Hello les amis ! Nous débutons aujourd'hui une toute nouvelle série qui devrait nous emmener loin puisque nous allons nous intéresser aux différents styles de musique populaires et traditionnelles du monde entier. Débutons par le flamenco !
Avant-propos
En préambule de ce nouveau dossier, je tiens à préciser un peu le cadre dans lequel il va se développer. Chaque style musical sera traité en quatre articles. Le premier sera consacré à la présentation générale, historique, artistique et éventuellement sociale du style concerné, ainsi qu’à l’évocation des grandes œuvres et des principaux artistes qui y sont rattachés. Le deuxième article en présentera les particularités purement musicales telles que les gammes ou les structures employées. Le troisième article étudiera plus particulièrement les différents rythmes associés au style concerné. Et le quatrième article en présentera les instruments les plus caractéristiques. Bien entendu ce plan pourra être amené à évoluer selon les styles abordés ou si le présent découpage devait s’avérer non-pertinent. Enfin, ces articles ne se veulent en aucun cas exhaustifs mais bien plus une introduction à chacun des styles présentés et nous vous invitons grandement à venir les enrichir par votre participation et vos commentaires !
Mais ne tardons pas davantage et plongeons-nous dans le vif du sujet.
Histoire et présentation du flamenco
Le flamenco représente une tradition musicale qui a été chantée et dansée avant d’être également accompagnée par des instruments. Sa région d’origine est l’Andalousie et l’on fait remonter son apparition aux alentours de la fin du 18e siècle. Mais c’est dans un passé plus ancien que le flamenco puise son inspiration. Entre le 8e et le 15e siècles, l’Andalousie a en effet été habitée par les Arabes qui ont étendu leur influence à tous les aspects de la vie andalouse, incluant les aspects artistiques et donc également musicaux. On peut ajouter à cela également des emprunts aux traditions musicales juives. Mais c’est principalement dans la culture gitane que le flamenco enfonce ces racines. À ce stade on pourra donc déjà constater que le flamenco est la musique des réprouvés de l’Espagne catholique de la Reconquista (la reconquête des territoires occupés par les Arabes). Mais ce n’est pas tout, car ce style musical est tout autant pratiqué aux XIXe et XXe siècles par les villageois et paysans andalous soumis à une vie quotidienne de rude labeur. Le flamenco se révèle donc le creuset culturel de toutes les populations en souffrance de l’Andalousie. Le caractère tragique qu’il peut souvent revêtir ne traduit toutefois pas seulement les difficultés propres à ces populations spécifiques mais les enjeux de l’humanité tout entière que sont l’amour et la mort. Et quels que soient les thèmes abordés, le flamenco les transcende pleinement par sa nature à la fois fière, festive et profonde.
Musique essentiellement jouée à l’origine sur les places de village (ou dans les cours de prison…), le flamenco va intégrer à partir de 1880 le cadre des « cafes cantantes » (sortes de cafés-concerts), ce qui constituera le début de sa reconnaissance avant son essor national et international, mais marquera également pour certains la perte de son identité première.
Les œuvres et les artistes du flamenco
Le flamenco étant une musique essentiellement festive et chorale, il n’existe pas à proprement parler d’œuvre particulière qui le représente. En revanche, les artistes qui l’ont façonnée sont nombreux. On attribue à El Planeta (1789–1856) et Tio Luis el de la Juliana la création de ce style, même si l’existence-même du second n’est pas absolument attestée. Je n’ai d’ailleurs pu trouver d’illustration que concernant El Planeta :
Parmi les compositeurs classiques, c’est Manuel de Falla (1876–1946) qui a été le plus grand promoteur du flamenco au sein de la musique classique, mais c’est véritablement Georges Bizet (1838–1875) avec Carmen qui a fait connaître la culture hispano-gitane au public mondial de la musique classique, même si dans une version moins authentiquement flamenca que le compositeur espagnol.
Au 20e siècle, l’une des plus grandes chanteuses du flamenco traditionnel qui continue d’inspirer les générations actuelles a été Niña de los Peines (« La fille des peignes », de son vrai nom Pastora Pavon Cruz, 1890–1969) :
Parmi les danseurs, on citera notamment Antonio Gades (1936–2004), qui a été également l’un des plus grands chorégraphes du pays. On le voit ici diriger un groupe de danseuses dans le film Carmen, de Carlos Saura :
Mais les deux plus célèbres représentants du flamenco moderne ont été le chanteur Camarón de la Isla (1950–1992) et le guitariste Paco de Lucia (1947–2014, que l’on aperçoit d’ailleurs à la fin du clip vidéo précédent). Ces deux-là ont longtemps joué ensemble et on peut les entendre ici :
Certains ont pu reprocher à Paco de Lucia d’avoir trahi le flamenco originel en le faisant rencontrer d’autres styles, notamment le jazz, les musiques caribéennes ou la musique classique, ou encore en intégrant de nouveaux instruments comme la basse électrique.
Aujourd’hui, la nouvelle génération d’artistes s’articule notamment autour des chanteuses Estrella Morente (fille d’Enrique Morente, guitariste renommé) pour un style plus traditionnel :
Et Niña Pastori (élève de Camarón de la Isla) pour un style plus moderne, voire plus commercial pour certains :
Dans une optique d’ouverture du flamenco à des influences plus variées, on peut aussi citer le groupe Ojos de Brujo :
Le duo Rodrigo y Gabriela d’origine mexicaine intègre également de nombreux éléments de la musique flamenca dans ses propres compositions :
Enfin, dans une démarche qui vise à renouer davantage avec les origines nord-africaines du flamenco, on trouve des groupes comme Radio Tarifa :