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Sujet Les niveaux-cible pour la musique en ligne. Explications.

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1 Les niveaux-cible pour la musique en ligne. Explications.
Je reçois régulièrement des questions en privé concernant les niveaux à respecter pour la mise en streaming de musique sur les différentes plateformes audio (YouTube, Tidal, Spotify, etc…). Et aussi sur les conséquences sonores d’un titre qui est aux normes ou non.
Voici donc un résumé aussi simple que possible à ce sujet.

Lorsqu'il s’agit de graver un CD ou d’écouter une piste mixée et ou masterisée, il y a très peu de contraintes techniques : il faut éviter de dépasser le 0 dB TP (True Peak). Donc en général, on laisse deux ou trois dixièmes TP de marge, et cela passe. Le CD n’ayant pas de normes établies de volume, il est tout-à-fait possible de graver un titre surcompressé, à la dynamique quasi inexistante sans que cela ne modifie quoi que ce soit sur le plan sonore : le plus mauvais mastering du monde, au niveau sonore abominable, sans aucune dynamique sera accepté et restitué tel quel.

Ceci n’était pas vrai pour le vinyle, où les contraintes techniques étaient réelles : le niveau sonore était corrélé à la durée de gravure : 5 minutes ou 20 minutes par face ne rendaient pas du tout le même volume, ni le même son. De même : si l’on réalisait le cutting à trop haut volume ou avec trop de basses fréquences, le stylus (aiguille de gravure) sautait, et l’on pouvait jeter le lacquer et recommencer.
La diffusion en ligne parle de « target level » (niveau-cible). Le but est assez simple, et identique à ce qui se fait en radio ou télévision : obtenir un niveau sonore relativement homogène pour l’auditeur, lorsqu’il passe d’un titre à un autre.

La gestion des niveaux pour le streaming comporte plusieurs aspects
:
- Le niveau LUFS (Loudness Unit Full Scale) qui va mesurer la sensation de sonie sur l’intégralité du titre. Il ne s’agit pas d’une mesure instantanée, mais globale, sur l’entièreté du titre.
- Le PLR (Peak Level Ratio) qui est calculé entre le niveau crête (dBFS) et le niveau moyen (RMS)
Le calcul est simple : Peak-RMS = le PLR
- Le niveau maximum : le niveau crête instantané maximal, mesuré en TP (True Peak)
- La plage dynamique (DR = Dynamic Range)

Quel mesure faut-il surveiller ? Toutes ! C’est l’ensemble des différentes mesures évoquées qui fera que votre mastering sera ou non dans le « niveau cible » et sera le moins dégradé sur le plan sonore.
Que se passe-t-il si l’on ne respecte pas la norme ? A l’heure actuelle, personne n’a encore été mis en prison. Même ceux qui atteignent des niveaux de compression gigantesque et des niveaux sonores de cochon. Même ceux qui jurent que ces normes sont n’importe quoi, et qu’on peut faire ce que l’on veut sont toujours en liberté :mdr:

Simplement, les plateformes de streaming vont appliquer une normalisation, pour faire en sorte que le titre entre plus ou moins dans la norme. J’écris « plus ou moins » parce que si la dynamique est totalement ou partiellement absente, il ne sera pas possible de la ramener. Par contre, sur le plan du niveau LUFS, le niveau sera ajusté. Le titre masterisé trop fort verra donc son niveau baissé (parfois fortement), tout en gardant une dynamique faible. Si l’on cherche la qualité idéale, mieux vaut donc rester aussi près que possible des niveaux-cibles.
Et si l’on masterise à un niveau trop faible ?
Cela dépendra de la plateforme : certaines appliquent une normalisation à la hausse, mais la plupart ne font rien : donc le titre sonnera moins fort que les autres. A savoir que Apple, via Soundcheck est la seule plateforme à respecter les recommandations de l’AES. C’est aussi la plateforme qui propose la plus grande dynamique de musique en ligne.
Les recommandations sont les suivantes : -16 LUFS, DR 13 et PLR 15, TP à (au moins) -0.1 dBTP

En pratique :
Voyons le même titre masterisé deux fois : à gauche en haut en étant aux normes YouTube, en bas en ayant masterisé trop fort (au-dessus des normes). A droite, on voit ce qui se passe après passage sur YouTube : le titre masterisé dans la norme-cible est joué au même volume, quand celui qui est masterisé trop fort voit son niveau baisser drastiquement (- 5,34 dB). Résultat à l’écoute : celui qui sonnait plus fort sonnera moins fort quand il sera écouté. Un comble quand on espère gagner en sonie, de constater qu’au final, on perd !

techniques-du-son-3079122.jpg

En données chiffrées, cela donne quoi ?
Les deux tableaux donnent les mesures des deux titres masterisés : à gauche celui réalisé dans les normes, à droite celui qui sonne plus fort. Après passage sur YouTube, on peut constater que le premier n’a pas été modifié, alors que le second a été baissé. Mais bien entendu, même baissé, sa plage dynamique reste faible et surtout, il respire moins : les crêtes ne se détachent que très peu du niveau moyen.

Les niveaux lus au mastering :

techniques-du-son-3079126.jpg

Les niveaux us après passage sur YouTube :

techniques-du-son-3079128.jpg

Il existe différents outils pour mesurer les différents paramètres sonores évoqués plus haut, dont certains sont très abordables, voire gratuits. Si vous n’avez aucun de ces outils, il est possible de mesurer en ligne via www.loudnesspenalty.com où votre fichier audio sera rapidement analysé. Ce site donne une estimation, pas une mesure exacte. L’analyse du titre masterisé trop fort donne une estimation d’une baisse de 4 dB, alors que Youtube l’a baissé de 5, 34 dB.
La guerre du volume est donc vaine quand il s’agit de déposer un fichier pour qu’il soit joué en ligne. Si toutefois vous êtes plus bas que le volume-cible, votre fichier ne sera pas modifié, mais à l’écoute il sonnera moins fort que ceux qui seront joués avant ou après. L’idéal est donc de rester aussi proche du niveau-cible que possible.
Enfin, certains styles musicaux sont parfois extrêmement compressés, et sonnent à des niveaux indécents… mais cette compression exagérée peut faire partie du design sonore (choix artistique). Si l’on veut garder ce type de sonorité, il faut accepter que le volume soit baissé sur les plateformes musicales.
Il ne faut pas hésiter à mettre en ligne différentes versions, en mode privé, pour choisir de diffuser celle qui sera la plus plaisante à l’oreille. Mais dans l’immense majorité des cas, au plus près on reste du niveau-cible, au mieux le titre sonnera une fois mis en ligne.
Le seule plateforme qui n'applique pas de normalisation est Soundcloud. La seule exigence est de laisser 1 dB TP de marge.




[ Dernière édition du message le 05/09/2020 à 18:34:30 ]

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71
Des " wave forms" c'est bien . Du son c'est mieux.

72
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Hors sujet :
Citation de Jean-Marc :
Masterisé par Bob Katz, inventeur du k-weighting qui a servi à l'élaboration du système LUFS...
Je pme permet juste une petite remarque : Inventeur du K-system, qui n'a a priori de point commun avec le K-weighting que le "K" du nom. Le K-system n'est pas rattaché à un algorithme de mesure particulier, même si il a été introduit avec la mesure VU, cf Partie VI P.7 et Partie VIII - P.14
Sinon pour le fond du message :bravo:

[ Dernière édition du message le 10/04/2021 à 21:50:04 ]

73
Citation de Danbei :
qui n'a a priori de point commun avec le K-weighting que le "K" du nom


En effet j'ai fait un raccourci inexact, merci de la correction ! Il faut dire qu'il y a matière à se tromper : k-system et k-weighting sont des dénominations proches, et les deux concepts ont entre autres pour but de proposer des outils permettant une meilleure prise en compte des courbes d'isosonie (equal loudness contour) dans les systèmes de mesure ou d'écoute.
74
Citation de laurend :
Des " wave forms" c'est bien . Du son c'est mieux.


Intéressant... A tout hasard existe-t-il une comparaison similaire avec de la musique plus dynamique/acoustique ?

[ Dernière édition du message le 10/04/2021 à 22:13:33 ]

75
Sur un titre acoustique.
76
Merci pour le lien. Je comprend que c'est toi qui a développé le concept et qui le commercialise ? Sur les exemples que tu publies le résultat est bon (même si il y a des points sur lesquels j'aurais fait différemment mais c'est aussi une question de goût, subjective). J'ai écouté quelques-uns des "crédits YouTube" et malheureusement il y a quelques titres qui ne mettent pas en valeur ton service, mais cela doit être essentiellement du à la qualité du mix.

Globalement j'entends une "couleur" générale que je retrouve sur chaque morceau, avec de la saturation et pas mal de traitement dynamique. A mon goût c'est un peu trop marqué mais il faut reconnaître que ce genre de traitement a l'avantage de fonctionner dans un grand nombre de cas. Je n'ai pas trouvé d'infos techniques sur ton site, j'aurais aimé en savoir un peu plus sur le process et notamment la partie analytique qui détermine la quantité de traitement à appliquer.

Dans la mesure ou ton offre n'est pas chère et que tu ne la présentes pas comme un service qui prétend se substituer totalement au mastering humain, je trouve que c'est légitime.
77
Les analyses sont faites sur les niveaux par fréquences, groupes de fréquences et en global. Pas de "Big Data" ici. Les résultats sont comparés à un modèle personnel qui combine "Fletcher Munson" et "ITU-R BS.1770".

Le gain est ajusté en conséquence pour chacune des 32 bandes du dé-expandeur ou "upward compression". Les valeurs d'attaque et de relâchement sont variables et indépendantes pour chaque bande de fréquence. Une fois reconstitué, le signal passe par un hybride de "soft clipper" et de limiteur avec temps d'attaque et de relâchement variables. Un "exciter" basé sur une modélisation d'étage à tube et réglé à dose homéopathique (-96 dB) est placé en amont du traitement multi-bandes. Voilà pour la technique.

Dans certains cas les distorsions déjà présentes peuvent être amplifiées. Libre à chacun de revenir sur son mixage jusqu'à obtention du résultat escompté. Voilà pour la pratique.

[ Dernière édition du message le 17/04/2021 à 12:54:47 ]

78
Super, merci pour les infos techniques.

Si ce n'est pas trop de demander, peux-tu m'expliquer de quelle façon tu intègres Fletcher Munson à ton modèle ? Vu que tu n'as aucun contrôle sur le volume auquel l'auditeur va écouter la musique, je ne comprend pas l'intérêt de prendre en compte ces courbes, qui si je ne me trompe pas représentent les variations de la perception auditive humaine en fonction des différents niveaux de pression acoustique.
79
La courbe Fletcher Munson retenue est un confortable 82 dB. Elle pondère une variable de vélocité qui participe au calcul des temps d'attaque et de relâchement du traitement multi-bandes.

Si la restitution se fait à un niveau supérieur, les basses sont légèrement suramplifiées et le rendu reste flatteur.

Quand l'audition se fait à un niveau inférieur, les basses ne sont pas à leur optimisation maximale, mais on bénéficie pleinement de la réduction de dynamique qui favorise une perception large bande.

[ Dernière édition du message le 17/04/2021 à 20:54:32 ]

80
Ok donc si je comprend bien, en gros tu joues sur la réduction de la dynamique dans les zones de fréquences les plus sujettes à variations (les fameuses courbes de F-M) pour trouver le meilleur compromis qui fonctionne à tous les niveaux d'écoute c'est ça ?