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ArcheoMane ArcheoMane

« Pulse Modulation 156 , le premier processeur de dynamique de l'histoire du son »

Publié le 08/11/25 à 10:33
Rapport qualité/prix : Excellent
Cible : Les utilisateurs avertis
On ne présente plus EMT, fleuron allemand de l’audio professionnel.

Si la marque est universellement connue pour ses reverbs mythiques (EMT 140, 240 Goldfoil, 245/246/250 Digital Plate) et ses platines légendaires (948, 950, 981), on oublie souvent qu’elle a aussi conçu l’un des tout premiers processeurs de dynamique complets de l’histoire : le PDM 156, lancé en 1965. Bien avant le 1176, ce compresseur-limiteur-expanseur stéréo inaugurait une technologie révolutionnaire : la modulation de durée d’impulsion (Pulse Duration Modulation).

Contexte : la fin de l’ère des lampes

Au milieu des années 60, les compresseurs sont encore majoritairement à tubes : superbes, mais lents et colorés. Chez Abbey Road, le RS124 fait des merveilles sur les voix, mais peine sur les signaux rapides. EMT propose un concept radicalement nouveau : une attaque quasi instantanée, une stabilité inédite et une transparence exemplaire. Le PDM 156 impose dès lors un nouveau standard de contrôle dynamique. Rappelons que le 1176 sortira bien après...

De la régie broadcast au studio
Le 156 devient rapidement la référence absolue des chaînes de radio et de télévision européennes : dernier maillon avant la diffusion FM, présent dans les régies de l’ORTF, de la ZDF et jusque chez NRJ dans les années 90. Mais sa précision et sa musicalité le font aussi adopter par les studios : Davoust, La Grande Armée, et même les Crystal Studios de Los Angeles, où Jimi Hendrix et Stevie Wonder l’utilisent. Sa signature sonore ? Clarté, cohérence et douceur.

Plus qu’un compresseur : un processeur de dynamique complet
Le 156 ne se limite pas à la compression : c’est un système dynamique à trois étages – expansion, compression et limitation – interconnectés mais autonomes. Une architecture inédite à l’époque, ancêtre des processeurs modernes comme le GML 8900.
Il permet d’agir simultanément sur le bruit de fond, la plage dynamique et les crêtes – avec un naturel stupéfiant.

Le cœur du 156 : la modulation d’impulsions
Pas d’opto, pas de FET, pas de diodes lentes. Le contrôle de gain repose sur un amplificateur à transconductance commandé par un train d’impulsions ultrasoniques (50–100 kHz). La durée de ces impulsions varie selon le niveau RMS du signal : plus le signal est fort, plus les impulsions “on” s’allongent. Le signal audio est ainsi converti en une suite d’impulsions dont le rapport cyclique traduit la dynamique. Filtrées à la sortie, ces impulsions ajustent le gain sans déformer la forme d’onde originale.

Résultat :
- attaque : 80 µs (limiteur)
- 2–5 ms (compresseur),
- release : jusqu’à 12 s, distorsion : quasi nulle.

Une prouesse d’ingénierie qui inspirera plus tard George Massenburg.

Tests et impressions d’écoute


Branché sur un bus stéréo après un mix SSL ou ProTools, le PDM 156 impose immédiatement sa signature : une cohésion sonore, une stabilité des graves et une présence dans le médium difficile à décrire autrement que par “autorité naturelle”. L’attaque est foudroyante, mais jamais dure : les transitoires sont maîtrisées, pas écrasées.

Sur une prise de batterie acoustique, on ressent un gain de densité sans perte de respiration ; la room s’épanouit, les cymbales restent libres avec une précision dans l'aigu qui n'est jamais chirurgicale. Le haut de spectre est très intéressant parfois époustouflant : une proposition sonore inédite quand on cherche cette présence et cette clarté lumineuse dans le top. Sur une voix, la compression est élégante : elle stabilise la performance tout en conservant le grain et la respiration. En mastering, il agit comme un niveau de cohérence invisible – il resserre la matière sans jamais ternir l’image stéréo.

Le comportement du release program-dependent rappelle celui d’un vari-mu, mais avec une précision numérique avant l’heure.
C’est à la fois chirurgical et chaleureux : un paradoxe typiquement EMT. “On a la sensation d’un outil qui comprend la musique avant nous.”

Le PDM 156 n’a ni la sécheresse d’un VCA, ni la brillance d’un FET. C’est une machine crémeuse, soyeuse et étonnamment vivante. Même en forte limitation, le signal reste propre, cohérent, sans pompage ni dureté. On peut lui demander beaucoup : il reste droit, musical et incroyablement stable. Il détimbre pas. C’est le genre de compresseur qu’on oublie… jusqu’à ce qu’on le retire de la chaîne. Pourtant cette soi-disante transparence n'est pas ici synonyme d'une absence de couleur ou de grains comme dans le digital. C'est du transparent organique.

Le manuel EMT incitait les ingénieurs à tracer leurs propres courbes pour apprendre à “voir” la dynamique. C’est tout l’esprit EMT : rigueur scientifique, pédagogie et écoute sensible. Le PDM 156 est resté en service près de quarante ans, preuve de sa robustesse et de son intemporalité. On en trouvait encore sur la sortie de diffusion de NRJ à la fin des années 90.

Prise en main ?

Je terminerai par cette question bien épineuse. L’EMT 156 n’est pas une machine très intuitive quand on commence dessus. Cela lui a couté une réputation de machine chiante voire inutilisable en studio. C'est dommage car c'est totalement faux...

Mais je dois bien avouer que sa première utilisation surprend : aucun réglage de niveau d’entrée, aucun “input trim”, et pas de contrôle de sortie non plus. On peut se sentir désorienté. Surtout que le front panel n'est pas des plus aidants : le potard bleu "compresseur gain" (0 à 18 db) est même assez vicieux pour l'utilisateur débutant : je venais de payer 800 euros chez un technicien agréé en Allemagne et j'étais furieux lors des premiers tests. Le gain ne marche pas ! Oui ... et c'était normal. La réponse est sur le diagramme. Le bouton bleu contrôle en fait l'expansion du gain dans un registre allant jusqu'à -10 db environ. Au delà, il n'agit plus. Toute la chaîne de gain dépend donc du niveau qu’on lui envoie en amont. C’est à la fois déroutant et typique de l’ingénierie broadcast EMT : le 156 devait s’insérer dans un environnement parfaitement calibré, où le niveau ligne était constant (+6 dBu en Europe à l’époque).

En pratique, tout se joue sur le gain-staging : il faut soigner la tension en entrée, issue du convertisseur ou de la console, pour placer le signal dans la bonne plage de détection. Si le niveau est trop fort, le 156 écrase tout immédiatement ; trop faible, et la compression ne réagit presque pas. On “pilote” donc le comportement du processeur en ajustant l’amont, souvent via un trim de sortie ou un atténuateur passif, puis on corrige en aval pour récupérer le niveau global.

Le VU-mètre central devient alors "le" repère : il indique la réduction de gain effective et, surtout, la respiration du programme.
Le bon réglage se trouve à l’oreille, en observant la vitesse du retour d’aiguille et la stabilité du signal. Cette absence d’entrée réglable, frustrante au début, oblige à une discipline d’écoute et à une rigueur de calibration qui fait tout le charme de la machine.

Une fois comprise, la logique du 156 devient limpide : on ne “règle” pas un PDM — on dialogue avec lui.

Je conseille fortement de télécharger la documentation EMT (qui se lit en 30 minutes) et de faire les 3 petits exercices proposés en guise de tuto de préambule. C'est comme toutes les machines, une fois qu'on a compris c'est pas sorcier...

En conclusion

Le PDM 156 n’est pas seulement une pièce de musée : c’est le chaînon manquant entre les compresseurs à tubes des années 50 et les architectures RMS modernes. Une machine d’une élégance rare, à la fois technique, musicale et humaine avec une sonorité bien particulière. L'essayer c'est l'adopter ?

« C’est du PDM — et c’est magique. »