Quand un ancien de chez JBL et M-Audio crée sa propre marque d'enceintes de monitoring, c'est (parfois) concentrique et ça donne Fluid Audio.
— Tu connais Zuccaro ?
— Ouais, c’est le mec qui chantait « Senza una donna », c’est ça ?
— Non, ça c’est Zucchero. Je te parle de Kevin Zuccaro, il a bossé dans les années 90 pour JBL, c’est un ingénieur spécialisé dans la conception d’enceintes.
— Ah OK. D’ailleurs je crois qu’il a réenregistré la chanson en duo avec Paul Young quelques années plus tard.
— Non, mais on s’en fout de Zucchero, je te parle du mec qui a aussi bossé chez M-Audio entre 2005 et 2011.
— C’est vrai que j’aimais bien sa voix italienne un peu cassée et ses jolis chapeaux.
— Mais arrête avec Zucchero, j’te dis ! C’est de Kevin ZUCCARO dont il est question depuis tout à l’heure. Après avoir quitté M-Audio, il a créé sa propre marque, Fluid Audio, et on teste aujourd’hui les FX 8, des enceintes de monitoring coaxiales dotées de boomers de 8 pouces.
— De toute façon, t’as jamais aimé la musique italienne toi…
— Bon, laisse tomber.
Si l’expérience de Mr Zuccaro est grande, sa marque Fluid Audio est encore jeune et le catalogue reste limité. On recense seulement quatre produits, les C5 dotées d’un boomer de 5 pouces et placées sous la barre des 200 € la paire, les F4 qui, d’après le constructeur, se destinent plus aux musiciens, avec leur prix très abordable (un peu plus de 150 € la paire) et leur boomer de 4 pouces, les F5 qui sont dotées de boomers 5 pouces pour un peu de 250 € la paire et enfin, les FX8 qui nous intéressent aujourd’hui, qui sont les plus chères (moins de 400 € la paire) et qui ont la particularité d’être coaxiales.
À ce prix, Fluid Audio reste moins cher qu’une bonne partie de la concurrence, qui est généralement à environ 500 € la paire dans cette gamme d’enceintes dotées de haut-parleurs de 8 pouces. C’est donc un premier bon point.
Fluid glacial ?
Le design coaxial (le tweeter et le boomer partagent le même axe) permet à l’enceinte d’être assez compacte : 340 × 254 × 270 mm pour un poids de 9,8 kg. La boîte est en MDF, comme souvent sur les enceintes de monitoring situées dans cette fourchette de prix. Le design général est assez passe-partout, et la finition est soignée. Sur la face avant est situé l’évent bass reflex. Rappelons qu’acoustiquement, cela ne change pas grand-chose d’avoir l’évent devant ou derrière. En dessous d’une certaine fréquence, une enceinte de cette taille émet les ondes dans toutes les directions. Si l’évent est à l’arrière, il faudra juste faire attention à ne pas l’obstruer complètement, ce qui ne devrait pas être compliqué même dans un espace exigu.
On retrouve aussi une LED de mise sous tension qui permettra de voir si l’enceinte est en veille. Car la FX8 se met automatiquement en veille lorsque le signal en entrée passe sous un certain seuil, ce qui est une très bonne nouvelle. Nous avons en revanche remarqué que le seuil était un peu trop haut à notre goût et que les enceintes avaient la fâcheuse tendance à se mettre en veille lorsque la musique envoyée par notre interface audio n’était pas assez forte. On préfèrera donc baisser le potard de volume situé en façade et augmenter celui de notre interface audio.
Derrière, à vrai dire, il n’y a pas grand-chose. Ce n’est pas du côté de la connectique que nous pouvons émettre une critique : il y a du XLR, du Jack et du RCA, bref tout ce qu’il faut pour le home-studiste. C’est plutôt du côté des réglages que l’enceinte pêche, et pour cause, il n’y a rien du tout… C’est vraiment dommage à l’heure où la grande majorité des enceintes de monitoring proposent des réglages, même sur l’entrée de gamme. Elles ont intérêt à bien sonner ! Vérifions cela.
À l’intérieur, on retrouve deux amplis de classe A/B (50 et 80 Watts), avec un filtre de cross-over situé à 2,4 kHz. Le tweeter est un dôme de soie de 1,2 pouce, tandis que le boomer a un cône en papier composite. À noter que les enceintes sont fournies avec des petits pads en mousse censés réduire les vibrations. S’ils protègent vos enceintes et votre bureau des rayures, ce sera déjà pas mal.
Fluid FX8 en bleu VS PreSonus Eris E8 en vert
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Écoute
Pour écouter ces enceintes, nous les avons mises face aux Eris E8 de PreSonus, qui coûtent du coup un peu plus cher, mais qui restent dans la même gamme de produits, et qui sont équipées de boomers de 8 pouces.
À l’allumage, première mauvaise surprise : les FX8 soufflent un peu, même avec le volume à –6 dB. Ce n’est pas rédhibitoire, mais les enceintes que nous testons habituellement ne soufflent pas autant.
Johnny Cash — Hurt
La voix de Cash semble plus naturelle sur les Eris de PreSonus, cela est peut-être dû au surplus des Fluid Audio à partir de 9 kHz qui rajoute de l’air, mais aussi de la brillance. La voix est plus pincée et nasale sur les Fluid. Les guitares sont en revanche bien retranscrites sur ces dernières et tous les détails sont bien présents. Sur ce morceau, les Fluid nous semblent moins équilibrées que les Eris dans le haut du spectre, avec un effet « in the face » nous donnant l’impression que le chanteur se rapproche de nous à chaque fois que l’on passe des Eris aux Fluid. Dans le bas médiums (entre 500 et 700 Hz), les Eris rendent un peu plus justice au piano. Dans l’ensemble, les Fluid, même si elles restent moins équilibrées que les Eris, se défendent plutôt pas mal et aucun détail ne nous échappe vraiment. Il est possible qu’elles soient plus fatigantes au bout de quelques heures de mixage si vous êtes du genre sensible.
Michael Jackson — Liberian Girl
L’attaque du kick ressort plus sur les Fluid et le bas du spectre est sec comme il faut. Les enceintes n’essaient pas d’en faire trop, et c’est très bien, dans le sens où tout reste lisible. La bosse dans le haut du spectre fait ressortir le charley un peu trop à notre goût, il en va de même pour les sibilantes. L’image stéréo est très bien retranscrite, il en va de même pour la dynamique du morceau. Le sweet spot des Fluid est aussi assez large, peut-être grâce au design coaxial ?
Gorillaz – Feel Good Inc
Le kick ressort très bien sur les Fluid, il est sec et ne se laisse pas bouffer par la basse, un très bon point. L’effet sur la voix de Damon Albarn est légèrement amplifié sur les Fluid et d’une manière générale, ces dernières semblent plus creusées que les Eris. Sur certains détails comme le « grattoir » du médiator sur la guitare acoustique, les Fluid en font un peu trop, sans doute à cause de ce haut du spectre toujours un peu trop en avant. Dommage, car le reste est plutôt bien.
The Raconteurs — Consoler of the lonely
La résonance de la grosse caisse est un peu moins présente sur les Fluid, qui descendent un peu moins bas que les Eris, peut-être à cause de leur gabarit un peu plus compact ? Rien de bien gênant à l’écoute. La basse est très lisible, c’est bien là le principal. Sur ce morceau, les cymbales ressortent toujours un peu plus sur les Fluid, et l’équilibre des hauts médiums par rapport aux aigus donne raison aux Eris.
Strauss — Ainsi parlait Zarathurstra
On termine avec cet enregistrement de classique. Sur l’intro, impossible de faire la différence entre les deux enceintes, ce qui prouve qu’elles restent très proches dans cette partie du spectre. La présence des cuivres est légèrement plus accentuée sur les Fluid, et les timbales restent finalement très similaires. Difficile de vraiment départager les deux enceintes sur ce morceau.
Pour résumer l’écoute, on peut dire que pour un prix inférieur (environ 400 au lieu de 500 € la paire), les Fluid se débrouillent pas trop mal face aux Eris 8 de PreSonus. Elles restent tout de même moins équilibrées dans le haut du spectre, et cela a pour effet direct de faire trop ressortir certains détails de mix. Au mixage, il faudra donc faire attention à cette zone. Pour le bas médium et les graves, cela reste très bien, quasiment à la hauteur des Eris. On regrettera juste le fait qu’elles soufflent un peu et que la mise en veille se déclenche parfois un peu trop tôt.
Conclusion
Pour 400 € la paire, les Fluid Audio FX8 sont des enceintes très honnêtes. Si elles restent un peu moins équilibrées que nos enceintes étalons dans cette catégorie, elles conservent une certaine précision dans tout le spectre, ce qui est bien là le principal. On apprécie le volume situé à l’avant, la mise en veille automatique (même si on aurait aimé un seuil un peu moins haut), leur compacité due au design coaxial, et bien sûr leur prix. Le principal défaut est de ne proposer aucun réglage, ce qui est un peu dommage, car la concurrence directe (même si elle est souvent plus chère) propose généralement au moins 3 réglages. On regrette aussi le souffle un peu trop présent à notre goût. Mis à part cela, les FX8 restent assez attractives pour leur prix.