Toujours très inventive, la marque IK Multimedia lance un nouveau produit inédit, qui pourra rendre de fiers services à des producteurs ou mixeurs nomades travaillant essentiellement au casque. Arc On Ear pourrait bien être une petite révolution, ou au minimum une belle évolution…
On découvre aujourd’hui un produit tout à fait singulier, puisque c’est à notre connaissance le premier système de correction de casque autonome et matériel (ou hardware, si c’est plus clair). Arc On Ear se présente sous la forme d’un petit boîtier que l’on insère entre l’ordinateur ou la carte son et le casque, et qui a pour but de proposer une calibration de ce dernier, en fonction du modèle utilisé. En plus de la calibration, IK Multimedia profite de cette petite interface pour ajouter une simulation de monitoring studio, avec un certain nombre de modèles d’enceintes disponibles.
Brève histoire des systèmes de correction de casque et de pièce
Petit retour en arrière, pour mieux comprendre de quoi il s’agit, et ce qui a mené la marque italienne jusqu’à cette proposition. IK Multimedia a été l’une des premières marques de moniteurs à développer son propre système de calibration, ou correction de pièce, à savoir une égalisation proposée dans le DSP des enceintes en fonction des mesures acoustiques effectuées dans la pièce où elles sont utilisées. Ce système, déjà appelé Advanced Room Correction (ARC), existe depuis des années en version logicielle et accompagne les modèles iLoud Precision depuis 2022, puis il a été intégré en 2024 dans une interface matérielle nommée ARC Studio. Chez d’autres marques, des systèmes de correction avaient été développés précédemment, et notamment Sonarworks avec le très populaire SoundID Reference. Ce dernier logiciel propose une correction pour les moniteurs en fonction de l’acoustique de la pièce, mais aussi, depuis longtemps, une correction pour de très nombreux modèles de casques. Au-delà de la question de la correction, certains défauts de l’écoute au casque sont souvent pointés, et des solutions sont développées pour les compenser. Principalement, il y a la représentation stéréo : lors d’une écoute au casque, l’oreille droite n’entend que ce qui est émis par le canal droit, alors qu’une écoute avec des enceintes permet à chaque oreille d’entendre un peu de ce qui vient du canal opposé. La perception au casque de l’image stéréo est donc différente, et pas représentative de celle qu’on a avec des moniteurs. L’idée de rapprocher l’écoute au casque d’une écoute dans un espace, avec des enceintes et en se rapprochant de modèles précis, n’est donc pas nouvelle. On vous en parlait dans ces colonnes en 2023, le VSX de Slate Audio, par exemple, allait dans ce sens. Waves propose aussi un plugin appelé Nx, qui fait ce type de travail.
Le matériel : boîtier Arc On Ear, connexions et ergonomie


Le logiciel Arc On Ear : calibration de casque et réglages avancés
Ce petit boîtier est donc lié à un logiciel, qui porte le même nom, et dans lequel on accède à toutes les fonctions et options disponibles. Dans sa première utilisation possible, connecté en USB à l’ordinateur, le matériel est également un DAC, et se charge de la conversion du signal vers la prise casque analogique. C’est aussi dans ce mode de connexion que le logiciel identifie le boîtier et lui communique les options choisies. La première chose à faire, c’est évidemment de lui indiquer le modèle de casque avec lequel vous allez écouter, pour que Arc On Ear vous propose la calibration adaptée. 

Simulation d’espace et enceintes virtuelles de studio
Le menu de l’Arc On Ear est assez dense, et il est temps de passer à la Studio Simulation, qui se trouve juste à droite de la Calibration. Le rôle de cette simulation, c’est précisément de créer une perception de la stéréo comparable à celle qu’on aurait avec des enceintes dans une pièce. L’image stéréo, en conséquence, se rétrécit considérablement et chacune de nos oreilles perçoit un peu de ce qui provient du canal opposé. La largeur de l’image reste ajustable, de 10 % à 200 %, la proposition par défaut étant à 100 %. On peut également choisir d’ajouter une Ambience, ce qui ne change pas grand-chose, de notre perception. La suite se trouve juste à côté, et se nomme Virtual Speakers : ici, on peut donc choisir d’ajouter les caractéristiques tonales d’un modèle précis de moniteurs, choisi parmi la vingtaine de propositions. Les habitué.e.s de l’ARC connaissent déjà le principe : des paires d’enceintes de référence, pas nommées par leurs vrais noms, mais reconnaissables assez aisément, ainsi que des téléphones ou téléviseurs, sont listés dans le menu Select Speakers. On a, par exemple, trouvé sous le nom Small Alu-120 les moniteurs Neumann KH120 qu’on a dans notre régie. C’est un peu gadget, mais on peut alors remplacer la courbe des fréquences par un visuel de studio avec les enceintes choisies.
Un système nomade : présets embarqués et usage sur batterie
Revenons sur le boîtier, qui est donc chargé à 100 %, puisqu’il est connecté en USB depuis un moment. En utilisant les Presets dans la fenêtre du logiciel, on peut enregistrer dans le boîtier jusqu’à cinq profils, pour lesquels on choisira un modèle de casque, d’éventuels ajustements sur la correction, mais aussi les réglages effectués sur la Studio Simulation ainsi que la paire de moniteurs virtuels choisie. À partir de là, l’interface peut être utilisée de manière autonome, sur batterie et connectée en analogique entre une sortie audio et le casque. C’est là que les petits interrupteurs vont s’avérer utiles : « Cal » permet d’activer ou non la calibration, « Studio » idem pour la simulation de studio et les éventuelles enceintes si on a activé au préalable un modèle pour ce préréglage. Le dernier interrupteur « Fn » est assignable à un autre paramètre au choix, Mono, Dim ou autres, et il faut donc choisir pour chaque Preset ce paramètre.
On écoute les casques : résultats de la calibration Arc On Ear
Logiquement, la calibration devrait faire converger différents modèles de casques aux caractéristiques tonales différentes, qui pourraient sonner presque identiques avec les corrections proposées pour chacun. On va donc tirer avantage des cinq préréglages pour passer assez rapidement sur cinq références et les comparer. Pour ça, on a réuni un Beyerdynamic DT 770, un Sennheiser HD 25, un Audio-Technica ATH-M50x, un Focal Listen Pro, et enfin un Slate Audio VSX. La comparaison est franchement convaincante : une fois calibrés, les différents casques diffèrent très peu, et l’équilibre tonal semble très cohérent, alors qu’à l’origine, ils sont extrêmement différents ! Les mesures de IK Multimedia pour ces cinq modèles ont un point commun : il y a toujours un excès dans les aigus, au-delà de 10 kHz, et cette zone est par conséquent systématiquement baissée par la calibration.
Cela confirme notre première impression, qui est que, par rapport à nos habitudes d’écoute au casque, la correction retranche trop de ces fréquences, et on est par conséquent bien heureux d’avoir sous la main des réglages pour l’ajuster à nos repères. La simulation de studio, sans enceintes spécifiées, nous donne accès à une deuxième perception de la scène stéréo, assez représentative de ce que l’on connaît avec une paire d’enceintes. On ne pense pas que cela puisse remplacer l’expérience réelle d’écouter avec des enceintes dans un espace, et on ne perd pas de vue qu’aujourd’hui, beaucoup de gens écoutent principalement avec un casque ou des écouteurs, donc mixer uniquement pour une écoute hifi comme il y a quelques années n’est plus une évidence. Néanmoins, cette simulation est une vraie alternative intéressante, et si on apprend à jongler entre les deux configurations sans s’y perdre, ça peut être utile. Les enceintes virtuelles, c’est une autre histoire : corriger les tendances du casque que vous utilisez pour lui appliquer les défauts d’un autre système d’écoute, c’est un peu spécial comme démarche. On a tout de même testé la comparaison entre les moniteurs Neumann KH 120 de notre régie et leur émulation virtuelle à travers le DT 770 corrigé, et on doit reconnaître que c’est assez proche ! On constate une légère différence dans le bas, où on trouve que la proposition Arc On Ear enlève trop de matière, mais dans l’ensemble, c’est crédible.



