« Au » Samba ? Non, il ne s'agit pas d'une faute de frappe, l'emblème musical du Brésil est masculin en portugais, nous allons donc respecter ce choix grammatical durant les prochains articles que nous lui consacrons !
Histoire et origine du Samba
C’est au cours du 17e siècle que naît l’ancêtre du Samba actuel à Salvador de Bahia, le « samba de roda » appelé ainsi car il se danse en ronde. Celui-ci migrera à Rio de Janeiro au début du 20e siècle et y mutera vers sa forme actuelle notamment dans les favelas et dans les docks, tout comme la Rumba cubaine est née en partie dans les docks de la Havane. L’histoire du Samba est d’ailleurs à bien des égards proche de celle de la Rumba. Tout comme elle, le Samba est pour une bonne part inspiré lui aussi de l’héritage culturel des esclaves africains. On retrouve notamment une forte influence des musiques rituelles employées pour la célébration des Orishas, les esprits célébrés dans l’Akabuá cubaine ou le Candomblé au Brésil. Les liens entre Rumba et Samba se retrouvent également dans leurs noms respectifs. En effet, il semblerait que Samba provienne du mot bantou « semba » qui signifie « nombril », tout comme le « n’koumba » congolais à l’origine du mot « rumba ». Mais bien davantage que pour la Rumba, le Samba s’est très rapidement exprimé comme une manifestation de la diversité ethnique du pays, les musiciens euro-descendants s’étant montrés rapidement curieux de cette musique et ayant été assez vite intégrés à la création et la diffusion de celle-ci. Car si les favelas étaient (et sont encore) essentiellement habitées par des descendants d’esclaves, les quartiers pauvres de Rio intra-muros étaient très fréquentés par des artistes de toutes origines ethniques. Ainsi, le premier samba enregistré en 1916 était une composition de l’afro-descendant Donga interprétée par l’euro-descendant Baiano, le tout dans une parfaite reconnaissance mutuelle.
Au cours des années 20 une bande de copains à la fois « sambistas » (musiciens de samba) et « malandros » (un peu « racailles », quoi) prit l’habitude de se retrouver dans l’un de ces quartiers, l’Estacio. C’est là que se créera le premier « bloco », groupe informel de musique et de danse de rue, et au début des années 30 la toute première école de Samba, « Deixa Falar », à laquelle viendront s’ajouter de très nombreuses autres au fil du temps. La création de ces écoles sera fortement encouragée par le gouvernement de Getulío Vargas qui cherchera à la fois à canaliser et organiser les blocos notamment durant les défilés du carnaval de Rio, tout en attribuant au Samba le statut de « musique officielle » du Brésil censée symboliser l’unification de toutes les catégories de population du pays.
Le Samba est resté très vivant jusqu’à aujourd’hui et a essaimé dans de nombreux styles musicaux extrêmement variés. Dès le début, il a été ainsi introduit dans la musique classique grâce à Heitor Villa-Lobos. Dans les années 40, la chanteuse et actrice Carmen Miranda fera énormément connaître le Samba à l’étranger, notamment grâce à de nombreux films hollywoodiens. Dans les années 50, la rencontre des sambistas Antonio Carlos « Tom » Jobim, Joao Gilberto et du musicien-poète Vinicius de Moraes avec le jazz américain donnera naissance à la « Bossa Nova » qui a connu un énorme succès international. Partiellement en réaction à ce « blanchissement » du Samba, des musiciens afro-descendants de Salvador de Bahia créeront le Samba-reggae dans les années 70, notamment sous l’influence du bloco Ilê Aiyê puis du groupe Olodum sous la direction de Neguinho do Samba, qui enregistrera notamment avec Paul Simon et Michael Jackson. Du Samba-Reggae naîtra entre autres une version plus commerciale, le Axé, aujourd’hui représenté principalement par Daniela Mercury. En parallèle du Samba à proprement parler se développe depuis la fin de la guerre la MPB (Música Popular Brasileira), mêlant Samba originel, Bossa Nova, chanson, etc., autour de nombreux artistes comme Chico Buarque, Caetano Veloso ou encore Gilberto Gil.
Oeuvres et artistes
Nous commencerons par le premier Samba jamais enregistré, « Pelo Telefone », de Donga, interprété par Baiano et Côro :
Voici ensuite Nelson Cavaquinho, digne représentant de l’esprit « malandrino » de l’Estacio, ici avec son ami Guilherme de Brito :
Ici, Carmen Miranda dans le film « Copacabana » où elle partage la vedette avec Groucho Marx :
Heitor Villa-Lobos qui a fait entrer le Samba dans la musique classique :
Antonio Carlos Jobim et tous les standards de la Bossa Nova:
Le groupe Olodum, fer de lance du Samba-Reggae :
Chico Buarque et son tube Essa Moça Tá Diferente :
Daniela Mercury et l’Axé:
Et enfin l’édition 2019 du Carnaval de Rio, l’emblématique lieu d’expression du Samba depuis presque un siècle :