Le concepteur berlino-hong-kongais Soundbrenner tente de se faire une place sur le marché du métronome avec un modèle qui vibre et se porte comme une montre, accompagné d’une application mobile. Alors, révolution ou gadget ?
Outil indispensable à tout musicien, du pianiste en herbe qui fait ses gammes au batteur pro en live en passant par le guitariste et le chanteur en studio, le métronome se cantonne depuis des décennies à faire résonner son « bip-bip-bip-bip » ou son « tic-tac-tac-tac » dans nos oreilles. Même s’il reste des adeptes du modèle mécanique, celui-ci a largement laissé sa place aux petits boîtiers numériques dans les housses des musiciens. Mais si à la maison le métronome peut se poser devant soi sans trop gêner, sur scène ou en studio un casque devient indispensable, coupant ainsi le musicien de ce qui l’entoure. Soundbrenner tente de résoudre ce délicat problème et a développé un métronome à pulsations agrémenté de repères visuels et d’une appli pour mobile. C’est parti pour un tour du propriétaire.
Déboîtage
C’est une belle boîte en carton rigide bien dessinée qui nous a été livrée. À l’intérieur, le gros cadrant noir tout en plastique de 50 mm de diamètre pour 32 grammes sur notre balance de cuisine, deux bracelets en silicone de longueurs différentes dans lesquels s’insère le métronome à pulsations, comme une montre, le chargeur micro-USB sous la forme d’une base aimantée de la même forme et taille que le Pulse avec un câble tissé, et le guide d’utilisation multilingue, dont le français, chouette !
Si l’installation du Pulse dans son bracelet est simple, et le petit appareil bien sécurisé (vous pouvez y aller, il ne risque pas de tomber, même sur sa base de chargement aimantée), retirer la bête s’avère un peu plus ardu, et l’on se demande quelle sera la résistance dans le temps des bracelets en silicone si l’on doit changer de configuration régulièrement. Le premier bracelet sert à installer le Pulse autour du poignet, le second plus haut autour du biceps. Un troisième, élastique cette fois, est proposé en option pour fixer le Pulse sur la cuisse ou le torse.
Le Pulse est un gros bouton noir présentant un anneau rotatif cranté multicolore et en son centre, le logo de Soundbrenner lui aussi multicolore (de la même couleur que l’anneau). La partie centrale est tactile et multitouch, il vous faudra tourner l’anneau d’un quart de tour et poser deux doigts au centre pour l’allumer, taper en rythme avec un doigt pour définir le tempo (tap tempo donc), taper rapidement deux fois pour arrêter ou relancer le métronome… Le tempo se règle aussi en tournant l’anneau et l’ajustement se fait en temps réel, pas besoin de l’arrêter et de le relancer. La première chose qui saute aux yeux, c’est l’intensité de l’illumination de la bête, autant vous dire que le Pulse n’est pas discret. Heureusement, vous pouvez désactiver l’éclairage si vous le souhaitez via l’appli. Premier défaut, rien n’indique sur le Pulse lui-même le tempo. Là aussi il faudra passer par l’appli.
Ni une ni deux, dégainons notre smartphone…
Applicage
Soundbrenner fournit donc avec son Pulse une application baptisée Metronome, disponible sur iOS et Android et bien traduite en français, merci. Elle communique avec le Pulse via Bluetooth, un indicateur montre d’ailleurs le niveau de charge de la batterie. Si vous êtes du genre à vous promener sur scène, nous vous recommandons de ne pas trop vous éloigner de votre smartphone ou tablette, la connexion coupe après seulement quelques mètres.
Création de compte et mise à jour du firmware du Pulse terminés (après quelques essais, le Pulse s’est déconnecté inopinément plusieurs fois au moment de l’installation), voilà donc notre montre haptique connectée. Sachez que l’appli n’a pas besoin d’un Pulse pour fonctionner, vous pouvez donc l’utiliser dès que vous en avez besoin sans sortir l’artillerie. À l’inverse, vous pouvez utiliser le Pulse sans l’appli, mais nous n’aurez pas accès à toutes les options et ne pourrez que régler le tempo.
Rendez-vous tout d’abord dans l’onglet Paramètres, où vous pourrez régler tout un tas de… paramètres (il y en a deux qui dorment au fond) pour votre Pulse et l’appli : choisir la couleur de l’illumination, avec un mode incolore, blanc, vert, bleu, rose, trois niveaux d’intensité dont la différence ne saute pas aux yeux en plein jour mais se note dans l’obscurité, et la possibilité d’attribuer une couleur différente aux accents ; configurer les pulsations, avec trois niveaux d’intensité avec neuf courbes de durée et trois types d’accent, sans oublier le mode Insensé, à vos risques et périls, régler le son (vous pouvez toujours profiter du tic-tac-tac-tac si cela vous chante) avec un choix d’instruments et de kits pour chaque accent, le niveau de volume, etc. Chacune des fonctions peut être activée et désactivée séparément, vous pourrez donc combiner sensations, bruit et lumière pour être sûr(e) de ne rater aucun temps.
Vous profitez aussi d’un décompte vocal (avec une belle voix féminine), de la connexion à Ableton Link, vous pourrez même faire clignoter l’écran ou le flash de la caméra (arrière seulement) de votre smartphone en rythme pour une meilleure aide visuelle, ou encore assigner des fonctions à une éventuelle pédale connectée (tap tempo, morceau suivant, augmenter ou réduire le tempo, arrêter ou lancer la lecture). L’appli gère également des messages MIDI en envoi et en réception, via WiFi, Bluetooth et entre applications sur le dispositif mobile (merci Audiobus). Soundbrenner n’envisageant pas de développer un plug-in, le support du MIDI sans fil vous donne néanmoins la possibilité d’utiliser le Pulse avec votre STAN ou d’autres logiciels, sympa. Enfin, une fonction permet de ne pas mettre votre smartphone ou tablette en veille durant l’application, ce qui peut éviter bien des surprises.
L’application peut communiquer avec jusqu’à cinq métronomes Pulse simultanément, l’appairage se faisant d’un tap sur l’écran. Vous pourrez même renommer les Pulse pour retrouver Polo. Nous n’avions qu’un seul Pulse sous la main, nous n’avons donc pas pu juger du bon fonctionnement lorsque Polo, Bébert et Nénette sont appairés.
Une fois les réglages effectués, direction la page Lecteur où vous passerez tout votre temps. Vous retrouvez la petite roue graphique du Pulse, avec l’affichage du tempo (ouf), à gérer via un glisser vers le haut, le bas, la droite ou la gauche pour augmenter ou décroitre le BPM entre 20 et 400 BPM ; un petit bouton pour lancer la lecture, un autre pour le tap tempo, mais celui-ci peut aussi être géré directement sur la roue, ce qui lance la lecture par la même occasion.
Par défaut, le métronome est réglé à la noire et en 4/4, mais vous pourrez choisir parmi un grand nombre de signatures rythmiques et de divisions, du 1/1 au 16/8 et pas moins de quinze divisions, chaque changement se faisant à la volée. Petite attention sympathique à l’attention de ceux qui jouent avec des partitions, le nom des rythmes s’affiche en italien au-dessus du tempo.
Ces changements affectent la partie supérieure de l’écran, où les temps sont représentés par des petits cadres qui clignotent en rythme et avec les mêmes couleurs que sur le Pulse. Un dernier bouton vous servira à définir, si besoin, le temps (jusqu’à 59 minutes et 59 secondes) ou le nombre de mesures (jusqu’à cent) du morceau. Car l’application vous permet de sauvegarder des configurations de morceaux, et même créer des setlists que vous stockerez dans une « bibliothèque », idéal quand vous devez préparer vos concerts.
Notez que Soundbrenner travaille en permanence sur son application et propose très régulièrement de nouvelles fonctionnalités et améliorations. Encore un bon point.
Voilà, tout est réglé et prêt, les musiciens aussi, allons tester la bête…
Testage
Premier essai avec le petit bracelet et le Pulse installé sur la partie extérieure du poignet : la surface vibratoire n’était pas entièrement appuyée contre la peau, je ne ressentais donc pas une partie des pulsations. Direction l’intérieur du poignet et là, c’est beaucoup mieux mais je sens rapidement que mes nerfs sont à fleur de peau, et ce littéralement puisque la peau est très fine à cet endroit. Changement de bracelet et installation du Pulse contre mon un-peu-plus-gros biceps, c’est plus confortable mais pas idéal. Retour au petit bracelet mais cette fois plus haut sur l’avant-bras et côté interne, c’est beaucoup mieux. Les premières minutes sont assez déroutantes, il faut de l’attention pour arriver à bien ressentir et suivre le rythme, mais on s’y fait assez vite… sans la musique.
Je précise tout de suite que j’ai d’emblée testé le Pulse, au chant, lors d’une répétition en groupe. Lorsque je suis derrière le micro, j’ai tendance à pas mal bouger les bras, et très rapidement, j’ai cessé de ressentir les pulsations pendant que je chantais, comme si je l’oubliais. Il me fallait me reconcentrer entre les phrases sur les pulsations pour pouvoir bien les sentir à nouveau et donc savoir si nous avions dévié ou non. La même chose m’arrive parfois avec le métronome auditif, donc je ne me formalise pas, mais il m’est plus difficile de retrouver le tempo. Pour m’ôter tout doute, je monte l’intensité du métronome au maximum. Pour être honnête, je n’ai pas senti de grosse différence entre les intensités les plus basse et élevée et dans le rythme de la musique, l’accent se fait moins sentir. De même, je n’ai pas constaté de grande différence entre les types de pulsation et pourtant ils sont nombreux et variés. Pire, les pulsations ont fini par titiller mes nerfs, m’obligeant à l’arrêter. Dans son manuel, Soundbrenner met en garde les utilisateurs ayant des maladies du cœur ou des nerfs, et déconseille l’utilisation du Pulse sur des personnes équipées de pacemakers…
Par contre, l’illumination a servi à tous les autres musiciens qui se calaient bien sur les flashes colorés, parfois au détriment du batteur, le pauvre… Si cela peut être pratique en répétition, je ne me vois pas déambuler sur scène avec ce truc flashy, à moins d’avoir le costume qui va avec.
Une fois ma première impression faite, j’ai installé le Pulse autour du bras du batteur habitué à jouer avec un clic au casque. Il a utilisé le Pulse autour du poignet, du bras, de la cuisse, sur le torse et au niveau de l’omoplate avec le Body Strap, sur plusieurs morceaux et a abouti au même résultat : très vite, les pulsations ne sont plus ressenties. Notre verdict : pas assez puissant, une impression d’ailleurs souvent décrite dans les forums et les avis d’autres utilisateurs sur différents sites. Néanmoins, il a apprécié de pouvoir placer le Pulse sur son pupitre pour profiter des clignotements.
Retour à la maison pour travailler la guitare, et là encore il m’a fallu un peu de temps pour trouver l’emplacement et la configuration adéquats pour profiter pleinement du Pulse : installé sur le poignet gauche (je suis droitière), je perds vite les sensations vibratoires quand je change d’accord ou me déplace sur le manche, mais je me repère mieux avec le clignotement coloré. Transfert au poignet droit, avec une longue pulsation pour indiquer le premier temps, tout va beaucoup mieux et ma main (et le reste) suit assez instinctivement les pulsations, aussi bien en accords qu’en arpèges. En résumé, n’hésitez pas à tester différentes positions et configurations.
Une dernière remarque concernant l’autonomie du Pulse, qui est, du moins en son début de vie, assez remarquable. Après 3 répétitions et plusieurs heures d’utilisation plutôt intensives pour ce test, je n’ai eu besoin de la recharger qu’une seule fois et cela a pris moins d’une heure. Malheureusement, rien ne semble fait pour pouvoir la remplacer lorsque viendra son heure, encore une fois, nos chers fabricants pensent que sommes toujours à l’ère du jetable…
Conclusage
Je double-tape de fin sur le Soundbrenner Pulse en profitant d’une dernière vibration, mais avec un avis assez mitigé. Le fabricant nous promettait une nouvelle manière de suivre le rythme en mettant l’accent sur l’aspect vibratoire, c’est finalement l’aspect qui m’a le moins convaincue, tout du moins pour jouer en groupe. Pour s’entrainer seul(e) à la maison, sans avoir à subir les « bip-bip » des métronomes numériques sonores qui ont vite fait de rendre à moitié fou (ou folle), et une fois que l’on a trouvé l’emplacement qui convient le mieux, le Pulse est très agréable, léger et pas fatigant. De plus, l’option lumineuse est aussi très bien faite, avec ses couleurs différentes pour les accents, sans oublier l’application pour smartphones et tablettes iOS et Android ultra-complète qui peut fonctionner de manière autonome.
Cela vaut-il pour autant la peine de débourser 99 $ (118 $ avec le Body Strap) ? Je ne peux que vous recommander vivement de tester le Pulse car c’est une expérience différente qui ne conviendra probablement pas à tous. Pour ma part, j’ai remisé mon vieux Korg gris et ses bip-bip insupportables.