Du coin de chambre ou de salon à l'équipement minimaliste au garage ou grenier aménagé pour cette seule tâche, le Home Studio renverra chez les uns ou les autres à bien des réalités. Comme toujours, tout est question de besoins, de moyens, et plus encore de possibilités.
En effet, la première contrainte lorsqu’on envisage de se monter un home studio, c’est bien la place qu’on peut lui allouer, et qui ne sera pas la même suivant qu’on vit dans une chambre de bonne de 15m2 ou dans un pavillon de 200 m2, suivant qu’on vit seul ou avec une famille, suivant aussi la proximité du voisinage.
Bien évidemment, plus vous aurez de place, plus vous pourrez bosser confortablement et plus vous pourrez faire de choses, que ce soit en matière de prise de son ou tout simplement pour disposer votre matos de manière ergonomique. Gageons toutefois que le cas de ceux qui disposent d’une maisonnette de 30 m2 à l’écart de leur maison pour leur seul loisir n’est ni le plus courant, ni le plus problématique et attaquons-nous aux cas plus courants du musicien dans une chambre de bonne ou de celui qui doit cohabiter avec d’autres.
Problèmes de voisinage et de cohabitation
Faire de la musique, l’écrire, l’enregistrer, la produire est, reconnaissons-le, un calvaire pour notre entourage direct ou indirect. Si, pour les besoin d’un mixage ou d’un arrangement, nous sommes en effet capables de jouer les deux mêmes mesures en boucle pendant des heures sans nous plaindre, il en va autrement des personnes à qui nous imposons ce supplice, à plus forte raison si la musique que nous faisons n’est pas leur tasse de thé.
Or, si vos proches peuvent consentir à tolérer cela par amour pour vous, gardez bien à l’esprit qu’ils font un effort et que, suivant le contexte, le poids de cet effort pèsera sur vos relations. Gardez surtout à l’esprit que vos voisins ne vous doivent rien. Ce serait même plutôt l’inverse : vous leur devez le silence. C’est inscrit dans la loi.
Vous leur devez le silence et pas seulement, comme beaucoup le croient, après 22 h. Car le fait que le tapage s’exerce de nuit est certes un facteur agravant, mais le tapage diurne n’est pas toléré pour autant, sachant qu’on définit une nuisance sonore dans le rapport entre son niveau et sa durée. Une télé un peu forte huit heures de suite en pleine journée ? C’est du tapage qui peut donner lieu à une sanction car, concrètement, si l’on tolère un niveau de +3dB par rapport au bruit ambiant durant la nuit, le seuil de tolérance ne monte qu’à +5dB entre 7 h et 22 h. Alors imaginez ce qu’il peut en être de votre activité… Et ne croyez pas que nous parlions uniquement d’une amende de quelques dizaines d’euros donnée anecdotiquement par la police, car vous pouvez faire l’objet d’une plainte auprès d’un tribunal civil ou pénal et vous exposer, suivant les circonstances (caractère de la nuisance, éventuelle récidive, etc.) de quelques centaines à plusieurs milliers d’euros, que ce soit en amende ou en dommages et intérêts, avec à la clé dans certains cas, la confiscation possible du matériel à l’origine de la nuisance ou l’interdiction de s’en servir sous peine de nouvelle amende.
C’est ainsi que dans les multiples procès ayant opposé les époux Picard à la famille Atanassov dont le fils jouait du piano en journée, la troisième chambre de la Cour d’Appel de Versailles a finalement condamné le 15 avril 2010 la famille bruyante à payer près de 25 000 euros en amendes et dommages et intérêts. Ah oui, quand même…
Dura lex ? Sed Lex ! Et que vous soyiez premier prix de conservatoire ou débutant, que la musique soit votre métier ou un loisir, le legislateur ne sera pas plus tolérant à votre égard. Vous souhaitez faire de la musique ? À votre aise : c’est à vous de vous assurer que vous puissiez la faire sans troubler la tranquilité de personne, ce qui, au delà de la loi, est une question de savoir-vivre et de respect d’autrui. Vous êtes responsable et il s’agit de vous conduire comme tel car en tant que musicien, vous êtes ambassadeur de la Musique et des musiciens, garant du fait que celle-ci demeure pour tous et toutes un plaisir et qu’elle ne soit jamais quelque chose qu’on subit car, que ce soit dans les geôles de Guantanamo, dans les cabines d’essayage de H&M ou dans les enceintes d’un voisin indélicat, la musique qu’on subit n’est jamais rien d’autre qu’une forme d’agression.
Cela implique de monter votre home studio dans le lieu qui sera le moins gênant pour vos voisins donc. Dans la mesure du possible, prenez donc soin de le placer près de murs qui ne soient pas mitoyens (c’est à dire qui ne servent pas de séparation avec un autre logement) et, à l’heure de la location, privilégiez les rez-de-chaussée ou les derniers étages, histoire de vous épargner la contrainte d’un voisin du dessous ou du dessus (prévilégiez d’ailleurs surtout les rez-de-chaussée car le son descend bien plus facilement qu’il ne monte vu que nos équipements sont plus généralement en contact avec le sol qu’avec le plafond). Prendre un appart au-dessus d’un bail commercial est aussi un bon moyen d’éviter les problèmes car c’est l’assurance que le lieu n’est pas occupé en dehors des heures d’ouvertures, et qu’à choisir, les gens se plaindront moins si vous les gênez sur leur lieu de travail que chez vous.
Faites au mieux sachant que l’argument « Désolé, mais je suis musicien et je ne peux pas faire autrement » n’est pas recevable. Vous pouvez en effet toujours faire autrement : tout faire au casque, investir une éventuelle cave attenante à votre appart, louer un local dédié pour faire de la musique… ou déménager. Comprenez simplement qu’en regard de la loi française, vous ne serez jamais dans votre bon droit si vous êtes bruyant.
L’enfer, c’est les autres… ou bien vous !
Lorsque vous vivez seul, rien ne s’oppose à ce que votre logement entier devienne un Home Studio : prises de voix dans le placard, mixage dans la chambre, guitares dans le salon… Mais si vous devez partager votre espace de vie avec une compagne ou un compagnon, des enfants, vos parents ou des collocataires, il faudra veiller à ce que votre passion n’empiète pas sur le bien-être de chacun.
Évidemment, la première chose à laquelle on pense, c’est la nuisance sonore : si vous mettez votre Home Studio à côté de la télé familiale, dans la chambre à coucher ou que vous collez deux grosses enceintes sur le mur mitoyen à la chambre de vos enfants ou vos parents, ça peut créer bien des embrouilles. Mais ce n’est pas qu’une question de bruit, c’est aussi une question d’encombrement et d’esthétique. A quoi bon en effet s’évertuer à décorer votre lieu de vie pour qu’il soit joli et agréable si c’est à la fin pour tout ruiner avec deux énormes enceintes noires, une choucroute de câbles immonde et un ordinateur tout aussi moche.
Plutôt que d’en appeler au concept un brin sexiste du WAF (Woman Acceptance Factor ou facteur d’acceptation féminine), on préférera évoquer le OAF (Others Acceptance Factor), en vertu duquel on sera attentif à l’avis de chacun sur l’emplacement du home studio et sur son dimensionnement : ce n’est pas parce que votre compagne ou votre compagnon ont consenti à ce que vous installiez votre matos dans un coin du salon qu’ils ont signé pour que la moitié de la pièce se transforme en bordel audio. Tâchez donc d’être clair sur l’espace qu’il vous faut, comprenez qu’il y a un compromis à trouver avec l’espace qu’on vous laisse… et sachez vous y ternir.
Autre facteurs à considérer
Les facteurs humains, qu’ils concernent vos voisins ou vos proches, sont évidemment les plus importants à considérer, mais des aspects plus pratiques sont ensuite à prendre en compte :
- L’isolation : choisissez l’endroit le plus isolé d’éventuels bruit extérieurs.
- L’acoustique : choisissez l’endroit où le son se réverbère le moins (tapez dans vos mains pour écouter la réverbération du son), et évitez de vous trouver près d’une vitre, d’un mur carrelé ou de ciment (même si, nous le verrons, on peut toujours améliorer les choses si vous deviez monter un home studio dans ces environnements).
- La qualité de l’électricité : essayez de disposer d’une ligne propre, qui ne soit pas derivée de la multiprise qui alimente… le frigo, par exemple ! Sans quoi garre aux buzz, ronflettes et autres variations de courants susceptibles même d’abîmer votre matériel.
Ceci étant dit, nous commencerons à voir dans notre prochain article quelles sont les solutions et les astuces pour venir à bout des 1001 défauts de l’emplacement que vous avez choisi, ou au minimum pour améliorer l’ordinaire.