Entre la composition de la bande son des jeux-vidéos Outlast, celle de la bande-originale de la série québécoise Le Chalet, et ses expérimentations modulaires sur l'immense Moog de son studio, Samuel Laflamme fait une petite pause pour nous parler de ce qui se cache derrière SON son.
Salut, est-ce que tu peux te présenter rapidement ?
Je suis compositeur de musique à l’image (télévision, cinéma, jeux vidéos, etc.) depuis 20 ans, basé à Montréal. Je suis reconnu internationalement entre autres pour la franchise de jeux Outlast, produite par Red Barrels Games. Je suis fasciné par tout ce qui touche le “Story Telling” en musique, en lien avec un autre média.
Comment es-tu arrivé dans la musique ? Quel est ton parcours ?
Ma curiosité pour la musique, mais plus spécifiquement la musique à l’image à commencé en 1989, après avoir vu Batman de Tim Burton. Pour la petite histoire, mes parents ont dû louer la VHS en anglais, car la version française n’était pas disponible. Je ne comprenais pas l’anglais tout jeune, alors c’est la musique de Danny Elfman qui m’a guidé et transporté dans le récit. Je crois que ça a transformé à jamais ma conception du cinéma, pour le meilleur ou pour le pire, puisque dès lors, je n’ai plus jamais regardé de film sans me soucier de sa musique. J’ai par la suite développé mes talents de compositeurs en m’inspirant de mes compositeurs de musique de film préférés. Un autre moment important de découverte musicale fût à l’université, où j’ai baigné dans la composition électroacoustique, acousmatique et musique électronique de tout genre. Je porte encore à ce jour ces deux grandes familles d’inspiration. Plus récemment je me suis intéressé à la synthèse modulaire et j’ai plongé réellement dedans lorsque j’ai mis la main sur mon premier Moog Modular en 2016 dans la quête de trouver un son électronique unique pour un projet.
Actuellement, quelle est ta principale casquette ?
Je compose principalement de la musique pour la télévision, le cinéma et les commandes de jeux vidéos produits ici à Montréal, ou à l’international.
Tu vis à Montréal, mais tu bosses où exactement ?
Je travaille à partir de mon studio dans le quartier Mile End, dans un lieu que j’ai fondé avec un ancien collègue de l’Université et qui rassemble plusieurs studios. Nous avons créé un lieu qui favorise les échanges intellectuels et créatifs. Nous sommes plusieurs créateurs et producteurs de musique réunis, tous indépendants, mais la proximité permet d’échanger et d’évoluer ensemble. En somme, j’aime entretenir l’idée que nous avons créé une cellule propice à la reflexion et à la création. Mon studio mesure environ 5,5 mètres sur 8,5 mètres. Il y a une immense baie vitrée qui offre une vue spectaculaire de Montréal. Le soir, grâce à la ville qui s’illumine, l’endroit, qui est situé en hauteur, devient particulièrement inspirant. J’ai créé le lieu en pensant davantage à un salon qu’à un studio d’enregistrement. C’était important pour moi de me sentir bien et inspiré. L’endroit respire et permet d’accueillir confortablement mes clients, producteurs, réalisateurs, directeurs artistiques et concepteurs de jeux vidéos.
Quelle est ta configuration principale ?
Comme station centrale, j’ai fait faire sur mesure un meuble en noyer massif qui intègre parfaitement mon contrôleur midi principal, le Doepfer LMK4+, et quelques pièces hardware comme le Patchbay, les compresseurs et mon module de Summing. Je travaille beaucoup avec les Shadow Hills Industries. J’adore l’Equinox pour la sommation et ses préamplis, et le Mastering Compressor pour ses différentes couleurs de compression et de transfo. J’ai aussi le SPL Transient Designer pour tout ce qui est percussif.
Je compose principalement dans ProTools HDX (anciennement TDM) depuis bientôt 15 ans, mais j’utilise de plus en plus Ableton Live, principalement comme pont entre mon ordinateur et les modulars.
J’utilise depuis des années les interfaces Avid, mais depuis peu, pour sa convivialité, ma petite Universal Audio Apollo Twin X est connectée à temps plein, ne serait-ce que pour bénéficier des plugins DSP UAD ou des préamplis Unison. Depuis deux ans, je travaille exclusivement sur mon MacBookPro. J’aime l’idée de pouvoir avoir mon studio en tout temps avec moi. Les cartes HDX sont dans un châssis Thunderbolt.
Mes enceintes principales sont les PMC IB2s-A, calibrées par Sonarworks. Les PMC offrent une écoute très analytique et détaillée, tout en me donnant des basses vraiment précises, présentes et physiques. Entre les enceintes sur le mur du devant, j’ai un grand moniteur de 190 cm pour y projeter les vidéos sur lesquelles je compose. À la droite de ma station de composition principale, il y a mon rack d’EQ, de compresseurs et préamplis additionnels. J’ai les Inward Connections Vac Rac 6000 (avec préampli, limiteur et EQ/DI à tube) et le Mastering EQ DEQ-1 avec 6 bandes. Il y a également mon Lang Electronics PEQ-1 adoré.
Maintenant, raconte, peux-tu nous parler de tes instruments ?
À gauche de la station principale, il y a mon piano d’enfance sur lequel j’ai appris à composer, un Yamaha C-108. Il demeure pour moi une source de connection et d’inspiration très lié à mon monde intérieur. Deux micros DPA Microphones 4011 placés en permanence captent les idées qui me viennent spontanément à l’esprit.
Sur le mur de droite, il y a mon mur de Moog Modular comprenant un Moog IIIP (de 2018), Moog Music Model 15 (de 2015), et des modules Moon Modular, qui complètent à merveille les Moog. Les modules Moon Modular, brillamment créés par Gert Jalass à Berlin, permettent entre autres le dialogue entre mon DAW et les Moog. Ce que je trouve génial de Gert, c’est qu’il ne tente pas de “cloner” les Moog. Il a créé une gamme de séquenceurs, oscillateurs, filtres et modules utilitaires qui complètent et apportent beaucoup à l’expérience Moog tout en respectant l’esthétisme.
Du côté de la baie vitrée se trouvent mes synthétiseurs hardware. Il y a un Roland Jupiter 6, Roland System 100 (Model 101), un Oberheim Two Voice Pro accompagné de deux Sem CV, un Sequential Prophet 6 (j’adore le vintage mode récemment ajouté), un Ensoniq Mirage, et mon premier synthétiseur, un Clavia Nord Lead Stage 2, que je garde par nostalgie, et pour quelques sons précis que j’avais créés il y a des années. J’ai aussi au milieu des Synthés un rack incluant un Moog Voyager RME, ses compléments, et un Vermona DRM-1. Tous ces synthés sont connectés en Midi par une MOTU Midi Express 128.
Derrière le divan, dans la partie bibliothèque, il y a le Korg Arp 2600 FS que j’ai eu l’immense chance de me procurer, ainsi que mon Modular Eurorack. Ce dernier comprend des modules de percussions, les Noise Engineering entre autres, des VCOs, filtres, enveloppes et autres utilitaires complémentaires au Moog/Moon de marque comme Modcan, Mannequins, Doepfer et Synthesis Technology. Le Arp et les Euro sont pour moi des compléments au mur de Moog/Moon.
Aussi, nous partageons avec mes collègues une cabine d’enregistrement dans lequel il y a entre autres mon Rhodes Suitcase 73. La salle est traitée pour y faire de l’enregistrement de voix off, d’instruments acoustiques, etc.
Alors, dis-nous tout, parmi tous les instruments et effets que tu possèdes, tu as bien un petit préféré ?
Mon instrument préféré est de loin le mur de Modular Moog et Moon. Il est mon principal instrument de musique, de synthèse et une source inépuisable d’inspiration. Je l’utilise pour chaque production. J’y trouve toujours une place dans mes compositions, et le Modular apporte une touche singulière, unique, distinctive et une profondeur. J’ai un attachement passionnel à cet instrument. En plus, j’ai personnalisé l’utilisation des instruments Moog en ajoutant les modules Moon.
Le Model 15 fut mon premier Moog Modular. Je suis tombé amoureux de la musicalité de l’interface et du son de cet instrument. Ces instruments, les Moog Modular, ont une aura très particulière. Certes, il y a le fait de se retrouver devant un instrument qui a eu un impact historique dans l’univers de la musique électronique, mais il y a aussi autre chose, l’instrument t’invite à l’explorer, à créer avec lui, à converser en quelque sorte. Il y a une réaction physique de la part de l’instrumentiste, mais aussi de celle de l’instrument, et les deux interagissent en symbiose. J’avais déjà à l’époque quelques modules Eurorack, mais les Moog Modular sont des instruments à part entière, bel et bien calibrés, et non seulement plusieurs modules combinés ensemble. Le Moog 15 ne sonne pas comme le System 55, tout comme le IIIc ne sonne pas comme le Model 10. Je pense que le ratio quantité de modules et puissance de l’alimentation a un impact sur le son au final. Le cabinet aussi, puisque les Cabinet en Tolex Portables ne dispersent pas la chaleur de la même façon que les cabinets en Noyer. Puis la sélection des modules dans un système influence de toute façon la synthèse “à sa façon”. L’ergonomie dans ces instruments est réellement importante. Pour revenir au Model 15, les oscillateurs 921 sont hyper vivants (je ne sais pas comment l’expliquer autrement), le filtre 904A est la genèse de tous les filtres à résonance. Il n’y a pas beaucoup d’autres sensations aussi satisfaisantes sur les instruments électroniques que celui de manipuler le potard de fréquence du filtre 904A. Les enveloppes en mode exponentiel sont très rapides. Et selon moi ce qui est le plus sous-estimé, c’est la couleur du mixeur et des VCA très particulière à cause du voltage interne atypique de +12V/-6V. Lorsqu’ils sont saturés, le mixeur et les VCA créent des harmoniques asymétriques, car le côté négatif a moins de Headroom que le côté positif.
Ensuite, j’ai commencé à complémenter le Model 15 avec des Moon Modular qui me permettent d’adapter mes Moog à la vie numérique et actuelle tels que “midi to cv”, “Trig sequencers” avec mémoire numérique et une série de filtres et oscillateurs qui complètent brillamment les Moog. Les VCOs Moon sonnent plus modernes et demeurent stables et accordés sur tous les octaves. Comme le voltage est différent des Moog, ça me permet d’exploiter les Moog différemment. Les Moon sont basés sur un voltage de +15V/-15V. Par exemple, utiliser une enveloppe Moon de 10V sur le Moog 904A (qui est “habitué” de recevoir environ 5,5V) peut créer des caractères différents et dévoile une nouvelle étendue de possibilités de timbres. Aussi, les filtres des Moon, étant librement inspirés des Oberheim (SEM et Xpander), offrent une couleur complémentaire lorsque joint au Moog. Moon est spécialisé et reconnu pour ses séquenceurs, principalement le 568 et 569 sont parmi les meilleurs séquenceurs offerts sur le marché, et tous respectent la règle de ne pas être interminables à programmer. J’aime la simplicité et l’efficacité de leur design. Les deux séquenceurs ont des modules expanders qui permettent de multiplier les capacités de séquence temps réel. Car avec le modulaire, s’il y a un aspect important en plus de la qualité sonore, c’est la musicalité des interfaces, ou comment un instrument répond efficacement au geste musical du musicien. Ayant auparavant principalement programmé toute ma vie sur un ordinateur, j’ai découvert un nouveau monde lorsque je me suis mis au modulaire, et ses séquenceurs. La possibilité d’interpréter une séquence en temps réel me permet alors d’explorer de nouveaux horizons musicaux en interprétant en temps réel des séquences. Par exemple, je peux jouer avec une séquence rythmique déclenchée par le Moon 568 tout en changeant les hauteurs de notes à partir du Moog 953. Le tout envoyé respectivement aux enveloppes et au pitch des VCOs. Il est d’autant plus facile de changer la séquence rythmique du 568 en temps réel. Donc on ne pense plus juste à jouer des notes sur un clavier, mais tout le système devient l’interface. Par exemple, c’est très efficace pour créer des séquences de pulsations musicales pour des scènes de tensions dans mes projets.
Enfin le IIIp est arrivé quelques années plus tard, et j’ai découvert les oscillateurs 901 qui apportent à mon avis une musicalité inégalée en synthèse soustractive. Leur faiblesse, c’est-à-dire leur certaine instabilité, devient aussi leur force. La manière que ces oscillateurs ont d’interagir ensemble une fois mixés donne un résultat quasiment magique, hyper musical. Le IIIp incite l’instrumentiste à empiler plusieurs VCOs ensemble, puisqu’il y a en tout 10 VCOs disponibles pour seulement une banque de filtre 904 A-B-C, et que 3 enveloppes… L’instrument m’a personnellement inspiré comme aucun autre instrument l’a fait auparavant. Si on fait la comparaison un peu simple que le Model 15 serait le Stradivarius des synthétiseurs, alors le IIIp en serait un ensemble à cordes de Stradivarius. Il y a un côté quasi orchestral et grandiose qui émerge comme caractère. L’instabilité caractérielle des 901 font en sorte que je doive travailler un peu plus sur mon patch pour arriver au résultat désiré, mais à chaque fois, ça en vaut la peine. Actuellement, le IIIp est l’instrument principal de mon mur, et le Model 15 et les Moon deviennent complémentaires, ou m’offrent d’autres voies disponibles.
Pour revenir à la question, si on considère le Moog IIIp, Model 15 et mes modules Moon comme un seul instrument, alors les deux instruments hardware que j’utilisent le plus seraient le Sequential Prophet 6 et le Shadow Hills Industries Equinox.
Le Prophet 6 est un véritable allié pour moi. Lorsque je dois livrer rapidement une composition, je sais qu’en utilisant le Prophet 6 le résultat y sera, et rapidement. J’adore cet instrument qui peut être tant vintage que moderne. Il est juste assez complexe et complet tout en conservant l’aspect vintage tant désiré du Prophet 5, surtout avec le nouveau vintage mode récemment offert.
Pour ce qui est de L’Equinox, c’ est mon entrée audio principale (comme préampli ou interface de sommation). J’adore la solidité et la modernité qui caractérise le son de cet équipement. Même si les trois transformateurs sont très intéressants, j’ai ma petite préférence pour le Iron. Fait intéressant et curieux toutefois, je préfère la plupart du temps le transformateur Steel sur le Mastering Compressor.
Quel est ton plug-in favori et pourquoi ? Quel est celui que tu utilises le plus et pourquoi ? Ton TOP 3 ?
J’aime beaucoup les Fabfilter. L’égaliseur Pro-Q 3 est certainement ce que je me sers le plus en ce moment, suivi de près par le limiteur Pro-L 2 et l’Echoboy de SoundToys. Je connais bien les couleurs qui peuvent apporter à un mix ou un master. J’utilise beaucoup aussi les UAD, spécialement le API 2500 et Shadow Hills Mastering Compressor, même si j’ai aussi ce dernier en analogique. Pour être franc, je choisis une fois sur deux le plugin. J’ai remarqué que si j’entame le réglage avec le plugin, il y a de fortes chances que je choisisse le plug-in à la fin, même si je le compare au hardware. Et vice versa. En bout de ligne, si je veux plus de 3D dans le son, je sais que ça se fera dans l’analogique. Mais le plug-in a quelque chose de plus clair et précis.
Quel est, selon toi, le hardware ou software le plus sous-estimé et pourquoi ?
Pour le hardware, je dirais d’excellents câbles. C’est incroyable de constater la différence de couleur sonore que l’on peut obtenir en changeant de câble. Parfois, au lieu de changer de préamp, je ne fais que changer le câble AC. Je pense spontanément à des compagnies audiophiles comme PS Audio, Oyaide ou Actinote pour ne nommer que celles-là. Pour le software, je dirais un logiciel de calibration comme Reference de Sonarworks, qui met en phase les haut-parleurs avec la salle d’écoute. Une fois que l’on s’est habitué à écouter des haut-parleurs en phase avec la salle, il est difficile de retourner en arrière. Les détails des différentes réverbes et de l’image stereo deviennent évidents.
Quel est l’instrument ou toute autre pièce hardware que tu rêves de t’offrir ?
Un jour j’aurai certainement un piano à queue, lorsque j’aurai une salle d’enregistrement qui pourra le justifier. Je rêve également d’avoir un système de son d’envergure hyper efficace à pavillon tel Oswalds Mill Audio. J’utilise actuellement mes vieux Altec 604 modifiés. Ils me procurent un plaisir d’écoute inégalé à ce jour. Seule exception, j’ai déjà eu la chance d’entendre un système audiophile à pavillon Altec et c’est vraiment impressionnant.
Est ce qu’il y a un conseil ou autre que tu as reçu un jour et qui a changé ta façon de voir ou de faire les choses ?
Mon professeur à L’université nous a averti d’emblée que ce qu’il jugeait, c’était nos travaux et non notre personne. C’était une façon pour lui de pouvoir critiquer les travaux sans froisser l’ego des étudiants. J’ai trouvé ça très formateur. Ça m’a aidé à prendre un peu de distance par rapport aux créations pour lesquelles je mets tant de temps et d’efforts. Par la suite, lorsque des réalisateurs commentaient mon travail sur un projet de film par exemple, je gardais toujours en tête de conserver cette distance. Ça me protégeait émotionnellement et me permettait en même temps de rester créatif et ouvert pour le meilleur du projet.
Est ce que toi tu aurais un conseil à donner ?
Mon père m’a répété toute ma vie l’importance “d’être présent”. L’importance du réseau de contact rapproché. Peu importe ce que quelqu’un veut accomplir dans la vie, les gens qui l’entourent ont un impact primordial sur la réussite. Par exemple, j’ai été présenté à Red Barrels Games par mon grand ami Samuel Girardin, qui produisait à ce moment l’audio du jeu.
Quelle est ta plus grande fierté ?
Peut-être plus ma plus grande chance que fierté, mais je suis très reconnaissant de pouvoir composer de la musique et collaborer depuis 20 ans avec des gens que j’aime, que j’admire, qui sont talentueux et qui pour la plupart font partie de mes amis proches.
Quels sont tes projets, dans un futur proche ou éloigné ?
Je travaille actuellement sur une série télévisée montréalaise pour le diffuseur Radio-Canada. Ce sera une bande sonore électronique urbaine. Ce projet m’aura fait sortir d’une belle façon de ma zone de confort, étant éloigné de mon style habituel. Je suis très fier de ce qui en résulte.
J’ai aussi accumulé depuis quelques années plusieurs idées musicales entre les projets de commandes, et je pense sortir cela éventuellement sous la forme d’une compilation ou de plusieurs EP… Ce sera un projet personnel. Je cajole l’idée de sortir mes idées pour le plaisir de créer de la musique. Évidemment, il y aura beaucoup de Moog Modular !
As-tu quelque chose à ajouter ou dont tu aimerais faire part à nos lecteurs ?
Les projets ou expériences dont je suis le plus fier, ou auxquels j’ai reçu le plus de satisfaction me sont arrivés un peu par hasard. En fait de façon imprévisible. J’ai toujours visé haut et tenté d’aligner ma carrière vers mes buts, de façon déterminée. Mais avec un petit recul, c’est en m’ouvrant aux opportunités de la vie que j’ai été le plus marqué et choyé. Par exemple, je ne visais pas du tout le marché du jeu vidéo pendant des années, je visais l’industrie du cinéma. Et puis presque par hasard, mon premier jeu a été Outlast, et j’ai pu y découvrir toute une industrie hyper stimulante. Je crois à l’importance de rester souple et ouvert aux opportunités, et savoir s’adapter pour évoluer à travers elles. C’est tellement enrichissant professionnellement mais aussi personnellement.
Je dois mentionner le grand compositeur John Williams. Lors d’un American Film Institute Masterclass, il était accompagné de Steven Spielberg, et on leur demande le secret de leur succès. Une étudiante fait mention d’emblée de la persévérance, le travail acharné et les contacts, mais demande s’il n’y aurait pas d’autres conseils que ces deux légendes pourraient partager auprès des étudiants pour atteindre ce succès. Après quelques secondes de silence, Williams répond: "Les gens ont beaucoup d’ambitions, veulent créer des navettes spatiales, ou devenir Président des États-Unis ou sénateur, et c’est tellement décevant de réaliser que seulement très peu de gens peuvent concrètement réaliser ces rêves. Je me méfie de ces grands rêves que nous nourrissons parfois, car souvent ça peut nous rendre cynique, désemparé et dépressif. Peu de nous peuvent concrètement créer des vaisseaux spatiaux, devenir Président, ou devenir Steven Spielberg. Il serait peut-être mieux d’être à l’écoute de ce qui se passe à l’extérieur de nous, et d’accueillir avec joie et comme opportunités les petites tâches qui nous sont demandées, au lieu de tenter de réaliser le grand rêve. Au lieu de vouloir créer rapidement Autant en emporte le vent, peut-être serait-il mieux de faire une simple carte postale et de grandir de cette expérience. Et que cette expérience, comme résultat, nous enrichisse et propulse concrètement.” Ce qui nous unis tous à la base est la joie et la passion que nous pouvons éprouver à concrétiser et exercer nos talents. C’est ce qui est le plus important pour moi.
Je retiens que tant et aussi longtemps que j’aurai du plaisir et de la joie à exercer mon métier, et que je resterai ouvert aux opportunités qui me permettront d’exercer mon talent tout en conservant cette joie, il y a de fortes chances je m’épanouisse et me réalise, sur le plan professionnel mais aussi personnel.
Pour suivre le travail de Samuel, rendez-vous sur son site internet. Vous pouvez également le retrouver sur son compte Instagram et sa page Facebook.