Vous l’avez probablement remarqué, les campagnes de financement participatif se multiplient dans le monde de l’audio. Vous pouvez ainsi régulièrement découvrir dans le cadre de nos news des produits plus ou moins innovants propulsés sur des plateformes comme KissKissBankBank ou Indiegogo. Cette pratique étant amenée à se développer encore plus, nous avons décidé de tester des produits issus du crowdfunding. On débute donc avec l’iSolo, un système de sonorisation de guitare acoustique particulièrement complet et personnalisable.
C’est en février dernier que l’iSolo a achevé sa campagne sur Indiegogo. Avec $18 650 récoltés, l’équipe de Taïwanais derrière le produit a réussi son pari initial, puisque le projet a été financé à 101%. L’iSolo est un système visant à amplifier le son de votre guitare acoustique. Il est proposé sous forme de trois kits différents, incluant ou non trois appareils distincts, mais complémentaires. Détaillons cela !
Un nouvel espoir
Tout d’abord, l’iSolo se compose d’un transmetteur-micro. Il s’agit d’un tout petit boîtier plutôt élégant équipé d’une tige aboutissant sur un microphone, et d’une petite antenne pour envoyer le signal capté par le micro sans aucun fil. Il suffit alors de placer le boîtier sur la table de votre instrument via un petit système adhésif, et d’orienter la tige au coeur de la rosace pour diffuser le son de l’instrument. En effet, la tige est pliable dans de multiples directions, et s’adapte à la forme que vous lui donnerez. L’atout principal de ce système est de pouvoir modifier le son en plaçant différemment la tige et son micro : plus ou moins profondément dans la rosace, proche des cordes, plutôt vers les aigus ou vers les graves, etc. La tige semble solide et devrait pouvoir encaisser de nombreuses manipulations au fil du temps. En revanche, la petite antenne paraît fragile, mais elle n’a pas vocation à être touchée. Le boîtier possède en plus un petit bouton pour l’allumer, ainsi qu’un sélecteur trois positions pour modifier le gain. Enfin, il est doté d’une entrée micro-USB pour être rechargé (un câble USB est inclus).
Le deuxième appareil est un récepteur USB. Conçu pour l’enregistrement, il s’agit d’une simple clef connectée sans fil au transmetteur-micro. En la branchant à votre ordinateur, vous pourrez directement enregistrer le son capté par le transmetteur dans une STAN ou tout autre logiciel.
Le troisième appareil est un récepteur conçu pour les prestations live. Équipé d’une imposante antenne, il possède huit canaux pour être connecté sans fil au transmetteur micro. Étant donné qu’il est équipé d’une sortie Jack, il peut être branché à un système son et ainsi vous accompagner sur scène. Dans cette optique, un potard de volume et un autre pour couper les fréquences basses sont disponibles.
Comme je vous l’indiquais, l’iSolo est disponible en trois versions. La première comprend un transmetteur-micro et un récepteur USB. Ce kit destiné à l’enregistrement est proposé au tarif de $199, soit 180€ environ (les frais de port sont gratuits vers la France). Le deuxième kit comprend un transmetteur-micro et un récepteur Live. Il est manifestement pensé pour le live, et son tarif est de $299, soit 270€ environ. Enfin, le troisième kit comprend le transmetteur-micro, le récepteur USB, et le récepteur Live. Son prix est de $349, soit 315€ environ. C’est cette dernière version que nous avons reçue.
Joue-la comme Apple
Le kit est livré dans un joli emballage, certes sans matières nobles, mais fonctionnel et esthétique. J’ai tout de suite été marqué par le nombre de petits accessoires fournis. Il y a une petite housse pour transporter le transmetteur-micro, un câble USB pour recharger ce dernier, et une alimentation 9V classique (mais format américain) et sa version USB pour fournir de l’énergie au récepteur Live. Sans rivaliser avec la qualité (cher payée) des produits Apple, l’iSolo semble s’inspirer de l’écosystème créé par la firme à la pomme. L’on trouve même deux petites plaques adhésives de remplacement pour le transmetteur, et un petit clip pour l’attacher différemment.
D’ailleurs, parlons-en ! La plaque adhésive est très efficace. On colle très facilement le boîtier sur la table, et malgré mes multiples collages/décollages cela fonctionnait toujours, et sans laisser aucun résidu. Pour ceux qui préféreraient laisser la table de leur guitare inviolée, un petit clip peut remplacer la plaque adhésive. Il faut alors placer le boîtier à l’extrémité de la rosace et le laisser pendre. C’est un petit plus fastidieux à installer que le système adhésif, mais c’est fait en quelques secondes et l’appareil est plutôt stable.
Le manuel fourni est uniquement en anglais et en mandarin standard (langue officielle de la Chine et de Taïwan). Il faudra donc s’armer de courage pour les non-anglophones, mais peut-être maitrisez-vous le mandarin ? Dans tous les cas, le fonctionnement de l’iSolo étant assez simple, vous devriez instinctivement comprendre son fonctionnement et les quelques schémas sont assez explicites pour quiconque connaît un tant soit peu le monde de l’audio.
Plug and play
L’appairage entre le transmetteur et l’un des deux récepteurs est très facile et rapide : il suffit d’approcher les deux appareils et d’appuyer brièvement sur le bouton d’activation du transmetteur. Il n’est pas possible de brancher les deux récepteurs ensemble, il faudra donc faire un choix. Commençons avec le récepteur USB.
La clef est tout de suite reconnue par l’ordinateur en tant que périphérique audio. Après avoir appairé le transmetteur et le récepteur, j’ai tout de suite tenté d’enregistrer avec ma STAN habituelle : Studio One Prime. Manque de bol, le logiciel ne reconnaissait pas la connexion USB, alors que l’ordinateur n’avait aucun problème pour cela. J’ai donc tenté avec Garage Band, et là, tout fonctionnait. Ce n’est pas la première fois que je rencontre ce problème avec Studio One, et il est probable que cela provienne du logiciel et non de l’iSolo. Les sons qui suivent ont donc été enregistrés sous Garage Band. J’utilise une guitare électroacoustique Cort Grand Regal que vous pouvez découvrir ici en test sur Audiofanzine. Il s’agit du modèle GA5F-BW.
Dans les extraits qui suivent, nous allons nous pencher sur l’influence du placement du micro dans la rosace. Dans le premier exemple, j’ai mis le micro assez proche des cordes, et la capsule en direction de celles-ci. Dans le deuxième exemple, j’ai gardé la même position de micro, mais en dirigeant la capsule vers le fond de la guitare. Dans le troisième extrait, je dirige à nouveau la capsule vers les cordes, mais le micro est cette fois-ci placé au fond de l’instrument.

- 1 – iSolo micro vers rosace / iSolo mic mic pointing towards soundhole00:24
- 2 – iSolo micro vers fond / iSolo mic pointing towards tail00:25
- 3 – iSolo micro vers rosace placé au fond / iSolo mic at tail pointing towards soundhole00:25
Dans les deux exemples suivants, j’ai placé le micro assez profondément dans la guitare, mais en le déplaçant vers les cordes graves pour le premier son, et vers les cordes aiguës pour le second son.

- 4 – iSolo micro au fond vers les graves / iSolo mic at tail pointing towards low strings00:25
- 5 – iSolo micro au fond vers les aigus / iSolo mic at tail pointing towards high strings00:25
Terminons l’essai avec le récepteur USB en modifiant le gain sur le transmetteur. Dans le premier extrait, le gain est placé au minimum, puis j’utilise le deuxième palier dans le deuxième extrait, et le gain au maximum dans le troisième extrait.

- 6 – iSolo strumming gain faible / iSolo strumming low gain00:30
- 7 – iSolo strumming gain moyen / iSolo strumming medium gain00:30
- 8 – iSolo strumming gain fort / iSolo strumming high gain00:30
Le son produit par l’iSolo dépend énormément du placement du micro et de l’orientation de la capsule. Bien réglé, je trouve le son convaincant, plutôt équilibré, malgré un certain manque de brillance. Le souffle est inexistant même avec le gain au maximum, ce qui est très appréciable. Je n’avais pas adapté mon jeu aux différents gains, ce qui explique les saturations dans les extraits sonores. Par contre, l’on entend beaucoup les frottements de la main et du bras sur la caisse, les éventuels coups de médiator, etc. Le guitariste devra impérativement adapter son jeu pour obtenir un son très propre, ou à l’inverse être plus naturel et resté ainsi fidèle aux aléas liés à l’utilisation d’une guitare. De plus, le micro captant beaucoup les sons d’ambiances, il faudra se trouver dans un environnement silencieux pour assurer une bonne prise (on m’entend souvent frotter ou cogner la caisse). Notons qu’aucune latence n’est perceptible. Concernant le sans-fil, cela fonctionne à merveille jusqu’à 6 ou 7 mètres de distance. Au-delà, il advient quelques coupures qui s’avèrent rédhibitoires autour des 10 mètres.
Nous allons à présent utiliser le récepteur Live. Nous en profiterons pour comparer trois prises de son différentes : les sonorités captées par l’iSolo, le son de l’électronique embarquée au sein de la Cort, et enfin la captation d’un micro Neumann U87. Les trois prises ont été effectuées en même temps, le tout branché dans une carte son Universal Audio Apollo 8. Voici ce que cela donne.

- 9 – Comparaison iSolo strumming / Comparison iSolo strumming00:17
- 10 – Comparaison Cort strumming / Comparison Cort strumming00:17
- 11 – Comparaison U87 strumming / Comparison U87 strumming00:17
- 12 – Comparaison iSolo arpèges / Comparison iSolo arpeggios00:23
- 13 – Comparaison Cort arpèges / Comparison Cort arpeggios00:23
- 14 – Comparaison U87 arpèges / Comparison U87 arpeggios00:23
C’est le jour et la nuit entre l’iSolo et le piezo Cort. L’iSolo l’enterre allègrement. Le face à face avec le Neumann est par contre défavorable à l’iSolo, et la guitare ressort comme terne. Le manque de brillance déjà perçu saute aux oreilles. Le rendu de l’U87 est certes nettement supérieur, mais il s’agit d’un micro à 2500€, et l’écart de prix n’est certainement pas proportionnel à l’écart de qualités sonores. Au regard de son prix, l’iSolo s’en sort donc bien.
Écoutons à présent l’impact du Low Cut présent sur le récepteur Live. Dans l’extrait qui suit, il est tout d’abord placé au minimum, soit 30 Hz, puis à 100 Hz, puis à 200 Hz, et enfin à 300 Hz. Je reviens ensuite au réglage minimum pour comparer. Étant donné que je bougeais pour modifier le bouton, on entend particulièrement bien mon corps frotter contre la guitare.

Le Low Cut est efficace, et pourrait être utile lors des balances. Concernant le sans-fil, il existe quatre canaux « proches » et quatre canaux « lointains ». Il est donc possible de brancher plusieurs transmetteurs-micro iSolo. Les quatre premiers canaux sont censés fonctionner jusqu’à 5 mètres, alors que les autres marchent jusqu’à 10 mètres. Dans les faits, les distances évoquées par le constructeur s’avèrent justes. Le mode proche fonctionne parfaitement jusqu’à 5 mètres de distance. Au-delà, cela devient plus compliqué avec quelques petites coupures. Mais rien n’est catastrophique jusqu’à environ 10 m. En mode loin, même à 10m je n’ai rencontré aucune coupure. Ce mode est donc très efficace, mais cela a un prix : le mode proche offre une latence de 12 ms contre 20 ms pour le mode lointain. Effectivement, j’ai ressenti une légère latence. Si le live parait tout à fait envisageable en mode proche, il est un peu plus risqué en mode lointain. La sensibilité du micro peut aussi faire craindre des feedbacks intempestifs. Des essais seront donc nécessaires.
Middle Class Hero
L’iSolo est un bon produit doté de deux atouts essentiels : la connectivité sans fil et la possibilité d’orienter le micro à sa guise. Ajoutons également que les trois appareils qui le composent sont ergonomiques et faciles d’accès. Par exemple, un indicateur LED présent sur le récepteur Live indique le niveau de batterie du transmetteur-micro. La multitude de petits accessoires fournis est un petit plus appréciable, d’autant que l’iSolo est amené à évoluer grâce à d’autres petits objets. Ainsi, de nouveaux stands sont en préparation pour par exemple placer le transmetteur au milieu de la rosace, à la manière d’un micro classique pour guitare acoustique. Ajoutons également que l’iSolo existe pour violon avec un microphone légèrement différent directement intégré au boîtier transmetteur. Les concepteurs de la machine prévoient aussi de sortir de nouvelles versions pour d’autres instruments acoustiques.
J’aime beaucoup le fait que l’iSolo puisse s’adapter à différentes plateformes : ordinateur, système son, et même smartphone iOS ou Android par l’intermédiaire du récepteur USB et d’un adaptateur USB (non fourni, pour une fois !). Quant au son, il s’avère convaincant sans éblouir. Comparé à une véritable prise micro de qualité, il paraitra terne. Il faudra aussi prêter une attention particulière aux sons de la pièce, et aux bruits de frottement sur la caisse omniprésents. Mais étant donné les nombreuses fonctions de l’iSolo, je trouve l’équilibre global assez réussi : le son est correct, et l’on peut faire facilement beaucoup de choses avec. Reste la question du prix.
Le kit d’enregistrement à 180 € me parait très intéressant. Vous trouverez peu de solutions aussi efficaces à ce prix, et au niveau sonore vous en aurez pour votre argent. Mais vous ne pourrez pas faire de live… Un musicien expérimenté préférera certainement utiliser un micro d’enregistrement classique, mais cela nécessite une carte son, un bon préampli, etc. Le débutant ou le confirmé qui souhaitera peu investir sera comblé par l’iSolo. Le kit Live à 270 € représente un investissement plus conséquent, mais il est également plus polyvalent : vous pourrez faire de la scène et vous enregistrer par l’intermédiaire d’une carte son. La qualité sonore n’évolue pas, mais les possibilités sont démultipliées, et ce kit me parait donc lui aussi être un bon choix. Enfin, le kit « Live and recording » s’adresse à un public plus restreint : les musiciens s’enregistrant et faisant de la scène, mais ne possédant pas de carte son, ou souhaitant s’enregistrer rapidement et sans aucun fil. Le prix n’est pas excessif comparé aux autres kits (315 €), mais cela commence à représenter une somme qui pourrait être investis dans d’autres produits qui feraient moins de choses, mais probablement mieux.
En fin de compte, ce premier test d’un projet issu du financement participatif est une belle surprise. Malgré quelques défauts, l’iSolo est séduisant et original, et pour peu qu’il corresponde à vos besoins, il devrait vous satisfaire. Et puisqu’il n’y a pas de mal à se faire du bien, et surtout à introduire son micro dans des rosaces, je lui attribue la note de 4/5.