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Editorial du 13 décembre 2014 : commentaires

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Sujet de la discussion Editorial du 13 décembre 2014 : commentaires

Sacré Google : non content de travailler à ce que l’espérance de vie humaine atteigne 130 ans, le voici qui s’associe au Centre National d’Etudes Spatiales pour un nouveau projet ‘visionnaire’. De quoi s’agit-il? D’envoyer dans la stratosphère d’énormes ballons qui serviront de relais pour que tout le monde ait Internet, même dans les coins les plus reculés de la planète.

Comme l’explique Jean-Yves Le Gall, président du CNES, « plus de 5 milliards d'êtres humains ne sont pas connectés. L'objectif des 'Gafa' (Google, Amazon, Facebook, Apple) est de connecter tout le monde ». Imaginez : cinq milliards de consommateurs qui dorment et qui ne se doutent même pas qu’au lieu de vivre leur petite vie offline et low-tech, ces gros nases, ils pourraient faire des recherches sur Google pour liker des trucs sur Facebook et les acheter ensuite sur Amazon depuis leur ordinateur Apple… Cinq milliards d’insectes qui ne sont pas encore pris dans la toile et qu’on entend bien cerner pour les engourdir dans des cocons de soie…

La démarche n’a certes rien d’étonnant de la part d’un Google, mais on se demande bien ce que le CNES, a priori sous tutelle de l’état, vient faire là-dedans. On se demande surtout s’il ne se trouvait aucun historien, anthropologue ou ethnologue pour expliquer à Jean-Yves Le Gall que le projet Loon sent à plein nez l’impérialisme de la grande époque. Pourquoi? Parce qu’il se fait pour le plus grand bien de 5 milliards de personnes qui, me semble-t-il, n’ont rien demandé, ou alors extrêmement discrètement. Parce que je ne suis pas sûr, par exemple, que Wikipedia, Twitter, YouPorn ou Audiofanzine manquent au bonheur des touaregs. Parce que c’est enfin toujours de la sorte qu’on s’y est pris pour asphyxier des cultures ou éteindre des civilisations, avec la certitude arrogante que nos progrès devaient être partagés par tous : hier on donnait de l’alcool et des casinos aux Indiens d’Amérique, on distribuait des sesterces aux Gaulois, on convertissait des Péruviens au christianisme ou on installait une télé dans une hutte en pleine forêt Amazonienne. Aujourd’hui, on lance des ballons pour faire pleuvoir l’information, avec Google pour veiller à la qualité de l’eau qui irriguera ces terres arides. Il n’y aura évidemment aucune obligation pour quiconque de se connecter, argumentera benoîtement Jean-Yves. Certes Jean-Yves, certes. De même qu’il n’y a aucune obligation de boire une bouteille posée opportunément au beau milieu d’une table. Ni de goûter au fruit de l’arbre de la connaissance planté au beau milieu d'un jardin. En revanche, la seule obligation évidente, c’est d’envisager un minimum la portée d’un projet à plus ou moins long terme lorsqu’on deale avec une multinationale de ce calibre.

En tout cas, si en 2015, un renne du Père Noël se prend un ballon Google de plein fouet et que, du coup, les touaregs, les guaranis ou les pygmées ne peuvent plus checker leur mails pendant deux semaines pendant que les enfants attendent leurs cadeaux, on ne dira pas que je n’avais pas prévenu. Tout comme on vous prévient cette semaine sur la nouvelle version d’Ozone, excellente dans l’absolu, mais pas forcément indispensable pour les possesseurs de la version 5. Tout comme on vous met au parfum sur l’excellente Korg Electribe 2, ou sur les mini-basses Kala, à frettes ou fretless : de parfaits instruments pour les pygmées justement, en attendant qu’ils nous lisent…

Enfin, on n’oubliera pas de voir la suite du reportage sur Fab Dupont produisant the Arrows, et d’aller jeter un oeil au concours de mix qui bat son plein.

Sur ce, bon week et à la semaine prochaine.

Los Teignos

From Ze AudioTeam

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Le GIEC chiffre à 3,3 milliards le nombre de victimes du réchauffement climatique. On en parle ?

 

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21
Houla ! Tu as mal dormi ? c'est bien négatif comme propos ...
mais c'est assez juste sur certains points malheureusement.
Côté positif le CNES est le champion mondial du ballon aérien. Normal qu'il vende son savoir-faire ici donc.
Bonne musique.
YAC5
22
Edito pertinent, comme d'hab, éclaboussant de clairvoyance. A ceux qui ne voient que le côté positif de ce projet (accès à la connaissance, échanges humains, progrès techniques etc.), qu'ils ouvrent les yeux et voient derrière ces quelques points lumineux l'ombre de la pieuvre gigantesque, implacable machine à faire du fric qui étendra ses tentacules jusqu'aux fins fonds de l'Amazonie, non pas pour aider les indiens à garder leurs terres et leurs coutumes mais pour leur vendre du cola-coca et autres saloperies qui les rendra dépendants et accessoirement obèses...but the show must go on...
23
Merci à tous pour vos commentaires et pour la citation de Kant qui tombe à point nommé.

Citation :
Petite question néanmoins, pour tous les musiciens, ne trouvez vous pas qu'Internet et l'ensemble des services qui lui sont associés, a ouvert des perspectives fantastiques pour la production et la diffusion musicale ?


Oui en ce qui me concerne. Tout comme j'adore le Nutella. Et ce n'est pas pour ça que je dois présumer que toute la planète a besoin du Nutella, à plus forte raison quand sa consommation est mauvaise pour la santé et sa production mauvaise pour l'environnement.

Citation :
N'y a t-il personne parmi vous qui se soit plaint lorsque le débit est lent ou le réseau inaccessible dans certaines régions ?


Oui en ce qui me concerne, mais on ne parle pas de certaines régions : on parle de ballons lancés au-dessus de la forêt brésilienne notamment. Quand je suis allé en Amazonie, une des choses que j'y ai apprécié, c'était notamment de ne pas y avoir de réseau, de devoir ré-envisager mon quotidien sans ça. Et je te garantis que je n'avais pas pour autant l'impression de régresser.

Citation :
Ne vous est-il pas venu à l'esprit qu'Internet contribue au savoir, à l'éradication de grandes épidémies, bien plus qu'aucun gouvernement dans le monde n'a été capable de le faire ? Ne voyez-vous pas qu'Internet est un espace de liberté comme aucune ONG n'a su établir ?


La liberté de cet espace est très liée aux lois du gouvernement qui l'accueille : pour ne parler que de la Chine, à chaque fois que tu envoies un mail de là-bas, le gouvernement sait qui tu es, où tu es et ce que tu envoies.

Par ailleurs, j'ai 40 ans et très sincèrement, bien que la révolution des telecoms me fascine comme elle fascine toute ma génération, je ne peux pas dire, pour l'heure, qu'elle m'ait permis d'être plus heureux ou plus malheureux. Je lui dois mon travail et d'avoir rencontré quantité de gens intéressants, et je lui dois d'avoir vu ou lu 1001 choses passionnantes. Comme je lui dois d'avoir vu Daniel Pearl se faire décapiter ou Loana et Jean Edouard baiser dans une piscine. Oui, Internet permet aux scientifiques de mieux collaborer, mais il permet aussi au crime de mieux s'organiser. Contribue-t-il au savoir? Oui, comme à l'inculture également car sur Internet comme dans la vraie vie, c'est celui qui crie le plus fort qui a raison. Avec son petit jeu du référencement et en soutenant l'idée que la vérité est statistique, Google contribue notamment à cet état de fait. Si six milliards de gens écrivaient sur leur blog que la terre est plate, alors Wikipedia dirait que la Terre est plate. Et comme Google part du principe que tout ce que dit Wikipedia est vrai comme en atteste la préférence qu'il donne à cette encyclopédie participative dans ses résultats de recherche, je te laisse imaginer ce que nous avons gagné depuis l'époque de Galilée.

Citation :
Est-il si scandaleux que tout cela soit financé par de la publicité ?


Non dans un référentiel occidental, à plus forte raison quand c'est le seul modèle viable que l'on ait trouvé pour l'heure. Il existe une offre sans Pub sur Audiofanzine, sur un système d'abonnement et, bien que nombreux soient ceux qui n'aiment pas la pub, notre offre ne connait pas un succès démesuré. J'en déduis donc que la 'gratuité sponsorisée' convient au plus grand nombre.

Préféreriez-vous que cela vienne de nos impôts lorsque l'on constate la gabegie avec laquelle l'Etat dépense notre argent ?
Ben justement, ça vient de nos impôts vu que le CNES est partie prenante du projet, ce que pointe l'édito : Google fait son Google, on y est habitué, il veut terraformer le monde pour l' "améliorer", mais je serais curieux de savoir, alors que l'Europe envisage précisément de scinder l'entreprise américaine en plusieurs entités, pourquoi, en France, aucun politique ne s'est exprimé sur cet usage de nos impôts et sur les implications politiques de ce projet.

Citation :
Seulement voilà, tellement facile de critiquer le grand méchant loup...

Tellement facile aussi de le défendre. Laisse moi te raconter deux histoires.

La première se passe en Guyane française. A l'origine, il y avait là-bas, dans la forêt, des amérindiens qui vivaient de la chasse et de la cueillette, en parfaite osmose avec leur environnement, avec leur propre culture, leur propre langue... Sans le savoir pourtant, du fait de la colonisation, ils étaient en France, soumis aux lois et au droit français. De fait, dans notre grande générosité et tellement persuadés que nous devions diffuser notre progrès, nous leur avons apporté l'électricité via un générateur électrique à essence, ainsi qu'une télé. Et parce que ces citoyens français étaient 'sans emploi' et en 'situation précaire' selon nos critères, nous leur avons aussi versé un RMI. Cette histoire, je la tiens d'un ami ingénieur pour l'ADEME et qui est chargé d'aller en réserve amérindienne pour leur expliquer comment faire du tri sélectif pour la collecte des déchets (précisons qu'avant de nous connaître, leurs déchets étaient tous biodégradables)... A quoi sert le RMI là-bas? A acheter de la gnôle, essentiellement, ou des babioles occidentales. Et les hommes de la forêt, petit à petit, deviennent des occidentaux, perdant au passage cette connaissance de la forêt qui dépassait de très loin la nôtre.

Autre histoire, toujours en 'France' : la Nouvelle Calédonie. Il y avait là-bas un peuple de pêcheurs mélanésiens qui vivaient paisiblement des ressources d'un lagon... jusqu'à ce qu'une multinationale décide d'extraire le Nickel en amont de ce dernier, engendrant une pollution détruisant l'un des plus précieux écosystèmes de la planète. Le plus drôle, pour avoir vu un reportage sur le sujet, c'était de voir l'argumentaire de la multinationale et des officiels français pour convaincre les pêcheurs d'accépter cette usine : "grâce à cela, vous aurez du travail! Des maisons!". Sauf que les pêcheurs ne voulaient ni travail ni maison, ils voulaient juste continuer de vivre comme depuis deux millénaires grâce à un lagon qui assurait leur survie. Et l'usine s'est installée donc. Et les enfants de ces mecs qui vivaient très bien connaissent désormais les 'joies' du travail, les 'joies' d'une maison. Et il connaîtront du coup aussi les affres du chômage et tout ce qui va avec... Et on est très fier dans nos médias de montrer le 'développement' économique de la Nouvelle Calédonie...

Bref, mon propos n'est pas de dire que Google est méchant : Google n'est pas plus méchant qu'une bactérie qui cherche à se nourrir pour se développer. Mon propos est de dire que ce n'est pas à une bactérie de choisir pour 5 milliards de personnes, pas plus qu'à l'état français, car c'est bien cela l'impérialisme et que c'est précisément là-dessus que nous avons bâti notre suprématie : en choisissant ce qui est bon pour les autres. Evidemment qu'Internet apporte des choses intéressantes (tout comme des choses inintéressantes ou dangereuses : des photos de chat et des plans de bombes), et évidemment qu'il n'y a pas que des chasseurs-cueilleurs parmi les 5 milliards concernés, mais ne soyons pas condescendants : si ces gens voulaient Internet, ils l'auraient parce qu'ils ne sont pas moins doués que nous. Laissons-leur l'initiative plutôt que de les coloniser.

En Allemagne, le peuple s'est mobilisé pour que le gouvernement refuse Google Street View que Google avait pris la liberté de faire sans même consulter personne. Comme il l'a fait en France : perso, je ne veux pas de Google Street View. Ai-je eu voix au chapitre? Non. Je suis également inquiet du deal entre Google et Wikipédia et ce qu'il implique en terme de diffusion de la connaissance : un de nos députés ou ministre a-t-il jamais soulevé la question? Non. Le fait est que Google a la bride sur le cou, tout comme Facebook, Amazon, Apple, Microsoft, Twitter, Wikipedia et les législateurs ne font que réagir à des initiatives qui ne s'inscrivent que dans une stratégie commerciale et non dans une politique responsable décidée par les états et les peuples... A la fin, je ne suis même pas contre ces ballons, je suis surtout contre le fait que Google et le CNES prennent cette initiative comme si le monde était leur jardin.

Perso, si un inconnu rentrait chez moi pour me cuisiner une blanquette de veau, si succulente que soit cette dernière, je n'en trouverais pas moins la démarche parfaitement déplacée. Google, comme à son habitude, entre et prend ses aises. Et le CNES lui porte ses valises.

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Le GIEC chiffre à 3,3 milliards le nombre de victimes du réchauffement climatique. On en parle ?

 

[ Dernière édition du message le 13/12/2014 à 14:20:53 ]

24
Nutella, blanquette de veau... encore un spéciste ?

car à bien y regarder, qu'y a-t'il de différent entre l'affreux Google qui tisse sa toile sur la planète (merci pour le spécisme encore une fois et d'utiliser l'analogie avec l'araignée, c'est vrai qu'elle est méchante celle-là brrr, elle ne devrait pas exister*)et celui qui bouffe son Nutella (dont l'huile de palme est responsable de déforestation massive, de pollution donc, et de rejet de GES dans l'atmosphère) et sa blanquette de veau ?

Oui qu'y a t-il de différent entre un individu à la bien-pensance dégoulinante, qui prétend mieux savoir que les autres quels sont les droits fondamentaux des humains et qui s'en carre des droits fondamentaux des espèces et de la Planète en étant complice de la souffrance animale et de la pollution, et Google qui veut en faire de même avec les humains ?

Aucune.

Moralité: balayez devant votre porte.

Mais vous pouvez tout aussi bien piétiner ce que j'en pense, ce que vous allez faire sans nul doute, avec... vos chaussures en cuir.

Ah... qu'il est bon et rassurant d'être spéciste dans le confort occidental.

Quand on est mort, on sait pas qu'on est mort c'est difficile seulement pour les autres.

 

C'est pareil quand on est con...

25
Los à moelle !
Merci à toi, Los Teignos, éditorialiste intelligent (Los à moelle ?), plume agile, qui questionne, qui doute, sans péter plus haut que son caisson basse. Merci à toi, quand tu es inspiré comme aujourd'hui, sais-tu que je fais lire ton petit chapitre à mes proches ?

Mais bon, comme tu es musicien, j'imagine que pour tes superbes éditos, tu dois être payé au black avec un coup de pied dans eul cul ! (Au demeurant, c'est peut-être là que tu ranges ta plume)
26
J'ai lu comme toujours avec plaisir l'édito. Une seule phrase m'a fait tiquer :

Citation :
On se demande surtout s’il ne se trouvait aucun historien, anthropologue ou ethnologue pour expliquer à Jean-Yves Le Gall que le projet Loon sent à plein nez l’impérialisme de la grande époque.


Il y a bien dû y en avoir, soyons-en certains. Seulement, leur parole est tellement méprisée que personne ne l'entend - parce qu'il n'y a plus grand monde qui veuille l'entendre. Elle est perdue au milieu de la grande clameur de tous ceux qui, et au premier chef chez nos dirigeants, n'ont plus d'autre "vision" pour demain que la recherche du moyen de faire toujours plus d'argent. Plus rien d'autre n'a d'importance que la quête du profit, de la croissance, du confort matériel ; travailler toujours plus, être toujours plus compétitifs, consommer davantage, etc. : c'est la seule définition de la vie qu'aient désormais nos sociétés orweliennes, et les quelques voix qui s'élèvent contre ça sont aussitôt vouées aux gémonies, accusées de véhiculer des utopies mortifères déconnectées du réel.

Des gens qui tâchent de mettre un peu à distance le monde terrible que nous créons, ce n'est pas ce qui manque. Ils sont au milieu du monde, ils crient au milieu de la foule qui n'entend même pas les hurlements, comme s'ils étaient muets.
27
Citation :
Nutella, blanquette de veau... encore un spéciste ?

car à bien y regarder, qu'y a-t'il de différent entre l'affreux Google qui tisse sa toile sur la planète (merci pour le spécisme encore une fois et d'utiliser l'analogie avec l'araignée, c'est vrai qu'elle est méchante celle-là brrr, elle ne devrait pas exister*)et celui qui bouffe son Nutella (dont l'huile de palme est responsable de déforestation massive, de pollution donc, et de rejet de GES dans l'atmosphère) et sa blanquette de veau ?

Oui qu'y a t-il de différent entre un individu à la bien-pensance dégoulinante, qui prétend mieux savoir que les autres quels sont les droits fondamentaux des humains et qui s'en carre des droits fondamentaux des espèces et de la Planète en étant complice de la souffrance animale et de la pollution, et Google qui veut en faire de même avec les humains ?

Aucune.

Moralité: balayez devant votre porte.

Mais vous pouvez tout aussi bien piétiner ce que j'en pense, ce que vous allez faire sans nul doute, avec... vos chaussures en cuir.

Ah... qu'il est bon et rassurant d'être spéciste dans le confort occidental.


Merci de m'apprendre le mot 'spéciste'. ;)

Si j'ai bien compris, ce qui ruine mon argumentaire, c'est de ne pas être végétalien, c'est ça? Et de ne pas envisager la problématique de l'information et des télécoms au niveau du règne animal? De ne pas ramener l'entreprise Loon au seul problème environnemental?

Je le confesse donc : j'ai deux paires de chaussures, une en cuir, une en synthétique, et je mange occasionnellement du Nutella comme de la blanquette. Un vrai criminel de guerre, hein, même si ça ne m'empêche pas d'avoir dans mon quotidien quelques gestes pour l'environnement et de ne pas maltraiter les animaux qu'ils s'agisse de mon chat ou des fourmis et araignées de mon jardin. Nul n'est parfait.

Citation :
qu'y a t-il de différent entre un individu à la bien-pensance dégoulinante, qui prétend mieux savoir que les autres quels sont les droits fondamentaux des humains et qui s'en carre des droits fondamentaux des espèces et de la Planète en étant complice de la souffrance animale et de la pollution, et Google qui veut en faire de même avec les humains ?


Une différence d'échelle déjà : j'ai beau savoir que qui mange un oeuf mange un boeuf et bien-penser en dégoulinant, il me faut rester humble. Google a beaucoup plus d'influence sur le monde que moi, et ses choix sont beaucoup plus impliquants que les miens en terme de politique comme d'environnement, que ce soit pour les hommes ou le règne animal. Je pourrais manger du Nutella sans discontinuer tout le reste de ma vie que je ne déforesterais pas autant que Google en un mois. Juste pour le rappeler, en matière d'électricité, une simple requête sur Google équivaut à allumer une ampoule pendant une heure. Or des requêtes, il s'en fait des millions par seconde.

Je ne m'en carre pas sinon du droit des espèces ou de la pollution, pas plus que toi d'ailleurs si l'on considère que les ordinateurs qui nous permettent d'avoir cette conversation contiennent quantité de plastiques et de métaux lourds dont l'extraction comme le retraitement sont extrêmement problématiques sur le plan environnemental. Ne m'en veux pas donc, voisin de pallier, si je profite de balayer devant ma porte pour balayer devant la tienne. ;)

Enfin, en y réfléchissant, je m'interroge sur ton accusation de spécisme qui ne me semble pas exacte et mal à propos. Avec toutes mes contradictions que tu relèves, je ne suis pas insensible à la souffrance animale (merci pour le reportage) ni ne pense l'homme meilleur animal que les autres, mais il est vrai qu'à la fin je privilégie la considération de mon espèce, comme chaque représentant d'une espèce le fait, et sans doute toi le premier : ce qui importe à mon chat, ce sont les chats, aux fourmis les fourmis, aux oiseaux les oiseaux. Je ne crois pas qu'une vache ne se soit jamais posé de questions sur la couche d'ozone avant d'émettre du méthane, ou qu'un requin se soit demandé s'il n'était pas en train de manger le dernier représentant d'une espèce de poisson avant de le manger. Bref, je ne sais pas si cette façon de voir fait de moi un spéciste. Si c'est le cas, ça me va et j'aurais appris quelque chose sur moi aujourd'hui.

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[ Dernière édition du message le 13/12/2014 à 14:14:15 ]

28
Citation :
ce n'est pas parce que nous nous servons essentiellement d'Internet pour des futilités qu'il faut d'office tourner le dos à la formidable possibilité que constitue 7 milliards d'êtres humains interconnectés qui pourraient librement communiquer avec des gens qu'ils n'auraient par ailleurs jamais pu rencontrer.


En quelle langue ?icon_facepalm.gif

Don't give me time, give me deadlines

 

Archive de mon site de Ressources 1999-2017

29
Citation :
En quelle langue ?


Ca nous renvoie effectivement à la mythique tour de Babel. Au MIT, on bosse sur le fait d'utiliser les téléphones mobiles comme traducteurs instantanés, ce qui permettrait de pouvoir échanger avec n'importe qui en ne parlant qu'une seule langue.

Ce qui nous dispenserait d'apprendre des langues étrangères, et donc de découvrir de la sorte d'autres façons de voir ou de penser le monde, car c'est bien de cela que la langue est dépositaire. Curieusement, ce projet qui simplifierait la communication entre les hommes devrait donc également les éloigner les uns des autres... :|

Citation :
la formidable possibilité que constitue 7 milliards d'êtres humains interconnectés qui pourraient librement communiquer avec des gens qu'ils n'auraient par ailleurs jamais pu rencontrer.


La question du formidable se pose vraiment. A supposer que cela soit possible, quelle est la nécessité de s'assurer que toutes les particules d'une même humanité puisse être concomitantes? Quel est le but poursuivi? S'agit-il d'être plus heureux, plus productifs, plus en sécurité, plus intelligents? Je ne tire aucune conclusion sur le sujet mais je pense que le point de vue occidental selon lequel la communication est toujours une bonne chose peut se discuter, surtout dans la mesure où cette concomitance tendra à globaliser les culture : voulons-nous vraiment que les Guaranis dansent sur Gangnam Style et qu'il délaissent leur tradition orale au profit de notre tradition écrite (car c'est aussi de cela qu'il s'agit, imposer l'écriture alors que dans quantité d'endroits dans le monde, l'oralité demeure le vecteur culturel). A l'heure actuelle, grâce au Net, chacun a un pouvoir d'expression et tout le monde peut prendre la parole. Qu'observe-t-on? Une saturation du silence, un bruit global dont n'émerge à la fin aucune parole. Ne sommes nous pas ridicule, vus de loin, avec nos tweets et nos SMS pour dire qu'on rentre bientôt, qu'on passe sous un tunnel ou qu'on a adoré telle page web?

Chaque seconde qui passe sur Youtube, il se publie par exemple une heure de vidéo. Ca veut dire 5 mois de vidéo en une journée, et 152 ans de vidéo par an si mes calculs sont exacts : quel est le bénéfice d'une telle production? Quel est le bénéfice de la multiplier encore en s'assurant que toute la planète participe? Qu'est ce que cela a de fondamentalement formidable et de bénéfique pour l'humanité et, au delà, pour la planète?

Je le dis : aucune conclusion de ma part, juste des questions que j'aurais aimé voir en amont du projet Loon.

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[ Dernière édition du message le 13/12/2014 à 14:50:13 ]

30
Citation :
de Los Teignos
Mon propos est de dire que ce n'est pas à une bactérie de choisir pour 5 milliards de personnes, pas plus qu'à l'état français, car c'est bien cela l'impérialisme et que c'est précisément là-dessus que nous avons bâti notre suprématie : en choisissant ce qui est bon pour les autres.


Voilà le coeur du sujet que tu voulais pointer, je crois, comme le confirme tes réponses. Mais la vision impérialiste (ou néo-colonialiste) du monde est gravement et profondément implantée chez les occidentaux, et chez les français en particulier. On célèbre toujours notre Jules Ferry national, omettant qu'il fut un farouche promoteur de la colonisation (en particulier de l'ex-Indochine où j'ai vécu plus de dix ans) sous le prétexte que " La France devait apporter ses Lumières à ces peuples sauvages et incultes. " Oui l'école publique, laïque et gratuite était un bien pour les petits français de la fin du XIX, mais je doute qu'elle fut aussi indispensable à un petit paysan khmer ou lao à qui on rentrait de force que ses ancêtres étaient les gaulois. Et on sait les bienfaits qui en découlèrent pour toute la région, de la guerre d'Indochine à celle du Vietnam (30ans), de l'Agent Orange (produit par Monsanto) à Pol Pot (formé en Sorbonne) et ses deux millions de martyrs. Bienfaits de la Civilisation, Amen.
Je n'ai personnellement rien trouvé de plus navrant que les belles maisons sur pilotis de bambous des campagnes vietnamiennes d'où émergeait une antenne de télé, oiseau sinistre du désespoir, qui, comme "fenêtre sur le monde" se résumait à la propagande du Parti, aux feuilletons thaïs sirupeux et aux publicités pour les Honda Dream.
Le projet Google ne vise probablement qu' à toucher une "audience" plus large, entendons un réservoir de plusieurs milliards de consommateurs potentiels qu'il est tout de même impensable de laisser plus longtemps éloignés des incommensurables bienfait de la Très Sainte Consommation.
Et puis quoi, comment feront les millions de touristes appeler à parcourir les sentiers près des chutes de Vang Tien pour relever leurs mails, se faire conseiller une "auberge typique" ou le vendeur de souvenirs lao le plus proche, hein ?


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[ Dernière édition du message le 13/12/2014 à 14:57:38 ]