Les enceintes Rokit, représentant l’entrée de gamme du constructeur californien KRK, peuplent maintenant depuis plusieurs années bon nombre de home-studios. Mais les enceintes aux cônes jaunes, qui n’avaient pas connu de mise à jour depuis plus de 5 ans, méritaient un petit lifting afin de faire face à une concurrence toujours plus féroce. Mise au point sur la version 8 pouces de cette troisième génération de Rokit.
Le périph jaune
Quelle bonne idée de doter ses enceintes de haut-parleurs jaunes, immédiatement identifiables dans un studio, un salon ou un magasin ! Une si bonne idée que certains concurrents ont tenté de la copier, avec plus ou moins de bonheur. Reste que le boomer jaune est devenu le symbole de KRK et leur a permis de se démarquer de la concurrence autrement que pour des raisons purement acoustiques, car il n’est pas toujours évident quand on est débutant de faire confiance à ses oreilles…
Imaginez le musicien se rendant dans un magasin, et se trouvant bête devant un mur d’enceintes, ne sachant pas quoi acheter. Malgré tout, il se souvient d’avoir déjà aperçu une paire d’enceintes jaunes chez un ami, et ce dernier avait l’air d’en être content… « Comment vous dites ? KRK ? OK, je vais prendre celles-là. » Le but d’une marque est qu’on se souvienne d’elle, pour une raison ou pour une autre.
2013 est donc l’année du renouvellement pour la série Rokit, peuplant l’entrée de gamme de KRK. La deuxième génération étant sortie en 2008, le constructeur se devait de mettre à jour ses petites protégées afin de faire face aux nouveaux modèles concurrents, toujours plus performants. Mackie ont renouvelé leur série MR, Yamaha ses HS, et des marques que l’on n’avait pas l’habitude de voir dans la section des enceintes monitoring ont fait leur entrée, notamment Presonus et leur série Eris, dont la version 8 pouces nous a tellement impressionnés qu’elle nous servira de mètre étalon pour ce test (même taille, même prix).
Mais avant l’écoute, faisons le tour du proprio.
G3 : ça va shredder !
Cette troisième génération reprend le look des précédentes, à quelques détails près. Le boomer devient bleu (non, je déconne !), et les vis qui étaient visibles sur la face avant sont désormais cachées. La forme de l’évent (situé à l’avant) a été légèrement modifiée, mais mis à part cela l’enceinte reste la même. L’enceinte deux voies est toujours munie d’un boomer de 8 pouces en fibre de verre (Aramid Glass Composite) et d’un tweeter à dôme de soie de 1 pouce. Pour alimenter tout ça, KRK a intégré deux amplis en classe A-B (25 et 75 Watts) et le filtre de crossover est situé à 2 kHz. L’enceinte dotée d’une boîte en MDF avec finition vinyle est un peu plus grosse que les Eris E8 (315 × 275 × 396 mm) et pèse pas moins de 11,2 kg. Petite cerise sur le pancake, l’enceinte est dotée d’un mince pad en mousse situé sous l’enceinte qui est censé réduire les vibrations transmises au bureau ou au pied.
À l’arrière, on retrouve les entrées aux formats RCA (asymétrique), Jack TRS et XLR (symétriques), et le switch de mise sous tension (le logo situé à l’avant s’illuminera). Trois potards permettront de régler les hautes fréquences (de –2 à –1 dB), les basses fréquences (de –2 à +2 dB, ça, c’est nouveau et n’existait pas sur les G2 !) et le gain en entrée. En revanche, le constructeur ne donne pas les fréquences affectées par ces potards. Si le potard des hautes fréquences augmente simplement le niveau du tweeter, il devrait agir au-dessus du crossover situé à 2 kHz. Pour le potard des basses fréquences, le constructeur recommande de la régler sur +2 dB en plein air, –1 dB lorsque l’enceinte est contre un mur et –2 dB lorsqu’elle est placée dans un coin. Nous avons aussi remarqué que les enceintes se mettaient en veille lorsqu’aucun signal ne leur était envoyé pendant un certain temps (30 minutes), un très bon point, même s’il faudra attendre quelques secondes avant qu’elles soient de nouveau opérationnelles (en envoyant du signal, tout simplement).
Passons maintenant à l’écoute.
Écoute
Nous allons donc comparer ces Rokit 8 G3 à des Eris E8 de Presonus, qui nous ont pas mal impressionnés il y a quelques semaines de cela. Nous avons relié les deux paires d’enceintes à notre interface Metric Halo ULN-8, nous permettant de passer instantanément de l’une à l’autre en écoutant des mix que nous connaissons bien, en lossless et parfois même en 96 kHz/24 bit.
Melody Gardot — Mira
Dès la première écoute, on se rend compte que les deux enceintes ne retranscrivent pas de la même manière les hauts médiums situés entre 1 et 6 kHz. Si les Presonus Eris E8 nous avaient convaincus par leur bonne linéarité dans tout le haut du spectre, les KRK ont quant à elles un léger creux dans les fréquences situées entre 1 et 6 kHz et cela se traduit par une précision moindre dans l’attaque de certains instruments et une présence atténuée sur la voix de Gardot. La dynamique nous semble aussi meilleure sur les Eris, tandis que l’image stéréo reste équivalente. On remarque aussi un autre creux entre 200 et 300 Hz, certains instruments manquant de corps. Sur ce genre de mixage, les Eris restent donc plus précises, avec une voix retranscrite plus fidèlement.
Metallica – Enter Sandman
Même chose sur la voix de Hetfield, un peu plus enterrée dans le mix sur les KRK. Ces dernières rendent le mix plus boxy et les piles de guitares se creusent, ce qui rend le tout moins lisible. Ce creux dans les hauts médiums/aigus est assez dommageable, car ces fréquences sont particulièrement importantes lorsque l’on mixe un titre. Il faudra faire attention à ne pas trop booster ces fréquences sous peine de sortir de mix fatigants et rapidement pénibles à écouter. Un autre point pour les Eris.
Strauss — Ainsi parlait Zarathurstra
On termine avec Strauss. Sans trop de surprises, on retrouve les caractéristiques précédentes, même si cela saute moins aux oreilles. On garde toujours ce sentiment de distance, avec une présence moindre sur les cuivres et l’impression que certains instruments disparaissent sur la note tenue finale.
Les Eris gagnent d’après nous haut la main ces écoutes, avec une meilleure linéarité, une plus grande précision et plus de dynamique. Sachant que les KRK n’ont pas de réglage pour les moyennes fréquences, il nous sera impossible de redresser la barre. L’ajout du potard des basses fréquences est un plus par rapport aux Rokit G2, mais cela reste maigre par rapport aux Eris qui disposent de 4 filtres.
Conclusion
Cette troisième génération de Rokit voit apparaitre quelques nouveautés comme l’apparition d’un filtre pour les basses fréquences, mais cela reste bien maigre et ne suffit pas à se mettre au niveau de la nouvelle concurrence. La linéarité des KRK est toute relative et il manque un réglage pour les moyennes fréquences. Malgré cela, les enceintes gardent certains avantages, comme leur mise en veille automatique, mais cela nous semble encore un peu trop juste pour qu’elles se hissent au niveau des meilleures références du marché.