Les professionnels du son s’accordent au moins sur un point : plus des trois-quarts des soucis de fonctionnement d’une installation audio sont imputables, non pas aux machines, mais aux ‘bouts de fils’ qui les relient, soit que leur fabrication ne soit pas conforme ou fiable, soit qu’ils ne soient pas adaptés à l’utilisation que l’on fait d’eux… Cela méritait bien un petit dossier...
Depuis quelques années maintenant, les choses sont à peu près claires au niveau de la connectique utilisée dans le monde de la musique et de l’audio… Mais il n’en a pas toujours été ainsi et on a souvent négligé cet aspect pourtant fondamental de nos équipements.
C’est avec l’arrivée du numérique que l’on a vraiment commencé à se préoccuper des caractéristiques et contraintes de la connectique : en effet, si le ‘scrach-scrach’ d’un câble analogique défaillant est énervant, il n’est pas forcément catastrophique dans la transmission du signal comme cela peut l’être en numérique…
Longtemps considérés comme un poste de frais ‘stérile’ par les musiciens, la ‘cablasse’ est devenue de nos jours plus sérieusement considérée, grâce à la production de câbles ‘tout faits’ bon marchés nous venant d’Asie…
Qu’est-ce qui passe dans un fil?
Si l’on excepte les transmissions radio de type haute fréquence, on a besoin dans la plupart des cas d’un bout de fil pour transmettre un courant électrique d’un point A à un point B. Ou tout au moins, d’un matériau conducteur, mais il se trouve que pour nos activités, c’est évidemment le fil le plus pratique ! Un matériau se caractérise donc par sa résistivité, et donc, sa conductivité, que l’on peut considérer comme l’inverse. Plus la conductivité est élevée, meilleure sera la transmission du courant, et plus faibles seront les pertes en ligne et les dissipations par effet Joule.
C’est précisément ce que l’on attend d’un fil de cuivre, le plus couramment utilisé parmi les métaux conducteurs pour véhiculer des tensions électriques. Les caractéristiques de résistance et donc, de conductivité d’un câble sont donc fondamentales dès lors que l’on fait circuler des tensions faibles. On exprime les caractéristiques de résistance d’un câble par l’équation suivante (loi de Pouillet) :
Dans une transmission électrique par câble, d’autres paramètres entrent en ligne de compte : la capacité du câble exprimée en Farads/mètre, nous y reviendrons dans quelques lignes, et ‘l’effet de peau’. On a pu constater que dans un câble conducteur, la transmission du courant se faisait essentiellement sur la périphérie du conducteur. ‘L’épaisseur’ active du câble dépend de la fréquence transmise et de sa résistance. En audio, on préférera utiliser des câbles multibrins afin de répartir le courant véhiculé sur l’ensemble des circonférences des brins et éviter des soucis de déphasage qui pourraient apparaître entre tension et courant, car l’utilisation d’un câble ‘monobrin’ (du type de ceux que l’on utilise dans les installations électriques d’une habitation) aurait comme effet d’atténuer les aigus sur un signal audio… aux très hautes fréquences. Enfin, pour terminer, revenons sur les incidences de l’effet capacitif d’un câble : la proximité des deux câbles (‘aller’ et ‘retour’ du courant) qui vont se transformer en condensateur et en principe, jouer aussi sur la restitution des aigus…
Tous les câbles cuivre actuellement utilisés en audio sont en cuivre OFC (désoxygéné), évitant en principe les phénomènes d’oxydation de la périphérie susceptibles d’augmenter l’effet de peau…
Les ‘mélomanes ésotériques’ de la Hi-Fi sont capables de discourir des heures entières sur les caractéristiques et défauts de tel ou tel type de câble … On trouve ainsi des sites présentant des ‘montages’ destinés à supprimer totalement l’effet de peau, sans tomber dans les effets capacitifs (et leurs opposés, inductifs…) des câblages, parlant de conducteurs isolés au Téflon ou de connecteurs en or.… Peut-être est-ce sans doute exagéré pour nos équipements audio professionnels, prévus pour adapter en permanence des impédances de sources variées…
Ce qui est certain, c’est qu’il faudra choisir le câble prévu pour sa fonction : modulation, véhiculant des tensions de quelques millivolts ou puissance, qui représentent quelques dizaines de volts. Le choix du câble sera ensuite une affaire de moyens et de conditions d’utilisation : les catalogues des fournisseurs (La Boutique du Spectacle, www.la-bs.com/, ou SCV Audio, www.scv.fr/ pour ne citer que quelques-uns d’entre eux) proposent de nombreuses références dont le tarif dépend, évidemment de la qualité mais aussi de l’application : on n’a en effet, pas besoin d’un câble hyper souple et robuste pour une installation en fixe, dans un patch de connexions…
Le câble : une affaire de son ou de… sous?
Jusqu’à 300€ le mètre de câble de modulation (pour brancher un lecteur CD sur un ampli par exemple) vendu sans connecteurs, plus de 130€ le mètre de câble de puissance (entre ampli et HP), la Hi-Fi haut-de-gamme fait exploser les coûts de câblage ! On utilise peu de câblages en Hi-Fi, la liaison entre la platine CD et l’ampli (il y a longtemps que certains audiophiles on jeté leur platine vinyle ou leur lecteur de cassettes, même si, au contraire, que d’autres ne jurent que par eux, c’est affaire de chapelle), et les câbles entre ampli et enceintes. Evidemment, on peut espérer qu’à ce prix là, on aura la perfection…. On trouve d’ailleurs des commentaires assez « succulents » sur les caractéristiques des câbles : « restitution agréable et douce », « restitution réaliste », « défini et musical », « exceptionnel » (!) qui ne donnent qu’une idée toute relative de l’investissement que l’on fait! Il est vrai que le résultat est sensible entre du très haut de gamme et du tout venant acheté au magasin de bricolage du coin…
Mais le jeu en vaut-il vraiment la chandelle? Si les professionnels du son sont attentifs à leurs câbles, ils se satisfont de la production qui leur est proposée, et les renouvellent régulièrement: dans une salle de spectacle ou un studio où les câbles servent beaucoup, ils sont en général, « réformés » tous les 3 ou 4 ans ! Ne tombons donc pas dans les excès, car cela laisse rêveur quand on voit que le prix au mètre d’un « très bon » câble micro, donc symétrique, se situe chez un fournisseur professionnel aux alentours de 10€… On peut même trouver moins cher, jusqu’à 2à 3 € le mètre.
De son côté, un câble de bas de gamme vieillira moins bien qu’un modèle supérieur, ne bénéficiera pas d’un blindage très efficace, sera plus embêtant à souder, s’enroulera moins facilement et risquera de se couper s’il n’est pas précisément et correctement plié. Il faudra aussi être vigilant envers les connecteurs pour lesquels, là encore, on trouve des écarts de prix significatifs selon la gamme et la marque, mais rien de « surréaliste » comme chez les audiophiles…