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Pédago
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Les acouphènes - Les tympans qui saignent

Vous n'aimez pas lire, peut-être, mais vous aimez entendre. Alors lisez ce qui suit !

Acou­phène : n. m. (du grec. akouein, entendre, et phai­nein, appa­raître). Sensa­tion audi­tive (bour­don­ne­ment, siffle­ment, etc.) perçue en l’ab­sence de tout stimu­lus exté­rieur.

Beetho­ven était sourd, Keith Richards aussi

Si aucun ingé­nieur du son n’ac­com­pa­gnait les Rolling Stones dans leur tour­née, ceux-ci se montre­raient bien inca­pables de servir un son potable au public de leur concert. Pourquoi ? Ce n’est pas une ques­tion de compé­tences et je suis sûr que dans sa jeunesse, Keith Richards n’avait besoin de personne pour régler ses Vox et ses Marshalls. Seule­ment voilà : à force d’avoir joué tant d’an­nées à côté de murs d’en­ceintes déployant plusieurs dizaines de milliers de Watts, le guita­riste des cailloux a les oreilles complè­te­ment bousillées.

Non seule­ment, il entend les sons moins fort que tout un chacun mais il n’ entend plus certaines fréquences du spectre sonore.

Ainsi, s’il devait aujour­d’hui régler lui-même la sono d’un concert, Keith Richards aurait une fâcheuse tendance à pous­ser les aigus bien au-delà du néces­saire et le son qui en résul­te­rait agres­se­rait, sans qu’il s’en rende compte, les milliers d’oreilles saines du public venu le voir.

Et ce n’est pas là un exemple isolé : les trois quarts des musi­ciens profes­sion­nels souffrent du même problème à diffé­rents degrés de gravité.

Si Sting ne se plaint que d’avoir les oreilles qui bour­donnent et qui sonnent conti­nuel­le­ment, le batteur de Venom, un groupe de Thrash légen­daire, n’a plus qu’une seule oreille valide, le tympan de la seconde ayant litté­ra­le­ment explosé lors d’un concert.

Ce sont les risques du métier, me direz vous, et il n’y a rien d’éton­nant à ce que des profes­sion­nels de la musique, expo­sés conti­nuel­le­ment au bruit, perdent de l’au­di­tion. Certes, mais vous devez savoir qu’il n’est pas néces­saire d’être exposé des années au bruit pour perdre de ses capa­ci­tés audi­tives.

Les acou­phènes pas chers

Vous avez peut-être vu ce repor­tage où l’on découvre un type de 25 ans qui s’est ruiné les oreilles en allant simple­ment à un concert de U2. Lui qui proje­tait d’être profes­seur de guitare en est réduit à ne plus suppor­ter le bruit de son trous­seau de clés lorsqu’il ouvre la porte de son appar­te­ment. En taxi, lorsque la voiture passe sur une chaus­sée pavée, il doit se tenir les tympans pour atté­nuer la douleur qui le saisit. Et bien entendu, exit la guitare, exit les répets avec son groupe et exit l’écoute de CD sur sa chaîne si elle dépasse la limite d’un quart d’heure à très, très faible volume.

Dans des propor­tions moins graves, je me suis moi-même abîmé les oreilles. C’était au Prin­temps de Bourges avec des amis :

Le premier soir, concert de trois heures avec Franck Black, PJ Harvey et un obscur groupe pop. C’est bien, on s’amuse, on dort au camping muni­ci­pal et l’on se rend au plat de résis­tance le lende­main soir : concert de trois heures avec Almighty, Machine Head et Suici­dal Tenden­cies.

Almighty était déjà fort, mais Machine Head nous a litté­ra­le­ment cloués au mur. Le son arri­vait en défla­gra­tion et la quasi-tota­lité du public semblait écra­sée sur son siège par la masse sonore. La double grosse caisse du batteur plom­bait comme une DCA et nous donnait l’im­pres­sion de rece­voir des coup d’épaules dans le thorax, de compri­mer nos glottes. Le son était si fort qu’on ne perce­vait aucune distinc­tion de notes ou de timbres entre les instru­ments.

Après un tel magma sonore, Suici­dal Tenden­cies nous a paru être de la musique de cham­bre… En sortant du concert, nous avions chacun les oreilles qui sonnaient et bour­don­naient. Normal, se disait-on, «  ça fait ça après chaque concert et ça revient un ou deux jours après…  »

Normal, oui, sauf que plus de trois ans après, sur les quatres que nous étions, trois ont encore les mêmes siffle­ments et bour­don­ne­ments.

Sexe, mensonges et acou­phènes

(en fait, sexe, cest juste pour vous faire lire la chro­nique poignante d’un homme sacri­fié sur l’au­tel de la pollu­tion sonore)

Ce n’est rien de catas­tro­phique (Les audio­grammes montrent qu’au­cun de nous n’a perdu d’au­di­tion) mais c’est juste assez suffi­sant pour vous gâcher l’exis­tence car, en plus des siffle­ments conti­nuels avec lesquels on apprend à vivre, on déve­loppe une hyper­sen­si­bilté au bruit qui condi­tionne pas mal la façon de vivre :

Finis les concerts, le walk­man, et le son Dolby Surround THX du cinéma à moins de mettre des bouchons anti-bruits en mousse ou des boules Quiès.

Croyez-moi, on comprend à ce moment ce qu’est la pollu­tion sonore quand le moindre petit bruit devient une agres­sion : un train qui grince en s’ar­rê­tant, un klaxon, le bruit usant d’un moteur de voiture pendant trois heures de route, le vacarme de la foule dans un centre commer­cial, sans parler de la musique de fond que balancent les super­mar­chés, cafés ou restau­rants, parce que, les experts en marke­ting sont formels, monter le son, ça encou­rage le quidam à consom­mer.

Cette hyper­sen­si­bi­lité nuit même aux rapports sociaux : comme on change de trot­toir pour éviter un marteau-piqueur, on décline l’in­vi­ta­tion à la mega­teuf du nouvel an, on esquive l’en­ter­re­ment de vie de garçon d’un pote parce qu’il le fête en boîte, et quand on vient manger chez des amis, soit on passe pour les lourds de service en deman­dant tout le temps de mettre la musique d’am­biance «  un tout petit peu moins fort  », soit on passe sa soirée sur le balcon en prétex­tant qu’on prend l’air par –5°, soit on ferme sa gueule et le lende­main, les siffle­ments redoublent tandis qu’on a la désa­gréable impres­sion d’avoir les oreilles irri­tées, comme si un lutin les avait frot­tées trois heures (180 minutes !) avec un coton tige.

La ques­tion des gens est toujours la même :  » Ca ne se soigne pas ? "

Non, ça ne se soigne pas. L’homme marche sur la lune, il clone des brebis, greffe des avant-bras mais ne sait pas guérir les problèmes d’acou­phènes car, comme disent les nombreux ORL que j’ai vus, «  ces problèmes sont dus à la destruc­tion de cellule dans l’oreille et cette destruc­tion est irré­ver­sible.  » Super !

Mais que faire alors?

Je n’écris pas pour me plaindre mais parce que la seule solu­tion à ce problème, c’est de le préve­nir : prenez des précau­tions, des PRE-CAU-TIONS!

Les produc­teurs et les groupes se foutent roya­le­ment de votre état de santé tant que vous payez votre place. Ne soyez pas confiant dans les insti­tu­tions et dans les respon­sables qui vous assurent que les mesures ont été prises, en évoquant une loi censée limi­ter ce type de problème.

La loi existe bien, elle est récente, mais personne ne la respecte : tous les soirs, la plupart des boîtes de nuits passent outre la limite sonore fixée par la loi, parce qu’une nouvelle fois, marke­ting oblige, ça fait vendre des entrées.

Ne pensez pas non plus être à l’abri parce que vous n’écou­tez pas telle ou telle musique bruyante et lui préfé­rez une musique plus cool. Pour peu qu’ils soient sono­ri­sés à 130 db, Metal­lica, Daft Punk, NTM ou Gilbert Bécaud vous écla­te­ront les oreilles de la même manière.

Aussi prévoyez d’avoir toujours sur vous une paire de bouchons anti-bruit en mousse lorsque vous vous rendez à un concert ou une rave. Et si vous sentez que c’est trop fort, n’hé­si­tez pas à les mettre, même si vous devez passer pour une chochotte auprès des autres.

Deux paires de ce type de bouchons coûtent 12 francs en phar­ma­cie. C’est pas cher, c’est réuti­li­sable à loisir et ça vous permet­tra d’évi­ter bien des désa­gré­ments par la suite.

Quant aux musi­ciens qui ne peuvent jouer en se servant de ces protec­tions parce qu’elles les empêchent d’en­tendre correc­te­ment certaines fréquences, ils peuvent se rabattre sur des bouchons plus évolués qu’un prothé­siste spécia­lisé leur fera sur mesure pour 500–600 francs.

De nombreux musi­ciens les utilisent et en sont satis­faits puisqu’à l’in­verse des BABS (Bouchons Anti-BruitS), ils resti­tuent l’in­té­gra­lité du spectre sonore et ne modi­fient que le volume du son.

Par ailleurs, lais­sez vous le temps de récu­pé­rer quand vous avez été exposé à un niveau sonore élevé. 48 heures ne sont pas de trop pour lais­ser vos oreilles se remettre en place. L’un de mes amis s’est ruiné les oreilles parce qu’il avait enchaîné en une semaine les Mons­ters of Rock à Vincennes, Scor­pions à Bercy et Renaud au Zénith. A lui, les méde­cins ont prédit qu’il perdrait peu à peu l’ouïe. Cool !

Conclu­sion

Je sais, j’ai l’air d’un rabat-joie, d’un emmer­deur qui chipote et drama­tise, mais sachez que je me suis mis à la MAO en partie parce que je ne pouvais plus suppor­ter le bruit d’une répé­ti­tion (Ah ! Les coups de cymbales qui vrillent les tympans…) et que malgré tout l’in­té­rêt que je porte à mon ordi­na­teur, ça me manque

Et puis, un dernier regret pour conclure : celui de n’avoir pas pu rester plus d’une demie heure à l’Olym­pia (ancien modèle) lors d’un concert de Jeff Buck­ley parce que mes oreilles ne suppor­taient pas un niveau sonore pour­tant fort accep­table pour le commun des mortels. Main­te­nant qu’il est mort, je sais que même si on me greffe des oreilles de brebis, je ne pour­rais plus jamais l’en­tendre live. Les cais­ses… 

Liens utiles

Si vous voulez en savoir plus sur les acou­phènes, l’hy­per­acou­sie ou si vous voulez vous mobi­li­ser pour préser­ver l’ave­nir de vos oreilles, n’hé­si­tez pas à visi­ter le site France Acou­phènes.

Enfin, pour ceux qui sont déjà victime d’acou­phènes ou d’hy­per­acou­sie, rendez-vous sur cette page pour en savoir plus sur les protec­tions sur mesure qu’on peut se procu­rer chez un spécia­liste.


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