Moins d’un an après la version 6, Pigments revient dans une nouvelle mouture. Plus timide en nouveautés que les précédentes, cette septième version saura-t-elle malgré tout apporter de nouvelles couleurs à vos productions ?
Lorsque Pigments a débarqué il y a quelques années, il s’agissait avant tout d’un synthétiseur logiciel centré sur la synthèse à tables d’ondes, doté d’un moteur wavetable poussé et d’un système de modulation visuel d’une redoutable efficacité. D’emblée, Arturia avait posé les bases d’un instrument moderne, flexible et remarquablement clair dans son fonctionnement. Mais c’est au fil des versions successives, grâce à l’ajout de nouveaux moteurs, de filtres supplémentaires, d’effets élaborés et d’un séquenceur toujours plus inspirant, qu’il s’est transformé en véritable couteau suisse de la synthèse. Pigments est devenu l’un des rares synthés capables d’allier puissance, polyvalence et convivialité, sans jamais tomber dans la complexité gratuite.
Avec la version 7, Arturia poursuit cette évolution, mais d’une manière plus timide que par le passé. Il ne s’agit pas ici d’une révolution, ni même de nouvelles possibilités essentielles, mais plutôt d’une série d’ajouts et d’améliorations qui renforcent le potentiel, déjà énorme, de l’instrument.
Il faut reconnaître que si la liste des nouveautés peut sembler un peu légère, Pigments 6 avait atteint un tel niveau de puissance et de maturité qu’il devient difficile d’imaginer ce qu’Arturia pourrait réellement ajouter de décisif. Une fois n’est pas coutume, commençons donc par évoquer les quelques manques que l’on pourrait regretter.
Un nouveau générateur basé sur la FM, peut-être ? Pigments possède déjà des possibilités de modulation de fréquence puissantes, mais l’ajout d’un moteur dédié à cette synthèse avec davantage de contrôle ferait sens. On regrette également l’absence persistante de sauvegarde de présets par section, une fonction qui serait pourtant très précieuse compte tenu de la profondeur de l’instrument et qui faciliterait grandement la création rapide de nouveaux sons.
Enfin, contrairement à Serum 2 ou Dune 3, Pigments ne propose toujours pas la possibilité de créer ses propres wavetables directement dans l’interface. Voilà tout, et cela laisse encore une petite marge de progression pour les prochaines versions.
Mais globalement, on serait vilaine langue de critiquer ce logiciel déjà si complet, plaisant à l’usage, et qui de plus propose ses mises à jour gratuitement.
Penchons-nous maintenant sur les nouveautés proprement dites, en renvoyant les lecteurs intéressés par une vue d’ensemble vers les tests précédents.
Une nouvelle vue Play modernisée et orientée performance

Les macros, davantage mises en avant que par le passé, apparaissent en surimpression de cette animation, tandis que les commandes d’édition sont regroupées en bas de l’écran. L’ensemble est clair, efficace et visuellement très réussi.
Pour autant, ce n’est pas sans nuances. Si cette nouvelle vue Play s’avère indéniablement plus moderne et parfaitement adaptée au jeu en temps réel, elle montre aussi certaines limites lorsqu’il s’agit d’éditer rapidement un son. Presque tous les contrôles précédents sont toujours présents, mais l’accès direct est moins immédiat et passe davantage par des onglets.

Ce repositionnement transforme la vue Play en un véritable espace dédié au jeu. Pour les sound designers désireux d’explorer en profondeur les moteurs de synthèse, elle ne remplace évidemment pas l’accès aux pages détaillées, mais elle offre une expérience plus immersive lorsqu’il s’agit d’improviser ou d’ajuster en temps réel des paramètres essentiels, notamment via les macros.

- P7 08 – Amorphic Overtone00:27
- P7 09 – Arp Bad karma00:21
- P7 10 – Arp Da Rave00:18
- P7 11 – Arp Square00:19
- P7 12 – Arp SF00:18
- P7 13 – Digipunch01:54
- P7 14 – Dirty Flute01:01
Des filtres et un effet qui ajoutent vraiment du caractère

Le filtre Rage donne une capacité de saturation qui n’était pas vraiment présente auparavant. Il combine des éléments de résonance et de distorsion multiple, avec plusieurs types disponibles (Diode, Distortion, Soft Clip, Tape et Transistor), ce qui permet d’obtenir des colorations douces ou agressives. Sur des basses ou des leads, ce filtre apporte une énergie distinctive qui plaira particulièrement aux musiques électroniques modernes.
Le Ripple propose quant à lui via ses 3 types (Subtle, Medium et Hard) de jouer sur des phénomènes de phase et de décalage fréquentiel, offrant des timbres oscillants qui ne sont pas simplement des variations de cutoff. Ce filtre très original peut vibrer ou pulser de manière très intéressante et se positionne un peu comme un outil de sound design textural plutôt qu’un filtre classique destiné à « tailler dans la matière ».

Enfin, Pigments 7 ajoute à son arsenal d’effets le Corroder. À la lecture de la liste des nouveautés, on pourrait rapidement se dire que l’ajout d’un nouvel effet destiné à salir le son ou à ajouter de la distorsion n’a rien de fondamental. Et pourtant, à l’usage, Corroder se révèle rapidement convaincant.
Il est présenté comme un outil explorant des traitements de dégradation contrôlée, allant du plus subtil au plus destructeur selon les réglages. Et c’est effectivement le cas. L’ajout de bruit dans le processus constitue un véritable plus, apportant de jolies textures et une dimension supplémentaire au traitement.
Surtout, une source de modulation peut être choisie parmi les formes d’onde standards (sinus, square, saw), mais aussi, et c’est là que l’effet devient vraiment intéressant, les générateurs, les filtres, l’entrée FX ou encore l’Audio Input. Comme nous l’avions déjà constaté avec Pigments 6, cette possibilité ouvre la porte à de nombreuses fantaisies, mais appliquée ici à un effet dédié à la dégradation sonore, elle prend une tout autre dimension.
Votre voix, ou même le bruit de votre machine à laver, peut ainsi servir de modulateur pour Corroder. Avouez que c’est plutôt cool.
Parallèlement à ces ajouts, les filtres « Classics » bénéficient maintenant de modulation FM, ce qui ouvre encore plus d’interactions complexes entre oscillateurs et filtres. Cela enrichit considérablement la capacité de Pigments à aller vers des textures métalliques ou imprévisibles.

- P7 01 – Filters Rage Diode + Ripple01:17
- P7 02 – Filters Rage tape + Reverb01:53
- P7 03 – Filters Ripple + Rage tape00:21
- P7 04 – Filters Ripple + Reverb00:36
- P7 05 – FX Corroder – Amazing Machine01:55
- P7 06 – FX Corroder – Iron Tremor pad01:37
- P7 07 – FX Corroder Mars02:16
Autres nouveautés Pigments 7 : enveloppes plus nettes, meilleure gestion CPU, nouveaux présets et wavetables

À noter toutefois que ces changements peuvent avoir une incidence sur certains sons programmés avec des versions antérieures de Pigments.
Arturia a également optimisé les performances générales et la consommation CPU. Et le gain est bien réel : Pigments 7 se montre moins gourmand que ses prédécesseurs dans des contextes complexes, ce qui s’avère particulièrement confortable dans des sessions chargées ou sur des machines moins puissantes.
Le contenu livré avec Pigments 7 a lui aussi été enrichi. Cette version propose 150 nouveaux présets, accompagnés de 50 wavetables, 30 samples et 20 sources de bruit, ainsi que des tutoriels intégrés guidant les utilisateurs à travers des scénarios concrets de sound design.