Trouver une carte audionumérique en parfaite adéquation avec ses besoins propres est de moins en moins évident : le marché dispose d'un nombre croissant de modèles et les multiples caractéristiques ont tendance à perdre le musicien non informaticien. Je vais donc vous décrire les caractéristiques principales des cartes son et expliquer leur signification précise afin que vous y voyiez plus clair.
J’ai essayé de ne pas rentrer dans des détails trop techniques pour ce comparatif. Ceux qui veulent en savoir plus pourront bientôt se reporter à un dossier un peu plus technique sur le sujet.
Nous allons d’abord voir le point à respecter quelle que soit votre utilisation de la carte son, puis les besoins propres à chaque utilisation.
Les convertisseurs
Il y a deux types de convertisseurs : analogiques-numériques (CAN) pour enregistrer le son, et numériques-analogiques (CNA) pour le restituer afin de pouvoir l’entendre. Comme la plupart des musiciens utilisent la carte son pour enregistrer des instruments, la caractéristique la plus importante est certainement la qualité des CAN. En effet, ce sont ces convertisseurs qui sont chargés de transformer une oscillation (le son d’origine) en une suite de nombres. Les CNA, quand à eux, servent généralement à écouter le résultat d’un mix par exemple, mais n’altèrent aucunement le son enregistré. Ils ont donc une importance non négligeable mais moins grande que les CAN, à moins de réutiliser les sorties de la carte pour enregistrer le son sur un autre support. Dans tous les cas, la qualité des deux types de convertisseurs pour une même carte est souvent la même, ou presque.
Un convertisseur se caractérise par :
– Son pas de quantification (appelé aussi dynamique ou résolution)
Il s’agit du nombre de bits utilisés pour coder l’amplitude du son à un instant donné. Avec 8 bits, vous avez 2^8 = 256 valeurs. Avec 16 bits, 2^16 = 65536 valeurs, et avec 24 bits, nouveau « standard haut de gamme », on a 2^24 = 16,7 millions de valeurs possibles ! A ce stade, le bruit dû aux parasites lors de l’enregistrement peut dépasser la précision des convertisseurs. Ainsi, échantillonner à plus de 24 bits serait un luxe inutile dans la plupart des cas. La valeur la plus courante, mais aussi la valeur minimale acceptable, est 16 bits.
- Sa fréquence d’échantillonnageNotre vieil ami Shannon a dit : « pour enregistrer un son dont la fréquence maximale est f, il faut échantillonner à la fréquence 2f ». C’est pourquoi, pour enregistrer un son audible dans toute sa splendeur (jusqu’à 20–22 kHz), on enregistre à 44,1 kHz ou 48 kHz (En pratique, on opte pour 2,2f). Alors, pourquoi existe-t-il des cartes qui échantillonnent à 96 kHz ? On peut se dire que c’est simplement un luxe rendu possible par les progrès techniques. En fait, n’oublions pas que le son que vous allez enregistrer va souvent être modifié, traité, égalisé numériquement, puis vous ajouterez des effets, vous filtrerez etc. S’il est vrai qu’au bout du compte, vous rééchantillonnerez le morceau final en 44,1 kHz pour graver vos oeuvres sur un CD, toutes les étapes de traitement sonore seront plus précises en 96 kHz et il en résultera un meilleur son final en 44,1 kHz.
Enfin, relativisons la nécessité d’avoir une carte son en 24 bits / 96 kHz : n’oublions pas qu’il y a encore peu de temps, les studios professionnels utilisaient « seulement » des convertisseurs en 16 bits / 48 kHz Alors un conseil : ne soyez pas bloqué par une carte son si elle a une résolution ou une fréquence d’échantillonnage inférieures à 24 bits / 96 kHz ! Il vaut mieux une carte son 16 bits avec un grand facteur de suréchantillonnage, comme on le verra ci-dessous.
– Son facteur de suréchantillonnage (ou « oversampling »)
Il faut savoir que le pas de quantification donné seul n’a pas vraiment de poids. C’est le facteur de suréchantillonnage qui détermine la précision de l’enregistrement. Ainsi, une carte son bas de gamme peut très bien afficher « 16 bits / 48 kHz » et enregistrer un son de mauvaise qualité. Attention, donc. Pour du 16 bits, un facteur de suréchantillonnage de 64 ou 128 fois devrait faire l’affaire.
– Son rapport signal / bruit
Celui-ci dépend des paramètres précédents, de l’isolation de la carte contre les parasites électromagnétiques, et d’autres nombreux facteurs. Attention aux fiches techniques, les constructeurs donnent souvent le rapport signal sur bruit théorique alors qu’en pratique, les parasites réduisent ce rapport. Ne vous fiez donc pas à 100 % à ce paramètre.
Entrées analogiques
La première question à vous poser est : « qu’est ce que je veux faire avec ma carte son ? ». En effet, c’est cela qui va définir beaucoup de paramètres de la celle-ci. Par exemple, si vous avez un home studio et souhaitez simplement enregistrer un synthétiseur de temps en temps, vous n’avez besoin que d’une entrée stéréo analogique niveau ligne. En revanche, si vous voulez enregistrer un micro sur vos compos avec une bonne qualité, vous avez la possibilité, soit de posséder un préampli externe pour que le niveau du signal délivré à la carte son soit au niveau « ligne », soit d’acheter une carte son qui possède un préampli intégré et donc qui accepte que l’on connecte directement un micro. Enfin, si vous avez une table de mixage numérique, la carte son risque de servir surtout à transférer des données numériques entre la table et l’ordinateur, donc l’important sera surtout de posséder les entrées adéquates (SPDIF, ADAT, AES/EBU, TDIF).
Tout d’abord, définissez de combien d’entrées analogiques vous avez besoin : si vous n’avez qu’un instrument au niveau ligne (synthétiseur, guitare avec préampli, mais aussi sortie générale de votre table de mixage…) vous pouvez vous contenter d’une carte son qui possède seulement une entrée stéréo (ou deux entrées mono, ce qui revient au même). en revanche, si vous n’avez pas de table de mixage ou que vous désirez enregistrer simultanément sur des pistes séparées plusieurs instruments, il sera nécessaire de posséder une carte son avec plusieurs entrées.
Ensuite, posez-vous la question : « est-ce que j’enregistre des instruments au niveau micro, c’est à dire non préamplifiés ? ». Par exemple, un instrument acoustique ou une voix. Si tel est le cas, vous aurez besoin que la carte son possède des entrées au niveau micro (beaucoup plus sensibles que le niveau ligne) pour pouvoir enregistrer ces instruments. Sachez cependant que dans certains cas, du fait de la l’environnement de la carte son (autres cartes de l’ordinateur), des parasites peuvent apparaître sur le son, qui seront d’autant plus forts que le signal reçu (niveau micro) est faible. Aussi, une bonne alternative est de posséder un préampli dont la sortie sera branchée sur une entrée ligne de la carte son. Dans le cas où le budget ne permettrait pas l’achat d’un préampli, optez de préférence pour une carte son dont la connectique est dissociée de l’ordinateur (un gros câble blindé joindra alors la carte son et un boîtier externe sur lequel on trouvera toute la connectique analogique).
Ces deux points éclaircis, vous pourrez préférer un type de connectique spécifique d’une part, et une symétrisation du signal ou non d’autre part. Si vous avez opté pour des entrées micro, des entrées symétriques sont recommandées. Si vous utilisez des câbles très longs (10 mètres et plus), cela est encore plus important. En revanche, si vous n’avez que des instruments au niveau ligne, que les câbles qui les relient à la carte audionumérique sont courts, ou que l’environnement n’est pas trop « bruyant » (au niveau électromagnétique) des entrées asymétriques conviendront parfaitement. En ce qui concerne la connectique, vous avez généralement plusieurs types de prises : jack (mini et 6'35, sachant que les cartes professionnelles ne sont jamais en jack mini, au moins en entrée), XLR (idéales pour les connexions symétriques de longue distance), RCA (ou cinch). Dans ce dernier cas, vous êtes certain que la connexion est asymétrique.
Sorties analogiques
Vous l’aurez compris, la qualité des entrées est très importante puisque c’est la base de l’enregistrement sur l’ordinateur. Les sorties peuvent avoir une importance moindre si vous ne les utilisez que pour l’écoute. Du coup, beaucoup de constructeurs proposent des cartes son dont le facteur de suréchantillonnage est supérieur en entrée qu’en sortie. Si vous utilisez la sortie pour la réenregistrer sur un autre support ou bien pour retraiter le son en externe (égalisation, effets…), il faudra veiller à ce que les sorties soient également de bonne qualité. Mais rassurez-vous : généralement, pour une carte son donnée, les entrées et les sorties ont une qualité très proche.
E/S numériques
Vous avez une table de mixage numérique, ou bien des instruments qui possèdent une sortie numérique, vous pouvez alors opter pour une carte audio possédant des entrées de ce type. L’avantage principal de travailler en numérique est qu’il n’y a pas de détérioration du signal puisqu’il n’y a pas de conversion numérique-analogique puis analogique-numérique. Ainsi, vous oubliez tous les problèmes éventuels de parasites sur le trajet du câble ou de la fibre.
Le SPDIF coaxial ou optique permet le transport d’un signal deux canaux (ou un canal stéréo). La connectique est la plupart du temps une prise RCA (ou cinch) pour le SPDIF coaxial et un connecteur pour fibre optique dans le second cas. L’AES/EBU quand à lui est la version professionnelle du SPDIF : au lieu de la prise cinch, on trouve une prise XLR, plus robuste, plus immunisée contre les bruits.
Face à ce type de connectique « simple » (c’est à dire ne transportant qu’un signal stéréo), on trouve d’autres standards qui véhiculent 8 canaux simultanés. Le plus répandu est l’ADAT, car il transporte les 8 canaux (mono) via une petite fibre optique, ce qui permet un gain de place sur la carte et une immunité très grande au bruit électromagnétique. On peut également trouver des prises TDIF ou RBUS (également 8 canaux). Il s’agit en fait d’une « guerre » entre constructeurs qui veulent imposer leur standard de tranport multicanal : ADAT comme Alesis, TDIF comme Tascam, et RBUS comme Roland.
Un point important en numérique : la synchronisation. Chaque appareil (table de mixage numérique, carte audionumérique, synthé…) possède sa propre horloge interne et les 44,1 kHz d’un appareil peut différer légèrement d’un 44,1 d’un autre. Il en résulte que sans synchronisation, il y aura des erreurs de transfert des données. La solution ? Il y en a deux : la première, valable dans certains cas, est que si la carte son est bien conçue, son entrée numérique saura se caler sur le signal qu’elle reçoit. Le cas est simple avec deux appareils numériques. Cependant, imaginez que vous ayez deux instruments avec une sortie numérique, connectés tous deux à la carte son. Comment synchroniser l’ensemble ? La seule solution, dans ce cas, est que les deux instruments soient « esclaves » de la carte son, c’est à dire que leur horloge interne se synchronise sur celle de la carte son. Cependant, on l’a dit, c’est la carte son qui enregistre les deux instruments, donc dans cette configuration, ceux-ci ne reçoivent aucun signal numérique pour se synchroniser. La solution ? Le « Wordclock ». Il s’agit d’une simple prise BNC qui véhicule un signal d’horloge. En branchant la sortie Wordclock de la carte son à l’entrée Wordclock des instruments (en supposant qu’ils disposent d’une telle entrée), ceux-ci se synchroniseront sur l’horloge de la carte son. Ouf ! Le tour est joué. La conclusion de cette petite anecdote est que, si vous cherchez avant tout à faire des transferts en numériques, songez sérieusement à une entrée / sortie Wordclock.
E/S MIDI
Les cartes son professionnelles peuvent être dépourvues de prises MIDI, car à ce « niveau », on dissocie parfois MIDI et audio. Cependant, on trouve des cartes ambivalentes. Si vous ne voulez pas dépenser trop d’argent, il est fort possible que le coût d’une carte son audio + MIDI soit moins élevé que celui des deux éléments séparés. Si vous pensez utiliser pas mal de MIDI (plusieurs synthétiseurs ou expandeurs, un sampleur, un processeur d’effets contrôlé en MIDI), vous risquez d’être rapidement limité par le nombre d’entrées-sorties MIDI. En revanche, avec deux entrées / sorties, vous pourrez faire un travail majoritairement audio sans restrictions avec quelques instruments MIDI (n’oublions pas que l’on peut mettre des synthétiseurs en série via la prise MIDI THRU de ceux-ci, même si cette solution est moins souple que d’avoir autant de sorties MIDI que d’instruments). De la même façon, il est possible que vous utilisiez des synthétiseurs virtuels plus que de véritables synthétiseur externes. Dans ce cas, une seule entrée MIDI pourrait éventuellement suffire. En tous cas, le MIDI n’est pas un problème car la plupart des logiciels (séquenceurs notamment) et tous les OS gèrent plusieurs interfaces MIDI. Il arrive fréquemment que l’on achète, plus tard, une petite interface MIDI supplémentaire pour augmenter le nombre de canaux disponibles.
Offre logicielle
C’est un point à ne pas négliger, surtout pour les peu fortunés. En effet, les logiciels audio et MIDI professionnels et même amateurs ont généralement un prix plutôt élevé pour un particulier. Heureusement, les cartes son sont souvent livrées avec certains de ces logiciels, compris dans le prix de la carte son, ce qui fait chuter de façon très importante leur prix. De plus, les logiciels fournis peuvent être en version optimisée pour la carte son utilisée, ce qui vous permet une plus grande stabilité et homogénéité de votre configuration informatique, alors que ce n’est pas toujours le cas dans une configuration audio complexe !
Parmi les logiciels qui peuvent être proposés, citons un séquenceur MIDI + audio, un enregistreur multipistes, un logiciel de traitement sonore, des plug-ins spéciaux pour la carte son (notamment si cette dernière possède des DSP qui lui permettent d’alléger le travail du processeur de l’ordinateur) comme des synthétiseurs virtuels ou bien des effets. La plupart du temps, il y a aussi une table de mixage virtuelle qui permet la gestion du routing des entrées et des sorties
Générateur interne
Plutôt rares sur les cartes son semi-professionnelles et professionnelles, les générateurs sonores internes à la carte son peuvent être intéressants dans certains cas. Il s’agit soit d’un expandeur interne, soit de la gestion de banques de son propres à la carte, comme les SoundFonts (format propriétaire de Sound Blaster). Aujourd’hui, la création de synthétiseurs et de sampleurs virtuels rendent les cartes son à table d’onde un peu désuètes dans la cas d’une configuration informatique puissante. En effet, si l’on a un synthétiseur à table d’ondes sur la carte, le jeu des sons est entièrement géré par celle-ci, alors que dans le cas des synthétiseurs et sampleurs virtuels, c’est le processeur de l’ordinateur qui travaille.
Drivers & plateforme
Que vous soyez sur Mac ou sur PC, assurez-vous que les drivers fournis correspondent bien à votre système d’exploitation : par exemple, certaines cartes son n’ont pas encore de driver pour Windows 2000. L’avantage d’être sous Windows 98 est qu’il demande moins de ressources que Windows 2000. L’avantage de Windows 2000 est sa meilleure stabilité. Certaines cartes sont mêmes destinées à ne jamais avoir de driver pour Windows 2000 car considérées comme trop anciennes pour que la société développe de nouveaux drivers. Sachez enfin que certaines cartes son fonctionnent à la fois sur PC et sur Mac, fait intéressant si vous n’êtes pas encore certain de rester pour toujours sur le même un type de plate-forme (PC, Mac…).
Après les drivers nécessaires au fonctionnement de la carte son viennent d’autres drivers, plus spécifiques. Tout d’abord, le driver ASIO 2, développé à l’origine pour les logiciels Steinberg. Ils servent maintenant à une multitude de logiciels et permettent de gérer les temps de latence de la carte son de manière plus efficace par rapport à ce que fait le driver directX de Windows ou l’Apple Sound Manager de MacOS. D’autres drivers moins répandus peuvent être intéressants, comme le GS I/F pour Gigasampler (un sampleur en software très performant).
Performances
Aujourd’hui, la majorité des cartes – pour ne pas dire toutes – sont « full duplex », c’est à dire qu’elles peuvent enregistrer en même temps qu’elles jouent des sons. Ce critère intervient donc de moins en moins, mais si vous tombez sur une carte half duplex, c’est certainement qu’elle est très ancienne et à déconseiller.
Une autre possibilité intéressante est la conversion de fréquence d’échantillonnage en temps réel en hard (c’est la carte son qui le gère). Cela évite au processeur de s’occuper de cette tâche.
Il semble important de noter la possibilité à certaines cartes son d’être multiclients, c’est à dire que plusieurs logiciels peuvent utiliser la même entrée ou sortie de la carte son en même temps (Par exemple Cubase et Sound Forge). Il se trouve que Windows 2000 est censé gérer le multiclient en soft. Mais comme les produits audio semi-professionnels et professionnels sont assez spécifiques, les capacités propres à la carte son s’avèrent être plus fiables.
Extensions
Vous avez besoin aujourd’hui de 8 entrées, mais demain, vous aurez peut-être besoin de plus. Conclusion, un plus indéniable d’une carte son est sa possibilité d’être chaînée avec d’autres consoeurs et que celles-ci soient synchronisées entre elles. Ainsi, certains modèles permettent de chaîner jusqu’à 4 cartes, soit un total de 32 entrées ou plus.
Il peut également exister des cartes filles qui étendent les possibilités de leur maman, comme par exemple la puissance de traitement ou l’ajout de sorties supplémentaires…
PCMCIA ou PCI ?
La plupart d’entre-vous utilisent un ordinateur fixe pour faire de la musique. Cependant, il est maintenant possible d’envisager d’utiliser un ordinateur portable pour faire de l’audio. Ceci dit, à part dans des cas particuliers de scène ou de déplacements fréquents, on préférera un ordinateur fixe car beaucoup moins onéreux et souvent plus puissant.
Latence
La latence d’une carte son est un élément de plus en plus important aujourd’hui où l’on utilise des synthétiseurs virtuels et des effets en temps réel. En effet, la latence désigne, pour simplifier, le temps mis par la carte audionumérique entre le moment où l’on veut qu’elle émette un son et celui où elle l’émet réellement. Cela se caractérise par le retard entre l’appui d’une touche du clavier MIDI et l’émission du son voulu par le synthétiseur viruel.