Le Clean et Le Crunch étant déjà passés sur le grill lors des précédents épisodes, c’est tout naturellement Le Lead qui nous intéresse aujourd’hui.
Pour ceux d’entre vous qui n’auraient pas suivi l’histoire depuis le début, je rappelle qu’il s’agit là de l’un des quatre préamplis à lampe au format pédale présentés par le constructeur français Two Notes Audio Engineering en mars dernier lors du salon Musikmesse 2015. La sortie étant prévue dans quelques semaines, c’est donc en exclusivité mondiale qu’Audiofanzine vous propose ces bancs d’essai. Le décor étant planté, passons aux choses sérieuses avec Le Lead…
French Connection
Vous connaissez maintenant la chanson par cœur, cette partie reprend au mot près les caractéristiques plus ou moins techniques communes à toutes ces pédales. Du coup, si vous avez déjà lu les précédents articles (ici et là), rendez-vous au chapitre suivant pour les exemples sonores.
Tout d’abord, sachez que ces jolis engins ne fonctionnent que sur secteur. En même temps, des piles auraient eu du mal à rassasier la combinaison lampe/transistors MosFet se nichant au cœur de chacun de ces joujoux. Heureusement, Two Notes fournit l’adaptateur adéquat, chose suffisamment rare pour être soulignée.
En ce qui concerne la construction, c’est assez déconcertant… Ces pédales sont d’une légèreté exceptionnelle, et pourtant, elles semblent plus solides qu’un tank ! Sérieusement, vous pourrez y aller à grand coup de Doc Martens sans l’ombre d’une hésitation tant le châssis en fonte d’aluminium est inébranlable. D’autant que les switches ne sont pas en reste niveau robustesse. Bref, un bon point de plus.
Passons maintenant à la connectique. Sur le côté droit, nous avons logiquement droit à l’entrée instrument au format jack 6.35 mm. Celle-ci est directement suivie d’une sortie « THRU » (jack 6.35mm) qui permet, si l’envie vous en prend, de tout de même attaquer un autre ampli, voire de récupérer le signal brut de votre instrument via l’entrée DI d’une carte son au cas où. Vient ensuite la sortie « Send », toujours au format jack 6.35mm. Oui, vous avez bien lu, ces bestioles intègrent une boucle d’effet. Une fois encore, c’est assez rare pour être salué. Pour finir ce côté, une entrée MIDI au format DIN 5 broches complète le tableau, mais nous en reparlerons plus tard…
La tranche gauche est, quant à elle, un peu plus chargée. Il y a tout d’abord le connecteur pour l’adapteur secteur fourni (12VDC/500mA). Il est suivi de près par une sortie casque au format mini-jack, ce qui permettra aux astiqueurs de manche noctambules de pratiquer leur onanisme musical sans réveiller madame. Nommé « DI Output », le connecteur suivant constitue à mon sens la sortie principale de ces belles machines. Au format XLR, il permet d’attaquer tranquillement aussi bien les consoles que les cartes audionumériques. Et quel signal véhicule-t-il ? C’est au choix en vérité : soit le signal préamplifié dans son plus simple appareil, soit accompagné d’une simulation de HP activable via le switch idoine mitoyen. Notez que cette sortie dispose également d’un switch « Ground Lift » pour supprimer une éventuelle boucle de masse. Bien vu !
Pour finir ce tour du propriétaire, nous avons droit au « Return » de la boucle d’effet ainsi qu’à une deuxième sortie labellisée « Output », tous deux au format jack 6.35 mm. La sortie « Output » ne tient pas compte de la simulation d’enceinte et permettra d’envoyer le signal préamplifié vers un HP, voire – au hasard – vers un simulateur HP de la gamme Torpedo signé Two Notes. Comme vous pouvez le constater, la connectique est on ne peut plus complète. Dans les faits, cela permettra d’utiliser ces pédales aussi bien en concert qu’en studio, en passant par les répétitions ou bien encore la pratique à la maison. Chapeau bas monsieur Two Notes !
À présent, voyons ce que proposent ces joujoux au niveau préampli à proprement parler. Chaque pédale dispose de deux canaux, A et B, activables via leurs switches respectifs situés sur le dessus du châssis. Le premier dispose d’un réglage de gain en entrée, d’un volume en sortie, et d’un égaliseur deux bandes (Bass et Treble) simple, mais ô combien efficace. Pour le canal B, nous retrouvons les mêmes réglages avec en sus une bande semi-paramétrique pour les médiums qui permettra de sculpter encore plus avant votre son.
Voilà, plutôt pas mal, n’est-ce pas ? Ah, mais non, attendez une minute, j’ai oublié de vous parler d’un petit quelque chose : le mode Fusion ! En pressant simultanément les switches A et B, qui sont suffisamment éloignés pour une utilisation séparée correcte, mais tout de même assez proches afin de permettre sans mal cette manœuvre, les pédales basculent en mode Fusion. Mais de quoi s’agit-il ? Eh bien, dans ce mode, les canaux A et B peuvent être mélangés de deux façons différentes :
- En parallèle (fusion froide ou « Cold Fusion ») – le potard « Fusion » servant alors à doser le niveau du signal provenant du canal A ;
- En série (fusion chaude ou « Hot Fusion ») – le rotatif « Fusion » dosant alors le niveau du canal A venant booster le canal B.
À l’usage, ce mode Fusion offre à ces pédales 2 canaux un troisième canal pas piqué des vers ! Rendez-vous compte, l’option « Hot » transforme le canal A en un boost survitaminé puisque disposant d’un égaliseur. Quant à l’option « Cold », elle permet d’utiliser en toute simplicité une astuce de studio qui consiste à mélanger en parallèle un signal « clean » avec son double saturé afin de remédier à la perte de précision induite par un excès de distorsion. Tout simplement magique !
Au passage, sachez que les nouveaux bambins Two Notes ne sont pas avares en ce qui concerne les retours visuels. En effet, la fenêtre dévoilant la lampe s’illumine en fonction des canaux ou du mode de Fusion utilisés : en vert pour le canal A, orange pour le B, bleu pour la fusion froide, et enfin rouge pour la fusion chaude. Simple et efficace, rien à redire.
Avant de passer aux exemples sonores, revenons un instant sur le MIDI qui peut être employé de plusieurs façons. Premièrement, il est possible de piloter via un pédalier MIDI externe le passage entre les canaux A, B et Fusion, ainsi que le mode de Fusion. D’autre part, si vous avez la chance de posséder plusieurs de ces bestiaux, les relier entre eux via MIDI vous permettra de fluidifier les changements de canaux puisqu’alors, une pression sur l’un des canaux d’une des pédales désactivera automatiquement les autres. Enfin, sachez qu’il est possible de programmer l’envoi d’un message Program Change par ces pédales pour chaque changement de canal. Mine de rien, cela peut être diablement pratique si, par exemple, vous possédez une pédale Torpedo C.A.B. de la marque. En effet, il est du coup possible d’associer une simulation de HP différente pour chaque canal. Même si ces fonctions MIDI ne serviront pas à tout le monde, il faut reconnaître que le constructeur français fait ici très fort sur le plan de la cohérence et de l’intégration avec ses autres produits.
Voilà pour le « petit point » technique. Il est maintenant grand temps de passer à la partie la plus fun de ce banc d’essai : les extraits audio !
Cloué au Lead
Légende Sauf contre-indication, tous les extraits ont été enregistrés avec une guitare Fender Telecaster Road Worn '50s Blonde d’origine. Le préfixe « Re_ » signale qu’il ne s’agit pas d’une prise réalisée directement, mais d’un reamping au travers de la pédale. La mention « A », « B », « hot » ou « cold » indique le canal ou le mode de Fusion utilisé. Enfin, l’annotation « Scotch » se rapporte aux extraits joués par Romain Preuss (voir en bas) lors d’une séance d’essai sur Le Lead. La foisonnante connectique de ces pédales m’a permis d’enregistrer non seulement la sortie du Lead, mais également le signal direct afin de faire du reamping. |
Si sa carrosserie rouge peut laisser planer un doute, son nom, lui, n’en laisse pas l’ombre d’un : Le Lead est la pédale de cette gamme qui s’adresse aux accros du solo et/ou des rythmiques « Metal ». Afin de façonner le son de ce joujou, le constructeur s’est inspiré des amplis Mesa/Boogie. N’étant pas un grand gourmet en la matière, c’est avec curiosité que j’ai attaqué ce banc d’essai…
Première surprise, le canal A est capable de produire un son clair doté d’une couleur extrêmement intéressante, comme vous pourrez le constater au travers de l’exemple ci-après :
Les trois extraits suivants illustrent l’usage d’un gain plus poussé sur le canal A ainsi que l’impact sonore produit par des changements de micro. Le rendu est crunchy à souhait.
- 02 Re Lead A neck 00:21
- 03 Re Lead A neck bridge 00:20
- 04 Re Lead A bridge 00:21
En ce qui concerne le canal B, la saturation tendance « Lead » démarre très vite. Sur cet exemple, le gain est à peine au tiers de sa course. Notez que le souffle provient plus du micro simple bobinage de la guitare que de la pédale.
Sur ce même arpège, l’utilisation du mode « Cold Fusion » permet de regagner en intelligibilité.
Two Notes livre avec chaque pédale un bundle de 16 enceintes pour leur plug-in Torpedo Wall of Sound III. Ce bundle est différent selon le modèle de la pédale afin de coller au mieux avec l’esprit de chaque préampli. Du coup, si vous coupez la simulation de HP embarquée pour attaquer votre carte son et ainsi passer par le Wall of Sound, la palette sonore disponible est encore plus conséquente. Voici quatre exemples illustrant cela :
- 07 Re Lead cold 2NotesCSG 00:43
- 08 Re Lead cold Angl60C 00:43
- 09 Re Lead cold BDeluxe 00:43
- 10 Re Lead cold R2D2 00:43
Pour la suite, j’ai utilisé des extraits issus d’une session jam/impro avec le guitariste Romain Preuss (voir encadré). D’autre part, j’ai ajouté une petite réverbération histoire de se faire plaisir.
Les deux premiers exemples illustrent l’utilisation du canal A, d’abord avec peu de gain pour un son « clean », puis en poussant un peu plus pour obtenir quelque chose de plus craquant.
- 11 Re Scotch Lead A clean 01:20
- 12 Re Scotch Lead A crunch 01:20
Les trois suivants montrent la palette sonore du canal B, du crunch appuyé à la limite du fuzz, en passant par une belle saturation :
- 13 Re Scotch Lead B light 00:32
- 14 Re Scotch Lead B quart 00:32
- 15 Re Scotch Lead B troisquart 00:32
Enfin, les derniers extraits mettent en lumière les vertus du mode Fusion :
- 16 Re Scotch Lead hot 00:28
- 17 Re Scotch Lead cold 00:32
Quelques remarques avant de passer à la conclusion de ce banc d’essai. Tout d’abord, sachez que même si je n’ai pu inclure d’exemple sonore relatif à la boucle d’effet faute de temps, cette dernière fonctionne à merveille. D’autre part, j’ai également utilisé Le Lead en lieu et place de mon gros ampli habituel avec mon pedalboard en amont. Et pour le coup, si mes pédales Ibanez TS9, ProCo Rat et consorts se sont accouplées avec plaisir au canal A, la chose a été un peu plus hasardeuse avec le canal B. Mais cela est somme toute logique, car il est bien connu que trop de distorsion tue la distorsion.
Conclusion
Même si je ne suis pas forcément le client cible pour ce type de sonorité, je dois bien avouer que Le Lead m’a agréablement surpris. Bien sûr, cette pédale possède elle aussi toutes les caractéristiques qui font le charme de la nouvelle gamme signée Two Notes, à savoir une connectique et une qualité de fabrication irréprochables pour un tarif extrêmement attractif (299 €). Cependant, Le Lead bénéficie également d’atouts qui lui sont propres : le caractère du canal A, en son clair comme en son crunch, et un canal B puissant qui, couplé au canal A en mode « Cold Fusion », saura à coup sûr habiller élégamment les rythmiques et soli les plus exigeants. Seul regret, la saturation du canal B démarre un peu vite à mon goût. En même temps, n’oublions pas que ce modèle s’appelle « Le Lead », ce n’est clairement pas pour rien !
Remerciements
Je tiens à remercier chaleureusement mon ami Romain Preuss, alias Scotch, pour avoir su trouver le temps de venir me donner un coup de main. Guitariste funambule dont l’immense talent n’a d’égal que sa gentillesse, Romain prépare actuellement la sortie de son deuxième album au sein du duo Scotch & Sofa prévue pour janvier 2016. D’autre part, il défend également sur scène le premier EP de son deuxième groupe, Poussin. Encore mille mercis mon Scotch, j’ai vraiment adoré passer ce moment avec toi, plein de bisouilles !
Je souhaite également remercier Geoffrey Levêque pour les photos qui habillent cet article.
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