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Pédago
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Analyse d'un circuit simple : Vol + Tone (partie 4)

L'électronique pour le musicien 15

Et nous voilà parvenus à la dernière partie de notre analyse du circuit "volume et tonalité". Cette semaine nous allons nous intéresser à l'importance de la valeur des composants choisis, ainsi qu'à l'influence du réglage du potentiomètre de volume... sur la tonalité.

L'électronique pour le musicien 15 : Analyse d'un circuit simple : Vol + Tone (partie 4)
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Pour conclure cette « série dans la série » consa­crée au circuit volume et tona­lité de nos chers instru­ments élec­tri­fiés, nous allons procé­der en quatre temps. Main­te­nant que nous avons étudié l’ef­fet produit par le poten­tio­mètre de tona­lité (et son conden­sa­teur) en inter­ac­tion avec les proprié­tés induc­tive et capa­ci­tive du micro, nous allons nous poser une première ques­tion, toute simple : quel impact la valeur du conden­sa­teur a-t-elle sur réglage de tona­lité ?

Dans un second temps, nous nous inté­res­se­rons à un autre élément souvent discuté sur les forums : l’in­fluence de la valeur du poten­tio­mètre sur le son de l’ins­tru­ment. Un poten­tio­mètre de plus grande valeur permet d’ob­te­nir plus d’ai­gus, oui, mais pourquoi ?

Dans un troi­sième temps, nous nous penche­rons sur un élément un peu moins connu : l’in­fluence du réglage du poten­tio­mètre de volume sur la tona­lité d’un instru­ment. Puis, pour conclure, et rester dans cette optique de l’in­ter­ac­tion volume-tona­lité, nous nous penche­rons sur un autre câblage de la guitare élec­trique, souvent dési­gné comme le 50's wiring (câblage années 1950), et nous verrons comment un chan­ge­ment appa­rem­ment mineur peut t’avoir une inci­dence sur le son de l’ins­tru­ment.

Requiem pour un condo

Est-ce que la valeur du conden­sa­teur de tona­lité a une influence sur le son de votre instru­ment ? Oui… et non. en fait, tout dépend de ce que l’on signi­fie par influence, ou plutôt avec quel réglage est-il censé influen­cer le timbre. Car lorsque le potard de tona­lité est à 10, la valeur du conden­sa­teur n’a presque aucun effet. Pourquoi ? Comme nous l’avions expliqué la dernière fois, la résis­tance du poten­tio­mètre a pour fonc­tion de contrô­ler à quel point le conden­sa­teur se retrouve direc­te­ment en paral­lèle avec la capa­cité du micro et du câble. Il permet donc de faire varier la « présence » du condo dans le couple LC, formé par la bobine du micro et les diffé­rents éléments capa­ci­tifs addi­tio­nés.

Donc, quand le potard est au maxi­mum, la résis­tance limite en grande partie l’in­fluence du conden­sa­teur. Voici les résul­tats obte­nus dans LTSpice avec trois valeurs diffé­rentes (22 nF, 33 nF et 47 nF) pour le même réglage (potard à 10).

  • simu 22n.PNG
  • Simu 1.PNG
  • simu 47n.PNG

Comme on le voit bien, les trois courbes sont très simi­laires.

En revanche, le conden­sa­teur a une influence impor­tante lorsque la résis­tance du poten­tio­mètre dimi­nue. Pourquoi ? Parce qu’alors le conden­sa­teur se retrouve plus direc­te­ment en paral­lèle avec la capa­cité micro+­câble, et donc sa valeur influe plus forte­ment dans le couple LC. Voici cinq exemples, avec un poten­tio­mètres qu’on aurait tourné jusqu’à n’ob­te­nir plus que 1kΩ :

  • simu 1k 22n.PNG
  • simu 1k 33n.PNG
  • simu 1k 47n.PNG
  • simu 1k 68n.PNG

Les valeurs sont : 22 nF, 33 nF, 47 nF et 68 nF.

On voit tout de suite que les valeurs les plus petites donnent cet effet de « cloche », d’ac­cen­tua­tion d’une fréquence de réson­nance (ici aux alen­tours de 500 Hz) que nous décri­vions la semaine dernière, tandis qu’une plus grande valeur, toutes choses étant par ailleurs égales, n’aura pas autant d’in­ci­dence, et fera recu­ler la fréquence de coupure (fréquence où le signal est à –3 dB) : de 700 Hz pour 22 nF à 400 Hz pour 68 nF.

Alors comment choi­sir son conden­sa­teur ? Je vois deux solu­tions : connaître (en mesu­rant) la valeur de tous les compo­sants et effec­tuer une simu­la­tion comme celle-ci (ou la réali­ser par des calculs, pour les plus moti­vés) ou, tout simple­ment, tâton­ner en utili­sant ses oreilles, en sachant que la valeur que j’ai prise au départ (33 nF) est une bonne valeur médiane autour de laquelle cher­cher.

NB : est-ce que la tech­no­lo­gie du conden­sa­teur (son isolant) a un impact sur le timbre de l’ins­tru­ment ? Certains le perçoivent, même si les mesures et les tests A/B en double aveugle tendent à montrer le contraire. Subjec­ti­vité vs; objec­ti­vité, un débat sans fin, sans fond… Reste que la tension nomi­nale du conden­sa­teur, elle, peut jouer. Sur les guitares réali­sées dans les années 1950 et 60, il n’est pas rare de trou­ver des conden­sa­teurs faits pour suppor­ter des tensions élevées (400V, 600V), complè­te­ment surdi­men­sion­nés certes, mais dont l’in­duc­tance est plus élevée, ce qui peut chan­ger subti­le­ment le compor­te­ment du circuit de tona­lité.

Cepen­dant, le conden­sa­teur ne fait pas tout… 

Touche pas à mon pot’

La valeur des poten­tio­mètres à une influence directe sur la tona­lité d’en­semble du circuit. En premier lieu, le poten­tio­mètre de tona­lité, qui va produire des résul­tats très diffé­rents si l’on augmente sa valeur, en dimi­nuant d’au­tant plus l’im­por­tance du conden­sa­teur de tona­lité, et en augmen­tant la résis­tance paral­lèle. Lorsque, dans un circuit RLC, la valeur de la résis­tance paral­lèle augmente, le Q (ampli­tude d’ac­cen­tua­tion de la fréquence de réson­nance) augmente égale­ment. C’est donc sans surprise que l’on trou­vera les résul­tats suivants : 

  • Simu 1.PNG
  • simu 500k 33n.PNG
  • simu 1M 33n.PNG

 

 Ici, les valeurs choi­sies sont : 250kΩ, 500 kΩ et 1 MΩ. on voit clai­re­ment l’aug­men­ta­tion du Q de envi­ron 4 dB à envi­ron 6 dB. La fréquence de coupure ne change pas. Le circuit ne laisse donc pas passer plus d’ai­gus dans la bande passante, mais le timbre de la guitare va être malgré tout affecté par cette accen­tua­tion;

simu 250k 1M.PNGL’in­fluence de la valeur du potard de volume est donc basée sur le même prin­cipe : la résis­tance paral­lèle augmen­tant, le Q du filtre RLC augmente égale­ment. Pour un même poten­tio­mètre de tona­lité (250 kΩ) on va donc obte­nir un Q de plus en plus élevé, en augmen­tant la valeur du potard de volume. Voici, ci contre, un exemple avec un potard de volume à 1MΩ (la valeur de R3 devient 500k, puisque R3 = résis­tance volume//impé­dance d’en­trée de l’am­pli = 1 MΩ//1 MΩ = 500 kΩ). Le résul­tat ressemble à s’y méprendre à ce que l’on obte­nait avec un poten­tio­mètre de 1 MΩ pour la tona­lité.

On comprend alors que, puisque la valeur de la résis­tance paral­lèle à un impact sur Q, l’at­té­nua­tion du volume de la guitare (autre­ment dit, l’at­té­nua­tion de sa tension de sortie par le poten­tio­mètre de volume) aura un impact sur Q, et donc sur le timbre de l’ins­tru­ment.

Juste une histoire de Q

Quelle que soit la valeur totale du potard de volume, son réglage va donc avoir une influence sur la tona­lité de l’ins­tru­ment. Si, en lui-même, consti­tue bien un divi­seur de tension, son inser­tion en paral­lèle dans un filtre passif du second ordre va permettre au poten­tio­mètre de volume d’in­fluer sur la bande passante de la guitare. Pourquoi ?

Voilume Pot schemaReve­nons au premier article de cette série : un poten­tio­mètre est consti­tuée de deux résis­tances ajus­tables, lorsqu’une dimi­nue, l’autre augmente (voir ci-contre). Le signal est prélevé aux bornes de la deuxième résis­tances. Lorsque l’on atté­nue le volume de sortie de la guitare, R2 dimi­nue et R& augmente. R2 est la résis­tance paral­lèle dans notre filtre RLC, tandis que R1 est la résis­tance série (elle est traver­sée par le signal avant d’ar­ri­ver à la sortie). Dans un filtre RLC, quand la résis­tance paral­lèle augmente Q augmente aussi, si elle dimi­nue, l’in­verse se produit. 

Voici le résul­tat que l’on obtient, pour notre potard de volume de 250 kΩ, si on le tourne d’un quart de sa course, puis de la moitié. Bien sûr on observe une dimi­nu­tion géné­rale du signal, mais aussi un dispa­ri­tion totale de la fréquence de réson­nance. La guitare perd très rapi­de­ment de sa clarté.

  • Les Mains dans le Cambouis : simu 1quart vol.PNG
  • Les Mains dans le Cambouis : simu 1demi vol.PNG

C’est pour cela que le treble bleed a été conçu : pour rattra­per les pertes dans l’aigu géné­rées par le poten­tio­mètre de volume.

NB : il est égale­ment vrai que la perte d’aigu lors de l’ac­ce­tua­tion d’un signal sonore provient de la sensi­bi­lité non linéaire de l’oreille humaine. Les courbes isoso­niques le montrent bien, comme l’ex­pliquait en détail cet article, publié sur AF en 2015. toute­fois, dans le cas d’une guitare, son pic de réson­nace étant situé vers 3 kHz, zone parti­cu­liè­re­ment sensible de l’oreille, la perte des aigus ne serait pas aussi dras­tique si l’at­té­nua­tion du signal ne jouait pas sur le Q de l’ac­cen­tua­tion.

Back to the 50's

Au point où nous en sommes, on comprend bien que toute alte­ra­tion de ce circuit aura des consé­quences sur le filtre passif qu’il consti­tue, et donc sur sa réson­nance. Ainsi, le 50's wiring, cablâge années 1950, que l’on trouve dans les premières Les Paul, apporte une modi­fi­ca­tion fonda­men­tale : le potard de tona­lité y est placé après celui de volume. Pour quel résul­tat?

50's wiring schema full.PNGMustang tone 50s wiringVoilà, ci-contre, le schéma simpli­fié de ce montage, ainsi qu’une photo montrant sa réali­sa­tion, toujours dans notre fidèle Mustang. On voit bien comment le signal arrive au poten­tio­mètre de volume (V) sur la borne 3, puis repart par la borne 2. Sur cette borne 2, on trouve aussi connecté le conden­sa­teur de tona­lité, qui relie le potard de volume au potard de tone (T) par sa borne 1, la borne 2 étant reliée à la masse, direc­te­ment sur le capot du poten­tio­mètre.

Le système de tona­lité se trouve donc après le réglage de volume. Qu’est-ce que cela donne concrè­te­ment ? Avec ce montage, lorsque l’on atté­nue le signal, la « bosse » à 3 kHz ne dimi­nue pas aussi vite, ce qui permet de conser­ver une impres­sion de clarté, et un timbre plus homo­gène lorsque l’on joue sur le volume. Voici quelques simu­la­tions (poten­tio­mètre de volume au max, à 1/8, à 1/4 et à 1/2) : 

  • simu 50s full.PNG
  • simu 50s 1huitième.PNG
  • simu 50s 1quart.PNG
  • simu 50s 1demi.PNG

 

Parfait ? Non, car le poten­tio­mètre de tona­lité agit sur le niveau de sortie : lorsque le volume est au max, il agit comme un tone habi­tuel, mais lorsque le signal est déjà atté­nué, jouer sur le tone va avoir tendance à dimi­nuer encore plus le signal, dans son ensemble. Comme nous l’avons déjà dit : toute réali­sa­tion est un compro­mis par rapport à un but idéal.

Sur ce, nous concluons cette série sur le circuit Vol + Tone. La semaine prochaine, nous commen­ce­rons une analyse du circuit d’une pédale conçue il y a plus de 40 ans et qui vrom­bie toujours aussi bien : la MXR Disto­rion +.

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Analyse d'un circuit simple : Vol + Tone (partie 3)
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Auteur de l'article Pr. Soudure de La Feuille

Venu à la musique par le bruit, j'y retournerai un jour. J'aime les beaux circuits bien propres, les musiques sales et moches. Technicien de jour, la nuit je dors.

  • skarabee.nc 1083 posts au compteur
    skarabee.nc
    AFicionado·a
    Posté le 20/01/2022 à 03:30:37
    merci encore pour ces éclaircissements!

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