Pour vendre du numérique, il faut justifier d’une légitimité sur le terrain ! Voilà ce que déclare Vincent Villuis, co-dirigeant du label Ultimae, qui a décroché plusieurs tops au classement des ventes de musiques électroniques sur iTunes, eMusic et bien sûr beatport.
Label, c’est une chose, mais comment un petit auto-producteur peut-il espérer se faire connaître et gagner une rémunération sur ses enregistrements via l’exposition Internet ? Et bien, tout simplement en s’adressant à des acteurs dont le cœur de métier vise essentiellement les 99% d’artistes qui se voient refoulés par les majors. Si les offres sont pléthoriques et multiplient les belles promesses, le succès n’est pas à la portée de tous, ce qui nous laisse penser que le numérique n’est que le reflet du monde physique. Pour la plupart des artistes, la réalité sera au moins de récupérer les frais qu’ils ont avancés lorsqu’ils désirent vendre leurs œuvres sur les plateformes, processus qui se fait généralement après avoir signé avec un distributeur numérique.
Les distributeurs numériques
Leur rôle est identique à celui des distributeurs physiques, sauf qu’ici, le référencement d’un album ou titre à l’unité, en l’occurrence sur support numérique, se fait sur les plateformes de téléchargement et de streaming.
En France, Zimbalam est leader dans ce domaine. Il compte aussi des équipes au Royaume-Uni, en Allemagne et en Italie. Plus de 53 000 artistes dans le monde ont déjà signé avec l’agrégateur qui livre 95% des plateformes soit environ une vingtaine d’entre elles en moyenne selon les territoires.
L’inscription à Zimbalam est gratuite, l’artiste ne règle le service de distribution qu’à la dernière étape du processus de création et plus exactement au moment où les œuvres s’apprêtent à être envoyées aux plateformes.
Il n’y a pas de frais annuels, pas d’exclusivité ni d’engagement de durée. L’artiste reste indépendant, libre et propriétaire de sa musique.
Au final, il s’acquitte de 24.99€ pour l’upload d’un single (1 ou 2 titres) et 34.99€ pour l’upload d’un album (plus de 2 titres), peu importe les plateformes et les territoires qu’il sélectionne.
Côté rémunérations, il perçoit 90% des revenus générés par ses ventes. Ça veut dire quoi ? Si un titre se vend à 0,99€, une fois la TVA ôtée, il reste 0,83€. Sur cette base, la plateforme verse directement à la Sacem 8% soit 0,07€ (en effet, c’est à la charge du détaillant de rémunérer la Sacem dans la distribution numérique), ensuite, la plateforme retire sa marge brute (environ 30%), ainsi nous obtenons ce qu’on appelle le prix de gros hors taxes qui en moyenne avoisine les 0,60€, montant à partir duquel est calculée la quote-part versée à l’artiste. Ici, Zimbalam lui verse 90% de cette somme soit 0,54€. À ce rythme, un album numérique de 10 titres devra se vendre à hauteur de 3 fois pour égaler la vente d’un album physique d’une valeur de 15€ !
Le service de vente basique ne suffit plus pour justifier de la qualité d’un distributeur, ainsi Zimbalam propose des outils de promotion gratuits qui se mettent en place une fois les titres uploadés.
Le distributeur adresse une interface dédiée à l’artiste qui suivra l’évolution de ses ventes en temps réel et analysera ses royalties très précisément par période, plateforme ou zone géographique.
L’artiste gérera aussi un player exportable sur tous ses sites et réseaux sociaux. Ce player est là pour rassembler toutes les informations qui concernent sa musique, biographie, photos, news, etc. On y trouve également un onglet grâce auquel le fan pourra laisser son adresse mail, ainsi que des boutons renvoyant directement vers les sorties de l’artiste.
Ce n’est pas tout, car la Page Artiste Zimbalam permet encore une fois à l’artiste, de paramétrer un outil qui optimisera sa collecte de contacts en proposant un titre gratuit contre une adresse mail.
On y trouve également une rubrique dans laquelle il pourra mettre à disposition des professionnels du contenu spécial et protégé.
Nous avons rencontré Juliette Charlot et l’avons interrogée sur les activités de Zimbalam et Believe. Zimbalam a été créé en 2009 par Believe Digital, le premier distributeur numérique d’artistes et de labels indépendants en Europe. À l’époque, Believe avait reçu près de 50 000 demandes de distribution numérique. Difficile d’écouter tous ces projets, et de satisfaire tout le monde… Nous avions donc décidé de créer Zimbalam pour permettre à chaque artiste de rendre sa musique disponible à la vente et de faire en sorte qu’il rencontre son public. Si Zimbalam est un service de distribution totalement automatisé destiné à tous les artistes autoproduits, Believe ne fonctionne pas de la même manière : les projets sont signés par un label manager qui travaille chaque sortie afin de décrocher des mises en avant sur les plateformes de téléchargement et de streaming. Enfin, il exploite les catalogues afin d’en optimiser les ventes. Toutefois, Zimbalam bénéficie de l’expertise des équipes de Believe Digital, des réseaux de distribution identiques, d’une expérience de marketing ainsi que des technologies mises au point depuis 2005 (date de création de Believe). Sachez que l’équipe artiste de Believe Digital garde constamment un œil sur les artistes Zimbalam. Il lui arrive de contacter, conseiller et finalement signer les artistes et labels les plus prometteurs comme c’est le cas chaque mois où plusieurs artistes Zimbalam sont transférés sur Believe Digital. Believe Digital, c’est aussi un label qui signe des artistes, environ une dizaine par an. |
Hors de nos frontières, Rebeat International est un acteur autrichien très actif dans la distribution numérique qui, il y a quelques années est apparu avec un concept inédit : l’artiste achète d’abord une application pour la somme de 99€ qui lui servira à gérer l’ensemble des opérations avant et après l’upload en toute liberté. Le logiciel reprend en gros ce que permet de faire aujourd’hui Zimbalam, mais pas seulement, il donne la chance à l’artiste de remplacer, après l’upload, le nom d’un titre mal rentré. Plus fort encore, il est possible de retirer totalement l’audio de ce même titre pourtant déjà présent à la vente sur les plateformes pour le remplacer par un autre dont le mix ou mastering sera mieux réalisé, par exemple.
Chez Rebeat, le coût d’un upload est de 1€ par titre, les frais de fonctionnement s’élèvent à 15% contre 10% pour Zimbalam, mais la palme revient à Reverbnation, présent depuis des années dans l’accompagnement des groupes/musiciens notamment dans le domaine de la scène et de la gestion des fans, le site leur reverse 100% des revenus.
Et puis, et puis, il y a Ioda qui comme INgrooves propose beaucoup d’outils concrets et efficaces pour la promotion web (contacter les médias, envoyer des press kits…) grâce à une technologie propriétaire élaborée qui lui permet de contrôler tout le processus de la distribution, de l’encodage jusqu’aux fans…
Dans tous les cas, on choisira son agrégateur non pas uniquement sur le pourcentage de rémunération qu’il verse à l’artiste, mais surtout sur ses capacités à offrir les armes de promotion indispensables pour accompagner les titres mis en place sur les plateformes et ce sera sans compter votre travail sur le terrain (concerts et Internet) qui représente la part la plus importante de votre réussite.
Attention ! Si vous signez un contrat d’artiste ou contrat de licence, certains majors et labels ne versent environ que 18% des revenus à l’artiste et quelquefois ne versent rien du tout !
Je ne veux pas signer avec un distributeur, puis-je vendre mes œuvres à partir de mon site personnel ?
Il faut d’abord justifier d’une structure commerciale. On adoptera le mode simplifié d’auto-entrepreneur pour les artistes solo, à l’inverse, le statut associatif sera la meilleure solution pour les groupes qui veulent se lancer dans pareille aventure.
Ensuite, il faudra demander une autorisation à la Sacem, car ici, l’artiste/producteur exercera la qualité de diffuseur, mais aussi d’exploitant.
Si ces démarches ne sont pas infranchissables, la question de l’hébergeur qui accepte de vous délivrer une large bande passante surtout pour les fichiers WAV ou FLAC s’avère onéreuse.
En plus, vendre sa musique sur son site personnel impose de créer un lien de téléchargement à usage unique qui ne se détruit pas dans le temps et qui ne doit en aucun cas permettre le téléchargement multiple par différentes personnes. Alors, quoi faire ? La réponse est simple : Bandcamp.
Bandcamp, la Cha-Ching révolution !
Nous avons interrogé Jah Acid Dub et lui avons demandé pourquoi il a choisi l’offre Bandcamp. : Je cherchais à l’origine un service permettant de vendre en ligne ma musique (avant de passer à l’étape de la fabrication de CD’s physiques). Différentes solutions s’offraient à moi comme développer mon propre site de vente en ligne avec une solution payante ou open source, passer par un distributeur numérique (Rebeat, Zimbalam, etc.), utiliser les services en ligne de Reverbnation, bref, si toutes ces options semblaient efficaces, plus ou moins faciles à mettre œuvre, elles n’en étaient pas moins gourmandes sur le plan du coût de mise en place sans parler des taxes supplémentaires. Et un jour… je suis tombé sur Bandcamp. Waouh !
En effet, Bandcamp est un service original non exclusif de distribution numérique et physique. Il multiplie plein d’avantages, une souplesse totale et une constante mainmise du producteur sur la vente de son album ou de ses titres à l’unité.
Bandcamp reprend l’idée de MySpace avec la mise à disposition d’une page personnalisée qui affiche biographie de l’artiste, présentation photographique de l’album et du groupe, la liste des titres de l’album en vente qu’il est possible d’écouter en streaming de manière intégrale contrairement à la plupart des plateformes qui ne proposent que des extraits de 30’ (cela dit, il est aussi juste de préciser que la publication d’un titre dans son entier l’expose au piratage et ça concerne aussi les plateformes de streaming comme Spotify ou Deezer, le système qu’emploie Juno Records semble mieux armé).
Aucuns frais n’est requis au départ, pas besoin non plus d’une application logicielle, l’hébergement est gratuit, aucune limitation de données et d’information sur le groupe, c’est simple et efficace, le producteur n’a qu’une chose à faire, ouvrir un compte Paypal à son nom et dans lequel sera directement versé, en temps réel, l’argent issu des ventes ! Pas besoin d’attendre des mois et/ou une somme minimale pour être rémunéré !
De plus, l’ajout des titres (au format WAV, AIFF ou FLAC) ou leur suppression est un service gratuit, c’est aussi un gros point fort !
Que peut-on vendre sur Bandcamp et à combien ? Des titres à l’unité et/ou albums complets sous forme numérique et/ou physique. Les 2 sont possibles et sont complémentaires. En effet, l’acheteur qui opte pour l’album fabriqué peut tout à fait télécharger son équivalent numérique sans coût additionnel.
Télécharger, mais sous quel format ?
Là, où nombre de plateformes traditionnelles proposent un téléchargement unique principalement en mp3, Bandcamp propose à l’acheteur de choisir le format qui lui convient notamment entre MP3 320, FLAC (aucune compression, le téléchargement d’un album sous ce format prend 20 à 30 minutes), MP3 VBR (V0), AAC (en clair le format d’iTunes), Ogg Vorbis ou ALAC (format non-propriétaire et équivalent à l’AAC).
La question du prix ? Avec Bandcamp, le producteur dispose de 3 options : fixer le prix qu’il désire, laisser ses fans décider du prix ou bien se prononcer pour une exonération totale de ses titres au téléchargement. On notera qu’il est possible d’attribuer aux fans un code discount pour un prix réduit au moment de la vente.
En marge, Bandcamp permet au producteur d’inclure les frais d’envoi lors de la vente d’un CD physique et d’évaluer lui-même le montant supporté par l’acheteur au national et à l’international.
Enfin, à chaque vente numérique on peut y adjoindre le téléchargement de la pochette du disque au format Zip, mais aussi du vidéo clip promotionnel, bref Bandcamp est un magasin dont on a le sentiment d’être le gérant à part entière et ça change tout !
Les statistiques relevées sur l’écoute des titres, le buzz généré ainsi que le nombre et montant des ventes se fait n’importe quand, à l’instant T et à souhait sur la page personnelle du producteur.
Avec Bandcamp, ce n’est pas l’agrégateur qui verse la rémunération à l’artiste, mais l’artiste qui verse une part à Bandcamp sur chaque vente réalisée ! Alors, quelle est-elle ? 15% qui se réduisent à 10% si les ventes atteignent un total de 5000€ sur une année. Pour les ventes physiques, dans tous les cas, elle se fixe à 10% et peu importe le montant global généré.
Sachez enfin que les ventes sont exonérées de TVA, c’est un gros gros plus !
Dernière nouveauté : Bandcamp permet dorénavant de reproduire sa page personnelle à l’identique sur le compte Facebook de l’artiste.
Être toujours actif !
En guise de conclusion, nous avons donné la parole à Ultimae qui conseille à l’artiste qui se lance dans la distribution numérique de s’armer de patience et de prendre son temps, tout l’inverse de ce que les médias actuels semblent dire sur le web : instantanéité, buzz en un jour… Il y a tellement de services, miroirs aux alouettes, les réseaux sociaux en première place. Bref de ne pas foncer sur le premier distributeur en ligne. Surtout, se créer une cartographie des médias web (radios, magazines, portails, forums…), apprendre à bien connaitre les zones d’influences dédiées à vos esthétiques musicales, trouver vos fans.
Il faut bien préparer en amont sa communication (photos, visuels, extraits sonores, textes biographiques) pour sortir du lot.
Il faudra investir du temps et de l’argent en pub web (Google Ads) ou bannières dans un premier temps. Il ne faut pas trop espérer le jackpot dès le début. Le travail sera de surtout vous faire connaitre et d’être actif régulièrement. La solution pour proposer sa musique en ligne facilement reste Bandcamp, car le service est clair et huilé.
Nous avons interrogé Vincent Villuis (co-dirigeant du label Ultimae) 1) Quelles sont les activités d’Ultimae ? Depuis 11 ans, Ultimae (www.ultimae.com) est un label de musique qui se veut à 360 degrés : production, distribution physique et numérique, licensing, synchro, édition et booking. Nous travaillons principalement les musiques Ambient et leurs dérivées : downtempo, progressive trance, Electronica, IDM, tant que les musiques ont un aspect cinétique, visuel et hypnotique. Nous défendons par tous les moyens les artistes (une grande partie Scandinave) Solar Fields, Carbon Based Lifeforms, Asura, Circular, Hol Baumann, I Awake, Aes Dana et H.U.V.A. Network (dont je fais partie). Nous sommes basés à Lyon, mais nos activités sont tournées à 80% vers l’international avec des relais promotionnels aux États-Unis, Angleterre, Grèce et certains pays de l’Est. Nous avons opté pour une communication web plutôt que médias classiques depuis nos débuts. Nous croyons au phénomène Long Tail (petits ruisseaux), aux bouches à oreilles des fans, aux partages des passions via les réseaux virtuels. Les recettes collectées sont très conséquentes et permettent de consolider notre structure et générer des royalties décentes pour nos artistes. D’après INgrooves nous sommes dans leur top10, sur 3000 labels. 2) Que représente la vente numérique pour votre catalogue et quels sont les partenaires avec qui vous travaillez ? Nous avons toujours cru à la distribution numérique, continuation et duplication de nos musiques sur des multiples canaux de diffusion. Nous avons été le premier label français à signer avec l’agrégateur numérique Américain INgrooves. Ils ont en charge de mettre en avant notre catalogue et de défendre nos argumentaires artistiques et marketing auprès des plateformes numériques pour espérer décrocher des mises en avant. Notre collaboration est toujours au beau fixe, ils font un boulot superbe et sont inspirés par notre univers musical. De notre côté, nous travaillons avec des centaines de radio web, fanzines et blogs. Nous gérons nous-mêmes notre édition ; INgrooves agit en tant que sous-éditeur pour les USA. Nous avons aussi développé depuis septembre notre propre plateforme Bandcamp (ultimae.bandcamp.com) proposant l’intégralité de nos productions au format haute qualité audio. 3) Quels sont les supports de vente numérique que vous privilégiez? 4) Comment voyez-vous l’avenir de la distribution numérique dans votre domaine et dans les autres styles musicaux ? Je reste très optimiste, même si le monde dans lequel nous vivons va un peu trop vite et que les mutations sont violentes. On a tendance à mettre le modèle économique musical physique et numérique en opposition, mais je reste persuadé que les deux s’auto-alimentent, l’un donnant une légitimité et une visibilité réciproque à l’autre. Ce sont vos actualités de studio et de concerts qui font que vous existez sur le web et c’est le web qui permet de faire écho à votre réalité de terrain. Il me paraît un peu trop manichéen de penser tout virtuel ou tout physique. Les deux doivent s’aider mutuellement, devenir un média circulaire. Je garde cette conviction que l’objet sera toujours là, il prendra peut-être une autre forme, mais nous aurons toujours besoin de toucher quelque chose ou de revenir à cet aspect dans quelques années après une période de tout numérique. J’ai l’intuition que tous les styles musicaux ont leur chance, et c’est tant mieux. www.ultimae.com (site home page) www.ultimae.com/shop (boutique CDs) www.ultimae.bandcamp.com (boutique numérique) |
Nous avons le plaisir de proposer aux lecteurs d’Audio Fanzine un code promo de moins 20% sur notre plateforme numérique Bandcamp : www.ultimae.bandcamp.com.
Il vous suffit de rentrer Audiofanzine20 dès que vous verrez la phrase « Have a discount code? » et d’appuyer sur le bouton « Apply ».
Vous devrez effectuer cette manipulation pour chaque article choisi. Bonnes découvertes!
Le code est valable jusqu’au 24 décembre 2011 et peut être utilisé autant de fois que vous le voulez.