Nous avons vu que pour des raisons d'orchestration (délégation de la fondamentale à un instrument chargé de la basse) ou de simplification (allègement des voicings), l'on pouvait retirer toutes sortes de notes à nos voicings en fonction de nos besoins. En parallèle, je me suis efforcé durant les derniers articles de vous présenter une utilisation plus concrète des concepts théoriques évoqués, avec en l'occurrence une mise en pratique claviéresque. Dans ce cadre-là, je me vois amené à vous présenter deux nouvelles formes de modifications de voicings. Vous verrez, vos enchaînements d'accords au clavier ne vous auront jamais semblé aussi aisés !
Remplacement de la fondamentale par la quinte
Revenons un poil en arrière dans notre étude de la construction de voicings et ré-intégrons momentanément la fondamentale dans le voicing que nous allons jouer sur notre clavier. Nous avons vu par le passé que l’enchaînement cohérent de certains accords impose souvent d’effectuer des renversements. Oui, sauf que parfois cela ne suffit pas !
Prenons l’exemple suivant :
Nous avons un II-V-I tout à fait banal ou presque. Il s’agit de trois accords de septième dont nous avons retiré la quinte pour commencer déjà à aérer l’harmonisation. Toutefois, le voice-leading dans les deux voix inférieures n’est pas des plus satisfaisants (mouvement conjoint parallèle ascendant puis mouvement disjoint parallèle descendant). Sans compter qu’ergonomiquement, on a vu mieux. Pour améliorer les choses, je vous propose de redonner sa quinte à l’accord de Ré dominante 7, et de lui retirer sa fondamentale. On lui rajoute donc un La, et on lui retire le Ré.
Et voici ce que l’on obtient :
La stabilité de l’enchaînement s’en trouve renforcée, notamment grâce à des voix inférieures qui ont fortement réduit leurs mouvements. Ceux-ci ne se résument en effet plus qu’à une descente parallèle conjointe entre les deux derniers accords. Et vous pouvez constater qu’au niveau du doigté également, l’enchaînement des différents accords se fait de manière infiniment plus douce et cohérente.
La même chose avec un doigté de main droite :
Accords de septième à deux sons
Allez pour terminer, nous allons revenir à des voicings basés sur des accords de septième sans fondamentale, ou plutôt dont la fondamentale a été confiée à un autre instrument que le clavier. Et on les réduira même à leur strict minimum, à savoir deux notes : la tierce et la septième de chaque accord. On se rappellera bien entendu que ces degrés sont ceux qui caractérisent un accord de septième en dehors de la fondamentale (voir article 35).
Dans l’exemple suivant, nous allons voir comment nous pouvons fabriquer une cadence de II-V-I (donc une demi-cadence suivie d’une cadence parfaite) avec un enchaînement d’accords de deux notes, tout en bénéficiant d’une bonne ergonomie pianistique.
Notre voice-leading reste ici très compact, avec aucun changement de tessiture. Nous n’avons qu’un simple mouvement conjoint descendant dans la voix supérieure entre le premier et le deuxième accords, suivi d’un mouvement du type entre le deuxième et le troisième accords.
Ici la même chose avec la main droite :