Un brin de nostalgie m’empare alors que je tape ce banc d’essai. C’était Noël, j’avais 16 ans et sous le sapin m’attendait mon premier ampli. Pas un quinze watts, non un gros. Pour jouer en groupe, faire des concerts, me faire applaudir par un public en furie. Bref, arrêter de jouer dans ma chambre. L’ampli était plus imposant que le sapin, c’était un Fender BXR 300, un énorme combo sur roues acheté d’occasion. J’ai fait mon premier concert avec et bien d’autres souvenirs se sont joués sur ce quinze pouces. Et seize ans plus tard, je teste le Rumble 150 : le descendant du BXR qui s’adresse aux bassistes qui, comme moi à cette douce époque, cherchent un premier ampli pour jouer en groupe. Permettez donc cette petite larme…
Belle bête
Vingt-neuf kilos sur la balance, un format (34X58X60cm) qui en impose pour 150 watts efficaces. Un gros boomer de 15 pouces, un tweeter pour les aigus (justement ça manquait sur mon BXR) et de l’espace pour faire tourner la sauce et donner du coffre. Le fabricant a gardé l’évent en bas de caisse (si je ne me trompe pas, c’est la troisième génération du nom), viré les LEDs pimpants et surtout la moquette. À sa place, un tolex noir vient gainer l’objet. Tapisserie ou vinyle ? Chacun aura sa préférence sur la question. Pour ma part je n’aime pas les peluches ni passer l’aspirateur. Par contre, un tolex marque plus les coups. C’est donc un choix esthétique ou pratique.
La façade est sobre, entre la grille noire et le tableau de contrôle aux lettrines teintées de blanc, l’heure est à la modération et cela n’est vraiment pas un mal. Question corrections et connectiques, tout se passe devant et rien derrière ; mis à part l’alimentation. Les entrées et sorties sont complètes : une entrée instrument (avec son switch actif /passif), une boucle d’effet, une entrée auxiliaire RCA (vous pouvez y brancher votre PC, un lecteur MP3…), une sortie casque, une connectique footswitch (pour gérer la distorsion) et le Line Out, XLR s’il vous plaît.
Du côté des potards, il y a de quoi faire : un gain, la section distorsion (gain, balance et bypass), deux contours (au choix, une bosse dans les grave ou un creux dans les médiums), un égaliseur avec deux bandes médiums et un interrupteur de tweeter pour le couper au besoin.
Comme indiqué dans le titre, le Rumble 150 est équipé de quatre solides roulettes et de deux poignées latérales encastrées. Ces dernières sont à ressort, un peu fines à mon goût qui préfère les pommeaux bien larges. Mais la chose remplit correctement son office logistique. Ah les roulettes ! Si elles n’existaient pas, que deviendraient nos pauvres échines ? L’ampli comme le préampli, pour ce prix, est à transistors ; un gros ventilateur monté à l’arrière refroidit un peu bruyamment le circuit. Le bruit n’est pas assourdissant, mais bien audible lorsqu’on ne joue pas.
Alors quoi de neuf docteur ? Pour résumer, le Rumble 150 est plus puissant que son prédécesseur. C’est d’ailleurs toute la gamme qui à gagné en watts, sauf le Rumble 15. Donc cinquante watts de plus, qui ne gêneront personne et une distorsion s’il vous plaît. Le fabricant ne propose plus l’alternative du 2X10 pouces sur ce modèle, un choix justifié par la clientèle ciblée, plus à même de jouer lourd et fort que de faire dans la dentelle.
Pour terminer, je préciserai que ce combo est de fabrication chinoise, tout comme le rédacteur que je suis, dans certaines proportions. De visu, la finition et la réalisation générale sont correctement réalisées. Il ne me reste plus qu’à brancher ma basse pour vous faire entendre son ramage. Pour cet essai et afin de faire pratique, j’ai utilisé ma PB deluxe 5 US, un Boss RC-20 (mon fidèle sampleur sur scène) et un zoom H2.
Oui et deux jacks aussi, car il ne faut pas omettre l’indispensable.
Le Rumble 115, un ampli branché…
… à ma grosse cinq cordes, parce que vous le valez bien ! J’ai essayé de jouer sur un maximum de réglages, afin de pouvoir présenter toutes les possibilités tonales que propose le Rumble. Tout d’abord, parlons puissance pratique : jusqu’où peut-on se faire entendre là-dessus ? Comme je l’ai expliqué un peu plus haut, cet ampli à du coffre. Et le caisson aux larges dimensions permet un battement d’air propice à une grosse ampleur. Il en est de même pour le large évent frontal, qui occupe tout le bas de la caisse.
Personnellement, je trouve qu’il annonce bien sa puissance même si pour des raisons pratiques, je n’ai pu l’essayer avec un batteur. Le boomer ne perd pas en linéarité à large volume, j’ai fait un peu trembler les murs en jouant aux trois quarts de la puissance max et ça tient. Par contre le tweeter de deux pouces encaisse mal la sauce à ce niveau et se met un peu à saturer sous certaines notes. C’est un peu dommage même s’il n’est pas évident que ça le fasse avec toutes les basses. Je me demande donc quelle est la durée de vie de cette corne d’aigus, à ce régime constant et il me semble raisonnable de la couper pour ce type d’utilisation. D’où l’intérêt de l’interrupteur prévu à cet effet.
Pour finir sur la couverture sonore dont dispose le Rumble, je dirai qu’elle conviendra aux répétitions, siéra aux concerts dans les petites salles (café-concert, club) jusqu’aux salles moyennes (à condition de le repiquer, via l’XLR). Donc, de quoi être à l’aise pour vos premières performances scéniques. Évidemment ce constat dépendra de ce qu’utilisent vos camarades de groupe en matière d’amplification et du nombre de personnes qui animent votre formation.
Passons maintenant aux essais.
Le son droit (égalisation à zéro, pas de filtres) ne présente pas beaucoup de caractère. C’est un grain standard, assez linéaire pour que je reconnaisse la signature de mon double Jazz Bass.
Le tweeter souligne la brillance et “modernise” un peu le caractère plan-plan du grain qui se précise et se creuse légèrement. Ci-dessous, deux exemples de son droit, le premier avec Tweeter, le second sans.
Pour les extraits suivants, notez que je laisse le Tweeter ouvert. Son petit souffle caractéristique atteste sa présence à l’enregistrement. Les contours sont basiques, au nombre de deux sous forme de switchs, mais efficaces. On pourra au choix, voire simultanément (une option complètement dénuée d’intérêt), créer une bosse dans les graves (“Punch”) ou creuser le son d’une simple pression du doigt (“scoop”). Une correction rapidement accessible pour qui ressent le besoin de marquer des fondamentales fortes ou pousser sa petite ligne de Slap. Intéressant donc mais difficile à employer en plein milieu d’un morceau, puisque ce contrôle n’est abordable qu’en façade et ne peut être employé au pied, via le footswitch non fourni.
Passons maintenant à l’égalisation avec une seconde ligne de basse et cinq réglages différents, ici les contours sont coupés et je module exclusivement les quatre bandes du préampli. En premier, voici un petit rappel du son à plat.
Ensuite, la même ligne jouée avec le potard de graves aux deux tiers, les bas médiums aux trois quarts, les hauts médiums à un quart et l’aigu aux deux tiers. Un réglage type à la Pastorius (toutes prétentions et proportions gardées). En somme, un rendu qui s’en rapproche un peu.
La même chose en poussant les hauts médiums à la place des bas. Notez comme cela creuse le son et donne une approche complètement différente de l’extrait précédent. Seules les deux bandes médiums ont été inversées.
Maintenant, je pousse les graves aux trois quarts, réduit les deux bandes médiums à leur premier tiers et pousse aussi les aigus aux trois quarts afin de dynamiser le son. Ce réglage rend le jeu plus percussif, en poussant graves et aigus tout en réduisant le milieu du signal.
Pouces et cordes tirées apprécieront ce réglage.
Et enfin, une égalisation avec un petit peu de tout et pas grand-chose derrière : bande grave au tiers de sa course, idem pour les bas-médiums, les hauts médiums. Les aigus sont placés à un cran au-dessus de zéro.
Voici deux essais en Slap, l’un usant du contour (scoop) et l’autre passant par un réglage manuel de l’égaliseur (correction identique à l’extrait 8). Notez comme le switch de contour coupe intégralement les médiums, ce qui peu être regrettable au regard de certains (dont ma pomme) en matière de dynamique. Il peut être intéressant de garder certaines fréquences médiums, quand l’heure de bastonner sa basse à grands coups de pouce vient sonner.
L’utilisateur aura donc l’alternative d’un raccourci.
Et enfin, pour les amateurs de sons saturés, les bassistes de power-trio et autres adulateurs de gros sons vomitifs (ce qui n’est pas du tout péjoratif), voici un enregistrement de la saturation.
La ligne se répète sur cet extrait et je pousse les réglages de façon progressive. Passant d’un son Clean à une saturation à mi-puissance, puis poussés aux deux tiers et enfin aux trois quarts de la sauce. Dans cet exemple, j’incrémente les deux potards (Gain et Blend) de manière proportionnelle.
Conclusion
Pour vous donner mon impression à la suite de cet essai, je dirais que ce combo permettra à son utilisateur une belle palette sonore malgré un grain assez peu sophistiqué. Comme l’indiquent ces différents enregistrements, il est assez facile de moduler son égalisation pour aboutir sur un rendu désiré. Cela constitue un bon point pour un premier ampli. Quand on commence un instrument, il est peu évident de savoir résolument vers où l’on va se diriger musicalement.
Il faut toujours se permettre une ouverture, afin de devenir un bassiste polyvalent et pouvoir s’amuser de tous les genres. Pour son faible coût, le Rumble 150 est tout à fait à même d’intéresser une clientèle qui se met à jouer en groupe et qui cherche une puissance nécessaire à ce dessein. La qualité du produit me paraît correcte et son rapport avec son tarif est équilibré. À essayer donc et à comparer à ce que propose la concurrence.