classique de nos homes studios pour jauger la spider gratte. J’ai donc branché la belle dans un Line6 Toneport UX2.
Tests en son clair : dans le fichier suivant, j’ai joué la même série d’accords sur les 5 positions possibles, en commençant par la position 1 (humbucker chevalet seul). À droite, la guitare est enregistrée en direct, sans simulation d’ampli ni effets. À gauche, le preset utilisé est ‘clean guitar’, le RG passant dans une simu de Roland JC120. Je dois dire que, malgré la relative neutralité du tilleul utilisé pour le corps, la RG420 dégage des sonorités claires agréables. En général, les micros sont souvent le point faible des Ibanez, mais les V7 et V8 m’ont agréablement surpris. Ils délivrent des sonorités jamais trop agressives, avec un niveau de sortie plutôt fort sans atteindre non plus des niveaux délirants. Les positions 2 et 4 du sélecteur sont intéressantes, car assez ‘stratoides’ mais en restant légèrement différentes. La position 2 notamment, risque d’enchanter les amateurs de John Petrucci, très similaire en caractère à ce qu’il peut obtenir en son clair.
Tests en son saturé : petite démonstration sans prétention et pour le fun. La guitare rythmique de droite utilise une simulation JCM800, le preset Metal Rythm auquel j’ai un peu monté le gain. Pour la guitare rythmique de gauche, la simulation ‘Sandman’ utilise une simulation de Mesa Boogie Triple Rectifier. Au centre, sur le preset ‘Metal ’80’ (JCM800) la première phrase est jouée en position micro chevalet, la deuxième en position micro manche. Les quelques notes de fin sont pour montrer que le floyd est bien fonctionnel sur cette guitare. On retrouve ici le caractère des micros : équilibrés, assez passe-partout, ils donnent une personnalité relativement sage à la RG, mais restent toujours droits et précis. Très bon point d’ailleurs pour le micro manche, qui reste bien défini en saturé, là ou beaucoup d’autres sont baveux, ce qui permettra aux virtuoses de jouer des traits rapides en saturation sans que le résultat ne soit une bouillie sonore.
RG moi tout ça maintenant !
Au global, il faut avouer que cette petite RG sait se faire attachante, et pas parce que vous aurez les mains engluées dans sa toile. Évidemment, sa plus grande originalité reste sa finition, qu’on aime ou qu’on déteste, avec cet aspect bizarre au toucher qui risque d’en rebuter plus d’un. Pour autant, je le répète, cette guitare n’est pas du tout un jouet, il y a bien sous la toile d’araignée une vraie RG qui sommeille, pour un tarif somme toute raisonnable, vu l’originalité de l’engin. Et si la toile d’araignée ne vous plaît pas, sachez que La Chose des 4 fantastiques a aussi son modèle signature, le même modèle RG420, mais finition ‘briques’ !
[+] Construction irréprochable
[+] Manche Wizard
[+] Micros de qualité
[+] Finition très originale
[-] Aspect ‘plastique’ du corps et finition un peu trop originale pour certains !
[-] Tige de vibrato qui risque de prendre du jeu avec l’âge
Photos : Denfert