Il a travaillé sur les albums Jesus is King et Donda de Kanye West, mais également African Giant de Burna Boy, pour lequel il a d’ailleurs reçu un Grammy Awards. La légende raconte qu’à ses débuts, il a écumé tous les studios de la vallée de San Fernando, CV accroché aux boîtes de beignets qu’il livrait. Et il semblerait que cela ait payé ! Aujourd’hui, installé en Californie, il poursuit sa route et vient de lancer sa propre compagnie de plug-ins Mixland. Partons ensemble derrière le son de Jesse Ray Ernster.
Bonjour ! Est-ce que tu peux nous dire qui tu es, en quelques mots ?
Bonjour ! Je m’appelle Jesse Ray Ernster, je suis ingénieur du son de mixage et je réside en Californie du Sud, avec ma famille.
Comment es-tu arrivé dans le milieu de la musique ? As-tu suivi une formation particulière ?
Mes parents sont musiciens, et mon père avait un home-studio fantastique quand j’étais petit. Dès mon plus jeune âge, j’ai été exposé à toute l’excitation que peut offrir un style de vie musical : les concerts, l’enregistrement de groupes, entendre les chansons prendre vie, accorder les batteries, régler les micros, etc. J’ai ensuite joué dans plusieurs groupes et formations religieuses, puis je suis finalement devenu « le gars de l’enregistrement » parce que nous avions un studio et tout le matériel nécessaire chez moi. J’ai déménagé à Los Angeles il y a environ 5 ans et j’ai presque immédiatement décroché un emploi d’ingénieur pour Kanye West, ce qui a été le tremplin qui m’a permis d’atteindre un niveau clairement supérieur en termes d’exposition, de contacts et de crédibilité dans le secteur. J’ai rapidement réalisé qu’il était très important de se positionner en tant que spécialiste ; l’objectif est d’être connu comme LE gars à qui s’adresser pour mixer, plutôt que comme un mixeur/producteur/ingénieur/musicien/éditeur touche-à-tout.
À l’heure actuelle, quelle est ta principale casquette ?
Ingénieur de mixage ! Ces derniers temps, mon temps a été partagé de façon assez égale entre le travail de mixage stéréo et le mixage pour Dolby Atmos. J’ai également créé cette année une compagnie de produits audio professionnels, appelée Mixland, et j’ai développé des produits et des plug-ins pour cette entreprise ! Notre premier plug-in, Rubber Band Compressor, est sorti il y a quelques jours.
Dis-nous en un peu plus sur ton installation, ton matériel : comment travailles-tu ?
Je travaille ici, à la maison, dans mon garage aménagé ! La pièce a des plafonds voûtés de 3,60 m de haut et des bass-traps qui entourent la pièce. J’utilise des enceintes de monitoring SE-MF-4 de chez Strauss Elektroakustik, et leur son est fantastique ! Je me suis débarrassé de mon (trop) grand bureau et j’applique maintenant la méthode de travail sans bureau. Cela aide vraiment à la précision sonore dans mon espace, car les grands bureaux causent une variété de problèmes et de réflexions. J’utilise une plateforme clavier/souris qui repose sur mes genoux, et il n’y a donc rien entre moi et les enceintes. C’est donc un peu comme une salle d’écoute hifi. Je travaille sur un Mac Pro de base de 2013 et il fonctionne très bien ! Je suis un grand partisan du « dépenser moins, épargner plus » pour gérer mes finances, donc je suis plus qu’heureux sur l’ancien mac, et je ne ressens aucun besoin de passer à mieux ou plus récent.
Quelle sont tes processeurs de studio ou instruments favoris et que tu possèdes ?
Dernièrement, je mixe tout ‘in-the-box’ et j’adore ça ! Ce n’est pas du tout un compromis au niveau du son ! Ceci étant dit, j’aime vraiment beaucoup mon Urei 1178 vintage et mon Urei 1176 vintage. Ils ont vraiment un son unique. Le 1178 ajoute une couleur et une douceur au milieu du spectre. Il est très clairement sous-estimé. Quant à mon Urei 1176 Rev B, je suis surtout attaché à lui en raison de son statut légendaire et de sa renommée (qui, je crois, a été provoquée par Chris Lord-Alge et son engouement pour ce modèle particulier). Mon ami et technicien de réparation avait trouvé ce compresseur dans le rack de façade d’un bar qui a fermé dans les années 70. Il l’a gardé sous le coude pendant près de 40 ans, et nous avons récemment commencé le processus de restauration pour qu’il puisse trouver sa place dans mon studio. Il ne ressemble à aucun autre de son genre en raison des composants de haute qualité qu’il a utilisés pour le modifier. Ces derniers temps, je me suis également intéressé aux synthés numériques vintage : j’ai récemment fait l’acquisition d’un Yamaha DX7 et d’un Roland D-50. J’adore les sons nostalgiques et presque ringards que je peux obtenir avec ces instruments. Ils constituent toute la bande-son de mon enfance !
Puisque tu travailles beaucoup 'in-the-box’, parle nous un peu de tes plug-ins !
Il se trouve que j’en utilise très peu, mais j’ai mes habitudes. C’est simple, mais j’aime cette façon de travailler. Par exemple, j’adore Spectre de Wavesfactory pour booster et ajouter de la saveur. Il réussit à créer de la texture et des fréquences qui sont souvent manquantes ou absentes d’un signal, et me permet de rendre n’importe quel son plus riche. J’aime aussi beaucoup Pro-Q3 de FabFilter, pour le découpage chirurgical qu’il permet, et sa fluidité d’utilisation : ils ont vraiment bien réfléchi aux raccourcis clavier ! Enfin, j’adore l’Omega-N de Kush Audio pour le traitement des transitoires et l’adoucissement des hautes fréquences qui souffrent d’un écrêtage numérique douloureux. Je l’utilise souvent sur les éléments de percussion des mixages quand je travaille des morceaux afrobeat : je peux faire en sorte que les transitoires percent et se placent dans le mix sans être trop étouffantes ou envahissantes.
Quel est l’outil qui, selon toi, est sous estimé et que tu conseilles d’utiliser ?
Les applications de calendrier et de to-do list sur votre téléphone ! Faites des listes et mettez-les à exécution ! Procurez-vous aussi un calendrier physique ! Ils vous permettent de visualiser le mois dans son ensemble et de marquer votre trajectoire vers les étapes importantes. Les petites victoires mènent aux grandes réalisations.
As-tu un prochain investissement de prévu ?
Le Telefunken 251, c’est certain. Ma fille adore chanter au micro dans notre studio, alors je veux la capturer de la manière la plus pure possible, et c’est exactement le microphone qu’il me faut pour ça.
As-tu reçu un conseil un jour, que tu suis depuis et qui a changé ta vision des choses ?
Qui ne tente rien n’a rien ! En d’autres termes, si vous ne formulez pas vos attentes et si vous n’essayez pas de créer des opportunités pour vous-même, elles risquent de ne jamais se présenter.
Est-ce que tu as toi, un conseil à donner à nos lecteurs ?
Toute entreprise prospère, quelle qu’elle soit, repose sur des relations de confiance saines, qu’il faut entretenir.
Si tu devais nous dire ta plus grande fierté, ce serait quoi ?
Même si je suis très fier de ma discographie et de tous les projets sur lesquels j’ai pu travailler, ma plus grande fierté reste mes enfants. Ils me permettent de garder les pieds sur terre.
Tu es sur tous les fronts, quels sont tes futures projets ?
Malheureusement, je ne peux pas parler des albums que je mixe actuellement, vous vous en doutez bien. Par contre, je ne peux que vous conseiller d’aller jeter un œil au Rubber Band Compressor, et de rester à l’affût des prochains plug-ins que nous sortirons avec Mixland.
As-tu quelque chose à ajouter avant qu’on se sépare ?
N’hésitez pas à me contacter sur les réseaux sociaux. J’aime rencontrer d’autres musiciens à différents moments de leur parcours et je suis vraiment reconnaissant dès que l’occasion m’est donnée de les aider de quelque manière que ce soit.
Retrouvez Jesse Ray Ernster sur son site internet, ou encore sur Instagram.
Crédits photos : Sound and sound, Audiomack, Mixonline