Le voici donc : dans la catégorie "supérieur à 200 euros", le Hi-X65, casque de référence proposé par la marque autrichienne (origine évidente, puisque c'est comme le Port-Salut). Beau casque noir corbeau, mais est-ce que le ramage se rapporte au plumage ?
Que vous préfériez le groupe Ultravox dans la période John Foxx ou Midge Ure, vous aurez reconnu dans le titre de ce test une référence à l’un des « tubes » les plus bizarres, les moins tubesques des années 1980. Et si cela ne veut rien dire pour vous, alors vous aurez au moins cela en commun avec le chanteur du groupe anglais, puisque lui aussi pouvait dire : « It means nothing to meeeeeeeeeeeeeeeee. »
Après avoir testé en ce début d’année un ensemble de casque « de référence » situé dans la tranche 100–150 euros (environ), nous commençons désormais une série complémentaire avec les casques de la tranche supérieure (200–300 euros, et plus). Ils correspondent eux aussi à des références souvent disponibles dans des studios professionnels, et ils concernent plus souvent les écoutes de mix (je sais, certains vont hurler, mais c’est une pratique qui n’est plus si tabou aujourd’hui) ou de mastering.
Aujourd’hui, nous nous penchons donc sur le Hi-X65 d’Austrian Audio.
Présentation
Spécifications
Le Hi-X65 est un casque de type circumauriculaire, ouvert, avec un transducteur dynamique. La taille du transducteur est de 44 mm.
Les spécifications annoncées par le constructeur sont les suivantes :
impédance : 25 ohms
réponse en fréquence : 5 Hz – 28 kHz
Le casque est fourni avec deux câbles amovibles (3 m et 1,2 m) finis par des fiches jack TRS 3,5 mm, plus l’habituel adaptateur TRS 6,3 mm. Les connectiques sont solides et élégantes, et les câbles ont l’air assez robustes.
Toute la construction donne une impression de solidité. Une bonne partie des pièces est en métal, recouvert d’une peinture mat, en particulier l’arceau et les fourches, qui sont réalisées dans un métal particulièrement épais et robuste. On remarque au passage quelques fantaisies plutôt bien pensées, comme cette spirale qui a pour fonction de limiter les risques d’étirement des câbles interécouteurs. En plus, c’est rigolo…
Démontable ?
Oui, mais pas facilement, et pas intégralement.
Hop, on tire sur les coussinets !
Et là, on tombe sur une mousse de protection… collée !
Bon, elle se décolle facilement par les bords, pour accéder aux vis :
Il y en a quatre en tout, trois en haut, une en bas. On les retire :
Et là (ça commence à devenir une tendance agaçante ces derniers temps) un transducteur collé.
Le câblage est bien réalisé ! En revanche, tout est sécurisé par de l’epoxy… C’est bien pour solidifier, certes, moins bien pour réparer…
Passons…
Confort
Bon.
Ce n’est pas un casque léger, mais les écouteurs sont larges, prennent bien les oreilles, et se font plus ou moins oublier. Surtout, on n’a pas ressenti une impression de chauffe trop importante, et l’on a trouvé les coussinets très confortables sur toute la longueur d’une écoute.
Isolation
Nulle, c’est un casque ouvert.
Transport
Facile.
Le casque est fourni avec un sac et une boîte, certes en carton, mais solide, fermable solidement, et dotée d’une mousse découpée pour accueillir et protéger le casque.
Mais surtout, celui-ci se plie ! Donc, pas de soucis pour le transport dans un sac, il saura se faire petit, et il fait preuve d’une souplesse et d’une capacité d’adaptation mécanique assez importante.
Benchmark
Voici donc le nouveau protocole de mesures objectives, mené par nos soins afin de compléter l’écoute subjective. Avec l’aide précieuse de notre testeur EARS de MiniDSP, nous avons le plaisir de pouvoir vous fournir des courbes de réponse en fréquence et distorsion, réalisées dans notre atelier.
Réponse en fréquence :
On remarque :
- Un profil TRÈS linéaire, de 20 Hz à 400 Hz
- Un creux très progressif de 400 Hz à 1,5 kHz
- Une accentuation claire à 4 kHz
- Un creux marqué à 5,5 kHz
- Des aigus accentués au-dessus de 7 kHz et jusqu’à 18 kHz
Les transducteurs sont très bien appariés. Très bon contrôle qualité.
Distorsion :
La distorsion mesurée est inférieure à 0,2 % de 70 Hz à 4 kHz. Le pic de la RF juste au dessus de 4 kHz implique un petit pic de distorsion, qui remonte à 0,4 %. Dans les grave on ne dépasse jamais 1 %, c’est très bien. Dans l’aigu on remarque une remontée importante des harmoniques impaires, très en retrait sur le reste du spectre.
Écoute
Richard Hawley – Don’t Get Hung Up In Your Soul (sur Truelove’s Gutter)
Une ballade acoustique, avec beaucoup de réverbe et une différence de dynamique importante entre la voix et la guitare. C’est large – voilà notre première impression. Les aigus ne manquent pas de détails, sans excès à ce niveau non plus. La voix, par exemple, est bien articulée, pas masquée, mais elle a aussi du coffre. La contrebasse est là, un peu lourde, mais c’est à peine le cas. À voir si cela ne risque pas de devenir un problème sur des morceaux avec plus de présence du grave.
Sun Kil Moon – Butch Lullabye (sur Common As Light And Love…)
Sur l’intro, on doit entendre à la fois les notes graves, les harmoniques médiums ajoutées par la distorsion, l’attaque légèrement piquée des notes, tout en séparant bien la grosse caisse qui sonne assez sèche et médium. L’intro basse/batterie est très bien rendue avec les éléments attendus (attaques dissemblables entre les instruments, clavier/basse qui descend bien bas sans imprécision). La voix surtout est très bien rendue : pas nasale, détaillée, en avant mais pas trop, avec un timbre bien différent (une impression de proximité différente en particulier) entre les parties chantées et les parties parlées.
Massive Attack – Teardrop (sur Mezzanine)
Un titre avec beaucoup d’extrême grave, mais qui ne doit jamais masquer les nombreux détails dans le haut médium et l’aigu. Là, on ne trouve pas le problème que l’on constate sur d’autres casques : une basse qui « mange » le centre du mix et couvre le piano. Au contraire, c’est très équilibré. Même commentaire que précédemment sur la voix : le rendu est très bon, très équilibré entre le détail de l’aigu, et la présence dans les hauts-médiums.
Charlie Mingus – Solo Dancer (sur The Black Saint And The Sinner Lady)
Voilà un morceau avec beaucoup de soufflants jouant dans des tessitures similaires : c’est très touffu et le but est d’essayer de discerner les timbres. Les cymbales sont en avant – on sait que c’est le cas sur ce mix – mais… Pas trop : elles sont là, précises, détaillées, sans résonance désagréable. Excellent équilibre des cuivres entre eux. Les instruments vers l’extrême grave (il y a un sax basse ET un trombone basse sur ce morceau) sont rendus efficacement, sans accentuation, peut-être avec un timbre un poil « épais », dû à la distorsion dans le grave, mais rien de rédhibitoire à l’écoute.
Edgar Varèse – Ionisation (New York Philharmonic, dir. Pierre Boulez)
Ici on cherche à juger de l’image stéréo et du suivi de la réverbération naturelle de la salle, qui joue sur l’impression d’espace. L’écoute se fait entre 0 h 30 et 1 h 15 min. Non seulement l’acoustique de la salle est restituée de façon convaincante, mais surtout on a un bel équilibre entre les différents instruments, avec un respect des nuances de jeu très impressionnant. L’image stéréo est large, avec une vraie perception de la résonance de la salle. On conclue donc cette écoute sur une note vraiment positive, et une impression très bonne, grâce à un enregistrement auquel le casque confère une largeur, une fidélité, une précision très convaincante.
Conclusion
Oui, le Hi-X65 est cher, mais le résultat est au rendez-vous.
Je ne rentrerais pas ici dans une supputation sur la validité de son prix, ni une comparaison oiseuse avec un casque 100 euros moins cher et qui ferait aussi bien (cela doit exister, j’en suis sûr).
Mon propos est plutôt de dire : oui, il n’est pas donné, mais au moins le résultat est sans surprise. On obtient la qualité que l’on peut attendre de ce type de gamme : on est vraiment frappé par la précision du rendu sonore du casque, par son équilibre, par le peu de fatigue auditive ressentie durant l’écoute, par le confort et la solidité de l’objet… Bref, on est impressionné par le résultat d’ensemble (bien plus d’ailleurs que sur son petit frère que nous avions précédemment testé.) Chapeau !