Un EQ logiciel qui arrive à proposer quelque chose de véritablement nouveau, c'est assez rare. Alors quand SoundRadix a annoncé la sortie d'un égaliseur "surfant sur les ondes sonores", cela a forcément titillé notre attention... Explication.
L’égaliseur est sûrement, avec le compresseur, le traitement le plus utilisé lors d’un mixage. Si le home studiste devra travailler dur et pratiquer quelque temps afin de maîtriser l’art de l’égalisation, le fonctionnement d’un EQ reste assez simple : il permet de modifier la réponse en fréquence d’un signal à l’aide de différents filtres. Ou pourra ainsi rehausser ou atténuer certaines fréquences afin de modeler le son à sa convenance. Le choix de ces fréquences est le coeur du problème et l’ingénieur du son / home studiste devra utiliser ses oreilles pour détecter les modifications à faire. Dans la pratique, il boostera une fréquence prise plus ou moins au hasard, et balayera le spectre afin de repérer celle qu’il devra atténuer ou booster.
Là où Surfer EQ change un peu la donne, c’est justement dans le choix des fréquences. Pour une bande donnée, on ne choisit plus une fréquence (en Hz), mais une harmonique (rang 1, 2, etc.). Évidemment, la fréquence de cette harmonique dépend de la note jouée. Ainsi, Surfer EQ intègre un moteur de détection de note : si l’instrument joue un « La », et que la bande est réglée sur l’harmonique de rang 1, elle se mettra automatiquement et en temps réel sur la fréquence de 440 Hz (pour un La3). Si une autre bande est réglée sur l’harmonique de rang 2, l’EQ modifiera la fréquence 880 Hz. Si l’instrument change de note (ça arrive !), le plug-in suivra et adaptera les fréquences des harmoniques en fonction.
Surfer EQ propose donc une nouvelle façon de travailler, chose plutôt sympathique pour ceux qui aiment expérimenter et sortir des sentiers battus.
Penchons-nous sur l’interface du logiciel.
Surfin’ VST
À première vue, le logiciel ressemble à un banal égaliseur logiciel : on aperçoit la courbe et les groupes de potards divisés par bande. Pour chacune d’entre elles, nous avons les classiques paramètres de Q (largeur de bande, seulement 4 valeurs ici), de gain et de fréquence. Seul le bouton « surf » bouscule nos habitudes : lorsqu’il est sur off, Surfer EQ se comporte comme un égaliseur classique (on choisira directement la fréquence), et lorsqu’il est enclenché, cela active la reconnaissance de note et l’on pourra entrer le paramètre « harm » permettant d’assigner la bande à une harmonique particulière.
Surfer EQ propose 7 bandes : deux coupe-haut/coupe-bas, 3 filtres de type « bell » et 2 de type « bell » ou « shelve » au choix. Il est possible d’activer/désactiver chaque bande et l’on retrouve un gain général. Rien de bien original, à part le mode « harmonic filter » disponible sur la bande centrale, qui propose d’activer un filtre dessinant de petites vaguelettes (c’est joli !) et permettant de filtrer toutes les harmoniques à partir d’un rang donné.
Un affichage situé en haut de l’interface donne le nom de la note jouée et deux banques permettent de faire un A/B rapide, pratique.
D’autres paramètres sont disponibles, mais en passant uniquement par les automations. Si jamais la détection est capricieuse, on pourra donner le pitch de chaque note via une petite automation. De plus, on pourra aussi régler le seuil de bruit : la détection de note ne prendra en compte que celles situées au-dessus d’un certain niveau sonore, pratique quand il y a de la repisse ! Enfin, il sera aussi possible de régler la sensibilité du détecteur de note : un mode relax max assez lent ou un mode sous cocaïne très rapide et réagissant au moindre petit changement.
C’est très bien tout ça, mais dans la pratique ?
Sur le spot
Le futur acquéreur devra savoir une chose très importante avant de passer à la caisse : le détecteur de note de Surfer EQ ne fonctionne qu’avec les sources monophoniques. En clair, ça fonctionne bien avec une basse, une voix ou une percussion seule, mais avec une guitare qui joue des accords ou un piano, le détecteur est dans les choux. N’est pas Melodyne DNA qui veut ! Dans la pratique, cela réduit pas mal l’utilisation, c’est le principal défaut du logiciel.
Avec des sources monophoniques, le logiciel se défend très bien. La détection de note est très rapide et précise et on n’entend pas les filtres bouger. Le son est plutôt bon, mais on aurait aimé avoir plus que 4 valeurs de Q, car on reste dans des valeurs assez larges. C’est sans doute aussi pour cette raison que l’on n’entend pas trop les filtres bouger. On utilisera donc cet EQ pour faire des traitements « doux », mais pas chirurgicaux.
Voici quelques exemples en vidéo, afin de voir Surfer EQ en action, sur une piste de basse et une voix. Cela marche plutôt bien, sauf sur la basse slappée où le plug-in décroche à un moment.
Conclusion
Surfer EQ offre un nouveau concept et une nouvelle manière d’aborder l’égalisation. On ne parle plus ici de fréquences, mais de rangs harmoniques, et le logiciel gère tout seul la détection de note. Le plug est assez efficace tant que l’on reste sur des sources monophoniques, mais dès qu’il y aura plusieurs notes simultanément, il faudra passer par l’automation, ce qui peut se révéler rapidement fastidieux. Le prix de 179$ est un poil élevé, mais comme il n’y a pas vraiment de concurrence dans le domaine… Le concept reste tout à fait intéressant et utilisable dans la pratique. Surfer EQ n’est pas un gadget et nous tenons donc à saluer SoundRadix qui montre que de petits éditeurs indépendants arrivent encore à proposer des choses utiles et originales.