Nous avions testé il y a un an et demi la SC204 de EVE Audio, une enceinte de monitoring assez compacte dotée d’un boomer de 4 pouces qui nous avait plutôt convaincus. Alors quand le constructeur berlinois nous a proposé de tester la SC203, on a tout d’abord pensé qu’elle ferait doublon avec sa grande sœur. Mais à y regarder de plus près, cette enceinte est différente sur bien des aspects, tant dans la conception que dans les fonctionnalités proposées, entre l’enceinte multimédia et l’enceinte de monitoring. Penchons-nous sur son cas !
Si la SC204 avait « tout d’une grande » et ressemblait à une version miniature du reste du catalogue d’EVE Audio, la SC203 se démarque par sa conception. Le constructeur n’hésite pas à employer le terme d’enceinte « multimédia » sur son site officiel pour parler de sa dernière née, lui qui s’est fait une place dans le monde du monitoring avec ses 2, 3 et 4 voies. La SC203 est un système maître/esclave, ce qui veut dire en d’autres mots que toute l’électronique se situe dans une seule enceinte (la maître, à droite) et que cette dernière se chargera d’envoyer le jus à la deuxième (l’esclave, à gauche). Côté transducteurs, on trouve un boomer de 3 pouces protégé par une grille, contrairement au reste de la gamme, et un tweeter µA.M.T. (un AMT RS1 équipe la SC204). Les amplis font 30 W chacun et la fréquence de coupure est située un peu plus haut, à 4,8 kHz. Côté mensurations, la SC203 est compacte, même si elle reste plus imposante que l’iLoud Micro Monitor d’IK Multimedia testée récemment : 116 × 190 × 134 mm, pour des poids de 1,9 et 1,7 kg (respectivement maître et esclave). On reste néanmoins dans une solution nomade.
203 coupé cabriolet
Côté réglages, on retrouve l’encodeur cranté de la marque qui permettra de tout faire : changer d’entrée, de volume, de balance ou encore d’activer le mode satellite (pour une utilisation avec un caisson de basses). On pourra aussi régler les filtres, deux plateaux (+/- 3 dB) pour les aigus (à partir de 3 kHz) et les graves (à partir de 300 Hz). Nous continuons d’émettre des petites réserves concernant cet encodeur qui peut s’avérer difficile à maîtriser les premiers temps. Néanmoins, il offre l’avantage d’accéder à tous les réglages sur la face avant, et ça, c’est plutôt cool, d’autant plus que l’enceinte se met en veille automatiquement au bout de 10 minutes. Cerise sur le pompon, la SC203 est livrée avec deux pads permettant d’incliner (7,5 ° et 15 °) ou non l’enceinte, suivant si elle est posée sur un bureau, un bandeau de console ou des pieds. Ces deux Flexipads joueront aussi un rôle d’absorbeur de vibrations. Il est à noter que les enceintes disposent aussi d’inserts afin de pouvoir les fixer au mur ou sur pieds via le « Mic thread wall mount » (en option).
À l’arrière, on retrouve des connecteurs très différents de ce qui se fait habituellement chez Eve Audio, d’où l’appellation « multimédia ». En analogique, exit le XLR, on retrouve du RCA (asymétrique, donc) et en numérique du TOSlink optique. La surprise provient aussi de la prise USB, qui permettra aux SC203 d’apparaitre comme une interface audio aux yeux de l’ordinateur. Plutôt cool quand on est en déplacement avec son ordinateur portable ! On retrouve aussi la sortie pour relier les enceintes au caisson de basses, la prise d’alimentation (externe, malheureusement un truc de plus à trimballer), la prise pour relier l’enceinte gauche et trois petits switchs permettant d’activer le mode stand-by, le filtre pour les mettre en mode satellite et le dernier pour choisir le niveau d’entrée maximum (8 ou 22 dBu).
Pour l’écoute, nous avons choisi de les mettre face aux LYD7 de Dynaudio qui appartiennent certes à une autre catégorie, mais qui nous permettront d’avoir un point de repère familier et fiable. Pour que le match soit loyal, nous avons, tout comme les LYD7, posé les SC203 sur des pieds équipés en isoAcoustics.
Écoute
Johnny Cash – Hurt
La guitare acoustique Martin de Cash est légèrement plus brillante sur les SC203 que sur les LYD7. Ces dernières étant plutôt modérées jusqu’à 15 kHz, la brillance des EVE n’est pas choquante, même si on sent une certaine emphase entre 3 et 8 kHz. Rien de rédhibitoire cependant quand on sait que le filtre shelf agit justement à partir de 3 kHz et peut atténuer jusqu’à – 3 dB. Quand la voix débarque, les SC203 se montrent un peu plus nasales que les LYD7 et les sibilances sont plus en avant. Globalement, la voix sonne de manière un peu moins naturelle. L’équilibre médiums/aigus entre les deux enceintes est un peu différent, les EVE privilégiant les fréquences situées aux dessus de 3 kHz à celles situées autour de 1 kHz. D’une manière générale, nous trouvons que les LYD7 sont plus transparentes et naturelles, mais les SC203 tirent quand même bien leur épingle du jeu, surtout en baissant un peu le filtre en plateau situé à 3 kHz.
Michael Jackson – Liberian Girl
Sur l’intro, le petit surplus de fréquences aiguës fait remonter certains bruits sur les SC203 et donne pas mal de détails. Quand le couple grosse caisse/basse arrive, la SC203 donne un rendu un peu plus creusé, mais étonnamment les basses fréquences rivalisent avec les LYD7, pourtant dotées d’un boomer de 7 pouces. Il faut dire que ces dernières ne se démarquent pas par leur extension dans les basses fréquences, elles sont au contraire plutôt limitées pour des 7 pouces, mais c’est tout de même un bon point pour les Eve Audio. La voix, qui reste le meilleur « instrument » pour juger de la transparence d’enceintes, car c’est celui que l’on connait le mieux, est toujours un peu moins naturelle sur les SC203, notamment à cause des sibilances un peu trop exacerbées. Quelques dB en moins sur les aigus ne feront pas de mal, c’est certain.
Gorillaz – Feel Good Inc.
Les SC203 descendent assez bas, nous l’avons vu, mais cette extension est-elle nette et lisible ? Il faut avouer que nous avons été assez impressionnés par leur rendu. Jusqu’à 65 Hz, la SC203 se défend sans problème et les basses restent sèches et rapides. Rien ne traine et tout est lisible. Le rendu général reste toujours plus creusé que les Dynaudio, et les voix de type radio sont un peu trop en avant, mais comme dit précédemment, c’est beaucoup mieux avec une légère atténuation dans le haut.
Comparées aux LYD 7, les SC203 sont loin d’être ridicules, et leur courbe de réponse légèrement creusée peut tout à fait se contrôler via les deux filtres shelves disponibles et bien placés dans le spectre. Leur côté légèrement flatteur cadre d’ailleurs avec le placement « multimédia » du produit, il n’y a rien de particulièrement choquant là-dedans. Le bas est assez hallucinant pour des enceintes de cette taille et il faut avouer que les constructeurs d’une manière ont fait d’énormes progrès en la matière ces dernières années.
Conclusion
Eve Audio a un peu surpris son monde en proposant des petites enceintes multimédias, eux pourtant habitués aux grosses enceintes de monitoring. Le résultat est plutôt étonnant, avec des basses assez étendues vu le gabarit et une courbe de réponse avec un haut un peu en avant, mais tout à fait corrigible via les filtres intégrés. C’est finalement du côté de la connectique que la nature « multimédia » de l’enceinte transparait le plus avec les connecteurs USB, TOSlink et RCA. On aurait quand même aimé avoir une entrée analogique symétrique pour pouvoir brancher correctement son interface audio et une alimentation interne pour avoir un truc de moins à trimballer dans le sac. Nous gardons toujours une réserve sur l’encodeur (qui équipe toutes les enceintes de la marque) en façade pas toujours facile à appréhender, même s’il offre le confort d’offrir tous les réglages en façade. On gardera en tête que ces petites enceintes proposent au besoin une certaine transparence et qu’elles pourront donc satisfaire les musiciens et home-studistes qui ont la bougeotte.
Tarif généralement constaté : 499 € la paire