Qu'est ce qui vient de Modenna, est assemblé à la main, n'est ni rouge, ni surmonté d'un petit cheval mais permet pourtant de franchir le mur du son ? La réponse à cette question tient en 9 lampes et 16 kg : une tête Pirata 141 de Brunetti, si bien taillée pour la musique qu'elle devrait faire du bruit...
Modena, petite ville du Nord de l’Italie, est avant tout connue pour abriter le célèbre constructeur automobile à l’emblème en forme de cheval, dont l’inaccessibilité des modèles pour le commun des mortels n’a d’égal que l’impossibilité de conserver son permis de conduire plus de 10 minutes sur une autoroute française avec pareils engins.
C’est dans cet esprit très « haut de gamme à l’italienne » que Brunetti propose une gamme complète d’amplificateurs guitare, du combo à la tête en passant par les preamplis, amplis de puissance et baffles.
Méconnue en France, cette marque allie des méthodes de fabrication « artisanales », dont la qualité est éprouvée, avec des innovations technologiques particulièrement bien pensées pour le guitariste exigeant.
C’est le cas du produit testé aujourd’hui, la tête Pirata 141, qui a la particularité de posséder 2 jeux de lampes de puissance : Un couple de EL34 et un de 6L6, et de permettre non seulement d’utiliser l’un ou l’autre de ces couples, mais aussi de les mixer, afin d’obtenir un son présentant des caractéristiques inédites, issues de la personnalité très différentes de ces lampes.
Carosserie
Dès le déballage, on sent que Brunetti a mis les petits plats dans les grands. La fabrication est de grande qualité. Grille, tolex, connectique : tout respire la solidité. L’équipement de série est aussi très complet : un solide footswitch est fourni avec son câble, ainsi qu’une sacoche de transport permettant de protéger la tête pendant les déplacements.
Sur la face avant on trouve les potards de réglage des 2 canaux :
- Le canal clair (appelé « rythm ») possède le traditionnel réglage de gain, une égalisation 3 bandes et un switch « bright » permettant, comme son nom l’indique, d’apporter une coloration « brillante » et plus claquante au son.
- Le canal solo possède des réglages un peu plus étendus, puisque outre le gain et l’égalisation, il possède son master volume dédié et un réglage de présence.
Les deux canaux partagent 2 réglages de master différents, commutables via le footswitch, permettant d’avoir 2 réglages distincts de volume pour la totalité de la tête. Très utile en live pour percer instantanément lors d’un chorus endiablé !
Dernier réglage de la face avant, le potard intitulé « Valvemix ». Celui-ci permet de faire varier le jeu de lampes utilisé par l’étage de puissance : EL34, 6L6 et toute position intermédiaire mélangeant les 2 jeux qui sera agréable a votre oreille !
La connectique de la face arrière est ultra complète, comme on peut l’attendre d’une tête de cette qualité, et de ce prix. La Pirata 141 est ainsi munie de 2 sorties « speaker » commutables en 4, 8 et 16 Ohms ainsi que d’une sortie « preamp » permettant de réattaquer un autre système ampli de puissance + baffle. Un dispositif utile à la fois pour l’enregistrement (associé à un simulateur de HP), ou pour les Live sur de grandes scènes. La boucle d’effet est quant à elle drivée par sa propre lampe et possède un réglage baptisé « mix » qui permet de doser le niveau effet / signal traité.
C’est logiquement aussi sur cette face arrière qu’on trouve les connexions de contrôle de la Pirata. Le footswitch permet de gérer au pied le changement de canal, le passage du master 1 au Master 2 et l’activation de la boucle d’effet, mais tous ces réglages sont aussi accessibles séparément par des connexions dédiées de type « jack ».
Ces connexions permettent par exemple d’utiliser un switcher (comme le « Vector » de la marque) qui gèrera d’une simple pression du pied à la fois un changement de canal, la commutation de la boucle d’effet et un changement de programme d’un multi-effet midi. Le genre de fonctionnalité rassurante en Live puisqu’elle évite toute pratique des claquettes.
Rugissements de moteur
Autant le dire tout de suite, au niveau son, cette tête joue à jeu au moins égal avec tous les plus grands fabricants d’amplificateurs haut de gamme (M… B…, par exemple et pour ne citer personne).
D’une puissance relativement modeste (50 watts en EL34 ou 6L6, 75 watts lorsque les 2 types de lampes sont utilisés simultanément), elle permet d’avoir un son de qualité avec un volume raisonnable, tout en étant largement suffisante pour couvrir n’importe quel batteur, même bodybuildé.
Très typée rock, et même métal, elle n’en est pas pour autant coincée dans un style et se sentira à l’aise sur des registres très différents, des plus calmes aux plus pêchus.
Seul petit regret : le manque d’un réel son crunch, le canal clair devant obligatoirement être attaqué par un humbucker avant de tordre, et le canal saturé ayant très rapidement une distorsion assez appuyée.
Un problème auquel on pourra toutefois remédier en ajoutant une pédale de boost sur le canal clair, ou en jouant avec le potard de volume de la guitare sur le canal saturé.
De son côté, le système Valvemix permet vraiment d’étendre la palette sonore de la Pirata de manière impressionnante ! En son clair, les EL34 permettent d’obtenir un son rond très caractéristique, alors que le passage au 6L6 apporte un brillant et un claquant très « fenderien » très efficace pour du blues ou du funk.
Cette polyvalence est aussi très sensible sur le canal saturé, les EL34 apportant un son rond et compact, très efficace pour « tenir » les grosses saturations, alors que les 6L6 permettent d’obtenir un son plus « fuzzy » dans les aigus, plus brillant. Notons d’ailleurs que le niveau de gain du canal solo est impressionnant, permettant des saturations extrêmes. Dans ce contexte, les guitares 7 cordes seront évidemment les bienvenues.
Mais outre le fait de pouvoir choisir entre 2 types de lampes, le gros avantage du système Valvemix est de pouvoir les mélanger, et donc de profiter des caractéristiques respectives des EL34 et 6L6. En dosant l’apport d’un jeu de lampes par rapport à l’autre, il est possible de se faire un son mixant les caractéristiques de chacune des lampes, et retrouver à la fois la rondeur et la tenue des EL34 et le claquant des 6L6. Tout simplement bluffant !
Après plusieurs heures de test (loin d’être pénibles, je vous l’accorde), on se prend à penser que le seul défaut de cette tête est de ne proposer qu’un seul réglage de ValveMix pour les 2 canaux. Personnellement, je préfère un son clair riche en 6L6 et un son saturé plutôt typé EL34. J’ai donc passé mon temps à faire varier le potard de Valvemix. En studio, ça n’est pas un problème, mais en Live, il faudra faire des choix et opter pour une position intermédiaire.
Exemples Audio
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Ces enregistrement ont été réalisés avec la tête Pirata 141 branchée dans un baffle Marshall 1912. La guitare est une Gibson LesPaul Standard et le micro un Sennheiser MD421. Merci à Mike qui a bien voulu nous prêter ses talents pour l’occasion.
Conclusion
Avec la Pirata 141, Brunetti nous démontre sa maîtrise technologique en repoussant les limites généralement admises de la polyvalence. Loin d’être un gadget, le système Valvemix permet d’appréhender un grand nombre de styles, sans pour autant obliger le guitariste à faire des concessions.
Si on y ajoute la connectique complète et une qualité irréprochable, les 1800 € demandés pour cette tête sont amplement justifiés. Espérons donc que la marque Brunetti connaîtra en France le succès qu’elle mérite.
[+] Le son ! En saturé comme en clair…
[+] La versatilité apportée par les deux jeux de lampes et le système Valvemix
[+] Une conception et une qualité de fabrication irréprochable.
[+] Une qualité au moins équivalente à celle de la concurrence pour un prix moindre.
[-] Des gros sons saturés, de beaux sons clairs mais un manque du côté des crunchs.
[-] On aurait aimé avoir deux potars Valvemix pour doser différemment les lampes sur les canaux clairs et saturés.