Nous avons testé il y a peu la dernière interface audio au format desktop signée Steinberg, l'UR28M, et notre principale déception était l'absence de boutons de transports et de contrôleurs. En fait, le constructeur allemand avait une idée derrière la tête et sort aujourd'hui toute une ribambelle de contrôleurs USB dédiés au séquenceur maison, Cubase. Mise au point sur ces 6 petites boîtes.
Pour accélérer son workflow sous un séquenceur, il y a plusieurs solutions. Soit on apprend tous les raccourcis clavier par coeur, ce qui requiert une bonne mémoire et un peu de temps, soit on achète un clavier doté de touches customisées pour le logiciel (à la Logic Keyboard), soit on achète un contrôleur spécifique (du genre Mackie Control).
C’est dans la dernière catégorie que les CMC de Steinberg se placent, avec une particularité cependant : c’est un système modulaire composé de 6 petites tablettes, chacune destinée à une utilisation bien spécifique. En effet, chaque utilisateur de Cubase (car c’est de ce séquenceur qu’il s’agit) a une manière différente d’aborder le logiciel, suivant son métier (compositeur, ingénieur du son…) et/ou son type de musique (acoustique, électronique…).
Avant de rentrer dans les détails de chaque contrôleur, faisons un point sur leur fonctionnement et leur construction.
T’as le look, coco
Question look, on peut dire que c’est réussi : la robe noire et blanche, les boutons rétroéclairés de toutes les couleurs, c’est assez mignon. On regrette un petit peu le côté plastique que l’on n’avait pas sur l’UR28M, et les contrôleurs ont l’air plus petits en photo qu’en réalité. Ce qui n’est pas forcément un désavantage, car ils restent légers (250 grammes en moyenne) et leurs dimensions (102 × 183 × 18 à 32,7 mm suivant le contrôleur) permettent d’avoir des boutons généralement assez gros et suffisamment espacés afin d’accueillir les gros doigts. On remarque que la prise mini-USB est cachée derrière un pied rabattable et utile pour surélever le contrôleur : les boutons tombent bien sous les doigts, c’est parfait ! Les potards en plastique ont une apparence plutôt « entrée de gamme » et les faders tactiles peuvent, on le verra plus tard, dérouter les premiers temps.
Côté accessoires, Steinberg propose deux « frames », l’une permettant de combiner quatre contrôleurs CMC et de faire office par la même occasion de hub USB, et l’autre sera utile pour assembler une CC121 et deux CMC. Pas mal, mais un peu cher (environ 150 €, soit le prix d’un contrôleur CMC !). On pourra aussi clipser deux CMC ensemble grâce à deux morceaux de plastique livrés.
Pour l’installation, rien à signaler sur notre iMac, c’est transparent et ça fonctionne sans broncher ! L’installeur est commun aux 6 CMC, et deux d’entre eux profitent d’un éditeur spécialisé : le PD (Pad Controller) et le QC (Quick Controller). Ces petits bouts de software permettront à l’utilisateur de modifier les paramètres MIDI contrôlés par les potards rotatifs ou les mini-pads.
Mais commençons par celui qui intéressera sans doute le plus grand nombre : TP, alias Transport Controller.
Tony Parker
Les fonctions dont on se sert le plus dans un séquenceur, ce sont forcément les boutons de transport : lecture, stop, enregistrement, marqueurs suivant, précédent… Ce TP sera donc un must have pour la plupart des utilisateurs de Cubase ! Alors concrètement, qu’est-ce qu’on pourra faire avec contrôleur ? Pas mal de choses : insérer un marqueur, avancer ou reculer d’une mesure, place des délimiteurs suivant l’évènement sélectionné (touche P sur le clavier), placer la tête de lecture sur le délimiteur gauche ou droite, rembobiner ou faire avance rapide… On pourra aussi accéder au marqueur précédent/suivant, copier la piste sélectionnée ou en créer une nouvelle mono, activer le métronome et mettre l’enregistrement et la lecture en boucle. Une touche shift permettra d’accéder à certaines fonctions comme « retourner au début », « aller à l’évènement suivant/précédent », ou encore accéder aux touches F1-F4. On a donc accès aux principales fonctions, même si on aurait aimé pouvoir accéder directement à certains marqueurs (pour ceux qui n’ont pas de pavés numériques). À l’utilisation, il faut un peu de temps pour s’habituer à ces nouveaux contrôleurs, mais une fois pris en main, ce TP se révèle efficace.
On termine avec le fader tactile, ou curseur, qui propose pas moins de 6 modes de fonctionnement. D’un point de vue technique, sachez que ce curseur possède une définition de 128 pas et qu’il est possible de la doubler en maintenant le bouton shift afin d’accéder à un contrôle plus précis. Le premier mode est le Jog, qui commande la Jog Wheel. On gros, plus vous glissez votre doigt rapidement sur le curseur, plus vous avez/reculez vite dans votre projet. Ce mode permet d’avancer/reculer doucement, afin de se caler précisément dans votre projet. Le mode Shuttle, commande le…Shuttle ! Si vous laissez votre doigt sur le curseur, ça continue d’avancer/reculer, et plus votre doigt est loin du centre du fader, plus vous avancez/reculez rapidement. La troisième mode dénommé « locate » permet de déplacer plus rapidement et silencieusement la tête de lecture du projet, et sa place est affichée directement sur le curseur. Les deux modes suivants, « défilement » et « zoom », contrôlent l’affichage des événements dans votre fenêtre Cubase. En gros, ils remplacent l’ascenseur horizontal et le petit curseur placés tout en bas de la fenêtre. Enfin, le dernier mode appelé « tap tempo » permet de, vous l’aurez deviné, définir le tempo en tapotant sur le curseur tactile. À l’utilisation le curseur est parfois un peu décevant, car il ne répond pas toujours très bien, comme en mode « locate » ou le curseur de lecture « saute » de temps en temps. Les modes Jog et Shuttle s’en sortent en revanche plutôt bien !
Passons maintenant au FD.
Faye Dunaway
Ce deuxième CMC permet de contrôler les faders de quatre pistes, et même jusqu’à 16 avec quatre unités. Ces faders tactiles peuvent fonctionner suivant deux modes : capture (par défaut) et saut. Le premier fonctionne comme un fader hardware et il faudra attraper le fader virtuel (représenté par une LED rouge) pour ensuite le faire glisser. Le mode saut permet de cliquer directement sur la valeur désirée, méthode moins précise, mais plus rapide. La touche shift permet en mode capture d’augmenter le nombre de pas (jusqu’à 1024) afin d’améliorer la précision. Les quatre boutons du bas autoriseront le changement de canal ou de banque (4 canaux), et la touche shift permettra d’activer d’autres fonctions parfois sympathiques : on pourra ainsi passer en mode vu-mètre afin de voir les niveaux des pistes, rendre muette une piste ou la mettre en solo (shift + tapotement). Les faders tactiles restent quand même moins intuitifs que des faders physiques motorisés, et si l’on veut contrôler plus de 4 pistes, l’addition commence à devenir salée.
Christophe Hondelatte
Le Channel Controller intéressera une bonne partie de nos lecteurs, car il permet d’avoir sous la main tous les paramètres d’un canal sélectionné. Ainsi, on a directement accès au mute, solo, à l’écriture et la lecture de l’automation et au bypass des inserts, envois et de l’EQ (celui de Cubase). Le bouton « e » permet d’accéder à la page de configuration de la voie, et il sera aussi possible d’armer la piste en enregistrement et d’activer le monitoring d’entrée. Ajoutez à cela un potard de panoramique, un bouton pour freezer la piste, et un dernier bouton pour ouvrir ou fermer un dossier de piste. Petit détail sympa sur la panoramique : le potard possède une LED verte et celle-ci fait varier sa luminosité suivant la valeur du paramètre (éteinte au centre, lumineuse à gauche ou droite). La touche shift permet d’accéder aux touches F1 à F8, et donc à pas mal de fonctions utiles, et le fader tactile fonctionne de la même manière que sur le FD. Associé au TP, vous aurez accès aux fonctions principales de Cubase !
Andrés Iniesta
Ce CMC est centré sur l’AI Knob, potard que nous avons déjà croisé sur certaines interfaces Steinberg. Ce bouton à tout faire permet de régler le paramètre pointé par votre souris. On peut agir ainsi sur les faders de la console, les EQ et même les paramètres de vos VST(i). C’est assez pratique à l’utilisation, de plus ce potard ne sert pas qu’à ça. En mode « jog », il permet de déplacer la tête de lecture du Cubase et en mode « vol » il permet de modifier le volume de la voie Master du séquenceur. Le bouton « lock » permettra de bloquer l’action du IA knob sur le paramètre désigné par l’emplacement de votre souris. Ainsi, vous pourrez déplacer cette dernière et continuer à modifier le même paramètre.
On termine avec les quatre touches F1-F4, et les deux flèches permettant de naviguer dans les menus qui apparaissent lorsque l’on appuie sur l’IA Knob. Si aucun projet n’est ouvert, on accède à l’assistant, sinon on accède au préréglage de piste. Si une fenêtre VST/VSTi est ouverte et active, on ouvre l’explorateur de préréglages. Ce CMC pourra donc vous intéresser si vous aimez le concept de l’IA Knob, pour les autres passez votre chemin.
On termine avec les deux CMC possédant un éditeur spécifique.
Patrick Dewaere
C’est bien une mini MPC que nous avons là : 4 rangées de 4 pads sensibles à la vélocité ! Grâce au CMC-PD Editor, il sera possible, en mode normal, d’affecter à chaque pad une note MIDI et de sauver jusqu’à 8 configurations (8 parmi les 16 banques disponibles). On pourra aussi choisir entre 16 courbes de vélocité. En mode 4Velocity, il sera possible de jouer 4 notes (les colonnes) suivant 4 vélocités prédéfinies (les lignes). On utilisera ce mode pour la programmation de batteries virtuelles, par exemple. Le potentiomètre permettra d’éditer les données des banques (notes, vélocités…) ou de se promener dans les menus de préréglages apparaissant une fois le bouton « browse » actionné. À noter que l’on pourra utiliser les pads comme touches de fonctions dans Cubase, pour cela il faudra aller du côté du menu « raccourcis clavier ».
À l’utilisation, il vaut mieux replier le pied sous peine de voir le CMC-PD se faire la malle. Nous avons apprécié le fait que les pads s’illuminent d’une couleur différente suivant la vélocité (vert, orange ou rouge), mais nous pensons que le contrôleur est un peu trop petit et léger pour programmer des séquences un peu complexes. Les gros doigts passeront leur chemin ! Si vous n’avez pas de clavier MIDI doté de pads, le CMC-PD est une solution à envisager afin de programmer rapidement quelques séquences MIDI, tranquillement chez soi ou en déplacement grâce à son poids plume et sa taille réduite.
Quincy Combs
On termine avec le CMC-QC destiné à piloter l’égaliseur et les « contrôles instantanés » de Cubase. On pourra aussi s’en servir afin de contrôler d’autres paramètres MIDI grâce à l’éditeur logiciel fourni. Ce dernier permettra d’assigner un numéro de changement de commande (CC number), un canal MIDI, une valeur maximum et minimum pour chaque potentiomètre. On peut donc potentiellement contrôler n’importe quoi avec les 8 potards, sympa ! On pourra aussi modifier le comportement de la LED située sur le potard : sa luminosité peut suivre 4 courbes différentes, suivant que l’on affecte le potard à une panoramique ou un gain, par exemple.
Le CMC-QC est muni de trois modes : le QC afin de piloter les contrôles instantanés du canal sélectionné dans Cubase (voir test de Cubase 6 pour en apprendre plus à propos des contrôles instantanés) et donc 8 paramètres au choix, le mode EQ pour régler l’égaliseur quatre bandes intégré au séquenceur et enfin le mode MIDI qui permettra au CMC-QC d’utiliser les valeurs que l’on a rentrées dans l’éditeur. Le petit boîtier devient alors un contrôleur MIDI polyvalent.
En mode EQ, le bouton f/Q permettra de régler, avec les potards du bas, la largeur de bande ou la fréquence, tandis que les potards du haut modifieront le gain de chaque bande. Le bouton Shift vous autorisera à activer/désactiver certaines bandes de l’égaliseur. On retrouve aussi les quatre boutons F1-F4, les deux flèches pour changer de canal, et la possibilité d’activer la lecture et l’écriture de l’automation.
Petit détail pratique : le bouton f/Q Learn permet, en mode QC, d’affecter le paramètre pointé par votre souris directement au premier potard tourné. Cela permet de gagner pas mal de temps sous Cubase lorsque l’on programme l’affectation de chaque potard. C’est un peu comme si on avait 8 IA Knob sous la main, toutefois cette fonction n’est seulement compatible qu’avec la dernière version de Cubase.
Grâce à l’éditeur logiciel, ce CMC-QC pourra vous être utile même si vous n’êtes pas un adepte de l’égaliseur intégré de Cubase. Que ce soit en mode Quick Control pour les heureux possesseurs de la 6e version du séquenceur ou en mode MIDI, le contrôleur peut satisfaire les maniaques de VST et VSTi ! Quand on voit ce petit QC, on trouve que l’AI a d’un seul coup moins d’intérêt, du moins pour les utilisateurs de Cubase 6. Le seul point négatif du QC concerne l’espacement des potards, trop faible à notre goût.
On termine avec deux détails que nous avons constatés et qui touchent tous les CMC : il faut redémarrer Cubase si on branche/débranche un CMC, et les PD et QC gardent en mémoire les paramètres modifiés avec les éditeurs, même si on les débranche.
Conclusion
Avec ces 6 CMC, Cubase propose un système de contrôleurs modulaire et sympathique : chacun choisit ses CMC préférés suivant son utilisation du séquenceur. À 150 € l’unité, il faut cependant rester sage, car l’addition peut vite devenir salée, surtout si l’on craque pour une « frame » ! Les faders tactiles du FD restent moins sympas à utiliser que de « vrais » faders, la MPC est un peu trop petite à notre goût et l’AI se fait un peu éclipser par le QC pour les utilisateurs de Cubase 6. En revanche, nous avons aimé les TP, CH et QC qui sont de belles réussites.