Avez-vous l’âme d’un cowboy ? Aimez-vous sentir le poney et le vieux cuir ? Transpirer en plein cagnard sous un chapeau moisi tout en chevauchant d’improbables montures, pour retrouver vos gonades définitivement greffées au tissu de votre pantalon ?
Ça tombe bien, moi non plus ! Moi je suis plus du genre justicier bassiste, un musicien de l’Ouest qui ne recule devant rien sauf l’effort et qui respecte assez les étalons et les taureaux pour ne pas leur chercher des noises. Même un dimanche tôt le matin, après une nuit passée au saloon à jouer du piano ivre. Mon Bronco à moi, c’est un combo de chez Fender, qui ne mange pas d’avoine et qui crache quarante watts quand on y branche une basse. Allez, comme on dit dans l’ouest : Hihaaaa !
Petit poney
Il est tout gris et tout petit… Enfin petit pas tant que ça : l’animal pèse bien ses treize kilos pour le gabarit d’un tonneau de vingt litres de bourbon (28 X 46 X 39cm). C’est un combo à l’allure sobre : un tolex gris foncé et une grille métallique noire, seulement huit potards cachés en arrière-plan, pour trois boutons qui clignotent discrètement. On passerait presque devant sans le remarquer, un peu comme une marmotte croisée au milieu d’une plaine. En bref, voilà un combo de plus dans un catalogue qui en comprend déjà une petite dizaine. Et qui propose soixante-quinze watts pour un prix quasi similaire, j’ai nommé le Rumble 75.
Alors, pourquoi lui préférer une plus petite puissance, avec une gamelle de dix pouces plutôt que de douze ? On ne nous prendrait pas pour des buses, nous les bassistes de l’ouest ?
« Halte-là dit le shérif, tu fais fausse route le kid ! Le Bronco, ce n’est pas un combo comme les autres. Ptioufff ! (ça, c’est le bruit du shérif qui crache…)
– Bah alors j’y gagne quoi dans l’histoire ? Parce que quitte à être plumé, autant aller au saloon pour jouer au poker…
– Avec ça mon gars, tu peux chevaucher dans la pampa de la clé de Fa tout en sifflant elle descend de la montagne à cheval de vingt-quatre manières différentes. Et ça, ce n’est rien ! Si tu le branches sur ton ordinateur via le port USB, tu peux t’en servir comme interface sonore et moduler autant de presets que tu voudras, pour les partager sur le Web grâce au logiciel Fuse. Il a une dizaine d’effets, huit modélisations d’amplis, un accordeur intégré et une version d’Ableton Lite est fournie avec.
-Non d’une Winchester, vous en savez des choses pour un shérif !
-C’est normal, je vais sur Audiofanzine quand il n’y a personne sur qui tirer… »
Donc, ce petit combo fait tout ça, pour une poignée de trois cents euros. Il va falloir chevaucher vers le couchant pour remonter sa piste, que l’on me donne une mule et mon fusil, pas de french cancan pour moi ce soir…
Et pour quelques potards de plus
Le premier truc qui me plaît bien, c’est qu’en surface, il n’y a rien qui laisse deviner une telle usine à gaz. Comme je l’ai dit plus haut, la façade des contrôles est d’une simplicité élémentaire : un gain, trois bandes d’égalisation, un volume général, un potard cranté, un seuil de compression et un niveau pour les effets. Les trois boutons témoins servent respectivement à mettre en banque un preset (comprenant l’étage de modélisation, l’égalisation, le niveau compression, le type d’effet et son niveau et ne prenant pas en compte le master) avec le bouton “SAVE”, à sortir du mode accordeur en pressant “EXIT” et à calibrer la fréquence du délai ou de l’effet vibratone en tapotant sur TAP. Il y a bien une douzaine de petites LEDS témoins, mais un grand soulagement visuel résulte de l’absence d’écran LCD embarqué. C’est plus fort que moi, mais je trouve qu’avoir un affichage digital sur un combo est aussi laid et affligeant que de porter une veste à franges et ce, depuis 1977 (mes excuses à Dick Rivers). C’est comme ça, je n’y peux rien, ça relève d’un anachronisme esthétique qui fouette les yeux. Le Bronco, quant à lui, ne fait pas dans la faute de goût et reste à l’image de ce à quoi un combo de basse doit ressembler.
Il y a trois connectiques en façade (instrument, entrée auxiliaire et sortie casque), un line out symétrique à l’arrière et une entrée pour le Footswitch (un sélecteur unique) juste à côté de ce dernier. Je n’oublierai pas l’entrée USB, qui s’affiche discrètement sur le tableau de bord. Sur ce panneau, il est possible de sélectionner sa configuration dans une banque de vingt-quatre presets en actionnant le potard du même nom. Les huits LEDs et les trois couleurs (vert, rouge et jaune) qu’elles affichent permettent d’effectuer ce choix. Pour la mise en banque, il suffira de presser longuement sur Save, de choisir l’emplacement du preset et d’appuyer à nouveau sur SAVE (ou de presser EXIT pour annuler). La mémorisation prendra alors en compte l’égalisation, le niveau de compression et l’effet. À ce rayon, le BRONCO 40 propose quatre étages de modulations. Le premier trio comprend Chorus, flanger et phaser ; le second dispose de deux enveloppe-filters et d’un octaver, puis deux delay et une reverb, suivis de trois combinaisons d’effets.
Un accordeur est intégré à ce combo et s’emploie le plus simplement du monde. Enfin, le Bronco 40 offre à son utilisateur, le choix de huit émulations d’amplis. Le Rumble (combo de la marque), le 59 Bassman (une référence vintage de Fender), le Bassman TV fifteen (une autre, tout aussi rétro), le KGB 800 (un ersatz de Gallien), la fameuse Redhead (de la marque SWR), le Rocking Peg (qui joue sur les mots pour dire Ampeg), le non moins efficace Bassman 300 (connu aussi sous la référence SUNN 300T) et un stack baptisé Monster. Chaque émulation embarque tous les réglages types des amplis modélisés. Évidemment, comme physiquement on ne dispose que de quelques contrôles sur l’ampli, toutes ces corrections s’effectuent en raccordant l’ampli à son ordinateur, grâce au logiciel Fuse fourni. Et c’est là que la magie opère…
Assisté par ordinateur
Une fois l’ampli connecté à son PC, il suffit de lancer Fuse (téléchargeable sur le site du constructeur) pour accéder à un outil formidable. Premier gros avantage du système, on entend toutes les corrections logicielles en simultané sur l’ampli. Second et troisième gros points forts : Fuse débride complètement les fonctions du Bronco 40, tout en restant facile d’utilisation. Afin de vous présenter la chose de la manière la plus visuelle possible, je vous propose une petite vidéo didactique, qui m’évitera de rédiger dix pages de présentation. Vous constaterez au passage, que je suis bien meilleur rédacteur que voix off. Voici un résumé des fonctions Fuse, pour ceux qui préfèrent lire :
- Édition des Presets, accès aux différentes bibliothèques
- Accès au site communautaire de Fuse
- Modélisation des façades d’amplis simulés
- Réglages complets pour chaque ampli
- Modélisations et réglage des effets en version pédale ou Rack
- Mise en ligne des presets personnels et téléchargement pour importation
Coups de pouce dans la sierra
Passons maintenant aux tests sonores du Bronco 40. Le son de l’enceinte a été repiqué par un micro Beyer M88, les presets utilisés pour cet essai sont exclusivement d’usine. Les réglages de l’instrument sont à plat et la capture passe par une configuration de micro en double Jazz-Bass :
-Voici trois extraits mettant en exergue les corrections apportées par l’égaliseur du Bronco
- A plat00:32
- Basses dans ta face00:35
- Bosse dans les mediums00:34
– Des exemples sonores des simulations d’ampli, avec leur réglage d’usine :
- Rumble00:25
- Bassman 5900:18
- Bassman TV00:19
- SWR RedHead00:13
- Rockin Peg Mute00:26
- KGB00:19
– Et quelques effets embarqués :
- Chorus00:25
- Flanger00:22
- Phaser00:22
- Filtre 100:10
- Octaver00:06
- Delai00:12
- Effet Reverb00:22
- Mix Octaver/OD/Reverb00:21
- Mix envelope/reverb00:21
- Mix Reverb/Chorus00:20
- Mix octaver/fuzz00:22
Voici le Bronco 40, tel qu’il sonne après déballage. Évidemment, la machine étant intégralement paramétrable, il n’est pas accessoire de peaufiner au mieux ces réglages. Obligé de me déplacer en studio pour ces prises, je n’ai pas eu l’occasion de mettre à bien les options qu’offre Fuse et ne peut vous présenter que des presets d’usine. Mais je peux vous assurer qu’une fois à la maison et après avoir passé quelques heures sur mon Mac, j’ai pu obtenir des rendus assez bluffants pour un petit combo. La gamelle de dix pouces encaisse bien (j’ai insisté sur le Si grave sur les enregistrements, pour la mettre à rude épreuve), les fréquences diffusées s’étalent bien et les dimensions du caisson permettent de descendre sans baver. Je serais néanmoins dubitatif quant à l’intérêt d’une puissance de 40 watts, trop faible pour jouer avec un batteur qui sait frapper et un tantinet excessive, pour ce qui est de jouer seul à la maison.
L’ergonomie du tableau de bord nécessite de se familiariser avec l’affichage à LEDs et ses codes couleur. Mais une fois que l’on maîtrise les deux, on s’y retrouve complètement pour vraiment apprécier la sobriété d’un design classique qui ne s’encombre pas de trente-six potards. Le caractère de l’ampli ne sort pas des sentiers battus et reste dans un panel de sons standard (pour ne pas dire traditionnels). Le DSP n’impose pas une signature numérique au grain, sauf pour les effets qui restent loin d’un rendu analogique, mais qui peuvent (sur un malentendu) faire illusion. Les simulations d’ampli sont intéressantes et même si elles ne témoignent pas d’une fidélité intégrale, elles teintent tout de même le grain de manière significative.
Et pour quelques euros de moins…
Comme son homologue pour la guitare (le mustang), le BRONCO 40 propose pour 309 euros (prix indicatif TTC) une alternative intéressante à l’offre de marché actuelle. Pas assez puissant pour assurer les répétitions en groupe, il sera parfaitement employé en tant qu’ampli de travail. Ces qualités sonores pourraient aussi être mises à bien au sein d’un home studio, pour enregistrer quelques grooves et profiter de la large palette qu’il peut diffuser. Ajoutez à cela l’outil informatique novateur, ergonomique et accessible qu’est le logiciel Fuse, la possibilité d’utiliser l’ampli comme interface sonore et une fabrication de qualité correcte, vous obtiendrez un rapport qualité prix assez attractif pour un public en quête d’un combo de salon de gamme supérieure.