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Mesa Boogie Dual Rectifier 2 Channels
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Mesa Boogie Dual Rectifier 2 Channels
Steelcore Steelcore

« Le meilleur du son high-gain  »

Publié le 20/07/14 à 03:19
Rapport qualité/prix : Correct
Cible : Tout public
Modèle : « Dual Rectifier Solo Head » 2 canaux
Type : tête d'ampli guitare 100W à lampes


FICHE TECHNIQUE

- 2 canaux avec switch pour deux combinaisons possibles : lead et crunch ou lead et clean
- switch de mode vintage ou modern pour obtenir une combinaison crunch et clean
- switch relais canal 1 / canal 2 avec connexion en façade pour une commande au pied, ou à l’arrière pour connexion à un switcher externe de type Rocktron Patchmate ou RJM Rack Gizmo
- potentiomètres de master, gain, présence et égalisation à trois bandes pour chaque canal
- un master volume commun aux deux canaux uniquement quand la boucle d'effet est engagée
- quatre lampes de puissance 6L6 Mesa STR-420, EL34 possible grâce à un switch de bias à l’arrière
- cinq lampes de préamplification 12AX7 Mesa 7025 chinoises
- deux lampes redresseuses 5U4GB ou les 5U4G qui les ont remplacées
- switch du mode de rectification (passage du courant alternatif au courant continu dans l'ampli) : vacuum tube ou silicon diode (voire la vidéo linkée tout en bas de cette review )
- switch pour l’étage de puissance : spongy (augmente la durée de vie des composants) ou bolt (tension plus élevée du bias, consommation de courant également)
- sortie slave pour ampli de puissance avec potard de niveau
- sorties HP, avant 1995 : 8-16 ohm x2 et 4 ohm x2, de 1995 à 2000 : 8 ohm + 16 ohm + 4 ohm x2
- boucle d'effets parallèle sur la Révision G avec potards de send et de mix (wet/dry) ou boucle d’effets série sur les Révisions C, D, E et F avec seulement le potard de send
- 1 sélecteur sur le panneau arrière du châssis pour désactiver la boucle d'effets ou pour l'engager manuellement ou avec un switch externe, ou pour l’assigner à un seul canal
- prise alimentation 120v ou 220v (capable de supporter jusqu'à 230V en Europe)
- fusible 5x20 mm 4A slow blow pour les modèles en 120v, 5x20 mm 2A slow blow pour les modèles en 220v
- pas de midi, pas de réverbe, pas de direct out


VERSIONS ET TARIFS

12500 francs à sa sortie en 1992 (1195 dollars aux USA), pour arriver à 15900 francs à la fin des années 90. La tête Dual Rectifier Solo Head 2 canaux se négocie selon l'état cosmétique, la version, la présence de transformateurs Schumacher ou non.
Lorsque j'ai écris la deuxième mise à jour de ma review en juillet 2019, la Révision G allait de 1200 euros pour un ampli en état de marche à 1500/1600 euros si vous tombiez sur un exemplaire en finition standard et "mint condition". 2000 à 2500 euros pour le même ampli en 2022. On parle donc d’une tête sans la moindre rayure, trace ou point de rouille (regardez la poignée et tous les clous des cornières en cuir), et surtout équipée de transformateurs où est gravé EIA606 sur leur capot. C’est la référence du fabriquant Schumacher.

Il y a trois éléments à vérifier : d'abord deux gros transfos peints en noir. Celui de l'alimentation est fixé à plat avec le capot vers le haut. Celui de sortie vers les HP, avec les capots sur les côté, est fixé à la verticale. Ils sont sur le châssis. Ensuite il y a un petit boîtier non peint à l'intérieur du châssis qui ressemble à un transfo mais qui en fait contient le choke (filtre à courant). Ces trois éléments doivent présenter le EIA606.

Et puis il y a la crème de la crème : les premiers Rectifiers ont été équipés des derniers transfos du Mark III encore en stock chez Mesa en 1992. Voici les numéros qui permettent de les reconnaître :

Transformateur de sortie : 562100
Transformateur d'entrée pour le marché américain (120V) : 561136
Transformateur d'entrée pour l'export (230V) : 561137

La présence de ces transfos du Mark III n'a rien à voir avec la dénomination "pre500 holy grail". Il y a ici confusion. J'ai lu souvent sur le web que le changement se faisait sur la tête serial R-0503, ce qui est faux. Mes amplis sont là pour démontrer le contraire.
Ces transformateurs équipent en fait les révisions C, D, E et une partie des F. Donc on est bien au delà des 500 premiers exemplaires comme vous allez le lire plus bas dans cet article. Il semblerait, mais ce n'est pas vérifié, qu'on trouverait encore ces transformateurs sur les Rev F dans les serials R-1300 / R-1500. Donc sur près de 1000 unités de plus que les fameux "pre500"... D'autant que les transfos 562100 et 561136/37 vont revenir sur de rares têtes Rev G de transition en 1994.

A partir de 1993 donc, on voit arriver les numéros suivants sur les EIA606 des Rev F :
Transformateur de sortie : 562105
Transformateur d'entrée : 561140
Des transfos qui vont par conséquence équiper la quasi totalité des Rev G de 1994 à 2000.

Si les transfos ont été changés (comme sur la R-015702 par exemple pour la passer de 230 à 120V), l'ampli n'a plus de valeur. Ne l'achetez pas. Ou alors considérez que vous allez devoir le porter à un technicien agréé Mesa Boogie qui posera d’autres transfos (280 euros HT pour du Mercury + 50 euros HT de l'heure pour la main d’œuvre) pour un résultat incertain. Et votre ampli n'intéressera pas les collectionneurs.

En clair, le type de transfo fait le prix de base, la rareté de la finition le fait grimper. En 1992, il fallait compter 100 dollars de plus pour avoir le châssis chromé. Aujourd'hui, cette variante esthétique peut faire doubler le prix d'une tête tout simplement à cause de sa rareté.

Si vous achetez directement aux USA où cet ampli est plus facile à dénicher qu’en Europe, il fallait en 2019 compter entre 1000 et 1500 dollars la tête, 2500 dollars pour une version rare. Ajoutez 250 euros minimum de transport par USPS puis La Poste : donc pas sur palette mais dans un carton malmené avec tous les risques que ça comporte… Et environ 350 à 400 euros de TVA et frais de douanes que le transporteur fait payer à la livraison. Il faut aussi compter 100 euros pour le "step down transformer" de chez Tube Amp Doctor qui permet de brancher les têtes en 120V sur notre 240V. En 2022, vous pouvez donc doubler le tarif.

Il existe des modèles custom shop avec des coques en érable flammé massif par exemple. En état correct (traces d’utilisation), c'était 3000 euros en 2019. Et c’était un bon prix ! A titre de comparaison, en 2018 une tête 3 canaux neuve du custom shop Mesa en bois massif dite « reserve » coûtait dans les 6000 euros.

Si l’ampli est entièrement recouvert de cuir (c'est le cas sur de rares Rev C des débuts), en 2013 lorsque je me suis renseigné, c’était une option à 700 euros en plus pour une tête Rectifier 3 canaux neuve à 2600 euros (soit 3300 euros la tête au total) et 1500 euros en plus pour un 4x12 à 1400 euros... soit pratiquement 3000 euros le cab, le double de son prix en finition standard !

On parle ici de collection où prime la valeur rareté. Précision : les amplis ne sont actuellement considérés de collection que lorsqu'ils ont été fabriqués avant 1980. Mais ça ne fonctionne pas comme ça avec le Mesa Boogie Rectifier ou son aîné le Soldano SLO100. Ici on parle des amplis high gain, pas d'un Vox AC30 ou d'un Fender Bassman. Pas le même monde, pas les mêmes règles.

L'année 1991, quand sont sortis les premiers prototypes du Rectifier, compte comme une étape qui sépare l'ère vintage de l'ère moderne chez Mesa Boogie. Mais pas que. Le début des années 90 est le point de départ de l'ère du high-gain. Le Rectifier n'est donc pas considéré comme vintage. Seulement voilà, c'est une légende vivante et la rareté de certaines révisions fait aussi leur prix. Et là ça se complique car il existe différentes versions de la Dual Rectifier Solo Head 2 canaux.

Mesa Boogie a produit environ 16480 unités de ces têtes 2 canaux toutes révisions confondues, depuis le début du développement des prototypes A et B en 1989 à la dernière Rev G en février 2000. Le type de révision est imprimé sur le bord du circuit PCB, à côté des gros condensateurs électrolytes bleu ciel, et se voit donc après avoir extrait le châssis de la coque en le dévissant. Le jour, le mois et l’année de la sortie d’usine sont parfois écrits au marqueur au-dessus, derrière les lampes de puissance. Sinon c’est écrit dedans, à côté du circuit avec le nom du technicien qui a câblé la bête (mention "wired by").

En 1992, ont été commercialisées les Révisions :
- C de la R-0001 en février à la R-0240 à la fin du printemps
- D de la R-0241 à la R-0525 durant l'été
- E de la R-0526 à la R-0645 en septembre
- F de la R-0646 à partir de fin septembre et durant tout 1993 jusqu'à la R-003180 en 1994

La toute première tête commercialisée, une Rev C, serait chez un collectionneur en Allemagne. La R-0161, finition standard, est également en Allemagne. Elle serait une des premières têtes Dual Rectifier équipées d'une alimentation en 230VAC pour l'Europe. Son propriétaire me jurait en 2018 qu'il ne la lâcherait pas à moins de 3500 euros.
La R-0202, une Rev C avec châssis chromé et black diamond plate, s'est vendue 3655 dollars en 2017 aux USA. Elle était en parfait état, et serait unique (la R-0217 serait parait-il similaire, à vérifier) en raison de sa conception car elle dispose de six lampes de puissance 6L6 : les quatre standard, plus deux autres prenant la place des lampes redresseuses et avec les transfos du Mark III Coliseum. Donc ici la rectification du courant est obligatoirement confiée aux diodes. La véritable Triple head viendra ensuite, en 1993, sous l'ère des Rev F, avec cette fois trois lampes redresseuses. Cette R-0202 est en fait le premier Triple Rectifier, un prototype sous l'appellation Dual Rectifier. Et donc le seul ou un des très rares Dual Rectifier en 150w.

Si vous tombez sur une C, une D ou une E, c’est certain, elle a été fabriquée en 1992. Si c’est une Rev F, la production a commencé au début de l'automne 1992 (la plus ancienne Rev F que je connaisse date du 23 septembre 1992) et s’est poursuivie durant toute l'année 1993 et en 1994.

La boucle d'effets de ces Rev C, D, E et F (sauf les tout derniers) est en série. La tonalité est variable. Les Rev C et D sont plus agressives que la Rev F et que la Rev G qui deviendra le standard en 1994. La Rev E est réputée tout aussi agressive mais beaucoup plus bright. Je ne m'engagerai pas plus loin ici : c'est la seule révision que je n'ai jamais eu entre les mains.
Certains utilisateurs ne jurent que par la Rev D pre500 en 120V; c'est le son du tout premier album de Rammstein, entre autres. Je lui trouve un beau mordant en lead et son grain à de l'air, il est moins compact que sur les révisions qui suivent. D'autres disent que la Rev C est ratée (son canal clean, oui), qu’elle a essuyé les plâtres. Question de goût. Et puis je serais prêt à parier que ces premières têtes ont chacune leur empreinte sonore particulière puisqu'elles ont été construites quand Mesa tâtonnait encore beaucoup.

On achète une C ou une D pour sa saturation, pas pour son clean. Certaines têtes Rev C et D ont ainsi été rappelées chez Mesa Boogie à Petaluma, au nord de la Bay Area, pour changer le circuit et le passer en Rev F. C'est la "clean mod". Car le son clair sur les Rev C et D n'est pas encore au niveau (parce que les lampes de preamp ne sont pas câblées au circuit comme sur les Rev F et G). Sur ma Rev D, je dois pousser le preamp aux 3/4 pour obtenir le volume du canal clair d'une Rev G avec le preamp à 1/4 seulement. Sur des châssis de certaines Rev C, Mesa a même indiqué qu'il fallait pousser le master du clean entre 7 et 10.
En discutant avec des techniciens de Mesa, il y a fort longtemps, j'ai appris que le fait de bypasser le premier étage de gain (donc la première lampe 12AX7) sur le canal clean empêchait justement d'avoir un véritable clean. Il fallait le pousser et ça se mettait à souffler et à cruncher. A partir de la Rev F, la totalité des tubes est mise à contribution pour le clean.
Aujourd'hui Mesa ne dit plus du tout ça. Chris Dilbeck (chargé des produits à l'export) a même répondu à mon technicien par mail : "Ce truc des différences des révisions vient d'internet. Tous les Rectifiers sont identiques". Ce qui est un très gros mensonge ! Mon technicien, agréé Mesa Boogie et qui en répare/entretient depuis des décennies maintenant, a même pris des photos des PCB de mes différents amplis et lui a envoyées.... sans jamais recevoir de réponse. Forcément, des types comme moi qui vous racontent qu'une Rev F de 1992 ça met au tapis la Multiwatts actuellement en production, c'est pas bon pour les affaires de Mesa. Donc surtout, si vous buvez la communication des marques comme les Saintes Ecritures, ne lisez pas les lignes qui suivent, "c'est un truc d'internet" parait-il. :)

Ajout daté du 21 février 2021. J'ai mis très longtemps à trouver des vidéos potables sur ces amplis. Et enfin je peux vous linker une production réaliste. Ici, vous pourrez juger entre le son d'une Rev F et celui d'une Rev G, c'est-à-dire LE véritable son d'une tête Rectifier. Tout ce qui ne sonne pas comme ça, c'est-à-dire les Rectifier 3 canaux Multiwatts dont je parle plus loin ainsi que le Badlander, n'est plus un Rectifier ! Voilà le VRAI son, à vous de choisir entre la Rev F pour du riff agressif :

ou la Rev G pour des basses façon raz-de-marrée :

Je vous déconseille les vidéos de certains youtubers comme Ola Englund ou Fluff. Ils triturent le son de leurs amplis à leur convenance et ne mettent pas en valeur l'identité de cette tête. Lasse Lammert et Reza Matix ont sorti de meilleurs vidéos plus réalistes, mais là encore, à leurs goûts.

Sur cette vidéo de Fluff, on entend à 5:42 la guitare seule avec la saturation. Je reconnais le son articulé de la Rev D, mais la comparaison s'arrête là. Les réglages et la guitare employée ne mettent pas assez cet ampli en valeur :

Si vous jouez sur un cab monté en Celestion Alnico Creamback, et non les bons vieux Vintage 30, voilà comment Reza fait sonner une Rev E. Il cherche ce côté plus tight à la mode (vous trouverez ça sur le Badlander) et n'exploite pas le potentiel de ces vieilles têtes qui ont des tonnes de basses à revendre :

Si vous cherchez des vidéos vraiment réalistes qui vous donneront une idée de la manière dont une tête Rectifier deux canaux va sonner devant vous sans aucun artifice, allez sur la chaîne du guitariste du groupe australien Ragdoll, Leon Todd. Il utilise le Rectifier pour avoir un son de... Rectifier. Il ne dénature pas l'ampli et le respecte. Il est pour moi le seul youtuber patenté en la matière. Les autres sont hors sujet. Pour vous faire gagner du temps, je vais ajouter certaines de ses vidéos les plus pertinentes plus bas dans cette review.

Maintenant, attention aux pièges. Pour les têtes construites entre 1992 et 1994, on peut tomber sur des bizarreries. La R-0406, en vente à Franklin dans le Tennessee il y a quelques années, était censée être une Rev D. Sauf que sur le PCB estampillé RF-1F, était écrit au marqueur 1/22/1993. D'habitude la date est apposée sur le châssis, pas sur le PCB. Deux solutions : soit le circuit Rev D a été changé en Rev F le 22 janvier 1993 pour une "clean mod", soit le numéro de série R-406 a été falsifié. Cette incohérence était dans la première ligne de l'annonce : "This is a very early pre500 serial number grail tone head. It is a rev F." Ben voyons, prend moi pour une bille! Une Rev F pre500, ça n'existe pas ! Et à 2600 euros sans les frais d'expédition, ce n'était clairement pas une affaire. D'autant que le vendeur a écrit que "The logo is later" et masquait ainsi une partie de la vérité. Il s'agissait-là d'une black plate avec le logo des Rev G et le vinyle des Rev G sur lequel figurent des rides pour imiter le cuir. Avant 1995, ce vinyle était lisse. Certains vendeur disent que c'est du cuir, mais c'est faux à part sur quelques Rev C du début 1992 (certaines C ont même eu une cover rhino façon Marshall, j'en ai vu une seule de mes propres yeux). Seules les cornières sont en cuir. Mais dire que c'est du cuir permet de justifier un prix trop élevé mais qui n'est pourtant pas aussi élevé que si c'était réellement du cuir (le double donc) !
En attendant, cette R-0406 n'avait pas seulement le logo des Rev G mais tout une coque de Rev G (remplacée après une chute ?). On était donc en présence d'une Rev D pre500 qui n'avait plus rien du "holy grail" comme le présentait le vendeur que j'ai contacté pour lui signaler que son annonce était mensongère. Il m'a répondu que ça ne servait à rien de lui faire perdre son temps. Traduisez : "Qu'est ce que ça peut te faire si j'enfume un pigeon?" Cet ampli devrait bien sonner, ça ne fait aucun doute, mais son prix était celui d'une Rev D originale, et c'est bien là qu'était l'arnaque : 1000 euros de trop à l'époque.

Bref, méfiance car les débuts sont chaotiques d’autant que des versions customisées et d’autres moddées sont sur le marché. Certaines versions américaines sont passées par les mains expertes de Manulonch en Belgique qui a changé les transfos d'entrée pour passer ces têtes en 230V. Et là vous faites le rapprochement avec les transfos du Mark III dont je parle plus haut ? Voilà comment ruiner le prix de son ampli bêtement !
Richard Kruspe de Rammstein a aussi fait changer le 120V pour du 230V sur certaines de ses têtes circulant sur le marché de l'occasion. Les collectionneurs apprécient peu (une Rev F Blackface passée en 230V et modifiée s'est vendue seulement 1400 euros en 2018), les musiciens trouvent ça pratique. Même si ça change un poil l'égalisation… Tu m'étonnes, ce n'est plus le même transfo.

Tout ça n'a pas empêché un vendeur autrichien de proposer en 2021 une Rev G en rack de la fin des années 90, la R-012255, à 3000 euros, certes négociables, pour une tête présentée comme étant en 220V mais... Une fois qu'on lui demande des photos du panneau arrière, on découvre la sérigraphie : 120V et un 4A bien américain au lieu du 2A européen, pour les fusibles. Ce qui signifie que les transformateurs ont été changés. Et c'est seulement après avoir mis ce vendeur devant le fait accompli qu'il a avoué que cette tête avait reçu de nouveaux transfos en 2000. Comme ils sont gravés EIA606, cette modification n'est pas dramatique puisqu'ils sont d'époque et encore fabriqués pas Schumacher et qu'il ne s'agissait pas au départ de transfos de type Mark III. Bref, le vendeur étant ici du genre cachottier, mieux vaut ne pas insister et risquer de tomber sur d'autres surprises quand il sera trop tard.

Les Rev C et D sont ce qu’on appelle les « pre500 ». Comprenez les 500 premiers numéros (un nombre arrondi) qui, en fait, courent jusque vers R0525 jusqu'à l'arrivée de la Rev E. Les Rev C et D sont recherchées par les collectionneurs. Richard Z Kruspe a vendu sa Rev D (R0392) à 3000 euros avec certificat et signature. La quasi-totalité de la production était destinée au marché américain (120V) et la plupart de ces revisions sont dans des états pitoyables parce que jouées par des pros qui les ont usées jusqu'à la corde. Comme la R0241, une Rev D full blackface (châssis + plaque tout en noir, donc rare) qui aurait appartenu à Sébastien Chouard et dont un des transfos a été changé après 2009. Elle est partie pour 1000 euros.

Richard Z Kruspe a vendu une autre de ses Rev D, la R0523 (c'est une pre500 parce que c'est encore une Rev D), full blackface également, à 2800 euros, et dont la coque témoigne des trop nombreux coups qu’a pris cet ampli en tournée. Le genre qui me fait fuir, mais qui fait certainement le bonheur d’un fan de Rammstein. Tout est relatif… Et il n'y a pas que les pre500 qui ont été usées. La Rev F, serial R-001994 de 1993, finition black plate et chrome châssis, a été utilisée en tournée par Bring Me The Horizon, Bleeding Through et I Killed The Prom Queen. Et ça se voit… ce qui ne l'a pas empêchée d'être vendue en Californie pour 2500 dollars en 2016.

J'ai une Rev D qui a été fabriquée fin juillet 1992 (alim européenne), et je suis tombé sur des Rev D fabriquées en août 92. Mes deux Dual Rev F (une en rack, l'autre standard) datent d'octobre 92. J'en déduis que les Rev E ont été fabriquées en gros en septembre 92, peut-être déjà fin août. Elles courent dans les R0550 / R0650, pas plus. Car la R0698 est une Rev F en rack fabriquée le 23 septembre 1992. ll s'agit de la plus ancienne que je connaisse, mais le plus ancien numéro trouvé pour une F est le R0643. Ce qui cloche avec le numéro d'une Rev E que j'ai vu en vente de mes yeux vus : R0645. Bref, on est autour des R0650 pour le passage de la E à la F.
Le youtuber Fluff a vendu sa Rev E, serial R0565, pour seulement 1200 dollars en 2016. Cette tête full black a été modifiée avec un ajout de réglages de bias à l'arrière. Surtout Fluff explique qu'il avait besoin de liquide à cette époque : il a donc sacrifié le prix et le regrette aujourd'hui. Je dirais que seulement un peu plus d'une centaine de Rev E ont été fabriquées, ce qui en fait la révision la plus rare.

Les Rev F sont donc grosso modo entre les R-0650 et R-003200. On en dénombre donc quelque 2500 ou 2550 exemplaires. La R0967 a été construite en novembre 1992; la R-001229 a été fabriquée en janvier 1993. On peut en conclure qu'un peu plus d'un millier de têtes, toutes révisions confondues, ont été fabriquées durant la première année de commercialisation. Et en déduire que le type qui, en 2016 en Californie, a vendu sa R-002887 comme étant une tête de 1992... a menti. Sa tête est partie pour 2700 dollars alors qu'elle est de 1993.

En 2019, en finition standard, les Rev F se négociaient autour des 1500 euros selon l'état, 2000 euros si la tête était en très bon état. Si on est sur du custom ou de la série limitée avec châssis chromé et diamond black plate, c’était plutôt 2000/2500 euros. Voire 2500/3000 euros si c’était un modèle importé des USA (à partir de 1700 dollars) à cause des frais de douanes et du transport. C’est le prix pour un modèle produit en 1992/93 qui ne court pas les rues.
Une Rev F Blackface chrome châssis de 1992 en parfait état avec la l'ampoule témoin de power bleue et avec la tonalité modifiée par le custom shop (donc modèle unique) s'est vendue 5200 dollars aux USA en août 2015. C’est le prix le plus élevé que j’ai pu constater à ce jour pour une transaction concernant cette révision, jusqu'à cette année 2022 (lire plus bas). Sans la TVA, les frais de douanes et de transport, voire d’assurance… gloups. Seulement voilà, cette tête était vraiment comme neuve. Une pépite.

Nous sommes le 24 juillet 2022, l’actualité m'oblige à mettre à jour une partie de ce texte car les prix indiqués plus haut sont désormais pulvérisés. Après le rachat de Mesa Boogie par Gibson, deux années de covid qui ont notamment eu raison de l'importateur de Mesa Boogie en France qui a mis la clé sous la porte et maintenant la guerre en Ukraine, attachez vos ceintures parce que les tarifs décollent. Voici juste quelques amplis en vente sur Reverb (pas le site le moins cher, je vous l'accorde) au moment d'écrire cette mise à jour :

Rev G R-3551 et R-3561 de 1994 aux USA : 3300 euros chacune (sans TVA ni frais de douanes).
Rev F R-1870 de 1993 au Canada : 5500 euros (alors qu'elle n'a pas les transfos du Mark III).
Rev F R-1231 de 1993 en Grèce : 3100 euros.
Rev G R-14789 en Australie : 2500 euros. Une autre Rev G identique au même prix aux USA.

Seule cette fameuse Rev F en rack R0698 de septembre 1992 en Finlande à 3400 euros reste dans les tarifs donnés jusqu'ici. Aujourd’hui c'est même une affaire, d'autant que sa finition chromée est rare. Mais elle a été modifiée avec un câblage sur les potards de présence et sortie jack à l'arrière. A tester avant d'acheter...

Une Rev G également en rack est à 3500 euros aux Pays-Bas. Le vendeur parle d'une early 90's, mais c'est faux. Car sur une des photos, on peut voir le début du numéro de série et c'est une R-012000 et des poussières, donc une Rev G de 1997/98 probablement. Cette tête full black est mise au prix d'une Rev F avec châssis chromé. Elle est donc surévaluée par son vendeur alors qu'elle ne devrait pas dépasser les 3000 euros. C'est une G beaucoup moins rare qu'une F. Et comme on n'a aucune photo de l'intérieur... méfiance. Si elle a été modifiée, ce n'a plus du tout la même valeur.

Mais il y a pire. La Rev G R-006313 en rack, full black, en vente aux USA à un tarif impérialiste de 3500 euros sans la TVA ni frais de douane et le transport. Et je ne suis pas étonné de trouver en Italie, où la fierté méditerranéenne mal placée est un facteur de hausse des prix, cette même Rev G en rack à... 4000 euros. Ah, ils ne se prennent pas pour de la m... ces descendants des Romains. Parole de Gaulois !

Le pom-pom va à cette Rev D numéro de série R0417 en vente aux USA à... 8500 euros. Un tarif italien chez les Ricains, rien ne va plus. Ajoutez la TVA, les frais de port et de dossier des douanes... Pan dans les dents : 10000 balles à la louche. Et bien, si j'ai besoin de liquide, je n'ai plus qu'à vendre la mienne qui est en meilleur état !

Vous comprenez maintenant que d’innombrables facteurs font varier le prix de la tête Rectifier 2 canaux. Et qu'il vaut mieux acheter en France, Belgique et surtout Allemagne où les vendeurs sont beaucoup moins délirants. Et bien vous n’avez pas encore tout vu, ça se complique.

Mesa Boogie ne tenant pas d'archives à l'époque, ils ne peuvent fournir le numéro de série exact de la toute première Rev G. Je leur ai demandé quand ils répondaient encore aux e-mails venant d’Europe. Aujourd’hui c’est silence radio. Donc ça se passe aux alentours de la tête R-3200, sans plus de précision, et selon les forums où le R-003180 circule. Quand en 1994? Aucune idée. En fait, il n'y a pas de véritable bascule de la F à la G. Explications :

Les premières têtes Rev G que j'ai pu essayer sont dans les numéros R-003200 effectivement. Il s'agit des Rev G dites de "transition" car leur châssis est bien celui d'une Rev G avec la boucle d'effets parallèle. Mais la "diamond plate" de la face avant est encore affublée du petit logo des révisions antérieures. Ce logo n'a pas la même hauteur que les ouïes qui le bordent. Et les potards sont identiques à ceux des Rev F ou E : c’est-à-dire qu’ils sont de type « metal dome » comme ceux des Rectifier actuellement en production. Ce petit badge et ces potards sont encore présent sur la Rev G R-004453 mise en vente en Tchéquie en 2022. Je n'ai pas d'exemple plus tardif sous la main.

Plus important, certains de ces amplis sont très activement recherchés car une poignée a été équipée des tout derniers transfos en stock du Mark III (EIA606 562100 et EIA606 561136 ou 561137) et ont une boucle en série tout simplement parce que ces Rev G ont été montée sur les derniers châssis chromés en stock produit pour la Rev C trois ans auparavant. Rev C parce que ces châssis comportent la suggestion "7-10" sérigraphiée à côté du master du clean. Des châssis qui n'avaient donc pas le trou pour le potard de mix de la boucle parallèle de la Rev G. Mesa ne pouvait pas mieux s'y prendre pour brouiller les pistes. Pardonnez-moi l'expression mais, 1994... quel bordel !!! Comment ça en y a encore ?!

Pour rajouter une couche au chapitre des anomalies, Mesa a produit quelques très rares têtes "transition" montées avec les tout derniers circuit Rev F de leur stock, a priori moins d'une centaine de Rev F, et équipées de la boucle parallèle des Rev G (le serial est dans les R-003000 et un peu plus donc). En 2020, une de ces rares têtes, qui plus est en bon état, était en vente en Italie (zut!) à 3000 euros. Je l'aurais bien achetée mais le vendeur était un petit c... (beeeep d'auto censure).

Je résume parce que, je vous l'accorde, il faut s'accrocher pour suivre ces productions empiriques. Seule conclusion possible à ce stade : la mutation, c'est le mot qui convient je crois, de la Rev F vers la Rev G s'est faite progressivement des R-3000 aux R-3200 avec des aller-retour pour la boucle et les tranfsos du Mark III, et aux R-4500 pour la cosmétique de la face avant, et tout ça probablement durant la première moitié de 1994.

Leon Todd utilise des Rev G de transition. Voilà comment ça sonne avec des 6L6 ou avec des EL34 :


Voilà, vous pouvez respirer on sort un peu la tête de l'eau, on est enfin sur la partie émergée de l'iceberg. La Rev G que l’on trouve communément en Europe est équipée de potentiomètres peints couleur chrome avec une forme à mi-chemin entre le « metal dome » et le type « chicken head ». Ces premières Rev G sont l’objet de joutes verbales sur le net. Chacun y va de son expertise, y compris en racontant des âneries… Avec ce que vous avez lu plus haut vous savez maintenant que si la boucle est parallèle c’est dans 99% des cas une Rev G. Ne vous attardez pas sur l’aspect cosmétique qui induit en erreur mais sur le numéro de série.

Je résume. La Rev G a été produite entre 1994 et 2000. Pour la reconnaître, il suffit de constater la présence des 2 canaux, du logo « Dual Rectifier » et non « Single Rectifier » qui est un modèle économique 50W à éviter car sa boucle d'effets n'est pas au même niveau et vous perdrez de l'argent si vous la revendez. Elle n'est recherchée que par des musiciens dont le budget est la priorité.
Mais c'est avant tout la présence de la boucle d'effets parallèle qui doit vous mettre sur la bonne piste. Donc sur le panneau arrière, la boucle est affublée de deux potards, send et mix, au lieu du seul potard de send. C’est LE Rectifier, le vrai, le classique qui a forgé la légende.
Il existe deux variables cosmétiques très répandues : le cordon d’alimentation et le dispositif de protection des lampes.

Beaucoup de Rev G ont un cordon d'alimentation fixe, parfois gris clair, parfois noir. Les R-007500 par exemple. Durant la fin des années 90, Mesa a produit ce qu'on appelle le "late Rectifier" (comprendre les dernières Rev G) avec un cordon d'alimentation amovible et noir. J'ai pu vérifier que les R-0011000 et R-0012000 sont ainsi fabriquées. Un lecteur de cette review m'a signalé que sa R-009297 l'est aussi. Le cordon fixe est censé apporter un meilleur son... J'ai les deux types de têtes, je n'entends aucune différence. Le cordon amovible est plus pratique pour ceux qui branchent leur ampli dans des régulateurs de tension Furman qui nécessitent de changer le câble. Ce qui est évidemment impossible quand il est fixe. Et un cordon fixe qui se détériore, c’est une réparation alors qu’un cordon amovible est très facilement remplacé. Demandez donc à voir le câble en photo avant un achat. S'il présente des coupures, vous allez devoir demander à votre technicien de le changer, ce qui vous coûtera une beau billet.

Beaucoup de Rev G ont aussi une barre de protection en aluminium censée protéger les lampes. Mesa est passé à la grille en nids d'abeille sur le "late Rectifier". C’est moins joli, mais plus sûr pour les lampes. Cette grille est restée en vigueur sur la tête 3 canaux Dual Rectifier Solo Head des années 2000, et a disparu avec la 100W Head multi-watts en 2010 pour laisser place à une sorte de cage fixée au châssis et non plus à la coque en bois. Mais la barre en alu est revenue à plusieurs reprises sur les Dual Rectifier de la fin des années 90, dans les R-0015000 notamment.

Un élément en façade permet de très vite identifier le type de headshell, la coque en bois recouverte de vinyle et à laquelle est vissé le châssis. Au beau milieu de la diamond plate qui est vissée à cette coque, prend place une longue plaque en aluminium brossé où le logo est fixé en son milieu. Et de part et d'autre de ce logo, sont pratiquées des fentes pour la ventilation. Comme elles me font penser à des branchies de poisson, j'appelle ça les ouïes du Rectifier. Sur les premières révisions, le logo est petit. Il y a donc davantage d'espace pour ces ouïes. Il y a alors 18 fentes de chaque côté du petit badge des Rev C, D, E, F et G de transition. Quand arrive le gros logo des Rev G, qui a la même hauteur que les ouïes, on ne compte plus que 15 fentes de chaque côté. Et à partir de 2000, ces fentes passent à 13 de chaque côté, sur les Rectifier 3 canaux donc. Voilà comment j'arrive en quelques secondes à savoir si un châssis de Rev F a reçu une nouvelle coque après 2000... et ainsi déceler si le vendeur est un menteur ou un ignorant.

Dernier point sur l'apparence. Au XXe siècle, Mesa Boogie utilisait des ampoules témoin on/off de type Fender "vintage glass". Le Rectifier deux canaux était équipé d'une ampoule rouge en finition standard. L'ampoule bleue était sur les finition black plate / chrome chassis. Avec l'arrivée du Rectifier 3 canaux, on passe à l'ampoule Fender de type jewel. Le plastique teinté est alors biseauté à la manière d'un diamant. Ces ampoules peuvent être utilisées sur des amplis Bogner ou encore Soldano. Et bien entendu sur des Fender. Retenez simplement qu'avant le Rectifier 3 canaux, l'ampoule est lisse. Ensuite, elle est à facettes.
Mon Triple Rectifier Rev F sur châssis chromé m'a été vendu avec une ampoule à facettes rouge car son propriétaire était fan de Slayer et voulait tout en rouge et noir. J'ai trouvé sur Ebay un vieux stock d'ampoules "vintage glass" pour 20 euros l'unité. Dans le lot, il y en avait une bleue. Et hop, tout est rentré dans l'ordre. C'est très facile à changer : il suffit de dévisser et de visser la nouvelle ampoule à la main comme on changerait une lampe d'éclairage à la maison.

Côté accessoires enfin, toutes les têtes Dual et Triple 2 canaux étaient livrées avec une housse en simili très pratique pour nettoyer la poussière en passant une éponge humide dessus. Des housses qui ne protégeaient pas du tout des chocs. Un footswitch et son câble avec connecteurs jacks de type Switchcraft, ainsi qu'un câble d'alim et un certificat d’authenticité avec le manuel au format A4, accompagnaient l'ampli. Le tout dans un emballage carton très solide.
L'ampli étaient enserré dans quatre pièces de polystyrène plastifié d'une épaisseur de 10 cm. Le carton faisait donc en largeur comme en hauteur les 25 cm de la tête plus 20 cm de protection, et en longueur 65 cm plus 20 cm de protection.
A l'achat, demandez à voir ces pièces. Une housse Mesa aujourd'hui, c'est 80 euros. Le footswitch : 50 euros. Et vous allez payer des frais de douanes puisque nous n'avons plus d'importateur. C'est ici que ça se passe : https://store.mesaboogie.com/categories/shop.html
Le plus important : si le vendeur doit vous expédier la tête, c'est évidemment dans l'emballage d'origine... que la plupart des propriétaires n'ont pas gardé ! Si le vendeur vous dit qu'il va vous préparer un emballage spécial, dites non. L'emballage d'origine est le seul à pouvoir protéger une tête lors d'un choc. J'ai vu des photos de châssis chromés... désaxés, certains littéralement explosés après une chute. Ils étaient (pas) protégés avec du polystyrène de seulement 1 cm d'épaisseur. Un acte criminel. Ah les c...

La Dual Rectifier Solo Head deux canaux a aussi été produite en version Tremoverb à partir d'avril 1993 (R-1737) et surtout en rack 4U dès 1992. On parle alors du « Rackto ». Des Rev E, F et G sont disponibles de temps à autre sur le marché de l’occasion quand des pros s’en séparent. Privilégiez les modèles des studios à ceux utilisés en live, la raison principale de ce format en rack. Rammstein, Alter Bridge, Dream Theater (écoutez "The Mirror" sur 'album "Awake") ou Devin Townsend, entre autres, ont utilisé ce format en studio comme en tournée. Le prix est sensiblement le même que la version tête dans sa coque en bois. Le son est le même. Le châssis tient dans une unité, les trois unités restantes servant d’espace pour les transfos et les lampes. Une tête rackable Rev F de 1992, châssis chromé avec plaque noire et les transfos Shumacher, c’est 3000 euros minimum.
Je dis bien 1992 : oui la version en rack est sortie dès la première année et non en 1995 comme j'ai pu l'entendre dans une vidéo YouTube sur l'histoire de cet ampli, vidéo présentée comme sérieuse par son jeune auteur... qui n'a jamais joué une tête Rectifier 2 canaux et qui n'a surtout pas corrigé sa vidéo après que je lui ai signalé de multiples erreurs.

La production de la tête Dual Rectifier Solo Head deux canaux dont on parle ici prend fin en l'an 2000, au mois de février, soit exactement huit années après la sortie de la première Rev C.

Au XXIe siècle, Mesa Boogie passe à la Dual Rectifier Solo Head 3 canaux, toujours avec une boucle d'effets parallèle. Les transfos Schumacher disparaissent alors puisque Schumacher Electrics a recentré son activité sur les batteries pour voitures américaines. Comme c’est le modèle le plus produit, le Dual Rectifier Solo Head trois canaux ne coûte pas plus cher que les 2 canaux plus anciens. En 2019 c'était 1100 euros pour une tête en état comme neuf. Donc forcément ce prix a augmenté. On en trouve partout sur les sites d'occasion, l'offre est plus importante que la demande. Les modèles custom shop n'ont aucun intérêt. Vous allez les payer plus cher alors que ce modèle est trop répandu pour affoler les collectionneurs. A la revente, vous perdrez de l'argent.

Enfin en 2010, Mesa a abandonné cette tête Dual Rectifier Solo Head trois canaux pour la Dual Rectifier 100W Head trois canaux multi-watt. Selon Mesa (je leur ai demandé directement), le marché poussait à l'abandon de la boucle parallèle au profit de la boucle en série et à un retour au son des Rev C et D. La dénomination « Solo Head » a alors disparu pour devenir « 100W Head » sur le logo couleur crème en façade sur le châssis à gauche. Et on est revenu à un voicing tentant un rapprochement avec celui d'origine. D'où le surnom de "Reborn Rectifier" qui n'est pas l’appellation officielle de Mesa. Les gars de chez Mesa l'appellent "The Multiwatt". Car on peut passer chaque canal de 100W à 50W indépendamment. Perso, je n'entends pas une grande différence. Et 50w en audio, c’est plutôt 70w. Le multi-watt, c’est du décorum, un gadget pour toucher un nouveau public réduit à jouer en appartement... alors que la boucle d'effets de la Solo Head deux canaux permet de jouer à bas volume avec le gros son. Sauf qu'il fallait le savoir alors que maintenant c’est écrit dessus, que c’est donc plus facile à vendre. Argumentaire du marketing, effet de mode, etc.



UTILISATION

Ultra simple à utiliser une fois qu’on a testé les différents modes et fait son choix. Pas besoin du manuel sur un ampli aussi intuitif. Idéal pour le blues, le rock, la fusion et surtout le metal sous toutes ses formes.

Même pour du stoner, une tête Rectifier deux canaux est meilleure qu'une tête Orange qu'il faut coupler à des pédales. J'ai testé. Même ma tête Matamp GT120MV n'y arrive pas, tout comme les Sunn Model T que j'ai eu sous la main et qui sont pourtant une référence en la matière. Vous pouvez écouter Corrosion Of Conformity, ils utilisent une combinaison de Recto deux canaux et de têtes Orange.

Bien entendu, la tête Rectifier n'est pas du tout une plateforme à pédales de distorsion. Sa saturation d'origine est la raison pour laquelle on la joue. Et elle est bien meilleure que tous les ersatz. C’est tout simplement le top of the top. Y ajouter une pédale de disto est ridiculement inutile.

Certains boostent le high gain avec une Tube Screamer de type Maxon 808 en mettant le gain de la pédale à zéro et le volume bien dans le rouge. Ce qui a pour effet d'ajouter des médiums sur un ampli dont la signature sonore est justement... "mids scooped" !!! J’ai essayé, c’est un non-sens. Faire ça signifie qu'on s'est planté d'ampli et qu'il fallait acheter un Mark III, IV ou V. Jeff Loomis a enregistré des classiques de Nevermore en utilisant la Rectifier 2 canaux avec une Maxon OD820 pour gagner en agressivité. Aujourd’hui, autant jouer un autre ampli plus précis.

Et par conséquent, avec un son tellement creusé dans les médiums et des basses à revendre si vous gardez les 6L6s, votre bassiste doit occuper le bas médium et l'infra basse. Dans l'idéal avec une basse active dans un Ampeg SVT-II Pro dont les mids sont boostés sur son EQ graphique, le tout joué au médiator en palm mute, façon Megadeth. Le son jazzy sur une basse fretless est à proscrire ici.

Le canal clean, quand il est poussé et qu'il commence à tordre, est juste excellent pour des fuzz du genre Boss Hyperfuzz FZ-2, Univox Super Fuzz ou Friedman Fuzz Fiend pour du stoner ou du doom. Ici, vous combinez le grain de la pédale à l'EQ à lampes phénoménal du Rectifier 2 canaux. C'est titanesque. J'ai une Boss FZ-2 de 1994 (malheureusement plus du tout fabriquée), je vous garantis que sur le clean d'une late Rev G avec le gain du Recto à 12h, et ben ça pousse les murs ! Et si vous couplez ça à un cab 4x12 Matamp ou Orange monté en HP Celestion V30 ou Heritage, vous passez en mode Godzilla.

Je vous fais grâce des quelque 200 pédales de modulation et de la centaine de fuzz que j'ai testées sur cet ampli. De la dizaine de compresseurs que j'ai essayés ici et de la cinquantaine de pédales wah wah que j'ai passées à la moulinette du Recto. Avec la liste que je donne ici vous pouvez y aller les yeux fermés. Sur votre pedalboard, en front, donc entre la guitare et la tête d'ampli, voici les meilleurs pédales pour :

High gain :
- EVH wah ou Musician Sound Design Silvermachine II wah
- MXR Black Label Chorus (ajout du 29 mars 2024 : n'est plus fabriqué donc prendre le MXR Analog chorus ou la toute nouvelle réédition signature bleue et noir chez MXR) ou Retro Sonic Analog Chorus, ou Boss CE-5 (il souffle un peu) ou encore Moolonn chorus un peu plus terne.
- EVH Flanger
- EVH Phase 90
- Fulltone DejáVibe ou MiniVibe 2 ou Mini DejáVibe MDV-3, la seule vibe qui supporte le high gain du Recto. Dommage, Fulltone a, durant l'été 2022, stoppé la fabrication de ses excellentes pédales après trente ans d'activité, un véritable drame !

Crunch et clean :
- Boss CH-2 Waza Craft
- EWS Arion SCH-Z pour la fusion façon années 80
- Boss BF-2 ou BF-3 flanger

Clean :
- Klon Centaur KTR pour un vrai crunch à l'overdrive
- Boss Hyperfuzz Fz-2 (n'est plus fabriquée et rien ne peut la remplacer)
- Jam Waterfall chorus
- Bogner Lyndhurst, un compresseur que je n’utilise pas pour ses réglages mais pour le transformateur Rupert Neve Designs à l'intérieur qui vient donner du peps au son clair tout mou du Rectifier deux canaux.

Il existe certaines contre-performances avec cet ampli extrême qui peut s'avérer indigeste pour du bon matériel comme le Providence Anadime Chorus qui fait "ouin ouin ouin" au taquet même quand on a coupé le volume de la gratte; la Dunlop John Petrucci wah trop chatouilleuse et qui part en larsen comme une folle; ou encore la Jam Retrovibe qui siffle à vous cisailler les tympans parce qu'elle est faite pour le single coil et le Marshall Plexi. D'autres ne servent à rien comme le MXR comp, entre autres.

Le choix de la révision se fait sur la boucle d'effets. Qui, même sans effets engagés, est un énorme avantage pour le Rectifier. Il faut vous imaginer au début des années 90. Les atténuateurs de puissance faisaient leurs premiers pas et la plupart des têtes 100w étaient inutilisables à domicile. Aujourd'hui les amplis sont multi-watts donc le problème est censé être réglé dès l'achat. Mais en 1992, quand est arrivée la Recto on se disait tous : "Mouais mais en 100w ça va faire comme ma Marshall, je ne vais pas pouvoir pousser les lampes sans exploser les oreilles de tout le voisinage". Et ben non!!! Miracle, car le volume de la boucle d'effet peut servir de volume général. Mike Soldano a introduit ce schéma avec le SLO100 (seulement sur les versions avec potard de send évidemment) pour avoir un gros son à bas volume. Le Friedman BE100 fonctionne aussi comme ça.

Donc, on monte le master et le gain pour obtenir le son souhaité (le sweet spot), puis on ajuste avec le volume de la boucle, même sans effets connectés. C’est magique. On perd un peu en dynamique si on joue à très faible volume mais rien de bien méchant. Du coup cet ampli convient en appartement, en home studio, en studio, dans un bar ou dans un stade.

Sachez surtout que le unity gain sur le send d'un Rectifier est à 5 (ça va de 0 à 10) sur les vieilles boucles des Rev F, à 50% sur le send des Rev G. Pour ma part, je laisse le send et le mix à 50% et ça fonctionne très bien comme ça, qu'on y connecte des effets ou pas. La boucle est ainsi engagée sur toutes mes têtes Rectifier.


BOUCLE D'EFFETS AU CHOIX

Deux type de boucles sont présents ici, en fonction des versions. Ceux qui n’utilisent pas de delays peuvent zapper ce long passage :

En parallèle, donc sur la Solo Head deux canaux Rev G ou la Solo Head trois canaux, c’est une des meilleures boucles du marché. Elle est presque au même niveau que la boucle de la fabuleuse tête Bogner Ecstasy (que je joue aussi donc je sais de quoi je parle), la référence puisqu’on peut la switcher parallèle ou série. La boucle des amplis Friedman (je joue aussi le BE100 donc je ne vous raconte pas de bêtises…) étant seulement en série, on ne peut la comparer qu'avec celle des Dual Rectifier 100 W Head et des Dual Rectifier Solo Head Rev C, D, E et F. La boucle du Diezel VH4 (idem je la joue, bla bla bla…) est au même niveau, mais avec des connections parallèle et série. Pas de switch comme chez Bogner, et le master volume ne fonctionne pas de la même manière. Le Rectifier a ici un avantage sur le Diezel si vous utilisez la boucle comme atténuateur de puissance.

Concrètement, la version dont vous avez besoin dépend du delay que vous utilisez. Si le delay intègre un line mixer mais pas de kill dry, il faut impérativement une boucle en série dans l’ampli. Si le delay peut passer en mode kill dry, alors la boucle parallèle fonctionnera. Si le delay n’a pas de fonction de mix, il faut alors une boucle parallèle pour éviter de noyer le son de l’ampli et conserver de la dynamique.
Exemple. Un Electro Harmonix Deluxe Memory Man, ça ne va pas du tout dans une boucle parallèle car le potard de volume de ce delay ne jouera que sur le son répété (wet), et non sur le son non traité par l’effet (dry). Ce dernier sera alors faible quand le son répété sera excessivement fort. C’est injouable, j’ai essayé.

Je suis un accro du delay analogique de type bucket brigade. Je teste tout, absolument tout ce qui sort. Voici les delays que j’ai gardé et qui fonctionnent à merveille avec les têtes Rectifier montées en boucle parallèle, donc Solo Head deux canaux Rev G et Solo Head 3 canaux :

- Boss DM2 Waza Craft : en mode custom c’est le top pour les solos et le shredding. Le son Steve Vai garanti. Je ne peux plus m’en passer pour le lead, quel que soit l’ampli. Ça passe aussi dans une boucle en série mais il noiera un peu trop le son dry. C’est un must have. Si vous voulez le son du Dm-2 d'origine, le Retro Sonic Delay est un clone qui fonctionne à merveille avec les amplis high gain, donc avec le Rectifier. Testé et approuvé, en particulier avec des guitares de type Charvel. Mais le Dm-2 Waza Craft offre un mode custom que j'adore, d'où ma préférence.

- Way Huge Echo Puss : un MXR Carbon Copy en mieux grâce à son potard de tonalité. Le son est énorme, épais et sombre. Tout le contraire d’un Strymon Brigadier, propre mais glacial. En delay court pour gonfler le son sur une rythmique high gain, il est devenu une partie intégrante de mon son. C’est le meilleur ami du Rectifier. Passe aussi très bien dans une boucle en série. Donc va avec tous les amplis, sauf le Soldano SLO100 avec sa boucle des années 80 (dédiée aux effets en rack des studios). Ce qui en fait, à mon humble avis, le meilleur delay de tous les temps. Joe Barresi, l'homme derrière le son de Kyuss, adore cette pédale. Il a utilisé ce delay sur des albums de Soundgarden, Anthrax, Monster Magnet, Tool, Queen Of The Stone Age, Clutch, Fu Manchu... Besoin d'en rajouter ? Allez, un p'tit dernier pour la route : The Melvins. Alors imaginez un peu les dégâts causés avec un Recto sauvage.

- Way Huge Supa Puss : plus mordant que l’Echo Puss, moins adapté au son du Rectifier pour du metal, plutôt pour du rock, plus polyvalent et avec le tap tempo donc pour du solo live jusqu’à 900ms. Là aussi, le potard de tonalité est un très gros avantage. Donc par exemple si vous jouez votre Recto avec des EL34 en crunch pour du gros blues.

- Seymour Duncan Vapor Trail : pour le delay long (900ms) à coupler avec une réverbe Electro Harmonix Holy Grail Neo en mode plate ou la superbe Strymon Flint en mode années 80 avec la regen au taquet si vous voulez jouer l’intro de « Sorrow » (Pink Floyd) en version bodybuildée. Avec le Rectifier Rev G, on ne peut pas faire plus gros que ça en son lead. Excellent pour le violoning. La boucle parallèle permet de le dompter. Dans une boucle en série c’est too much. Il a aussi un insert pour traiter le son répété avec un autre effet, mais pour ça, je préfère la version 1.5 du JHS PantherCub dont je parle plus loin. Donc le Vapor Trail conviendra parfaitement dans un contexte de metal progressif.

- JHS PantherCub v2, la version compacte donc. Ce delay très haut de gamme, inspiré par le Boss Dm2, et surdoué en son clair passe avec tous les modes du Rectifier, y compris sur du high-gain. La v2 a été dotée d’un potard qui permet de compenser le volume du son dry par rapport au son wet. Du coup, l’utilisation avec une boucle parallèle ne pose pas de problème, ce qui n’est pas le cas du PantherCub v1.5.

Maintenant les delays que j’ai gardés et qui fonctionnent à merveille avec les têtes Rectifier montées en boucle série, donc Solo Head deux canaux Rev C, D, E, F et 100W Head trois canaux multi-watt:

- Electro Harmonix Deluxe Memory Man : le top en son clair, un classique pour du U2, Steve Morse, Andy Timmons et j’en passe. Il a un son inimitable avec son chorus intégré. Même les autres versions, notamment la TT1100 (qui est géniale parce qu'on peut assigner le volume de l'effet à une pédale d'expression : top en live), n’ont pas ce son. Il se défend en son saturé sur du lead mais ce n’est pas son territoire. Si vous jouez live, il y a une alternative : Chase Bliss Audio Tonal Recall. Il prend moins de place, sonne presque (malheureusement) comme le Memory Man, mais avec un delay plus long (1100ms), un tap tempo et une mémoire pour avoir un preset. Là aussi, ça ne fonctionne que dans la boucle en série, surtout pas en parallèle. Le Jam Llama Supreme avec son chorus intégré est une alternative au Memory Man à prendre en compte pour un son plus ciselé. C’est du haut de gamme.

- Jam Llama et Llama+ : très épais, pour les sons crunch ou clean et un côté organique à la Pink Floyd. Je le joue en canal lead en baissant le volume de la guitare (c’est comme ça qu’on fait cruncher un Rectifier) parce que ce delay supporte très mal le high gain Mesa. Ici c’est rock psyché et blues d’abord. Pédale d’expression conseillée.

- JHS PantherCub v1.5 donc dans la grosse boi-boite : le meilleur delay pour boucle en série. 1100ms, donc delay long possible, tap tempo, superbe sur le clean, encaisse le high gain du Rectifier sans souci et dispose d’une boucle d’insert pour traiter le son répété avec une autre pédale (câble de patch en Y nécessaire). J’y mets un MXR Mini phase 95 en mode phase 90. Avec le Rectifier Rev F, c’est juste énorme sur les rythmiques. Ici aussi, pédale d’expression très utile. C'est donc mon delay d'ambiance ou pour les intros.

- DOD Rubberneck Analog Delay : chorus intégré, potards de tonalité et de gain, tap tempo et insert comme dans le JHS. Il est très complet et, contrairement au Memory Man, il supporte une boucle parallèle même si c’est dans une boucle en série qu’il donne son maximum pour un son épais. Mais attention, comme le Jam Llama, il supporte mal le high gain. Donc uniquement si vous utilisez le Recto pour son clean ou son crunch.

Conclusion : pour les solos avec delay mono analogique, la boucle parallèle est meilleure. Donc la Dual Rectifier Solo Head Rev G reste le top. Pour les ambiances, les delays avec boucle en série sont meilleurs. Donc les grosses rythmiques doublées sont pour la Rev F par exemple. Les sons clairs plutôt avec la Dual Rectifier Multiwatts.

Si vous avez besoin d’un noise gate, sachez que ça ne peut s’utiliser que dans des boucles en série puisque 100% du son doit être traité. Noise gate et boucle parallèle ne font pas bon ménage. En ce qui me concerne, vu que je n’utilise pas de pédale de disto avec mes têtes Rectifier, pas besoin de noise gate. Si jamais, essayez le Fortin Zuul ou mini Zuul. Il passe là où l'ISP Decimator n'y arrive plus.


MULTI AMPS SANS MIDI

Pour des effets en stéréo (digital donc) en high gain, plutôt que de jouer deux têtes Rectifier, vous pouvez vous tourner vers la tête Diezel VH4-S. S pour stéréo bien entendu et avec boucle parallèle et série, donc c’est fromage et dessert. Mais… cet ampli en 2x50W se joue très très fort car le sweet spot n'est pas du tout au même niveau que sur un Rectifier. Il est donc impossible à utiliser en appartement alors que les Recto peuvent produire le gros son à faible volume grâce à leur boucle d’effet.

Vous voulez absolument des Rectos? OK. La meilleure combinaison reste le mode wet/dry/wet qui peut se jouer wet/dry/dry ou dry/dry/wet avec trois Rectifier, dont deux avec des delays mono. Le premier à droite avec une boucle parallèle et les delays pour les solos. Entre la sortie des delays et le retour vers l’ampli, placez une pédale de volume Ernie Ball qui fera office de fader au pied comme pour mixer deux pistes. C’est la méthode Steve Morse. Le deuxième Rectifier au centre, est destiné au son dry quoi qu’il arrive avec la boucle engagée, mais sans effets connectés pour garder un son dynamique et de l’attaque, tout en bénéficiant du master volume. Et le troisième Rectifier avec boucle en série pour les ambiances. Ici 100% du son est traité par les delays analogiques. Du coup, pas de pédale de volume qui couperait la totalité du signal mais des pédales d’expression pilotant les delays. Et ça, c’est un plan jouissif de puriste qui touche le Graal. Impossible à faire avec un Kemper ou un Fractal qui ne font qu’émuler. Oh, les pauvres petits…

Alors évidemment, il faut démultiplier le signal sorti du pedalboard pour attaquer plusieurs têtes avec un splitter. Si vous n'utilisez que deux têtes Rectifier (c'est valable dès qu'on utilise plus d'un ampli avec n'importe quels amplis), le petit Lehle P-split fera l'affaire. Il est pratique parce qu'il est passif et il fait le job si vous ne mettez des effets qu'en mono dans une seule boucle d'un seul ampli (donc wet/dry). Mais il faudra quand même un rack Furman qui filtre l'alimentation, donc les modèles onéreux made in USA, pas l'entrée de gamme made in Asia.
Dès que vous passez à un système à trois têtes d'amplis et que vous avez des effets dans deux de ces têtes, il faut de quoi lutter contre cette satané boucle de masse et son buzz des 50Hz. Dans ce cas, j'utilise la solution la moins chère et qui fonctionne parfaitement : le Radial JX44 V2. Ma review est ici : https://fr.audiofanzine.com/splitter-merger-audio/radial-engineering/jx44-v2/avis/r.189270.html

Et là vous vous dites : "Oui mais comment passer du clean au lead sur trois amplis en même temps alors qu’ils ne sont pas midi ?" Et bien il faut un switcher externe. Les Rocktron Patchmate et Loop-8 font très bien le job avec un jack pour chaque ampli qui part du send d’une boucle. Donc trois boucles du switcher-looper sont ici condamnées à seulement switcher. Un switcher Voodoo Lab Mini Amp Commander fera aussi le job. Le fameux Amp Gizmo de RJM si cher à Dweezil Zappa aussi. Ce sont des machines dédiées à cette tâche.
Avec les Rectifier trois canaux, le câble est particulier. Il faut des systèmes RJM dispos chez Frank Post, l'importateur européen à www.loopersparadise.de. Et pas d'inquiétude, il cause français. Ces câbles spéciaux ne sont pas donnés (90 euros). Le RJM Rack Gizmo (qui n'est plus fabriqué) par exemple, peut piloter deux Rectifier trois canaux (wet/dry), mais pas trois (wet/dry/wet). Il faut donc deux Rack Gizmo dans ce cas.
Ces switchers sont midi et donc pilotés par votre pédalier midi. Comme ce sont aussi des loopers, ils permettent de bypasser les delays ou pas, là encore en midi. Ils sont indispensables pour un signal audio traité avec des effets analogiques.

Si cette configuration vous fait peur, le Rectifier fonctionnera très bien avec un Eventide Time Factor ou un Eventide Eclipse. Leur delay digital et midi est parfait pour une solution live stéréo avec deux têtes. En delay digital, je n'aime que ce son là. Mais Boss propose aussi de bonnes solutions. Certains diront que le Strymon Timeline est au top. Et bien, je le trouve dépourvu de caractère et je ne suis pas d'accord pour le Rectifier qui mérite quelque chose de plus jouflu. Question de goût.


MAINTENANCE

Outre les règles de base à respecter du genre pas de boc de bière posé sur la tête et prêt à basculer sur les lampes, il faut savoir ceci :

Concernant le retubage des lampes de puissance, deux règles sont à respecter. Comme tous les amplis Mesa Boogie, le Rectifier a un atout considérable. Vous n’avez pas besoin de régler le bias de l’ampli au moment de changer les lampes. Car son bias est fixé à une valeur moyenne. Et donc les lampes Mesa étaient à l'époque sélectionnées pour fonctionner avec cette valeur moyenne. Le retubage se fait donc sans faire appel à un technicien, si vos lampes neuves n'ont pas de déffaut ou ne sont pas arrivées endommagées. C’est très facile. Il suffit de savoir que les deux lampes de puissance du milieu fonctionnent ensemble, les deux de l'extérieur forment la deuxième paire.

Règle numéro 1 : Chaque paire doit comporter des lampes de même grade, chez Mesa on parle de couleurs. Red et Yellow (courant sur le Rectifier 3 canaux) correspondent au grade 4 chez Groove Tubes, Green (courant sur le Solo Head 2 canaux) et Grey sont équivalents au grade 5, Blue et White au grade 6.

Le fonctionnement d'une paire de lampes est expliqué ici, Mesa comparant ça à deux pneus qui doivent avoir la même pression sans quoi le chassis de votre voiture part de travers : https://mesaboogie.zendesk.com/hc/en-us/articles/218959518-What-s-up-with-the-color-coding-of-your-power-tubes-

Règle numéro 2 : Avec ce bias moyen, il n’y a donc pas de grades faibles parmi les lampes sélectionnées par Mesa Boogie. Si vous utilisez des lampes d’une autre marque avec grade faible, l’ampli sera sous biasé mais ne risquera rien. Vous perdrez la chaleur du son Boogie. C’est donc uniquement pour obtenir un certain son clair… Comme le Rectifier est une usine à saturax, ce serait une absurdité que d’utiliser des lampes de grade faible ici.
Tan,t que Mesa proposait ses sélections de tubes, j'ai longtemps déconseille aux novices d’utiliser d’autres marques que Mesa Boogie pour le choix des lampes de remplacement sans se renseigner auprès d'un véritable spécialiste comme Tube Amp Doctor ou l'Atelier des lampes. Votre revendeur du coin ou un vendeur du net peut vous induire en erreur ici, juste par ignorance ou pour vous refourguer ce vieux set de lampes qu'il n'arrive pas à vendre depuis dix ans. Alors faites gaffe.

Mise à jour du 14 février 2023. Depuis le rachat de Mesa Boogie par Gibson, je n'arrive plus à me procurer des lampes estampillées Mesa (qui sont des chinoises badgées). Et il n'y a plus d'importateur de la marque en France. Quand vous achetiez les lampes sur le site officiel ici https://store.mesaboogie.com/categories/shop/tubes.html vous aviez des frais de douanes à ajouter à la TVA. Bref, les lampes Mesa coûtaient deux fois plus cher que le tarif affiché en dollars. Aujourd'hui c'est fini, ils n'en proposent plus.

On oublie les merveilleuses Sylvania made in USA, malheureusement introuvables aujourd'hui. Je cherche en général de la Tung Sol made in Russia, qui correspond à ce que Mesa mettait dans ses amplis dans les années 90. Il s'agissait alors des 6L6GC STR 420 (STR pour Special Tube Request) en version big bottle qui n'existent plus à ma connaissance. Aujourd'hui on trouve de la Tung-Sol STR 440 avec une forme plus classique. Elles délivrent un peu plus de basse que les TAD Red Base qui sont aujourd'hui la seule solution "clé en main".

Tube Amp Doctor a donc deux sets spéciaux.
Ici pour la tête Dual : https://www.tubeampdoctor.com/en/tubeset-for-mesa-boogie-dual-rectifier-and-solo-head?c=312
Et là pour la Triple : https://www.tubeampdoctor.com/en/tubeset-for-mesa-boogie-boogietriple-rectifier?c=312

Les Red Base de TAD vont modifier le son de votre vieux Rectifier en le rendant plus tight. Je n'aime pas ça. Et même sur les lampes 12AX7 de preamp selectionnées, certaines soufflent. Je préfère acheter des Tung-Sol en nombre et faire la sélection moi même pour le preamp. Les lampes 12AX7 choisies par Mesa étaient des ECC83 7025, ce qui correspond au premium TAD. Dans le set TAD, les lampes de preamp ne sont pas forcément ce qu'il y a de mieux parce que seule la V1 est une 7025. Moi je mets cinq 7025, donc la totale, comme Mesa à l'époque.

Pour changer les lampes de preamp, je conseille vivement de dévisser le chassis de la coque et de l'extraire parce que vous ne verrez pas bien les sockets des lampes et vous risquez de tout abimer en forcant alors que vous n'êtes pas en face des trous. La V1 est celle qui est tout à droite quand vous ête face à l'ampli démonté, tout à gauche si vous montez les lampes depuis l'arrière, donc en ayant laissé le chassis dans sa coque. Cette V1 doit être irréprochable pour éviter des bruits parasites. La V2 se charge du canal 1 (donc chez moi le clean), la V3 du canal 2 (donc le lead dans mon cas où je mets de la Tung Sol bien juteuse). La V3 c'est du boost, la V4 la boucle d'effet, et la V5 la phase.

Pour les lampes de puissance pas besoin de démonter, vous avez juste à enlever la barre en alu ou la grille de protection. Vérifiez bien à l'arrière que le switch de biais correspond aux lampes choisies : 6L6 ou EL34.

Quant aux lampes redresseuses, beaucoup sont trop hautes pour pouvoir remettre le chassis dans la coque en les laissant dessus. La hauteur du chassis ajoutée à celle de ces redresseuses ne passe pas. Elles doivent donc impérativement être changées en laissant le chassis en place. Elle rentrent alors tout juste.

Concernant le revetement de la coque, ici c'est la méthode américaine opposée à la méthode anglaise. Les Brits utilisent des revêtements qui se collent à l'eau avec une sous couche en coton, la Rexine notamment, les Yankees du vinyle. Donc lorsque vous restaurez un Recto, il vous faut une colle adaptée: "multi purpose spray adhésive" que ça s'appelle en anglais. Et ça je le sais grâce à Jeff Lewis qui fabrique les amplis Matamp à côté de Manchester. Je suis en contact direct par mail avec cet anglais fort sympathique, toujours prêt à conseiller et plein d'humour. Il adore se moquer des mecs de chez Mesa parce qu'ils doivent mettre des agrafes pour faire tenir leur vinyle (la méthode a changé depuis). Bref, Jeff est un peu chauvin : les "Yanks" comme il dit, sont pour lui de gros blaireaux.
Alors voilà son conseil avec les amplis américains : utiliser de la colle aérosol en spray. Il m'a donné plein de marques dont certains anglaises comme Pro Chemicals (cpc.co.uk) utilisée par Matamp que je n'ai pas réussi à importer (bonjour la paperasse!). Je me suis focalisé sur la 3M qui résiste au 110°C et qu'on trouve sur Amazon. Tant qu'à coller du vinyle juste au dessus des lampes de puissance, autant que ça tienne à la chaleur. Alors Jeff a dit : tu vires l'ancienne colle si possible. Si c'est vraiment séché, pas la peine. Tu pulvérises la colle sur les deux côtés, vinyle et bois. Tu laisses sécher 20 minutes et là tu appliques une pression. Voilà comment j'ai rattrapé deux vieilles têtes Mesa. Évidemment comme la colle est en spray, il faut des protections adhésives (ruban de masquage) comme en peinture pour ne pas en mettre partout. Une fois que c'est sec, on enlève les protections. Au bout de 10 ans, cette colle tient toujours.

Si vous voulez apprendre à décoller un logo brisé (les Anglais disent badge), Jeff me l'a appris pour du Matamp, de l'Orange et du Marshall. Il faut un heat gun et un pistolet à colle à chaud pour coller le nouveau badge. C'est très facile, faut juste ne pas avoir peur de monter à 400°C avec le heat gun. Et avec le sèche-cheveux, ça ne marche pas hein, faut un engin qui chauffe vite. Mais chez Mesa, sa méthode ne fonctionne pas. Là encore les Ricains font autrement. Les petits badges Mesa sont difficiles à enlever parce qu'ils sont maintenus par deux cylindres soudés à leur dos. Donc essayez de ne pas les amocher... Le gros badge a des vis, là tout baigne.

Enfin pour les composants électroniques, il faut regarder de temps en temps si un capacitor, condensateur électrolyte en français (les cylindres bleu clair), n'est pas bombé sur le côté. Je n'ai jamais eu le cas pour l'instant et j'ai des têtes qui ont maintenant plus de 30 ans. Là, vous devez faire appel à un technicien pro, si possible agréé Mesa Boogie, pour le changer.

Dans le Rectifier, le courant passe par la rectification qui produit un bruit parasite (un gros bzzzzzz dans les graves) puis ensuite par l'étape du smoothing. Kesako ? En gros il y a des filter caps, donc des condensateurs qui vont gommer ce bruit.

Seulemlent voilà, ce type de composant electronique a une durée de vie de 12/15 ans. Certains des mes amplis sont là pour démontrer que ça va deux fois plus loin. J'ai même un Marshall de 42 ans qui a des condensateurs d'époque en pleine forme. Mais à un moment donné, apparait progressivement ce bruit parasite qui signifie qu'un ou plusieurs capacitors sont en train de mourir. Il faut alors faire ce qu'on appelle un "recap". Un remplacement de capacitors. Et là, et ben ça coûte bonbon en main d'oeuvre : il faut dévisser le circuit imprimé qui est monté sur des entretoises, dessouder certains cables trop courts (ah bravo Mesa !!!) pour ensuite déssouder les condensateurs et en poser des neufs. Compter plus de 600 à 700 euros TTC pour ce genre d'opération chronophage (une dizaine d'heures pour un travail bien fait) chez un technicien agréé Mesa. Alors que la pièce ne coûte que quelques euros : https://www.tubeampdoctor.com/en/electrolytic-capacitor-10000uf-at-10v-radial-for-mesa-boogie?c=289

Si vous collectionnez les amplis, ne les stockez pas sans les jouer. C'est comme la batterie d'une voiture : il faut au moins les brancher une fois pas mois, plus si possible, parce que sinon les condensateurs vont sécher et seront bons à remplacer. Ce serait d'autant plus dommage qu'aujourd'hui même Mesa Boogie a des difficultés d'approvisionnement chez ses fournisseurs officiels. BMI fabrique deux types de condensateurs pour Mesa (les gros bleu ciel) que vous trouverez ici : http://www.bmicaps.com/ Quand Mesa n'en a pas, ils proposent Illinois Capacitors, une marque qui appratient au groupe Cornell Dubilier https://www.cde.com/ Ils sont faciles à rteconnaitre puisqu'ils sont affublés d'un gros IC inscrit en italique.

Les condensateurs sont chargés d'electricité. Le transfo d'entrée de votre Rectifier va engloutir le 230V pour balancer du 500V dans les lampes. Alors imaginez le choc si vous touchez ces gros cylindres bleu qui ont l'air si inofensifs...

N'allez pas vous prendre un choc électrique ! On ne bidouille pas l'intérieur (les lampes, c'est l'exterieur, pas de souci) d'une tête 100w comme on bidouille une pédale d'effet qui marche au 9V. Qui plus est avec une rectification. Le courant alternatif 230V peut vous laisser une chance parce qu'il va et vient. Le courant continu ne vous lachera pas. Si vous touchez un composant encore chargé, alimenté en DC à 400/450V comme c'est courant dans les amplis à lampes, vous mourrez ou presque. Au mieux vous allez convulser toute une journée... Mais le courant continu peut par exemple, entre autres réjouissances, vous brûler les reins.

Et ne mettez jamais les deux mains en même temps dans un ampli. Laissez toujours une main dans une poche pour éviter de créer une boucle et finir brûlé. Enfin n'allez pas toucher des composants avec un tournevis en métal, prenez une baguette en bois sec ou mieux : en plastique.
Un technicien sait comment décharger un condensateur et je ne vous le dirai pas ici pour votre santé... au cas où vous voudriez essayer, hein.

Et bien entendu pour toute manipulation, y compris un changement de lampes : éteignez puis débranchez l'ampli. Et attendez 15 minutes après l'avoir éteint pour commencer les opérations d'entretien.


SONORITÉS

Je suis bien placé pour vous parler du son de cet ampli, car c’est un vieux compagnon de route, depuis 1994. Je joue la Dual Rev D, trois Rev F dont une Triple, quatre Rev G de différentes époques, la trois canaux Solo Head et deux Multi-watt. Et ce que je vous dis ici, vous ne l’entendrez pas en regardant YouTube. Sur une vidéo du web, vous pourrez au mieux distinguer des grains différents. Non, il faut se tenir devant un mur de 4x12 nourris au moyen de têtes Rectifier pour comprendre. Il faut sentir cet ampli diabolique faire bouger vos tripes pour mesurer sa valeur. Et ce n’est pas assis devant un ordinateur que vous réaliserez comment il répond à votre jeu. Il faut le violenter, il faut le jouer avec d’autres amplis à côté et passer d’un ampli à l’autre (avec un switcher Ampete par exemple) pour comparer et réaliser l’implacable vérité.

En high gain cet ampli est un tueur. Il achève sans pitié ses congénères, même les plus coûteux, et éclipse tout ce qui ose se brancher à côté de lui. Y compris des pointures.
Il a néanmoins d’excellents concurrents. Ils ne le dépassent jamais, mais sont très utiles pour l’épauler, car le Rectifier deux canaux est hyper spécialisé. Sa faiblesse est dans son manque de versatilité.

Le son du Rectifier deux canaux est à la fois plus gras, mais aussi comme plus acidulé, que celui du Mark V, vaisseau amiral de Mesa, ou du préampli Triaxis qui tous deux utilisent le mode saturé du Mark IV. Ce dernier reste le véritable son high gain de référence chez Boogie, à base de ce que les anglophones appelent le negative feedback. Je trouve le Royal Atlantic presque plus proche du Rectifier qui a une signature sonore finalement bien à lui, sans negative feedback.

Le Rectifier est donc une sorte d’anomalie chez Mesa. Carlos Santana et son Mark I sont bien loin. Le seul Mesa qui lui tient tête, vous avez deviné, c’est le Mark IIC+ réédité avec l’ampli signature de John Petrucci. Je joue aussi cette tête qui atteint le même niveau de saturation, plus tight mais surtout moins naturel parce qu'il faut engager un de ses 2 EQs pour arriver à un son gras comme celui du Recto. Là où le Mark IIC+ bat le Rectifier, comme tous les autres amplis au monde d’ailleurs, c’est qu’il combine le son Boogie avec les fonctionalités d’un Diezel VH4 (ils sont midi tous les deux). Et même plus puisqu’il a un CabClone intégré. Mais est-il judicieux de comparer un 2 canaux des années 90 avec une usine à gaz polyvalente du XXIe siècle ? On va éviter et rester entre Rectifier. Sachez simplement que même en mode 60w, le Mark IIC+ JP-2C se joue beaucoup plus fort qu'une tête Dual Rectifier 100w...

Les grains sont différents entre les Rectifier 2 canaux et les 3 canaux. Ce ne sont pas du tout les mêmes amplis. Le son de la Dual Rectifier Solo Head 3 canaux est plus précis, moins épais, plus terne, mais la boucle d'effets parallèle est toujours aussi bonne. Les solistes y trouvent leur compte. La Solo Head Rev G 2 canaux est vraiment typée high gain. C’est la championne du monde depuis 1994. Alors que les 3 canaux sont polyvalentes avec de meilleurs sons clairs. La tête 100W Head multi-watts actuellement en production est davantage destinée aux rythmiques plutôt qu'aux solos. Elle produit un son très articulé, comme si on jouait un son clair derrière le son saturé, avec des basses contenues, donc pour des gros riffs précis et faciles à enregistrer. Du coup, elle a un son lead qui n'est pas du tout onctueux mais "rappeux"... Elle cible davantage les jeunes musiciens qui ont appris sur des instruments virtuels et qui jouent du djent avec des guitares à 8 cordes. Pas les hard métalleux des années 80. Leurs oreilles sont habituées aux lampes des dinosaures. Elles sont intolérentes aux émulateurs d'amplis.

Maintenant à ceux qui se disent que trois canaux c’est mieux que deux, je précise que le canal 2 des têtes trois canaux n'est qu'une déclinaison du canal 3 et ne sert pratiquement à rien sur un Rectifier. Mieux vaut baisser le volume de la guitare sur le canal high-gain. Ce canal crunch, c’est du marketing pour vendre un trois canaux polyvalent donc pour ratisser plus large et être concurrentiel sur le marché actuel. La mode c’est trois canaux et multi-watts, sinon une tête 100W se vend plus difficilement.

Si vous voulez un véritable trois canaux, il vous faut le Mesa de John Petrucci ou le Diezel VH4. Ces deux amplis ont un clean magnifique (son de piano si l’ampli est monté en 6L6), un vrai son crunch (modern-vintage pour le Diezel dont le canal 2 reproduit le son d’AC/DC façon "The Razors Edge" si les cab est monté en Celestion Greenback) et un high gain rythmique exceptionnel. Le son de James Hettfield est d’ailleurs une combinaison du Mesa Mark II (qui vient d'un Triaxis chez Metallica) et du Diezel VH4. Mais le canal 4 du Diezel pour les solos, très précis, n’est là encore qu’une déclinaison de son canal 3 en plus compressé. Je joue cet ampli. Je peux vous assurer qu’il ne tient pas la route face au lead du Rectifier deux canaux qui en impose davantage.
Le Diezel VH4 et le Mesa Boogie Mark II sont excellents. C’est juste qu’en lead je me sens propulsé par le Rectifier. Le top, c’est évidemment d’avoir deux amplis qui sont complémentaires. Le VH4 pour les canaux 1, 2 et 3, le Rectifier Rev G pour le canal 4. Et en les jouant en même temps, vous aurez le son de Metallica ou de Tool. Le Diezel apportant l’attaque, le Mesa fournissant le gras.
Oui le gras. Parce que le Rectifier n’est pas un ampli pour faire son régime. Il fournit un son qui plait à ceux qui aiment ajouter du piment sur leur chili, du poivre sur leur côte de bœuf saignante. Et donc à des gratteux excessifs qui jouent des guitares au tempérament prononcé.

J'utilise des Gibson, ESP et Jackson-Charvel. Uniquement équipées en micros passifs Seymour Duncan (SH1, JB, TB12, TB14, etc.). Mais l’EMG et le Rectifier vont très bien ensemble. Pour moi, la meilleure guitare pour le metal sur un Rectifier reste l'ESP Horizon avec manche érable et touche ébène pour la précision, corps acajou pour le gras, et Seymour Duncan TB14 en micro chevalet. En l'occurence une custom shop signature Kiko Loureiro SE-100 de 2007 dont j'ai posté la review ici : https://fr.audiofanzine.com/guitare-sc/esp/kiko-loureiro-se/avis/r.45399.html
La LesPaul et la Telecaster avec du humbucker iront pour tout le reste... stoner, rock, punk, etc. La SG n'est pas assez précise, surtout en P90. Elle va mieux aux Marshall. Et si vous avez une Fender Statocaster en micros simples... euh... changez de gratte. Le Recto, c'est ni pour le raggae, ni pour la funk.

D'une manière générale, cet ampli est fait pour le gros saturax et sera donc le compagnon parfait d'une guitare équipée de humbuckers. Bien entendu, toutes les pelles sonnent mieux sur un tel ampli devenu un classique de l’industrie audio. Et un single coil en son clair fonctionne ici même s'il n'est pas fait pour ça et vous allez gacher son potentiel.
Je me souviendrai toujours de cet ami venu avec sa Strat american standard et son rack Marshall... Après avoir entendu un seul Rectifier Rev G couplé à une ESP MII Custom (de 1997) en acajou avec micro chevalet Seymour Duncan Jeff Beck (TB4), il a décidé de revendre ses unités Marshall, et aussi sa Strat. Oui parce que l’ESP enfonce la Fender et ses micros simples sur un tel ampli. Un massacre.

Côté égalisation, la réserve de basses est énorme sur la Rev G. Lorsque je place le potard des graves à fond sur une 100W Head multiwatts, j'ai le son de la Solo Head deux canaux avec le potard des graves à 12h seulement. Le calcul est simple : la tête deux canaux délivre deux fois plus de basses que la tête trois canaux. Les deux amplis n'ont pas du tout la même égalisation (et là souvenez vous de ce que j'écrivais au début de cette review : que Mesa a répondu à mon technicien que les différences entres revisions n'existent pas... très gros mensonge) même si la tonalité sombre est assez proche. Du coup, on ne les branche pas dans les mêmes baffles.

L'alimentation en 120V des modèles importés des USA donne une bosse dans l’égalisation au niveau du bas médium qui est plus épais. En gros, les modèles USA percent le mix, les modèles destinés à l'Europe (230V) sonnent un peu plus gras et dark, typiquement années 90. Mais la différence de son est minime et peut se corriger avec l'égaliseur de l'ampli ou selon le choix du baffle. Beaucoup n'entendront même pas la différence. Il faut les jouer l'une à côté de l'autre pour s'en rendre compte.

Les baffles ici sont primordiaux. Les têtes deux canaux vont avec le cab Mesa Boogie Rectifier Traditionnal qui ne va pas du tout avec les trois canaux. Ces dernières iront davantage avec le Mesa Boogie Rectifier Standard qui est plus gros. Ces cabs Mesa montés en Celestion Vintage 30 sonnent moderne et très droit. Un peu trop raide pour le Rectifier trois canaux. Je leur préfère mon vieux Engl Richie Blackmore signature de 1996, lui aussi en Vintage 30. Ce baffle a des HP montés par l’avant, ce qui donne plus de basses. Il est aussi très riche dans toutes les fréquences tout en encaissant le côté un peu brouillon qui est reproché au Rectifier. Parfait pour du thrash.
Si vous cherchez quelque chose de chaud, les baffles Bogner 412ST montés en V30 sont exceptionnels. Pour des rythmiques classic rock, il faudra un Friedman et ses Celestion Greenback. Le meilleur dans cette catégorie.
Pour le metal des abysses, le Marshall 1960 en Celestion G12T75 convient aux accordages dans le super grave. Pour ceux qui utilisent les Rectifier trois canaux, essayez le baffle Diezel avec ses Vintage 30 en front loaded : ça casse le côté rappeux. Les deux font la paire. Je n’ai pas encore pu tester le couple tête Rectifier / baffle Orange, mais j'ai un cab Matamp 4x12R Deluxe monté en Vintage 30 (donc un cab Orange custom shop mais tout vert pétant). C'est le top pour les gros riffs en power chords. Amis du doom et du stoner, c'est la combinaison qu'il vous faut. Je vous engage à lire ma review ici pour en savoir plus : https://fr.audiofanzine.com/baffle-guitare-4x12/matamp/green-matamp-4x12r-deluxe/avis/r.180293.html

En rythmique rock, si vous trouvez que le son manque de nervosité, vous pouvez coupler un Rectifier deux canaux avec un Marshall JCM800. J’ai une tête JCM800 de 1982 équipée en EL34 JJ / ECC83 Groove Tubes et branchée dans le 4x12 Marshall en G12T75. J'ai découvert la combinaison JCM800 + Dual Recto avec Tool. Vraiment, ces deux amplis font la paire. Le Recto apporte le gras, la crème. Le JCM apporte le muscle, le nerf. Ils sont complémentaires à la perfection.

Si vous considérez le son clair comme primordial, vous devez utiliser un autre ampli à côté du Rectifier. Préférez un Soldano si vous jouez aux doigts sans médiator. Le Soldano ne bave pas. Idéal si vous êtes fans de Dire Straits. Mais le son clair c’est surtout l’affaire de Fender. Essayez aussi les combos Matchless si vous pérférez Vox. C’est à tomber. Le Rectifier trois canaux est à considérer ici car il dispose d’un son clair précis. Mais il ne tiendra pas la comparaison face à des combos fait pour le clean et avantgés par des baffles ouverts à l'arrière.

Maintenant en enregistrement, si vous jouez une tête Dual Rectifier Solo Head Rev G, l’ingé son va vous détester. C’est qu’il en faut du temps pour trouver le bon placement de micros pour dompter ce tsunami de basses. En statiques, AKG C414, Audio Technica 4047 ou Mojave 301 font amplement l’affaire. Le premier est le plus précis, les deux autres plus chauds. En dynamiques, le Shure SM57 est très bien mais ne suffira pas seul pour capturer le low end du Rectifier. Il faut lui adjoindre un micro à ruban. La combinaison classique, c’est avec le Royer R121. Un Shure KSM313 fonctionne aussi très bien (il donne à lui seul le son du SM57 plus celui du Royer R-121). Pour le placement de micros, privilégiez les HP en haut du 4x12 pour être le plus loin possible du sol.

Côté préamplis, je conseille la neutralité avec le Summit Audio TPA200B (hybride) ou l’Avalon AD2022 qui respectent le son du Rectifier. Le classic Neve 1073 ou BAE 1073 fonctionnera très bien également si vous cherchez un son plutôt crémeux et épais. Un API 512 vous donnera un son avec plus de patate.
Un preamp tout lampes comme l’excellent TL-Audio PA1 (son anglais à la Thin Lizzy / Whitesnake) me parait plus adapté à des amplis plus raides comme les Marshall.

Ici pas de line out. Donc si vous n’utilisez pas de micros, pour du direct, sans cab, je vous conseille le Rivera RockCrusher Recording. C’est 100% analogique, et il faut bien ça pour cet ampli d’une autre époque. Mais attention, il n'est pas transparent ! Je n’ai pas testé le Mesa CabClone avec le Rectifier, mais ce que j’en ai entendu avec le JP-2C ne m’attire pas du tout. C’est trop raide et ça ne rend pas justice au son gras du Rectifier. Reste le Suhr Reactive Load IR, une valeur sûre, et le Fryette Power Station, transparent mais qui ajoute un étage d'amplification.

Ajout daté du 21 février 2021. Si tous ces paragraphes ne suffisent pas à vous décrire cet ampli, alors voici LA vidéo qui permet de bien comprendre les caractéristiques de ce son. Ici, Leon Todd compare sa tête Dual Rectifier Revision G de transition avec une Mark IV. Comme la guitare est une PRS, la Rectifier sonne très Alter Bridge, tandis que la Mark IV donne un son typé Metallica.
Et Leon utilise ensuite une pédale Tube Screamer, ce que je déteste par dessus tout, pour booster les amplis. Si vous préférez le son avec la Tube Screamer alors la Revision G n'est pas pour vous; il vous faut la Revision F qui va sonner bien mieux et plus naturel que ce qu'on entend ici. Utiliser une Tube Screamer sur une Rev G, c'est du bricolage et, mais ça n'engage que moi, une hérésie qui hérisse le poil du puriste que je suis. Cette vidéo a au moins le mérite de montrer ces différences de tonalités et d'égalisations :



Lasse Lammert a sorti des vidéos de cet ampli dans le mix. Mais ce n'est pas assez réaliste à mon goût parce qu'il y a un traitment au mixage :



Par contre, sur ce titre de Ragdoll, Leon utilise le Rectifier comme il faut et on entend, surtout sur le palm mute du refrain à 1:25, à 2:15 puis à 3:16, ce son épais et solidement charpenté dans les graves qui oblige le bassite à jouer medium aigu. Comme le fait Dave Ellefson dans Megadeth, par exemple. Et puis écoutez cette onctuosité sur le solo à 2:35. Voilà, c'est ça la magie du Recto 2 cannaux. On en a sous les doigts. Franchement, Leon devrait être démonstrateur officiel Mesa :



Maintenant si le gros hard rock n'est pas votre tasse de thé, et que vous préférez le punk rock des années 90, cette vidéo pourrait vous convaincre. J'ai exatement cette tête à la maison, même finition : même si ce youtuber ne la règle pas comme moi et qu'il ne joue pas au top (c'est du punk quoi...), il lui rend justice. Au début de la vidéo, on a même droit à un zoom sur l'ampoule "vintage glass" rouge, et non bleue comme c'était commun sur les chassis chromé :



Enfin si comme pour moi, le solo à fond les ballons est votre came, si vous vous voulez savoir ce que ça donne pour le shredding, il faut écouter en entier l'album "The Art Of Rebellion" de Suicidal Tendencies. Sur cette vidéo, Rocky George, le monsieur avec l'Ibanez, utilise une tête Triple Rectifier Revision F tandis que Mike Clark assure la rythmique avec une tête Peavey 5150. Et là, on termine cette review en plein dans le coeur du sujet, entre gros power-chords et solos juteux, sur le terrain de prédilection du Rectifier deux canaux :




AVIS GLOBAL

Je l'utilise depuis 1994 après avoir flashé sur un des tous premiers modèles que possédait l'autre gratteux du groupe dans lequel je jouais à l'époque. J'avais déjà pu tester une version de 1992 qui m'avait soufflé. J'en ai rêvé, ça dépassait toutes mes espérances. J'ai fait le test sur une Rev G avec une Charvel San Dimas en acajou pour coller au style de guitare que j'utilise. Un choc!!! Je l'ai même trouvé meilleure que la Rev F. Ce jour-là le vendeur, ne croyant pas pouvoir me refourguer cette tête à 12500 francs (j'étais lycéen et fauché), a voulu absolument me faire essayer une Sovtek à 3500 francs. Et de me dire : "Tu vas voir c'est exactement la même chose". Ben voyons!!! J'ai vu, j'ai entendu, j'ai bossé l'été et j'ai surtout compris qu'il essayait de conclure une vente plutôt que de répondre à mes besoins. Résultat? Je n'ai rien acheté chez lui et j'ai commandé la tête Recto chez son concurrent. Je me souviens encore du son pourri de la tête Sovtek et je ne regrette absolument pas d'avoir acheté la Mesa. Tellement pas que j’en ai maintenant onze. Plus les années passent, plus je les combine et plus je les aime.

Dans les années 90, Mesa avait la réputation de fabriquer des amplis trop complexes et irréparables. En tous cas c’est ce que me disaient les revendeurs plutôt frileux avec cette marque. En fait ils mettaient toute la gamme dans le même sac que le preampli Triaxis qui est un cauchemar de technicien. Mais il est vrai qu'il faut démonter tout le PCB pour intervenir sur des composants : c'est long et donc plus cher en maintenance.
Seulement voilà, contrairement à la Peavey 5150 que j’ai vu souvent faillir en live, ma tête Rectifier de 1994 n'est jamais tombée en panne. Ni celles que j'ai ensuite achetées en occaz pour faire du multi amps. C’est du costaud. Les seuls petits soucis viennent des fusibles. Cette tête tirant beaucoup de jus à l’allumage, un fusible non temporisé ne tiendra pas le choc. Il faut du slow blow. Et concernant les lampes Mesa, j’ai déjà eu de mauvaises surprises. Certaines claquent à la première utilisation, notamment les lampes redresseuses. Quant aux 12AX7 de préamplification, j’en ai déjà vu une jouer les stroboscopes alors qu’elle était neuve, à peine installée. Bref, sélectionnées, mais pas trop hein… Chères ? Toujours. Il faut donc avoir du spare, par exemple garder de vieilles lampes fatiguées au cas où…

La tête Rectifier mérite son prix, même si Mesa Boogie profite de sa notoriété pour assommer le client. J'ai vu passer les augmentations du tarif au fil des années... ça fait mal. Disons que c'est cher, très cher, moins cher qu'un ampli boutique genre Bogner, mais cher quand même. Mais que malheureusement pour notre compte en banque de guitariste, le plaisir procuré dépasse de très loin la douleur du sacrifice financier.

J'ai tout essayé sauf le Canadien Revv qui a priori se défend bien en high-gain. L'Allemand Driftwood fabrique aussi des amplis très proches du Rectifier, au même prix. J'ai trouvé des têtes équivalentes chez Diezel qui, à mon avis est le seul concurrent de Mesa sur ce segment des amplis high gain 100 watts haut de gamme avec le fabuleux VH4.
Bogner, Friedman et Fryette (anciennement VHT), c'est du super Marshall hotroddé donc un autre monde. Soldano et Rivera restent à part, faut les essayer pour comprendre. Même si certains disent que le Dual Rectifier est un clone du Soldano SLO100, pour moi ce n'est pas le même son. Soldano reste très "hard rock". Oui, les preamplis sont similaires mais les étages de puissance sont différents. Et je sais particulièrement de quoi je parle puisque je possède aussi une tête SLO100 originale sortie de l'atelier de Mike Soldano. Soldano navigue dans les mêmes eaux que l'EVH (héritier du 5150, lui même héritier du SLO) et le PRS Archon. On n'est pas en territoire Rectifier donc, mais plutôt avec des concurrents des Mark series chez Boogie.

Dans les amplis bon rapport qualité prix, si vous ne trouvez pas votre bonheur en occaz chez Mesa, allez donc essayer les Engl Powerball et Savage. Enfin si vous êtes patient et que vous savez exactement décrire le son que vous cherchez, alors vous pouvez faire appel à des moddeurs comme Fortin.

Je n'aime pas Blackstar trop terne à mon goût, ni Randall même si c'est bien construit, ni Krank, ni Laney (sauf le Supergroup d'époque, mais c'est un autre univers), ni Peavey (made in China donc pas cher mais pas fait pour durer), ni Orange (sauf les vieux modèle made in UK pour du stoner), ni Framus, encore moins H&K (beuark). Marshall... les vieux modèles OK mais depuis la JCM900, j'ai laissé de côté.

Il existe des modèles costauds comme le Rivera KR7, le Bogner Ubershall ou le Diezel Herbert. Mais il s’agit de 120, 150 ou 180 watts en concurrence avec le Triple Rectifier. Et ça, c’est une histoire que je ne connais pas suffisament pour en parler même si je possède une Triple Rev F. Côté prix, sachez qu'une tête Triple Rectifier Rev C, la R-0217, en finition Black diamond plate et chrome chassis, s'est vendue 4740 dollars aux USA en 2018. Le Triple Rectifier est fait pour le live afin d'obtenir suffisamment de puissance pour avoir un véritable son clair au même niveau que la saturation. Cette dernière est la même que sur une tête Dual. Un ami allemand, guitariste de thrash old school, ne jure que par certaines revisions du Bogner Ubershall. J'ai beau essayer, je n'accroche pas avec cet ampli.

Enfin ne me parlez pas de modélisation. Depuis l'arrivée du Sansamp, j'en ai vu de toutes les couleurs. Kemper, Fractal etc... Pourquoi pas un Neural DSP pour le live dans la sono, en raison du faible encombrement et de la fragilité des lampes. Mais non, mille fois non pour l’enregistrement ou pour se faire plaisir à la maison. Je citerai ici le grand maitre Patrick Rondat lorsqu'il est questionné sur la modélisation. " C'est le Kangoo de l'amplification, c'est pratique", a-t-il l'habitude de dire. Mon cher Patrick, que tes master class me manquent, tu ne me contrarieras pas j'imagine, si j'ajoute que la tête Dual Rectifier des années 90 est à l'amplification guitare ce que la Pontiac Firebird est à l'automobile. Y a pas de place pour la poussette du petit dernier, mais l'échappement ronronne comme une tigresse. Et une muscle car, tout simplement, ça a de la gueule.

Voilà, je vous ai tout dit. J’espère que mon expérience vous aidera à faire votre choix. Et je vois que vous êtes déjà en train de consulter votre compte en banque pour voir si ça va le faire... ou si vous ne partirez pas en vacances cette année :)


UN PEU D'HISTOIRE

Au début du XXIe siècle, c’est-à-dire à la fin de l’ère des Dual Rectifier 2 canaux, la Solo Head représentait 70% des ventes de Mesa Boogie si l’on en croit Doug West, directeur R&D chez Mesa. Cet ampli est tout bonnement devenu le cheval de bataille d’une compagnie qui n’était pourtant pas prédestinée à envoyer du lourd. Le Dual Rectifier des années 90 a fait passer Mesa dans le club des géants de l’industrie audio comme Fender et Marshall. C’est dire si cet ampli compte dans l’histoire.

A la fin des années 60, quand Randall Smith répare des amplis, il se fait surtout la main sur des Fender. Aux USA, Marshall n’est encore qu’un outsider que Pete Townshend et Jimi Hendrix font décoller. Comme tout bon réparateur, Randall Smith devient moddeur. La légende commence véritablement avec un Fender Princeton hot roddé qui fait succomber Carlos Santana en 1977. Le Mark I est né, le patrimoine génétique de Mesa aussi. L’entreprise transforme l’essai avec le Mark II, tout premier ampli à changement de canal et à boucle d’effet, dont la version C+ du milieu des années 80 a été revisitée et remise en production à la demande de John Petrucci. Les Mark III et IV enfoncent le clou à la fin de la décennie et Mesa devient le champion du high gain. Preuve que la marque est à l’écoute de la scène locale. Car dans les années 80, la Bay Area, c’est d’abord le thrash metal, à commencer par Metallica.

De Santana à Metallica, voilà le chemin parcouru par Randall Smith, saxophoniste à ses heures perdues, qui a trouvé sa signature : le high gain. Car le Mark I, c’est un préampli de son invention avec cascade d’étages de gain sans que ça souffle, le tout placé dans un Fender. C’est ça l’ADN Mesa : un Fender qui va plus loin dans la distorsion. La 6L6 est donc, comme pour Fender, une composante essentielle du son Mesa. Mais designer des circuits pour produire de la disto, à l’époque ça ne s’apprenait pas à l’école. La formation académique préparait les ingénieurs à fabriquer des appareils transparents. C’est donc l’ère des pionniers, des inventeurs comme Randall Smith pour qui les amplis doivent avoir « the magic inside » et être construits comme une Mercedes sans que la qualité du produit ne varie d’un exemplaire à l’autre (en théorie, dans la pratique il y arrive... plus ou moins). Alors quand Santana dit que le Mark I «gives the boogie », le nom de la marque est tout trouvé. Risquons-nous à une traduction en français : la « Merco bouillante » ou la « Benz qui file la gaule », comme vous préférez.

Dans les 70’s, Mesa a été le barbare qui s’attaquait à l’empire Fender. Mais au bout de 20 ans (1969-1989), il est un roi bousculé sur son territoire. Marshall est devenu un titan. Surtout, Randall Smith doit rugir plus fort que le fauve que Mike Soldano a lâché dans la nature en 1987 : le Super Lead Overdrive 100 à la robe mauve et blanc, ou serpent pour coller avec la tendance « moule burnes » de l’époque. Le Soldano SLO 100, c’est le pavé dans la marre avec son design high gain deux canaux avec preamplis indépendants, égalisation trois bandes et présence. D’Eric Clapton à George Lynch, de Garry Moore à Mark Knopfler en passant par Lou Reed ou Eddie Van Halen, c’est l’ampli que les stars s’arrachent alors. Ma review est ici : https://fr.audiofanzine.com/tete-d-ampli-guitare-tout-lampe/soldano/SLO-100-Super-Lead-Overdrive/avis/r.169555.html
Mesa doit répliquer avec un deux canaux au look tanky dépouillé façon SLO 100, mais classe comme une Mercedes. Il sera donc chrome et noir, la diamond plate donnant ce côté 38 tonnes qui écrase tout sur son passage. L’ampli de la contre-attaque, à l’épreuve des balles. Le Rectifier prend forme sur la base d’un Mark IV en 1989. Mais ce n’est pas un Mark V, ampli qui viendra plus tard. Non, le Rectifier est conçu pour repousser les frontières là où personne ne pourra l’atteindre, une autre voie explorée avec les lampes redresseuses et les diodes au silicone pour un high gain encore plus heavy. C’est la toute première incursion en territoire abyssal. Le Rectifier est finalement à la tonalité ce que Black Sabbath est à la musique. Un cran plus bas, un cran plus gras. Merci Mike Soldano, doublement merci. La concurrence a vraiment du bon au pays de l’oncle Sam.

Le timing de la conception du Rectifier peut expliquer ici la profusion des Révisions durant l'année 1992. En 1989, Mesa prépare un concurrent au Soldano SLO100. A cette époque, le hard rock fait la loi. Le Rectifier sort en 1992... Et bam : en même temps que l'album "Nevermind" de feu Nirvana. Il y a eu un avant et un après. J'avais 18 ans. On nous a gavés avec "Smells like teen spirit" qu'on entendait partout, tout le temps, jusque dans les supermarchés. Le monde n'était plus le même. Mesa Boogie a donc probablement adapté le Rectifier à ce changement profond. Tout comme la marque s'est adaptée à la demande en basse tight des guitaristes du XXIe siècle avec le Rectifier 3 canaux. Voilà, tout ça c'est la faute à Kurt Cobain ! Living Color, Suicidal Tendencies, Cannibal Corpse, Silverchair, The Presidents of the USA ou Nickelback ont suivi. Aujourd'hui Alter Bridge perpétue cet héritage de la fin du XXe siècle.

Depuis, Mesa Boogie, copié mais jamais égalé, n’a plus vraiment révolutionné le paysage audio, se contentant d’améliorer ses produits, de diversifier sa gamme pour résister aux amplis à modélisation en privilégiant notamment des combos concurrents de Fender.

Signe que le Rectifier 2 canaux est une pierre d’achoppement dans l’histoire du rock. Grunge, thrash ou nu metal… il a été l’outil de la génération des 90’s et il peut sans surprise représenter le Graal pour beaucoup de guitaristes, mêmes les non metalleux. Allan Holdsworth a bien dit de cet ampli (ITW dans Guitar&Bass) qu’il produisait la meilleure distorsion au monde. Rien que ça !

La Mesa Boogie Dual Rectifier Solo Head 2 canaux est désormais une pièce incontournable de l’histoire du rock. Elle a marqué les années 90 avec Korn. La jouer, c’est ouvrir les portes du Paradis. Beaucoup ne l’aiment pas, mais personne ne pourra contester qu’elle est désormais, au même titre que les Fender Bassman, Vox AC30, Matamp GT120 ou Marshall Plexi Super Lead … un artefact légendaire.


Pour ceux qui veulent en savoir plus sur les rectifier tubes et rectifier transistors :


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