Dans les deux derniers articles, nous avions marqué une petite pause pratique dans le déroulé très théorique de cette série, et je vous avais proposé quelques exemples concrets de progressions harmoniques facilement utilisables... et très souvent utilisées. Mais si nous voulons sortir un peu des sentiers battus, il est temps maintenant de nous replonger dans un peu de théorie « pure et dure ».
Après avoir étudié les degrés d’une tonalité et leur fonction, ainsi que la construction d’accords à partir de ces derniers et l’utilisation desdits accords au sein de progressions et cadences spécifiques, nous allons dans les prochains articles nous intéresser de plus près à la manière dont nous pouvons remplacer certains de ces accords par d’autres afin de diversifier encore nos harmonisations.
L’enrichissement d’accords
L’une des méthodes les plus simples pour varier les accords employés est de les remplacer par des versions plus riches d’eux-mêmes. Nous avons déjà vu dans l’article 4 que nous pouvions ajouter une quatrième note pour transformer les triades en accords de septième. Mais ceux-ci peuvent eux-mêmes être encore enrichis. En général, cela se réalise par l’ajout de tierces supplémentaires, dans la tonalité de base du morceau. Celles-ci peuvent parfois être altérées, dans les cas notamment d’accords de passages (voir les notes de passage dans l’article 8) ou pour créer une modulation (concept que nous aborderons prochainement).
Dans le cas de ces accords, on parle également de superstructures. À noter que l’on peut aussi ajouter une seconde majeure supplémentaire à la triade de base, donc une sixte à la fondamentale de l’accord. On appelle cela un accord de sixte. Toutefois, dans le cas d’un accord de sixte majeur, on remarquera qu’il peut être considéré également comme le premier renversement de l’accord de septième construit sur sa relative mineure.
Exemple ci-dessous : l’accord Do6 est le premier renversement de La min 7 :
Les degrés qui partagent une même fonction
Nous avons vu dans les précédents articles, que les différents degrés d’une gamme portent chacun une fonction particulière. Toutefois, les trois fonctions principales sont celles portées par les degrés I, IV et V, à savoir les fonctions de tonique, sous-dominante et dominante. Prenons l’exemple de la demi-cadence suivie de la cadence parfaite, donc la progression IV-V-I (voir article 7 de cette série). Celle-ci peut être remplacée par la progression II-V-I – très souvent employée dans le jazz notamment – car le degré II porte la même fonction de sous-dominante que le degré IV. On peut donc remplacer l’un par l’autre dans une progression donnée.
Le tableau ci-après rappelle les fonctions de chaque degré d’une tonalité, et vous indique quels sont les accords qui portent la même fonction et peuvent donc être éventuellement remplacés.
Mais il est important de rappeler une chose : les substitutions, quelles qu’elles soient, sont malgré tout à effectuer avec la plus grande prudence. Ainsi, le degré I sera difficilement remplaçable par un autre degré de tonique dans une cadence parfaite finale sans remettre en cause la nature même de cette cadence. En musique comme dans tous les autres domaines, l’analogie absolue n’existe pas !
Dans le prochain article, nous nous pencherons sur les substitutions liées à la fonction de dominante.