Qu'est-ce qui est petit, pas très cher, facile à utiliser, conçu pour les DJs, mais largement utilisé par toutes sortes de musiciens ?
Si vous avez répondu ‘un SP’, c’est gagné ! Ce générateur d’inspiration connaît un franc succès depuis le premier modèle. Mais le dernier-né, le SP-555, va-t-il combler tous les fans et convertir les autres ?
Les SP, sont des sampleurs de phrases, c’est-à-dire qu’ils enregistrent des parties musicales (celles-ci pouvant aller d’un bref coup de caisse claire à plusieurs dizaines de minutes de musique). Ces phrases sont affectées à des pads organisés en banques. Une pression sur un pad joue la phrase enregistrée dans la mémoire de ce pad. Un peu comme si on avait plein de magnétos (ou de lecteurs de mp3) prêts à fonctionner en même temps et immédiatement. On peut aussi enregistrer des séquences (appelés ici patterns) constituées de suites de samples/pads. Les samples peuvent être joués de différentes façons : en ‘one shot’ ou en boucle, en lecture inversée, etc. Si vous voulez plus de détails sur le fonctionnement des SP et de leur sampling, de nombreuses informations figurent dans les forums. Nous allons ici nous concentrer sur les nouveautés.
Tour du produit
Le SP-555, comme ses prédécesseurs, se présente comme une machine destinée à être posée sur une table. On retrouve la plupart des connexions à l’arrière et l’ensemble des contrôles en façade sur le dessus. La prise casque se trouve logiquement en face avant et la prise micro/instrument est située sur le dessus.
Comme sur les autres modèles de la série, tous les boutons du SP-555 sont lumineux. Formés d’un plastique caoutchouteux translucide, ils s’illuminent vivement de rouge lorsqu’ils sont enclenchés. C’est très agréable et cela facilite considérablement les repérages. Les boutons sont plaisants au toucher et répondent parfaitement. Première grande nouveauté : les pads avec lesquels on joue les samples sont désormais dynamiques. C’est-à-dire que le volume du sample joué sera proportionnel à la force avec laquelle on presse le pad. Voilà une grande attente des vieux utilisateurs de SP-x0x enfin comblée.
On dispose désormais de 16 pads et de 10 banques ! Deux internes et huit sur carte. Soit 160 emplacements mémoire. Les cartes acceptées sont des CompactFlash de 32 Mo à 2 Go. Un bon choix, car ce support de mémoire est plutôt fiable et peu coûteux. S’il n’y a pas de carte livrée avec le SP-555, une carte de marque de 1 Go achetée au supermarché du coin ne m’a coûté que 16 €. Avec ceci, c’est 397 minutes de mémoire qui sont disponibles en qualité standard, soit une moyenne de 2 min 30 par pad ! Plus qu’il n’en faut.
Connectique
La prise micro est un combo jack/XLR et possède un switch permettant de choisir le type d’entrée : instrument haute impédance comme une guitare ou une basse, micro « standard » pour les dynamiques ou avec alimentation fantôme pour les micros statiques. On dispose d’un micro interne qui se déconnecte dès que l’on branche quelque chose sur l’entrée micro. L’entrée micro/instrument comme l’entrée ligne disposent chacune d’un bouton d’activation et d’un réglage de volume.
Pour le reste, le SP-555 dispose
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D’une sortie stéréo sur deux prises RCA
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D’une entrée ligne stéréo sur deux prises RCA
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D’une entrée/sortie MIDI
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D’une prise d’alimentation sur laquelle on branche un transformateur externe. Celui-ci est assez petit et léger. De plus, ce n’est pas un transformateur sur la prise (si gênant sur les multiprises), mais un système avec un câble entre le transfo et la prise de courant comme pour les ordinateurs portables. Bon point.
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D’une prise USB
SP carte son
Une prise USB ? Eh Oui. Car non seulement celle-ci va permettre de transférer directement des sons de son ordinateur à la mémoire du SP (sans devoir sortir la carte mémoire pour la mettre dans un lecteur), mais en plus, le SP-555 peut faire office de carte son ! Et ceci, pour PC et Mac avec des drivers compatibles ASIO, WDM et MME et de faibles latences (quelques millisecondes).
La prise MIDI IN permet de synchroniser le SP sur l’horloge d’un autre appareil MIDI et de contrôler le déclenchement des samples à partir d’un élément MIDI externe (comme un clavier maître ou un séquenceur matériel ou logiciel)
La prise MIDI OUT permet quant à elle de retransmettre les messages entrant en MIDI IN (fonction MIDI THRU, bien utile pour constituer une chaîne d’appareils MIDI tous synchronisés) et d’envoyer des messages MIDI à partir du SP.
L’implémentation MIDI du SP est légère. Elle se limite à la synchronisation et au déclenchement des samples. Grâce à la sortie, on peut utiliser le SP-555 comme contrôleur MIDI type un MPD de Akai ou un PadControl de Korg.
Une grosse bêtise de la part de Roland : on peut synchroniser le SP sur un signal MIDI entrant sur la prise MIDI, on ne peut apparemment pas le faire sur du MIDI venant par l’USB. En tout cas, je n’y suis pas parvenu. Dommage.
La section d’effet
On dispose de 32 effets, des plus classiques (réverbe, chorus, délai) aux assez bizarres comme le DJFX Looper, une sorte d’écho à bandes numérique. Les effets sont en général d’assez bonne à très bonne facture même si quelques-uns sont assez mauvais comme le compresseur qui donne du souffle et les distorsions / overdrive qui sonnent vraiment numériques. On pourra s’en servir sur un sample instrumental, mais n’espérez pas les utiliser sur une guitare branchée sur le SP. Les effets du SP ne font en général pas dans la subtilité, car ce n’est pas leur propos. L’idée est plus une transformation radicale des samples qu’une production chirurgicale. Mais pour cette première, il y a de quoi faire et certains effets sont vraiment savoureux. L’utilisation des effets reste la même que dans les modèles précédents : on sélectionne l’effet et on dispose de trois boutons rotatifs pour le régler. Leur fonction change en fonction de l’effet, mais ils conservent une même logique d’affection. Par exemple, le bouton 3 sert presque systématiquement à régler le volume de l’effet ou le dosage dry/wet.
Le regret est qu’on ne dispose toujours que d’un seul effet simultané. Pour cumuler plusieurs effets sur un sample, il faut le resampler avec son effet. Décidément, les effets sont pensés pour triturer les sons en live et non pour faire de la production sonore précise. Un bouton ‘effect assign’ permet de sélectionner les pads et les entrées auxquels l’effet est appliqué.
Nouveauté très intéressante : la mémorisation des effets. On dispose de 16 mémoires d’effets avec leurs réglages rappelables par pression sur un pad.
L’écran
L’écran du SP-555 est un afficheur à segments avec trois caractères plus des points. Certains pourront trouver ceci un peu juste. Pour ma part, je trouve que c’est suffisant dans l’esprit d’utilisation simple de cette machine où l’on travaille plutôt à l’oreille. Très lisible, il est situé dans une fenêtre ronde qui s’éclaire en bleu et rouge. Cet éclairage pulse au rythme du tempo et lorsqu’on enregistre une source externe, il s’allume plus ou moins selon le niveau d’entrée du signal, prévenant ainsi du risque de faire saturer les entrées. On retrouve en plus la traditionnelle LED rouge indiquant les crêtes proches de la saturation.
Fonction Loop Capture
Voilà une fonction qui était très attendue. Son principe : faire de l’enregistrement en boucle, un peu comme sur un looper comme le fameux JamMan de Digitech ou les Boss RC-20 et RC-50. Pour ceux qui ne connaissent pas ces systèmes, il s’agit d’enregistrer des boucles les unes sur les autres. Une démonstration impressionnante de ce système est le solo ‘Globe Trotter’ de Didier Lockwood dont on peut voir la vidéo sur son site.
Cette fonction sur le SP-555 a suscité une quantité impressionnante de questions dans les forums, notamment de la part de guitaristes curieux de savoir si le SP-555 pouvait faire Office de RC-20. Disons-le tout de suite, la réponse est non : il y a des différences de fonctionnement entre la fonction du SP et celle d’une pédale dédiée. Cependant, la fonction loop capture, même si elle ne fonctionne pas exactement comme celle d’un looper pour guitare, permet énormément de choses et peut s’avérer largement utilisable pour tout instrumentiste. Beaucoup d’âneries ont été dites à son sujet, évoquant notamment une latence entre la fin de l’enregistrement et le début du jeu de la boucle. C’est inexact. Voyons donc comment cette fonction marche et ce que l’on peut faire avec.
Précisons que le SP-555 dispose d’une entrée pour une pédale switch qui peut être affectée à différentes fonctions dont le contrôle du loop capture. On commence par sélectionner la ou les sources d’enregistrement. On a le choix entre enregistrer les pads + les sources externes ou juste les sources externes. Ce choix pourra être changé pendant l’utilisation du loop capture. On peut donc enregistrer un instrument externe sur un accompagnement rythmique en enregistrant ou pas cet accompagnement. Notons au passage qu’on dispose d’un métronome dont on peut régler le volume.
Fonction Loop Capture, suite
Après sélection de la source, on peut sélectionner la longueur de la boucle (1, 2 ou 4 mesures) ou une longueur ‘free’ (libre) limitée à une quinzaine de secondes. En mode free, c’est le départ et l’arrêt d’enregistrement qui détermineront la longueur de la boucle. Si l’on enregistre sur un pattern, on a tout à fait intérêt à déterminer le nombre de mesures. Dans ce cas, la boucle sera parfaitement calée au pattern. Pour déclencher l’enregistrement, il suffit d’appuyer sur ‘rec’ (ou sur la pédale). Avec l’option ‘autostart’ l’enregistrement est déclenché par l’entrée d’un son. Lorsque l’on réappuie sur rec (ou sur la pédale), la boucle passe immédiatement en mode lecture, sans latence. L’entrée audio est alors désactivée, obligeant l’utilisateur à réappuyer dessus pour faire des overdubs. Logique pour une utilisation DJ pour éviter le mélange de la boucle avec la source externe. Après réactivation, elle ne se désactive plus lorsqu’on passe de rec à play, ce qui se fait à chaque fois par appui sur la pédale (ou sur rec).
Cela fonctionne très bien à l’exception d’un petit souci que j’ai rencontré une fois : en mode 4 mesures, le SP a curieusement refusé d’enregistrer une dernière fraction de seconde de la boucle, même si celle-ci était synchronisée au pattern. Cela n’est arrivé qu’une seule fois et je n’ai pas réussi par la suite à reproduire la situation du bug. En dehors de ce cas, je me suis amusé pendant des heures avec la fonction loop capture tant ce mode de jeu est ludique et suscite la créativité. Pour en terminer sur les comparaisons avec une pédale looper, sachez qu’on ne peut pas effacer son dernier enregistrement si l’on s’est planté. On ne peut effacer que la totalité de la boucle enregistrée. Rigueur et précision sont obligatoires, donc. Mais ce mode de jeu est justement un extraordinaire outil pour travailler sa précision.
Une fois sa boucle enregistrée, le bouton play fonctionne comme n’importe quel pad. On peut sauvegarder l’enregistrement dans un pad, mais comme pour toutes les opérations d’écriture sur le SP, cela arrête toute lecture pendant la sauvegarde.
Le fonctionnement du mode loop record ne peut donc pas remplacer stricto senso une pédale looper pour guitare. Mais pour peu qu’on accepte de se plier aux contraintes de l’outil, il permet bien des choses et procure un sacré plaisir de jeu. D’autant que l’absence de bruit et de souffle sur les entrées audio permet de rester en longtemps en mode enregistrement sans accumuler de bruit ou souffle dégradant trop le signal. C’est d’ailleurs le moment de parler de la…
Qualité sonore
Comme on pouvait s’y attendre, le micro intégré manque de définition dans le grave et surtout de puissance. Plutôt un dépannage pour enregistrer quelques bruitages à la volée ou faire des annonces sur scène. Que ce soit avec un micro dynamique (testé avec un SM58) ou un statique (un C-414), les micros que l’on branche sur l’entrée ont suffisamment de gain et le son est propre. Par contre, il manque cruellement d’aigus. C’est un peu dommage compte tenu notamment de l’utilisation possible en carte son. On en restera à l’effet de voix ponctuel ou à la maquette. Cela n’a rien d’étonnant si l’on se souvient que le SP-555 coûte moitié moins cher qu’un préampli micro d’entrée de gamme qualité studio. En revanche, le préampli est quasi totalement exempt de souffle, même en le poussant pas mal. Ce qui permet, de boucler overdubs sur overdubs avec les entrées micro ou instrument en conservant une qualité tout à fait correcte.
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L’entrée instrument fait son travail correctement. On ressent moins ce cruel manque d’aigus qu’avec des micros.
Côté entrée ligne, c’est vraiment bon. Comme sur les générations précédentes, l’échantillonnage est plutôt transparent et les samples sont très fidèles aux sources. La sortie ligne est elle aussi très bonne et quasi exempte de souffle même lorsqu’on pousse le volume.
Tout ceci fait du SP-555 un appareil d’une qualité sonore très très respectable pour son prix et l’usage auquel il est dédié. Signalons qu’il est livré avec un logiciel de conversion et transfert de samples (pour PC et Mac) permettant d’envoyer directement des samples de son ordinateur au SP sans passer par les entrées audio. Est également fourni Sonar LE (pour PC seulement), une version ‘light’ du séquenceur de Cakewalk qui permet de réaliser beaucoup de choses. En clair, le compagnon idéal du SP pour qui n’a pas de séquenceur logiciel.
Conclusion
Simple, ludique, générateur d’inspiration… Tels sont les qualificatifs qui reviennent généralement quand on parle des SP. Le SP-555 ne fait pas défaut à cette réputation. Ses évolutions le rendent à peine plus compliqué que ses glorieux devanciers et il reste simple d’utilisation. D’autant qu’il est accompagné d’une documentation (en français) brève, claire et complète. Avec sa mémoire énorme, ses pads dynamiques, sa fonction loop capture et sa qualité sonore, le SP-555 justifie clairement son prix si vous n’oubliez pas que ce que vous allez acquérir n’est pas un outil chirurgical de production léchée, mais un véritable générateur de plaisir de jouer. Car il s’agit vraiment de jouer de la musique et non de se perdre dans les arcanes de la complexité de certains instruments électroniques. Et l’expérience montre que malgré l’omniprésence du plastique, la fiabilité des SP est au rendez-vous pour des années de compagnonnage sur scène. Un très bon produit.
Les Plus :
+ Toujours aussi ludique
+ Temps d’apprentissage dérisoire
+ Qualité sonore
+ Effets à foison
+ Loop capture et D-Beam vraiment sympa
+ Fonction carte son
Les moins :
– Préampli micro un peu sourd
- Un seul effet à la fois
- Arrêt de la lecture pendant les écritures en mémoire
- Pas de synchro par l’USB