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Sujet Editorial du 14 mars 2015 : commentaires

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Sujet de la discussion Editorial du 14 mars 2015 : commentaires

Souvenez-vous : en août 2013, Robin Thicke est accusé de plagiat par les héritiers de Marvin Gaye qui jugent que son Blurred Lines pompe allégrement le célèbre Got to give it up. Presque deux ans, plus tard, le verdict est tombé et, contre toute attente, il leur donne raison.

On a beau savoir que, dans ce genre d’affaires, la loi se range le plus souvent du côté des meilleurs avocats plutôt que du côté de ce qui est juste, la chose n’en est pas moins inquiétante. Car si Thicke est tombé pour Blurred Lines, des centaines voire des milliers d’autres pourraient tomber. Il n’y a par exemple rien qui ressemble plus à la discographie pentatonique d’AC/DC que celle d’Airbourne, tandis qu’on pourrait trouver bien des similitudes entre les chansons de Whitney Houston, celles de Mariah Carrey et les cinq prochains albums de Lara Fabian ou Céline Dion. A mieux y regarder, il ne fait en outre aucun doute qu’en se référant à des Nick Drake, des Randy Newman ou des Cole Porter en plus des Stones ou des Beatles, on devrait pouvoir poursuivre quelques milliers d’artistes pour quelques centaines de millions de dollars… Je ne donne pas cher non plus de la scène électro internationale si les héritiers de Stockhausen et de ses copains réclamaient leur tribut…

Et tandis qu’on nous présente avec toujours autant de zèle le piratage comme le fléau ruinant la pauvre industrie du disque, on passe sous silence ce cancer qui ronge la musique tout court et qui fait le beurre de cette même industrie, comme celui des héritiers d’illustres artistes : la cession et le leg du droit d’auteur. Un dispositif grâce auquel un créateur est éminemment plus rentable mort que vivant, et qui permet à toute une vermine de vivre sur la charogne d’un génie. Un dispositif artisticide à cause duquel, désormais, il conviendra de faire bien attention à ne pas sonner un peu trop comme untel ou comme unetelle sous peine d’être traîné devant les tribunaux.

Tristement assassiné par son père, Marvin Gaye aura au moins ce privilège de ne pas avoir vu ses propres enfants assassiner la dynamique même de la création, tout comme le patrimoine qu’il leur a laissé, à eux autant qu'à ses pairs les musiciens, pour qu'ils le fassent vivre. Car sincèrement, après une si méprisable démarche, on n’en voudrait à personne de ne plus acheter les disques du grand Marvin, si brillants qu’ils soient.

Et fort heureusement pour ceux d’entre nous qui ne peuvent pas se payer le luxe d’un procès, les bancs d’essai de la semaine ne poussent pas forcément vers la soul mais plutôt vers le folk et le rock avec l’excellent Session Guitarist Strummed Acoustic de Native Instruments, vers le symphonique avec le splendide Capriccio de Sonokinetic, et vers le gros rock avec la superbe pédale Kraken Fuzz Overdrive.

Sur ce, bon week et à la semaine prochaine.

Los Teignos

From Ze AudioTeam

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Le GIEC chiffre à 3,3 milliards le nombre de victimes du réchauffement climatique. On en parle ?

 

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31
Citation :
Je suis catégoriquement contre le leg et la cession du droit d'auteur et c'est tout le sens du visuel qui accompagne cet édito, montrant Cain tuant Abel. De mon point de vue, Robin Thicke comme nous tous sommes des héritiers culturels tout aussi légitimes que ne le sont ses propres enfants. Qu'il leur lègue sa fortune et ses biens est une chose, mais à la mort d'un artiste, les droits d'auteurs devraient automatiquement tomber dans le domaine public.


Je ne suis pas totalement d'accord avec cette vision.
En effet l'artiste est un artisan également et on peut comprendre que le travail artistique d'une vie puisse se faire au bénéfice de la famille de l'artiste. De son vivant et aussi après.
Quand un riche entrepreneur fait en sorte que sa famille bénéficie directement du fruit de son travail après sa mort, il est dans son plein droit moral également.
Nous sommes peut être tous des héritiers spirituels de John Lennon mais il me semble normal que le monde entier ne soit pas inclus dans sa succession, sauf s'il l'avait voulu et signifié de son vivant.
32
Tout ça nous ramène à une histoire de fric, le fric c'est chic ! Parce que tout compte fait, un auteur pourrait être plutôt content que son riff ou sa mélodie soit reprise, améliorée, augmentée. Parce que évidemment, personne n'a inventé les notes avec lesquelles on joue. Heureusement que Bach n'a pas pensé à protéger ses quatre notes : B (si) A (Lam), C (Dom), h (Sim). On en serait où aujourd'hui ?:(((:(((
33
Et merci à toi.:boire:

Citation :
ce n'est pas demain la veille que cela se fera.


Oui et non, car d'une certaine manière, le système actuel dans ce qu'il a d'incompréhensible a produit son propre prédateur : le piratage. Si 100% des droits d'un titre allaient à son auteur, son compositeur et son interprète de leur vivant, je suis persuadé qu'il serait beaucoup plus facile de dissuader les gens de pirater, car ils aiment les artistes et veulent les voir proposer de nouvelles choses.

Aujourd'hui, quand tu télécharges illégalement un disque de Marvin Gaye, tu lèse qui? Ses enfants, son producteur, sa maison de disques? Autant de gens dont le public des artistes, à tort ou à raison (et je penserais plutôt qu'ils ont raison) se contrefoutent parce que, quoi qu'en pensent ces fournisseurs de services, ils n'ont rien à voir avec l'art au sens strict du terme.

Du coup, tout comme le trafic a mis fin à la prohibition, il se pourrait bien que le piratage fasse évoluer les vieilles lois du 19e siècles et remette les éditeurs comme les producteurs à leur simple place de prestataires qui méritent bien sûr un salaire, mais certainement pas des droits.

Il ne manque qu'un homme politique pour remettre Pascal Nègre à sa place. Et là, tu as raison, c'est pas gagné...:D:

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Le GIEC chiffre à 3,3 milliards le nombre de victimes du réchauffement climatique. On en parle ?

 

[ Dernière édition du message le 14/03/2015 à 13:48:19 ]

34
Citation :
Si 100% des droits d'un titre allaient à son auteur, son compositeur et son interprète de leur vivant, je suis persuadé qu'il serait beaucoup plus facile de dissuader les gens de pirater, car ils aiment les artistes et veulent les voir proposer de nouvelles choses.


Cela est un peu utopique... Je pense que le piratage démontre que les gens se foutent de plus en plus de la propriété intellectuelle. Internet a simplement révélé ce penchant pour la révolte méprisante d'une partie de la population mondiale consommatrice de musique.
Révolution technologique avec son cortège d'abus naturels et ses avancées formidables.
35
Citation de Los :
... remette les éditeurs comme les producteurs à leur simple place de prestataires qui méritent bien sûr un salaire, mais certainement pas des droits.

Le problème, c'est que la plupart des auteurs (compositeurs, paroliers, arrangeurs) ont cédé à des éditeurs une partie des DROITS D'AUTEURS de leurs oeuvres de leur vivant par contrat. Histoire de les faire diffuser et donc de faire fructifier leurs créations (ça, c'est la théorie, quand ce n'est pas un donnant donnant en échange de la sortie d'un album). Leurs oeuvres ne leur appartiennent donc plus à 100 %. Et les éditeurs sont des sociétés, qui vivent assez longtemps pour encaisser pendant 70 ans.
Exclure les héritiers en laissant les éditeurs s'enrichir, eux qui feront valoir qu'ils ont en principe "investi" dans la diffusion des oeuvres, c'est discutable... Pas simple.
Michel

[ Dernière édition du message le 14/03/2015 à 14:11:59 ]

36
Pour une fois je ne suis ABSOLUMENT PAS D'ACCORD avec votre édito. Ce morceau est une copie flagrante du titre de Marvin Gaye point barre. Après on peut philosopher pendant des pages et des pages et donc dire des âneries "ne plus acheter de disques de Marvin Gaye parce que..." !?!??! , le fric cii le fric ça, les éditeurs pourrissent tout (alors qu'une grande partie des artistes ont leur boite d'édition) ... Quand on copie il faut avoir le talent de Picasso qui disait "les artistes copient les génies s'approprient" .OK tout le monde n'attaque pas quand on le copie mais il est normal de pouvoir le faire et surtout le faire reconnaitre. Amicalement à vous Patrice Michel
37

Il est vrai que ce procès soulève un problème très délicat. En fait, je ne pense pas qu'il s'agisse de plagiat au sens stricte du terme.

Personnellement, je trouve que le titre "Blurred Lines" a carrément pompé l'arrangement et l'ambiance du titre "got to give it up", ce qui n'est techniquement pas un plagiat mais qui me pose un sérieux problème. Je veux dire, pondre un truc aussi similaire (même tempo, même tonalité, même la couleur des instrus est quasiment identique!) et se dire artiste parce qu'on a vendu des millions d'albums, faut pas pousser!

Après c'est toujours une question de fric, je suis tout à fait d'accord pour dire que le seul qui aurait eu son mot à dire est, hélas, décédé. Néanmoins, je ne peux qu'imaginer si Pharell Williams avait gagné, ça aurait été la porte ouverte à toutes les fenêtres! Et on aurait eu pléthore de titre faisant (beaucoup trop) penser à quelque chose de connu. 

Et puis, sincèrement, le titre de Pharell Williams ne doit son succès qu'à son clip et à la plastique d'Emily Ratajkowski qui a complètement éclipsé la musique. Je veux dire, quand le titre est sorti, tous ceux qui m'en parlaient me disaient pas "t'as écouté blurried lines" mais "t'as vu le clip?"

Pour vendre, qu'une recette: du nue, de la violence, ou du choquant, triste réalité du monde de consommation de masse dans lequel on vit. Vive le mainstream...

 

C'était mon avis sur le sujet.

[ Dernière édition du message le 14/03/2015 à 14:58:39 ]

38
Citation :
C'est tout à fait vrai.
Mais voilà, j'ai mis un jour sur soundcloud un remix d'une chanson de Alle Farben (artiste electro allemand) que j'avais fait dans le contexte d'un concours Beatport.
Le morceau est resté en ligne quelques jours... Puis, apparemment il y a eu une plainte.


ouch ! oui, effectivement.
Pour beatport, n'était-ce pas une magouille du style "le remix d'un contest beatport doit être uploadé sur beatport et seulement sur beatport" (bonjour la phrase truffée d'anglicismes!)

parce que j'ai une majorité de remix sur ma page et il ne m'est rien revenu jusqu'ici. Y compris dans le cas de compétition très bizarre ou le concours ne se clôt jamais, sans gagnant, à se demander si c'est pas totalement factice.
https://soundcloud.com/global-helena
39
Citation :
Et puis entre une inspiration et un plagiat clair et net,c'est là que ça se joue.L'inspiration on en prend tous,en tout cas moi je le dis,j'ecoute beaucoup,ça inspire,ça m'inspire,je suis pas génial alors,je m'inspire! Mais là le Pharell il a déconné,non mais qu'est ce qui croyait que ça s'entendrai pas? Non simplement je pense qu'en ne payant pas les droits a la famille et en allant au procès sa maison de disque paierai tout simplement beaucoup moins au bout du compte.


assez d'accord.
Nous avons tous connu cette situation, nous les "pas-géniaux" (sachant que le génie mainstream contemporain se mesure surtout à la puissance du marketing et de la complaisance intéressée des mass-médias) :
- j'ai pondu une mélodie absolument géniale... sauf que c'est celle d'un de mes morceaux préférés que j'ai recrachée inconsciemment.
- j'aime tellement ce groupe que j'essaye de me couler dans ses pas, m'inspirer de lui... avec un sentiment de gêne quand même, l'impression d'être un peu un imposteur.
- je veux rendre hommage mais le disque de l'artiste que j'adore est tellement définitif que cela revient à le plagier purement et simplement. Exemple, pour moi flagrant, de plagiat sincère : Sylvain Chauveau et le "Manafon" de David Sylvian https://www.deezer.com/album/6913303

Je pense que c'est là qu'intervient la responsabilité personnelle du musicien et la morale de l'artiste en général.
De ce point de vue, les contorsions de Pharell Williams sont assez dérangeantes et le fait d'attaquer en premier pour "non-plagiat" les Gaye montre que derrière l'image de gourou zen qui veut "nous inviter à être heureux" (ben tiens ! facile quand on est un songwriter à succès depuis des années, avant même d'exploser comme chanteur compositeur, et qu'on bénéficie d'une énorme machine promotionnelle), il y a sans doute un homme d'affaire implacable qui a fait le choix (comme Goldman et tant d'autres) de se couler dans le moule cynique de l'industrie. Morale et responsabilité personnelle.

Laquelle industrie repose essentiellement sur la loi du plus fort tempéré par l'esprit procédurier qui est lui-même souvent celui du plus fort. Le showbiz mondial et les mass-médias ne prêtent qu'aux riches.

Un système qui n'est pas le nôtre et que le grand public confond peut-être avec tous ces modèles alternatifs de création-diffusion-rémunération de la musique. Qui ne datent pourtant pas d'hier.

Je me demande si internet ne permet pas quand même de répandre l'idée d'un autre modèle possible que celui du showbiz antédiluvien (années 20, premières radios commerciales aux US, quand les bluesmen se faisaient arnaquer par les producteurs de radio contre quelques billets et une bouteille de gnôle, leur musique servant de virgules entre les annonces pour la quincaillerie Johnson&co ou l'appel aux votes pour la réélection du Sherrif Sheridan). Ecoutez Europe1, RTL, NRJ et consorts, ça n'a pas beaucoup changé !!!
:8O: sur ce...
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Citation de : uttrillo

[...]

Et puis, sincèrement, le titre de Pharell Williams ne doit son succès qu'à son clip et à la plastique d'Emily Ratajkowski qui a complètement éclipsé la musique. Je veux dire, quand le titre est sorti, tous ceux qui m'en parlaient me disaient pas "t'as écouté blurried lines" mais "t'as vu le clip?"

[...]

Complètement d'accord, le titre a marché avant tout pour le clip ouvertement sexiste et prétendument second degrés ! D'autant que sur cette histoire de plagiat, ils ont pris un titre pas hyper hyper connu de Marvin Gaye, "Got to give it up" que personnellement j'adore et qui je l'espère devrait ressurgir ; mais Thicke et Williams savait très bien que leur cible ne connaissait même pas Gaye. Avant cette histoire de procès, j'avais fait le test en soirée avec des amis de ma femme (ils ont la vingtaine, pas vraiment culture vintage si vous voyez ce que je veux dire). Résultat : "C'est quoi ? C'est une reprise de Blurred Lines ?" ça m'énerve ça...

Ça me rappelle un soir où on joue The Wall des Floyds dans un bar de jeunes beauf et y'en a un qui vient nous voir à la fin et qui nous dit : "Pas mal votre reprise de Eric Prydz !" ça m'énerve...