Se connecter
Se connecter

ou
Créer un compte

ou

Sujet C'est toujours les meilleurs qui s'en vont.

  • 87 réponses
  • 19 participants
  • 2 166 vues
  • 1 follower
Sujet de la discussion C'est toujours les meilleurs qui s'en vont.

Citation : Serge Reggiani, quarante années de métamorphoses

Des acteurs qui débutèrent au cinéma sous l'Occupation, Serge Reggiani, mort d'une crise cardiaque dans la nuit du jeudi 22 au vendredi 23 juillet, a été le plus étonnant par sa façon de se transformer, de dépasser les "emplois" pour créer des types, des personnages qui n'ont jamais laissé le public indifférent. Voyou et jeune premier dramatique, héros romantique et tourmenté, prolo tragique, truand de film noir, homme mûr humain, trop humain, il a traversé plus de quarante ans de cinéma français, avec une présence originale, même si son abondante filmographie comporte quelques scories. Grand comédien populaire, il a moins tourné lorsqu'il a mené, avec passion, son autre carrière de chanteur, mais la mémoire collective lui gardera une place de choix.

Né à Reggio Emilia, en Italie, le 2 mai 1922, Serge Reggiani vient vivre jeune, en France, avec ses parents. Son père est coiffeur à Paris et le destine au même métier. Mais, attiré par le monde du spectacle, il devient figurant au Châtelet et à Mogador, puis au cinéma à la veille de la guerre. Il est passé par le conservatoire et débute au théâtre, en 1940, dans Le Loup-garou de Roger Vitrac, mis en scène par Raymond Rouleau. C'est un four. Serge Reggiani retourne au cvonservatoire et décroche un premier prix de comédie et de tragédie. Il dit des poèmes au cabaret d'Agnès Capri. Il est pressenti pour le rôle principal du film Le Voyageur de la Toussaint de Louis Daquin, d'après Simenon (1942). On donne ce rôle à Jean Desailly, autre débutant, mais Reggiani en obtient un autre : celui d'un fils de famille bourgeoise, corrompu, voyou pathétique.

En 1943, il est encore un voyou, dans Le Carrefour des enfants perdus de Leo Joannon, où René Dary tente de le rééduquer. En 1945, il incarne François Villon, poète et voyou du Moyen-Age sous la direction d'André Zwobada ; il est aussi le partenaire d'Edith Piaf et d'Yves Montand (Etoile sans lumière de Marcel Blistène). Puis, il devient vedette en petite gouape criminelle des Portes de la nuit de Marcel Carné (1946). Il sera voyou, enfant perdu encore dans La Fleur de l'âge du même Carné (1947) mais le film reste inachevé. Serge Reggiani est un garçon cynique et pervers, un trafiquant de l'après-guerre dans Manon (1948), version moderne et très noire du roman de l'abbé Prévost réalisée par Henri-Georges Clouzot.

L'année suivante, André Cayatte lui fait prendre le tournant du romantisme dans Les Amants de Vérone, histoire du tournage d'un film d'après la tragédie de Shakespeare, dans l'Italie qui se relève du fascisme. Il forme avec Anouk Aimée un couple de légende et devient, presque autant que Gérard Philipe, le symbole de la génération montante. Il interprète le journaliste Rouletabille de Gaston Leroux avec un grain de romantisme, dans Le Mystère de la chambre jaune d'Henri Aisner et Le Parfum de la dame en noir, de Louis Daquin, films policiers modernes, qui s'écartent des intrigues d'origine. Son romantisme est beaucoup plus sombre dans Au royaume des cieux (1949, toujours), où Julien Duvivier fait preuve de son habituelle conception pessimiste du monde.

Serge Reggiani passe par La Ronde de Max Ophüls (1950), tourne en Italie et se transforme en menuisier 1900 épris d'une prostituée liée au monde des "apaches" des faubourgs parisiens. C'est Casque d'or, chef-d'œuvre d'abord incompris, délaissé, de Jacques Becker (1952). Superbe histoire d'amour qui se termine au pied de la guillotine. Simone Signoret et Serge Reggiani vont rester marqués par leurs personnages. Reggiani, dont le talent trop intense semble faire peur aux producteurs, ne retrouvera pas, avant longtemps, une composition aussi riche, même s'il est bien distribué dans Les Salauds vont en enfer de Robert Hossein (1955) et la nouvelle version des Misérables par Jean-Paul Le Chanois (1957). Il joue, alors, au théâtre, où il crée Les Séquestrés d'Altona de Jean-Paul Sartre.

1960 : coup sur coup, Serge Reggiani, à l'approche de la quarantaine, prend un nouveau visage, une nouvelle personnalité avec Le Guépard de Luchino Visconti et Le Doulos de Jean-Pierre Melville, où il interprète un truand ambigu, mais à la dimension humaine. Cette humanité se retrouve, dans les années qui suivent, chez Henri Verneuil (la Vingt- cinquième heure), Robert Enrico (Les Aventuriers, Les Caïds), Damiano Damiani (La Mafia fait la loi), Jean-Pierre Melville (L'Armée des ombres), et Roger Pigaut (Comptes à rebours, Trois milliards sans ascenceur). Presque tous ces films sont, pour l'acteur, des aventures d'amitié.

Marco Ferreri sait l'utiliser dans Touche pas à la femme blanche (1973) où il est stupéfiant en sorcier indien. Claude Sautet le replace dans le tragique contemporain sous-jacent, avec un des plus beaux personnages de sa maturité (Vincent, François, Paul et les autres, 1974). Serge Reggiani vieillit bien, se transforme encore une fois chez Claude Lelouch (Le Chat et la Souris, Le Bon et les Méchants, 1975).

Pourtant, l'écart se creuse entre le cinéma français et lui, comme s'il appartenait à une autre époque et qu'on le trouve encombrant. Il est remarquable, encore, dans Violette et François de Jacques Rouffio (1977) et, surtout dans La Terrasse d'Ettore Scola, cinéaste italien dont la sensibilité s'accorde à l'introspection des comportements et des sentiments. N'y avait-il plus, ensuite, de transformation possible ? Serge Reggiani se trouve comme en retrait en 1980 (L'Empreinte des géants de Robert Enrico et Fantastica de Gilles Carle). Il a fait une de ses dernières apparitions dans le premier film du jeune cinéaste Jean-Pierre Sauné : Coupe franche, sorti en février 1989.

Jacques Siclier (Le Monde du 23/07/04)



Nougaro, Ray Charles, Reggiani et j'en oublie... Le bilan est lourd cette année :((
Afficher le sujet de la discussion
81
Tiens en voyant ce topic remonter je pensais plutot à... Derrida.
82
:oops: Je l'apprends en te lisant Loop...


... Y'a pas beaucoup de place pour la philo sur AF...
83
G rare loup vin est mort :8O:
84
85
RIP Gégé :(
Encore un coup de Charleston ça :furieux:
86
Mais vous sortez ça d'où, à la fin ?
(sûrement pas de dans mon cul)
87
RIP Eddy Clébard :((
Je l'aimais bien.
88