C’est à l’occasion du Musikmesse 2015 en mars dernier que Two Notes Audio Engineering dévoilait de nouveaux joujoux ma foi fort attrayants sur le papier.
En effet, le constructeur français annonçait alors la sortie prochaine de quatre préamplis à lampe au format pédale, 3 pour guitare et un pour basse. Connaissant la qualité de leur série de simulateurs de HP Torpedo, il n’en fallait pas plus pour me mettre l’eau à la bouche. Le hasard faisant parfois bien les choses, il se trouve que votre serviteur habite juste à côté du siège de la société. Du coup, j’ai eu la chance de pouvoir tester les engins en avant-première pendant toute une semaine courant octobre. La question est donc maintenant de savoir si ces pédales sont à la hauteur des espérances qu’elles ont pu susciter. Et c’est justement ce que nous allons voir ensemble en commençant aujourd’hui par la première d’entre elles, j’ai nommé Le Clean…
French Connection
Commençons par quelques caractéristiques plus ou moins techniques qui sont communes à toutes ces pédales. Tout d’abord, sachez que ces jolis engins ne fonctionnent que sur secteur. En même temps, des piles auraient eu du mal à rassasier la combinaison lampe/transistors MosFet se nichant au cœur de chacun de ces joujoux. Heureusement, Two Notes fournit l’adaptateur adéquat, chose suffisamment rare pour être soulignée.
En ce qui concerne la construction, c’est assez déconcertant… Ces pédales sont d’une légèreté exceptionnelle, et pourtant, elles semblent plus solides qu’un tank ! Sérieusement, vous pourrez y aller à grand coup de Doc Martens sans l’ombre d’une hésitation tant le châssis en fonte d’aluminium est inébranlable. D’autant que les switches ne sont pas en reste niveau robustesse. Bref, un bon point de plus.
Passons maintenant à la connectique. Sur le côté droit, nous avons logiquement droit à l’entrée instrument au format jack 6.35 mm. Celle-ci est directement suivie d’une sortie « THRU » (jack 6.35 mm) qui permet, si l’envie vous en prend, de tout de même attaquer un autre ampli, voire de récupérer le signal brut de votre instrument via l’entrée DI d’une interface audio au cas où. Vient ensuite la sortie « Send », toujours au format jack 6.35mm. Oui, vous avez bien lu, ces bestioles intègrent une boucle d’effet. Une fois encore, c’est assez rare pour être salué. Pour finir ce côté, une entrée MIDI au format DIN 5 broches complète le tableau, mais nous en reparlerons plus tard…
La tranche gauche est, quant à elle, un peu plus chargée. Il y a tout d’abord le connecteur pour l’adapteur secteur fourni (12VDC/500mA). Il est suivi de près par une sortie casque au format mini-jack, ce qui permettra aux astiqueurs de manche noctambules de pratiquer leur onanisme musical sans réveiller madame.
Nommé « DI Output », le connecteur suivant constitue à mon sens la sortie principale de ces belles machines. Au format XLR, il permet d’attaquer tranquillement aussi bien les consoles que les cartes audionumériques. Et quel signal véhicule-t-il ? C’est au choix en vérité : soit le signal préamplifié dans son plus simple appareil, soit accompagné d’une simulation de HP activable via le switch idoine mitoyen. Notez que cette sortie dispose également d’un switch « Ground Lift » pour supprimer une éventuelle boucle de masse. Bien vu !
Pour finir ce tour du propriétaire, nous avons droit au « Return » de la boucle d’effet ainsi qu’à une deuxième sortie labellisée « Output », tous deux au format jack 6.35 mm. La sortie « Output » ne tient pas compte de la simulation d’enceinte et permettra d’envoyer le signal préamplifié vers un HP, voire – au hasard – vers un simulateur HP de la gamme Torpedo signé Two Notes.
Comme vous pouvez le constater, la connectique est on ne peut plus complète. Dans les faits, cela permettra d’utiliser ces pédales aussi bien en concert qu’en studio, en passant par les répétitions ou bien encore la pratique à la maison. Chapeau bas monsieur Two Notes !
À présent, voyons ce que proposent ces joujoux au niveau préampli à proprement parler. Chaque pédale dispose de deux canaux, A et B, activables via leurs switches respectifs situés sur le dessus du châssis. Le premier dispose d’un réglage de gain en entrée, d’un volume en sortie, et d’un égaliseur deux bandes (Bass et Treble) simple, mais ô combien efficace. Pour le canal B, nous retrouvons les mêmes réglages avec en sus une bande semi-paramétrique pour les médiums qui permettra de sculpter encore plus avant votre son.
Voilà, plutôt pas mal, n’est-ce pas ? Ah, mais non, attendez une minute, j’ai oublié de vous parler d’un petit quelque chose : le mode Fusion ! En pressant simultanément les switches A et B, qui sont suffisamment éloignés pour une utilisation séparée correcte, mais tout de même assez proches afin de permettre sans mal cette manœuvre, les pédales basculent en mode Fusion. Mais de quoi s’agit-il ? Eh bien, dans ce mode, les canaux A et B peuvent être mélangés de deux façons différentes :
- En parallèle (fusion froide ou « Cold Fusion ») – le potard « Fusion » servant alors à doser le niveau du signal provenant du canal A ;
- En série (fusion chaude ou « Hot Fusion ») – le rotatif « Fusion » dosant alors le niveau du canal A venant booster le canal B.
À l’usage, ce mode Fusion offre à ces pédales 2 canaux un troisième canal pas piqué des vers ! Rendez-vous compte, l’option « Hot » transforme le canal A en un boost survitaminé puisque disposant d’un égaliseur. Quant à l’option « Cold », elle permet d’utiliser en toute simplicité une astuce de studio qui consiste à mélanger en parallèle un signal « clean » avec son double saturé afin de remédier à la perte de précision induite par un excès de distorsion. Tout simplement magique !
Au passage, sachez que les nouveaux bambins Two Notes ne sont pas avares en ce qui concerne les retours visuels. En effet, la fenêtre dévoilant la lampe s’illumine en fonction des canaux ou du mode de Fusion utilisés : en vert pour le canal A, orange pour le B, bleu pour la fusion froide, et enfin rouge pour la fusion chaude. Simple et efficace, rien à redire.
Avant de passer aux exemples sonores, revenons un instant sur le MIDI qui peut être employé de plusieurs façons. Premièrement, il est possible de piloter via un pédalier MIDI externe le passage entre les canaux A, B et Fusion, ainsi que le mode de Fusion. D’autre part, si vous avez la chance de posséder plusieurs de ces bestiaux, les relier entre eux via MIDI vous permettra de fluidifier les changements de canaux puisqu’alors, une pression sur l’un des canaux d’une des pédales désactivera automatiquement les autres. Enfin, sachez qu’il est possible de programmer l’envoi d’un message Program Change par ces pédales pour chaque changement de canal. Mine de rien, cela peut être diablement pratique si, par exemple, vous possédez une pédale Torpedo C.A.B. de la marque. En effet, il est du coup possible d’associer une simulation de HP différente pour chaque canal. Même si ces fonctions MIDI ne serviront pas à tout le monde, il faut reconnaître que le constructeur français fait ici très fort sur le plan de la cohérence et de l’intégration avec ses autres produits.
Voilà pour le « petit point » technique. Il est maintenant grand temps de passer à la partie la plus fun de ce banc d’essai : les extraits audio !
Clean Eastwood
Légende Sauf contre-indication, tous les extraits ont été enregistrés avec une guitare Fender Telecaster Road Worn '50s Blonde d’origine. |
Avec sa robe argentée et son nom sans équivoque, Le Clean chasse clairement sur les terres des amplis Fender. De toutes les pédales, c’est celle qui possède la plage dynamique la plus vivace. Du coup, c’est également celle qui me semble la plus difficile à maîtriser. En effet, si le canal A reste on ne peut plus « clean » quel que soit le réglage de gain, il faudra tout de même faire très attention à ce dernier sous peine de voir la sortie « clipper ». Mais rien d’insurmontable cependant, et cette belle plage dynamique devrait régaler les guitaristes privilégiant les nuances dans l’attaque des cordes. J’en veux pour preuve l’exemple ci-dessous :
Les trois prochains extraits montrent d’une part que l’engin réagit également très bien aux changements de micro, et d’autre part que le canal B peut s’avérer crunchy à souhait :
- 02 Re Clean B neck 00:19
- 03 Re Clean B neck bridge 00:20
- 04 Re Clean B bridge 00:20
Les modes de Fusion « Hot » et « Cold » ouvrent quant à eux d’autres horizons, allant de la simple distorsion à une sorte de fuzz. Notez au passage que malgré la saturation, le mode « Cold » permet de conserver l’intelligibilité de l’arpège :
- 05 Re Clean hot 00:35
- 06 Re Clean cold 00:43
Comme si cela ne suffisait pas, il se trouve que Two Notes livre avec chaque pédale un bundle de 16 enceintes pour leur plug-in Torpedo Wall of Sound III. Ce bundle est différent selon le modèle de la pédale afin de coller au mieux avec l’esprit de chaque préampli. Du coup, si vous coupez la simulation de HP embarquée pour attaquer votre carte son et ainsi passer par le Wall of Sound, la palette sonore disponible est encore plus conséquente. Voici quatre exemples illustrant cela :
- 07 Re Clean A Brit65O 00:42
- 08 Re Clean A Blonde63 00:42
- 09 Re Clean B neck Voice65 00:19
- 10 Re Clean B neck WattFanC 00:19
Jusqu’ici, les extraits sonores ne comportaient absolument aucun effet supplémentaire. Histoire de se faire plaisir, j’ai ajouté une petite réverbération sur les suivants. Deux remarques concernant ces extraits. Tout d’abord, vous constaterez certainement que le premier « clippe » par moments, c’est la fameuse difficulté de maîtrise du canal A dont je vous parlais au début de cette séance d’écoute. Ensuite, le dernier a été réalisé sur une Fender Telecaster Road Worn '72 Custom Black équipée de micros The Creamery en position manche, donc avec un micro double bobinage. Malheureusement, l’installation électrique de mon domicile est loin d’être exemplaire et une saleté de parasite s’est glissée à l’insu de mon plein gré lors de cette prise, introduisant ainsi un sifflement pour le moins disgracieux… J’ai tout de même tenu à vous présenter cet extrait, car il me semble intéressant.
- 11 Clean A 00:39
- 12 Clean B 00:25
- 13 Clean hot 00:26
Voici à présent quelques fragments audio issus d’une session jam/impro avec le guitariste Romain Preuss (voir en bas).
- 14 Re Scotch Clean A 01:20
- 15 Re Scotch Clean B 00:32
- 16 Re Scotch Clean hot 00:27
- 17 Re Scotch Clean cold 00:30
C’est ainsi que s’achève notre séance d’écoute. Sachez que, même si je n’ai pu inclure d’exemple sonore relatif à la boucle d’effet faute de temps, cette dernière fonctionne à merveille. D’autre part, j’ai également utilisé Le Clean en lieu et place de mon gros ampli habituel avec mon pedalboard en amont. Cela vous intéressera sûrement d’apprendre que mes pédales Ibanez TS9, ProCo Rat et consorts se sont accouplées avec plaisir à la belle.
Conclusion
Avec sa connectique exemplaire lui permettant de s’adapter à n’importe quel usage, une qualité de fabrication au-dessus de tout soupçon, une ergonomie taillée pour la scène, et une palette sonore impressionnante, Le Clean a vraiment de quoi séduire. D’autant que le tarif agressif de la bête (299 €) n’a pas empêché Two Notes d’inclure quelques bonus comme l’alimentation et le bundle d’enceintes pour le WoS III. Si les autres pédales sont du même acabit, le plus dur sera certainement de faire un choix !
Sur ce, rendez-vous dans le prochain épisode pour découvrir Le Crunch…
Téléchargez les extraits sonores (format FLAC)
Remerciements
Je tiens à remercier chaleureusement mon ami Romain Preuss, alias Scotch, pour avoir su trouver le temps de venir me donner un coup de main. Guitariste funambule dont l’immense talent n’a d’égal que sa gentillesse, Romain prépare actuellement la sortie de son deuxième album au sein du duo Scotch & Sofa prévue pour janvier 2016. D’autre part, il défend également sur scène le premier EP de son deuxième groupe, Poussin. Encore mille mercis mon Scotch, j’ai vraiment adoré passer ce moment avec toi, plein de bisouilles !
Je souhaite également remercier Geoffrey Levêque pour les photos qui habillent cet article.