Grand spécialiste du traitement du signal, Eventide poursuit la virtualisation des effets mis au point pour sa plateforme H9 avec la version plug-in du CrushStation, une disto pas comme les autres…
Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’au fil des dernières années, Eventide a eu à coeur de mettre son expérience au service de concepts pour le moins intéressants : outre la Blackhole et ses réverbes abyssales, on citera notamment la Mangledverb combinant réverbe et distorsion. Inutile de dire en tous cas qu’on est curieux de voir ce que le papa du fameux Harmonizer peut nous proposer en s’attaquant à la distorsion. Réponse avec la CruShstation
Un air de famille
L’interface du plug-in ne surprendra personne dans la mesure où elle reprend le look comme l’ergonomie et les fonctionnalités des plug-ins récents du constructeur (s’inspirant eux-mêmes des pédales) : en vis-à-vis de sliders pour déterminer le niveau d’entrée et de sortie, une dizaine de gros potards vous permettent ainsi de paramétrer l’effet, tandis qu’un ruban permet de gérer un ensemble d’automations librement paramétrables sur les potards (pour chacun on définit une plage de valeurs qui sera fédérée à la position du ruban), et qu’un bouton Hotswitch permet d’activer un réglage spécial pour chaque preset.
Complétant cela, on a droit à un navigateur de presets et un système de comparaison de réglages. Précisons que l’interface n’est pas redimensionnable mais que la chose n’a rien de gênant dans la mesure où tous les paramètres et contrôles sont bien lisibles. Bref, rien de neuf depuis l’Ultratap, la Blackhole, la Mangledverb ou la Spring mais on ne s’en plaindra pas vu que tout cela était plutôt bien pensé. Reste à voir les réglages dans le détail pour en apprendre plus sur le fonctionnement de la Crushstation.
Candy crush
Comme d’habitude avec Eventide, la Crushstation n’est pas une simple disto : Outre un EQ trois bandes avec médiums paramétriques, on y trouve ainsi un gate aux réglages simple (réglage du seul et attaque commutable en lente ou rapide), mais aussi un octaver (+/- une octave) tandis que la distorsion elle-même dispose de quatre réglages : Drive qui détermine le niveau de saturation du signal, Sustain qui est un compresseur applicable avant ou après la distorsion, SAG qui simule la distorsion produite par des circuits électroniques défectueux, et Grit qui rajoute du bas au signal avant qu’il soit distordu. À la faveur de tout cela, la Crushstation permet d’obtenir bien des distos, de la subtile petite coloration au gros fuzz détruisant complètement le son.
Notons-le : ce n’est pas dans son registre subtile que le plug est le plus intéressant dans la mesure où pour simuler le grain typique d’une bande magnétique par exemple, on trouvera plus complet et plus réaliste ailleurs. En revanche, sur les grosses saturations, elle est très pertinente dans la mesure où les traitements dynamiques intégrés permettent d’obtenir des effets assez intéressants, avec des résonances qui remontent au milieu du déluge de saturation sous l’effet des enveloppes de volume. Bien évidemment, tout cela sera à canaliser en utilisant le potard de dosage Dry/Wet, tandis que l’EQ très efficace sera bien utile pour remettre du bas, creuser le médium ou adoucir les aigus quand le besoin s’en fait sentir. L’octaver permet quant à lui d’épaissir significativement le son et de redonner dans certains cas de la lisibilité à un signal bien violenté, comme nous allons l’entendre en commençant avec une guitare.
- GuitarDry00:19
- GuitarDirty00:19
- GuitarBitKit00:19
- GuitarOctaver00:19
- GuitarChristian00:19
Mais ça marche aussi très bien sur de la basse :
- CRUSHSTATION-bassdry00:05
- CRUSHSTATION-bassBitCrusher00:05
- CRUSHSTATION-bassBitCrusherMoreBass00:05
ou des percus ou le tandem Sustainer/Gate permet de faire remonter des réverbes ou des résonances :
- CRUSHSTATION-percudry(2)00:05
- CRUSHSTATION-percuCOMP00:05
- CRUSHSTATION-percuPillow00:05
- CRUSHSTATION-percuBottomFeeder00:05
- CRUSHSTATION-percuFATnSnappy00:05
On portera une attention particulière à la façon dont Grit, en marge de l’EQ, permet de remettre les basses aux centre du débat lorsque ces dernières tendent à être atténuées par la disto :
- Bass-drive50-Grit000:05
- Bass-drive50-Grit5000:05
- Bass-drive50-Grit10000:05
Et aux effets de SIG qu’on couplera encore à Grit lorsque les basses se font la malle :
- Bass-drive50-Sag5000:05
- Bass-drive50-Sag7000:05
- Bass-drive50-Sag70-Grit7000:05
Enfin, on appréciera les nuances dans l’enveloppe du traitement apportées par la position pré ou post du compresseur :
- Bass-drive50-SustainPre10000:05
- Bass-drive50-SustainPost10000:05
Et enfin ce que le plug peut apporter à un mix complet :
- CRUSHSTATION-MIXDry00:05
- CRUSHSTATION-MIXcomp00:05
- CRUSHSTATION-MIXcassette00:05
- CRUSHSTATION-MIXlobster00:05
Comme vous pouvez l’entendre, CrushStation jouit d’une personnalité indéniable et entre sa capacité à être utilisé simplement en live et les résultats intéressants obtenus à la confluence des algos de distorsion, de l’octaver et des traitements dynamiques, il mérite indéniablement sa place dans l’arsenal des sound designers au rayon Grosse Bertha.
Quant à savoir si c’est le plug-in unique à posséder pour vos besoins en saturation, c’est une autre question. Pour demeurer simple, le dernier bébé d’Eventide fait en effet l’impasse sur certaines fonctionnalités qu’on trouvera chez la concurrence, comme un traitement multibande, M/S ou encore un filtre résonant, tandis que pour ce qui est de la coloration plus subtil du signal façon magnéto à bande ou préamp, on trouvera plus à propos. Bref, ce n’est pas ce CrushStation qui va marcher sur les plates bandes d’un Ohmicide, d’un Thrash ou encore d’un Decapitator, pour n’en citer que quelques uns, mais il les complètera de belle manière sans aucun doute, ne serait-ce que pour sa simplicité à l’usage et l’orientation temps réel que lui ouvre son système de ruban.
Conclusion
CrushStation est un plug-in intéressant et réussi qui porte la griffe d’Eventide vu que la qualité des algos et les petits twists utilisés par l’éditeur pour en faire un effet original répondent présents comme sur les réalisations passées. En résulte une vraie personnalité et un outil simple à utiliser comme tourné vers le temps réel via son système de ruban d’automation. Il devrait donc sans problème trouver son public même si nous ne sommes pas face à la disto ultime sur le plan fonctionnel et donc en termes de polyvalence, ce qui n’était sans doute pas le but recherché.