Vous êtes musicien ou home studiste et vous n’avez qu’un billet vert pour acheter une paire d’enceintes de monitoring ? Les cinq articles qui vont suivre sont faits pour vous. Nous allons en effet tester quatre références du marché, les écouter, les comparer, afin de les noter et faire un classement selon nos critères. Nous commençons aujourd’hui avec l'Eris 3.5 de PreSonus avant d’enchainer les jours suivants avec les autres références.
Chez Audiofanzine, on connait bien la gamme Eris du constructeur américain, et pour cause, leur version de 8 pouces avait récolté l’Award Qualité/Prix lors de sa sortie en 2013. C’est donc avec une certaine confiance que nous avons déballé cette mouture 3.5 dotée d’un boomer de, je vous le donne en mille, 3,5 pouces.
Esthétiquement, nous évoluons en terrain connu vu que l’Eris 3.5 reprend les traits de sa grande sœur. Nous sommes en présence d’une mini moi avec quelques différences pratiques qui sont les bienvenues : un potard de volume, un switch de mise sous tension, une entrée auxiliaire, une sortie casque, et tout cela en façade s’il vous plait !
Comme toutes les enceintes de ce comparatif, la conception est de type maître/esclave, avec une enceinte embarquant toute l’électronique qui alimente la deuxième n’intégrant finalement que les haut-parleurs. Ce type de conception est a priori moins qualitative que celle que l’on retrouve sur des enceintes de monitoring plus haut de gamme (comme la Eris 8 dont nous parlions plus tôt), mais elle permet d’amoindrir les coûts et de proposer ainsi des enceintes sous la barre des 100 €, ce qui est assez extraordinaire, il faut l’avouer. Quoi qu’il en soit, nous ne jugerons pas les enceintes du comparatif sur cette conception, vu qu’elles adoptent toutes la même.
Au dos de l’enceinte on retrouve des filtres, ce qui, nous le verrons lors des tests suivants, est assez rare pour être souligné. On aura le loisir de régler les hautes fréquences autour de 10 kHz (+/- 6 dB) et les basses fréquences autour de 100 Hz (+/- 6 dB). Nous verrons lors de l’écoute si ces filtres sont placés judicieusement.
Au niveau des entrées, on dispose de connecteurs RCA asymétriques, jack 6,35 mm symétrique (bien !) et mini jack stéréo. À l’intérieur de la boite en panneaux de fibres recouverts de vinyle plastifié, nous avons deux amplis de 25 W alimentant le boomer de 3,5 pouces en kevlar et le tweeter d’un pouce de type dôme de soie. Le filtre de cross-over est placé à 2,8 kHz et les dimensions de l’enceinte sont de 141 × 162 × 210 mm pour un poids de 2,9 kg (la paire d’enceintes).
Maintenant que vous savez tout sur l’Eris 3.5, on passe à l’écoute.
Écoute
Notre système d’écoute nous permettant de ne comparer confortablement que trois paires d’enceintes à la fois, nous avons décidé de placer l’Eris 3.5 face à la M-Audio AV32 et la Mackie CR3 dans un premier temps, puis face à la M-Audio AV32 et la Alesis Elevate MKII dans un deuxième temps (dont le compte rendu sera disponible dans l’article de l’Alesis). Nous avons utilisé une Apollo 8 d’Universal Audio qui permet de passer rapidement d’une paire d’enceintes à une autre et des fichiers non compressés que nous connaissons bien pour les avoir utilisés sur de nombreux tests d’enceintes passés. Nous avons placé les enceintes sur pied en nous arrangeant pour avoir la même distance entre les enceintes gauches et les enceintes droites sur chaque modèle afin de ne pas fausser la largeur stéréo.
Johnny Cash – Hurt
L’introduction avec la guitare acoustique Martin donne déjà pas mal d’informations sur le profil de chaque enceinte. Les enceintes de PreSonus ont clairement plus de brillance que les deux autres, on l’entend aisément sur les bruits de cordes, et cela se joue dans la zone des 8 kHz. On a aussi une forte présence aux alentours des 2 kHz, qui disparait grandement quand on passe sur les Mackie CR3, lesquelles retranscrivent un son plus creusé, avec notamment plus de basses. Quand on passe aux M-Audio, le rendu est beaucoup plus centré sur les moyennes fréquences, avec des hautes fréquences un peu moins misent en exergue. Le son de ces dernières est moins flatteur, mais il n’est pas moins intéressant.
Quand la voix de Cash débarque dans le mix, chaque enceinte se concentre sur une partie du spectre. Les Mackie ont un rendu plus axé sur la poitrine et la gorge, les M-Audio plus autour des fréquences nasales et les PreSonus tendent à mettre en avant les sibilances et autres bruits de bouche tout en gardant une certaine présence. Sur ce morceau, nous aurons tendance à écarter les Mackie qui nous semblent un peu trop creusées, sans doute à cause de certains accidents dans les moyennes fréquences, et le duel entre les M-Audio et les PreSonus reste un grand classique des comparatifs d’enceintes avec tous les pièges qu’il comporte.
D’un côté, nous avons les Eris de PreSonus qui délivrent un son contenant plus d’air, de présence et de détails, qui est sans conteste plus flatteur, tandis que les M-Audio paraissent un peu plus fermées, mais pas déséquilibrées pour autant. Il est donc pas mal question de goût et d’usage. En effet, pour tout ce qui est enregistrement, on appréciera le détail apporté par les Eris, et pour l’étape du mixage, on pourra aimer, en supplément de plus grosses enceintes, le rendu des M-Audio, moins permissives, à l’instar de grot box genre Auratone. Les enceintes de PreSonus gardent néanmoins un avantage sur les deux autres enceintes : elles proposent deux réglages, dans les basses et hautes fréquences. Celui des hautes fréquences nous semble le plus intéressant, mais il est à noter qu’il n’agit qu’autour de 10 kHz, ce qui permettra de baisser cette brillance un peu excessive, mais pas la bosse située autour des 2 kHz. Voici la mesure montrant l’action des deux filtres :
Michael Jackson – Liberian Girl
L’intro de cette chanson est toujours très intéressante pour analyser le haut du spectre des enceintes. Les nappes et le bruit de fond permettent d’avoir un aperçu rapide de l’empreinte sonore des fréquences aiguës. Ici, les M-Audio sont clairement en retrait dans les fréquences haut-médiums et aiguës par rapport aux deux autres enceintes. On constate aussi que les Mackie et les PreSonus mettent l’accent sur différentes fréquences, plus hautes sur les Mackie (autour de 4 kHz) que sur les PreSonus (autour de 2 kHz). Lorsque la batterie et la basse arrivent, on récolte une information importante sur le bas du spectre, avec des Mackie qui en imposent plus que les deux autres, des M-Audio un peu plus limitées (elles sont aussi plus petites, rappelons-le) et des Eris qui se situent un peu entre les deux. Les Eris de PreSonus mettent vraiment l’accent sur la présence et les sibilances des voix dans le mix, les Mackie demeurent un peu plus creusées dans le médium, avec plus de rondeur dans le bas du spectre et les M-Audio sont, comparées à la brillance plutôt prononcée des Eris et Mackie, plus boxy et centrées sur les moyennes fréquences. Une fois nos oreilles habituées à ce changement, les AV32 nous semblent néanmoins plutôt équilibrées et assez détaillées pour travailler tranquillement.
Gorillaz – Feel Good Inc.
Sur cette chanson, les Mackie offrent un surplus de ressenti physique dans le bas du spectre, ce qui est plutôt pas mal pour des enceintes de cette taille. Comme pour les deux chansons précédentes, les Eris offrent plus de présence et de brillance que les deux autres, les Mackie plus de bas et un rendu plus creusé dans les médiums tandis que les M-Audio se concentrent sur un rendu plus 'Auratonien’, centré sur les médiums, ce qui sur ce genre de mix « moderne » est plutôt intéressant, car on ne se laisse pas trop distraire par le reste du spectre, à savoir les basses et les aigus.
Pour des enceintes de complément, les petites M-Audio sont assez séduisantes, car elles délivrent un son austère, sans fard, mais assez équilibré qui permettra aux home-studistes de travailler leurs morceaux sans problème. Pour les musiciens désireux d’avoir un son un peu plus fun, les Mackie sont celles qui proposent le plus de basses, mais aussi le son le plus creusé dans les médiums. Les Eris quant à elle possèdent un son assez brillant de base, mais leurs réglages permettront de sculpter le haut et le bas du spectre à sa guise, ce qui est un gros avantage par rapport aux deux autres.
Conclusion
À l’instar des Eris E8, les 3.5 nous ont vraiment séduites. Nous avons apprécié le fait de disposer de filtres, ce qui est très rare sur ce type d’enceintes, et d’entrées symétriques en Jack TRS. Son potard de volume, son switch de mise sous tension et son entrée auxiliaire placés à l’avant la rendent très pratique à l’utilisation et finalement, le seul reproche que l’on puisse faire à cette petite enceinte PreSonus est son rendu assez brillant de base, chose que l’on peut cependant corriger via le filtre idoine. Elle mérite donc la note de 4,5/5 et un Award Valeur Sûre.