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Sujet Gamme naturelle sans sixte ?

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Sujet de la discussion Gamme naturelle sans sixte ?
Morceau de Magma.

J'ai remarqué que sur ce morceau, on jouait sa gamme naturelle de Dbm, mais aucune sixte n'est préférable. En fait naturellement, j'improvise en omettant bien souvent la sixte, mineure ou majeure, car elle crée un tension qui brise l'atmosphère du morceau. En imposant cette sixte, j'ai l'impression que le tout perd de sa "neutralité", de son intention, je sais pas comment définir ça avec des mots en fait.

Cette gamme sans sixte a-t-elle un nom déjà ? Et comment expliquer le fait que je préfère omettre la sixte ?
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21
A.k.a>

Citation : J'enlève mon masque : j'ai été "lebat".


Oui je sais, j'ai suivi ta transition via ta mue/signature. :clin:

Head>

Citation : N'empêche c'est intéressant de jouer "sans" certaines notes


Oui et de voir comment elles ne nous manque pas en fait, mais aussi de redécouvrir leur "caractère" une fois qu'on les rejoue/retrouve dans un autre raga.

Autre point intéressant dans la musique indienne: les ragas sont souvent différents selon qu'ils soient ascendants ou descendants, on peut très bien monter en penta et revenir en hepta.
Exemple avec le magnifique raga Maru Bihag:
Asc T 3M 4 5 6 T
Desc T 6 5 #4 4 3M T

Voilà un lien sur lequel tu trouveras quelques des principaux ragas indiens, dont quelques raga à six notes.

http://www.orientalblues.com/ragaindex.htm
22
Et les shrutis ? :oo:
Sans les shrutis (les 22 micro-intervalles de la gamme), on loupe une grande partie des nuances de la musique indienne.
Voici la gamme indienne correspondant à notre gamme majeure, où SA est la tonique (pas forcément à la hauteur d'un do, l'échelle indienne n'étant pas fixe) :
SA = do [4 shrutis]
RE = ré [3 shrutis]
GA = mi [2 shrutis]
MA = fa [4 shrutis]
PA = sol [4 shrutis]
DHA = la [3 shrutis]
NI = si [2 shrutis]

Les swaras (notes nommées) peuvent avoir des altérations correspondant à peu près à un demi-ton (ça dépend des ragas): komal = bémol, teevra = dièse.
SA et PA ont 4 shrutis mais ne portent pas d'altération.
RE, GA, DHA et NI peuvent être komal (komal RE = ré bémol)
MA peut être teevra (teevra MA = fa dièse).

Par exemple, un teevra ma très teevra (un fa dièse plus que dièse !) peut produire une ambiance extrêmement bizarre sur certains intervalles.
Pour travailler les shrutis, on s'appuie sur une description qualitative, émotionnelle de l'intervalle. On n'est pas du tout dans la recherche d'une justesse mesurable. Dans chaque raga, on a une hiérarchie des notes, certaines notes ne peuvent pas se succéder en montée ou en descente... La musique modale est un autre univers musical dont nous sommes sortis avec le clavier "bien" tempéré... Il faut des années de travail à une oreille occidentale pour percevoir toute la richesse d'intervalles aussi subtils (ce qui est loin d'être mon cas !). Nous, nous avons l'harmonie comme terrain de jeux!
Mais si vous écoutez de la musique indienne, pour percevoir ces micro-tons, lâchez vos repères ! :clin:

Pour plus d'infos, je me suis appuyée sur cette introduction très bien faite pour mes explications :
http://www.pondichery.com/french/musique/musique_indienne.htm
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Brinik> Merci pour avoir ajouté ces importantes précisions.

Il semblerait cependant, à ma grande surprise, qu'il y ait un malentendu sur les micro-tons dans la musiques indienne.
J'ai lu çà il y a quelques temps dans l'excellentissime livre de François Auboux "L'art du raga", dans lequel un chapitre entier est consacré à la microtonalité.

Je me souviens vaguement d'une phrase de cette teneur:

"Quand au fameux quart de ton, c'est probablement le moins utilisé dans la musique indienne."
:8O:


Je me pencherai donc à nouveau sur ce chapitre ce soir et vous ferai part des informations importantes qu'il en ressort.

Le livre en question.
24
Magnifique petite leçon de musique indienne avec cette notion d'émotion soulignée par Brinik dans son post.

http://fr.youtube.com/watch?v=4Y6phCa--tk
25
Enorme ! :o:

Faut que j'en parle à mon claviériste, lui qui est plutôt jazz dans l'approche du piano, on a souvent ce genre de dialogue :

- Bon là tu joues sur un Bm7b5, mais ne mets que les 4 notes de l'accord, pas une de plus, sinon ça sonne différent...

- Ben c'est pareil ce que je joue.

- Non y'a un truc qui sonne différent...

- Ah oui mais ce que je rajoutes fait partie de la tonalité !

- Bah oui, mais non.

J'ai tendance à croire que les pianistes de jazz ont en général assez peu de retenue dans leur jeu, voulant tout harmoniser/enrichir dans tous les sens, pensant faire bien en mettant toutes les couleurs de la tonalité ou modalité, alors qu'un tableau n'est pas plus beau parce-qu'il a plus de couleurs, mais par contre la nuance de mêems couleurs peut être bien plus intéressant et beau...

Bon je généralise mais c'est un peu l'idée qu'on retrouve dans le morceau de Magma : pas de sixte, par contre il met une b2 par moments, encore que c'est assez rare. Le principal se joue sur 5/6 notes donc, pour demeurer dans une certaine ambiance. :)
26
Kumo > les livres d'Alain Daniélou, si tu les trouves, sont vraiment des perles.
Concernant Gilles Apap, j'avais vu le reportage entier sur Arte lors de sa diffusion, il est énorme tout entier. Quand il apprend aux petits indiens à jouer Brahms, c'est assez jouissif également... :bravo:
"C'est blazman legacy ici" (Apocryphe) / Live music / Soundcloud
27
Head>

Citation : J'ai tendance à croire que les pianistes de jazz ont en général assez peu de retenue dans leur jeu, voulant tout harmoniser/enrichir dans tous les sens



Faut bien amortir l'usage des dix doigts :mdr:


Citation : voulant tout harmoniser/enrichir dans tous les sens, pensant faire bien en mettant toutes les couleurs de la tonalité ou modalité, alors qu'un tableau n'est pas plus beau parce-qu'il a plus de couleurs, mais par contre la nuance de mêems couleurs peut être bien plus intéressant et beau...



Hyper-bien résumé.

Voilà l'instrument dont j'ai fait l'acquisition (c'est pas moi qui joue)
J'appréhendais la technique de l'archet, mais au bout d'une semaine j'obtenais déjà d'assez jolies sonorités.


http://fr.youtube.com/watch?v=YEvf22QDHJw

L'archet et la lutherie (manche creux, frettes arcquées)aide à effectuer les glissés dont je rêvais, et si galère à obtenir via le frettage de la guitare, permettant ainsi des mélodies nuancées, assez lyrique, chantantes...plus naturelles en fait puisque plus proche de la voix.

J'avais essayé avec un slide sur ma guitare acoustique, en montant l'action des cordes, le résultat était correcte mais il manquait alors les résonances des cordes sympathiques.


a.k.a> oui j'ai deux de ses livres "La musique de l'Inde du Nord" et "Traité de musicologie comparée". C'est pointu mais je le trouve un peu lapidaire quelques fois.
28

Citation : je généralise mais c'est un peu l'idée qu'on retrouve dans le morceau de Magma : pas de sixte, par contre il met une b2 par moments, encore que c'est assez rare.



Je n'ai pas relevé le chorus du clavier sur le morceau de Magma mais ça m'étonnerais qu'il ne fasse pas de sixte. Il joue même parfois out très clairement, ce qui enrichit l'espace harmonique considérablement (sur une cadence modale somme toute assez simple). Sinon, je comprends ce que tu veux dire avec les pianistes. Je pense que cela vient de l'instrument qui permet beaucoup plus de choses que la guitare dans le domaine de la densité des accords. En annonçant un Bm7b5, tu ne dis rien de la place des notes (même si tu ne veux pas plus que 4 notes). De fait, pour un jazzeux, ta notation implique un accord de base. Dans le genre, il n'est pas rare de trouver des grilles avec le seul accord de tonique en 13ème, ce qui donne une idée sur les voicings que tu peux tartiner avec.
29
Par soucis d'honnêteté intellectuelle je vous cite la phrase exacte de François Auboux concernant l'interval de quart de ton dans la musique indienne:

Bannissons de notre vocabulaire l'horrible quart de ton, qui désigne à peu près le seul intervalle inutilisé dans la musique indienne, et dont l'apparente précision mathématique est bien loin d'avoir l'exactitude requise.

"L'art du raga" p.25

Je souhaiterai, si vous en avez le temps, avoir votre avis sur cette affirmation concernant "l'apparente précision" mathématique du quart de ton.

Pour ce qui concerne la microtonalité dans la musique indienne j'ai cru comprendre qu'elle était plus effective dans la justesse de l'accordage (qui bien réalisé sera plus à même de faire ressortir les harmoniques propres à un raga donné, favorisant ainsi l'émanation des saveurs émotionnelles relatives aux shrutis) que dans l'éxecution mélodique.


Un autre aspect intéressant dans mon insignifiante pratique amateuriste des ragas est que cela nécessite une sorte d'écologie musicale.
Aussi, je ne joue pas autant que je le souhaiterai car pour ce qui me concerne, cela me demande des conditions d'attention et un état d'esprit plus exigeant que ne l'a exigé ma pratique de la guitare.

A la guitare, faire des petites phrases sympas, un petit bout de solo ou quelques chouettes enchaînement d'accord, bref jouer "gratuitement" et en tiré un peu de plaisir est relativement courant.

Là avec l'esraj et le système des ragas c'est déjà plus périlleux et on se rend vite compte que l'on ne fera rien de bon.

Pour moi les dispositions sont encore plus difficiles à obtenir et à saisir, mais quand est dans de bonnes dispositions et que l'on arrive à capter la musicalité dans l'instant on en ressort tout content, même si on a juste joliement aligné 20 notes sur 5 minutes, ce sera 5 minutes de musicalité qui vous donneront un sacré bonus pour la journée.

Bref ça vous oblige presque à considérer la musique comme une entité indépendante (méta?) qui sera généreuse avec vous si vous lui portez une attention dénuée de prétentions égocentriques et on comprends mieux Christian Vander et pas mal de musiciens (notamment traditionnels) lorsqu'ils disent que "c'est la musique qui demande, nous ne sommes là que pour la jouer."
30
J'avais oublié un autre livre très très intéressant de Alain Daniélou dans lequel une grande diversité de thèmes sont abordés.